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DU PLUS GRAND CRIME

AU PLUS PETIT DÉLIT

CHAPITRE I

DES INFRACTIONS.

CLASSIFICATION DES INFRACTIONS.

Les infractions aux lois, punies par le code, se divisent en trois classes: crimes, délits, contraventions.

Cette division étant absolument arbitraire, le législa teur pouvait difficilement l'expliquer par des définitions, aussi s'est-il borné à indiquer par la nature de la peine le caractère particulier de chacun des actes contraires aux commandements par lui posés, et à marquer ainsi quelle en est à ses yeux la gravité morale et sociale.

Dans la loi pénale on appelle donc crime l'infraction punie de peines afflictives et infamantes, délit l'infraction punie de peines correctionnelles, contravention l'infraction punie de peines de simple police.

Nous verrons plus loin qu'il ne faut pas prendre

ces indications trop à la lettre, car si, malgré leur imperfection, elles sont vraies en ce qui concerne la différence existant entre le crime et le délit, elles cessent quelquefois de l'être en ce qui concerne le délit et la contravention; il y a, en effet, notamment en matière fiscale, forestière, ou de chasse, des infractions qui tout en étant de simples contraventions sont cependant punies de peines correctionnelles.

Si on tenait beaucoup à indiquer une autre différence entre les délits et les contraventions, on pourrait dire que, pour l'existence des premiers, une intention coupable est généralement nécessaire de la part de leur auteur, tandis que pour les secondes il suffit d'un acte matériel commis même avec la plus entière bonne foi. Mais cette règle n'est pas absolue et on rencontre dans le code, d'un côté, des délits qui existent indépendamment de toute intention et, de l'autre, des contraventions pour lesquelles cette intention est nécessaire.

TENTATIVE.

La tentative manifestée par un commencement d'exécution et qui vient à être suspendue ou à manquer son effet par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur est toujours, s'il s'agit d'un crime, punissable comme le crime lui-même (1) s'il s'agit d'un délit, la règle cesse d'être générale et il faut une disposition de loi spéciale.

(1) Il y a cependant quelques exceptions à cette règle, mais elles sont fort rares.

On comprend, sans qu'il soit besoin d'insister, que la société, dont le but est surtout de se débarrasser des êtres malfaisants, a un aussi grand intérêt à punir celui qui ne réussit pas un mauvais coup, après l'avoir médité et avoir commencé à l'exécuter, que le coquin adroit, servi par les circonstances et arrivant au résultat poursuivi.

Si, dans la pratique, l'assassin qui n'atteint pas sa victime, l'incendiaire dont l'œuvre fatale est arrêtée à temps, le voleur qui se trouve pris la main dans le sac avant d'avoir pu l'en retirer, sont frappés moins sévèrement, à cause des conséquences peu graves de leur forfait, au point de vue moral leur criminalité est la même que si le succès avait couronné leurs efforts.

Pour qu'il y ait tentative il faut que l'auteur ait fait un commencement d'exécution capable de produire un résultat. Il suit de là que certains actes moralement criminels ne peuvent pas être atteints par la loi. Administrer à quelqu'un une poudre inoffensive que l'on croit être un poison, tirer sur son ennemi un coup de fusil chargé à blanc, donner un coup de poignard à un homme déjà mort : tous ces faits ne constituent pas tentatives, car ils ne sont pas des commencements d'exécution, puisqu'ils sont incapables de produire aucun résultat; puisque le crime est impossible.

des

Cette théorie, dont on a peu souvent, au reste, dans des espèces comme celles que nous venons de citer, à faire l'application, est le résultat d'une interprétation vraie mais judaïque du texte, et elle deviendrait dange-reuse si elle était logiquement poussée jusqu'au bout. Ne pourrait-on pas prétendre, en effet, qu'un empoi-sonnement, manqué parce que la dose de poison était

insuffisante, eu égard à la forte constitution du sujet, n'est que la tentative d'un crime impossible, étant donnée la maladresse commise par le coupable? Ne pourrait-on pas dire la même chose du coup de fusil tiré à droite, alors que le but se trouvait à gauche? Ne serait-il pas encore permis de soutenir que le voleur qui fracture un coffre-fort et ne trouve rien dedans a commencé à exécuter un vol impossible, etc., etc.? La jurisprudence, bien entendu, ne va pas jusque-là, et il faudrait aimer l'absurde pour lui en faire un reproche.

On comprend combien les faits qui peuvent être considérés comme un commencement d'exécution sont variés, de même aussi ceux qui peuvent suspendre cette exécution ou en faire manquer l'effet. Un incendiaire porte dans le grenier de son voisin un bidon de pétrole avec l'intention d'y mettre le feu, il est surpris avant d'avoir enflammé ce bidon, il peut à coup sûr quelqu'invraisemblable que doive paraître son explication, prétendre que ses préparatifs interrompus ne constituent pas un commencement d'exécution suffisant pour être punissable, car l'hésitation pouvait s'emparer de lui au dernier moment et le faire renoncer à son projet. Si, au contraire, il a mis le feu à la mèche et si le vent l'a éteinte, la tentative est suffisamment caractérisée pour tomber sous le coup de la loi.

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Veut-on maintenant savoir ce qui n'a pas, au reste, grande importance - quelle différence existe entre la tentative suspendue et la tentative manquant son effet par des circonstances fortuites: les deux exemples suivants sont classiques : Une femme veut empoisonner

son mari, elle achète chez un pharmacien de la mort aux rats et la glisse dans la soupe conjugale. De son côté le pharmacien, à qui cet achat de mort aux rats a semblé louche, met le mari sur ses gardes et celui-ci, au lieu d'avaler son potage, après l'avoir seulement goûté, va le porter chez le commissaire; voilà une tentative suspendue, par suite d'une intervention à laquelle la mégère n'avait pas songé.

commune

Supposons, au contraire, qu'il ne se soit pas trouvé là de pharmacien perspicace — l'espèce n'en est pas si et que le mari, arrêté dans l'absorption presque complète du fatal breuvage par un dégoût subit, en ait été quitte pour une indigestion, il y aurait eu alors tentative manquant son effet par des circonstances indépendantes de la volonté de la coupable.

COMPLICITÉ.

Dans le sens mondain du mot, on appelle complices tous ceux qui participent à une infraction, directement ou indirectement.

Dans le sens légal, on doit entendre par complices ceux qui ne participent à l'infraction que d'une manière accessoire et auxiliaire, en la conseillant par exemple, en la préparant, en la facilitant, etc.; ceux qui la consomment directement s'appellent auteurs ou coau

teurs.

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En règle générale nous verrons tout à l'heure les réserves à faire concernant les receleurs le complice est aussi coupable que l'auteur principal et il encourt la même peine que lui, quelles que soient les circonstances aggravantes dont le fait a été entouré,

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