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dans les petits appartements où il avait subi les rigueurs du sort, où il savourait son retour. Il dicta des ordres de route aux corps de l'armée pour la journée du lendemain, qu'il comptait passer lui-même encore dans cette résidence, et il s'endormit sous la garde de ces mêmes soldats campés dans ces cours d'où ils étaient partis pour l'accompagner vers son exil.

LIVRE DIX-NEUVIÈME.

Indignation de Paris contre Napoléon. — Le comte d'Artois passe la revue de la garde nationale. Nouvelles de la marche de Napoléon. monstrations royalistes de Paris. - Conseil du roi et des ministres. Ordonnance de clôture de la session des chambres.. Départ du roi dans la nuit du 20 mars. Proclamations de M. de Chabrol et de M. Bellart. Le général Excelmans. Entrée de Napoléon dans Paris. Ovation militaire. - Froideur des Parisiens. Entrevue de Napoléon et de Cambacérès. Il crée son ministère. - Adresse du conseil d'État.-Adhésion de Benjamin Constant. L'empereur forme sa maison militaire.

Revues.

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Entrée de l'armée impé

Soulèvement de la Vendée.

L'armée de Napoléon

Fuite de Louis XVIII. Son arrivée à Lille. Défection de la garnison. Le roi abandonne Lille et s'établit à Gand. Le comle d'Artois à Béthune. Il passe en Belgique. riale à Béthune. arrête l'insurrection. Le duc et la duchesse d'Angoulême à Bordeaux. - Le duc part pour le Midi à la nouvelle du débarquement de Bonaparte. Conseil tenu par la duchesse d'Angoulême. — Marche du général Clausel sur Bordeaux. Combat du pont de la Dordogne.

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Capitulation de Bordeaux.

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Entrevue du général Clausel et de M. de
Résistance de la duchesse
Départ de la duchesse de

Défection des troupes.

Bordeaux. Elle passe en Angleterre et vient rejoindre Louis XVIII à Gand. Protestation de M. Lainé. — Opération du duc d'Angoulême dans le Midi. — Défection d'une partie de son armée. Combats de Montélimart, de Loriol et du pont de la Drôme. L'armée royale s'établit à Valence. Elle se replie sur Pont-Saint-Esprit. - Le duc d'Angoulême est cerné à Lapalud. Il capitule. Il est arrêté par Lettre de Napoléon à Grouchy.

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Paris ne participait en rien à l'enthousiasme purement soldatesque qui emportait l'armée entière sur les pas de

Napoléon. Plus l'empereur s'approchait et menaçait de courber la volonté nationale sous l'immense émeute de ses soldats, plus le sentiment civique prenait d'énergie et d'indignation dans les âmes, et plus cette indignation contre la contrainte d'un dictateur à main armée s'imposant au pays par la force se transformait en adhésion raisonnée et en enthousiasme de pitié pour le roi. On plaignait unanimement ce prince désarmé et menacé, n'ayant plus à opposer au génie de la guerre et du despotisme pour lui disputer un peuple et un trône, que les institutions, les lois, les droits antiques rajeunis par un contrat nouveau avec l'esprit et les mœurs du temps. On s'attendrissait sur ses cheveux blancs, son âge, sa constance, ses malheurs passés, sur ceux des princes de sa maison et de la duchesse d'Angoulême surtout, qu'il allait entraîner dans sa catastrophe ou son exil. On jurait de combattre et de mourir pour lui. Ces serments étaient universels et sincères. Toutes les opinions, depuis le républicanisme jusqu'à la superstition de l'antique race des rois, se confondirent par des sentiments divers dans l'horreur et dans la malédiction contre le perturbateur de l'Europe. Les journaux, les cafés, les lieux publics, les jardins, les places, les rues n'avaient qu'une voix. On s'abordait sans se connaître, et on s'interrogeait, sûrs d'avance qu'on parlait à un ennemi de Bonaparte. Les jeunes gens des grandes écoles, qui apportent à Paris et qui manifestent dans les crises les vrais symptômes de l'opinion de leurs familles et de leurs contrées, ordinairement entraînés les premiers vers les nouveautés, s'étaient levés d'eux-mêmes contre l'attentat de l'ennemi de toute liberté. Ils s'étaient formés en bataillons actifs et intrépides de volontaires pour couvrir Paris, la Charte et le roi. On comptait dans leurs rangs, sans exception, tous les hommes qui ont signalé depuis leur nom et leur talent dans les lettres, dans la science, dans le barreau, à la tribune. L'arme qu'ils prenaient pour défendre les Thermopyles de la constitution était la profes

sion de foi du patriotisme et du libéralisme de leur vie. Odilon Barrot marchait digne de son père au premier rang. Ces volontaires avaient demandé à sortir de Paris et à s'offrir les premiers aux coups des soldats de Napoléon, résolus à les défier d'immoler la fleur de la jeunesse de la France, ou à mourir pour protester par le crime même de leur mort contre l'asservissement de leur patrie.

II

La garde nationale éclatait du même enthousiasme de la liberté dans tous ses rangs. Les citoyens qui la composaient, tous fils, chefs ou pères de famille, vivant pour la plupart de leur travail ou de leur industrie, attachés par la protection de leurs femmes et de leurs enfants au foyer, ne pouvaient pas, comme la jeunesse riche et indépendante des écoles, s'éloigner des murs pour une longue campagne. Mais si le reste d'armée rassemblée à Villejuif avait fait son devoir, l'empereur aurait trouvé aux portes de Paris la capitale entière debout devant lui pour lui disputer la patrie. Le comte d'Artois, commandant général de la garde nationale, la passa en revue le 17. Les cris qui s'élevèrent des rangs, les volontaires qui en sortirent, les larmes qui coulèrent, attestaient que tous les foyers de Paris et des faubourgs renfermaient un ennemi de Napoléon. Les gardes du corps, les mousquetaires, les chevau-légers de la maison du roi au nombre de quatre mille, étaient accourus d'euxmêmes de leur garnison ou de leurs familles à Paris. Ils étaient dévoués jusqu'à la mort et brûlaient de combattre, sans calculer le nombre et la supériorité des forces, l'armée de l'empereur. C'étaient les fils de toute la noblesse et de

toute la haute bourgeoisie de France. Ils avaient dans le sang l'honneur et la fidélité aux Bourbons. Beaucoup d'entre eux avaient servi dans les corps d'élite de Napoléon. Pas un seul ne se montra faible ou irrésolu devant son péril. Ils ne murmuraient que de leur inaction dans Paris. Ils entouraient d'un rempart de cœurs le palais des Tuileries. Ils remplissaient les casernes du quai d'Orsay, de l'École-Militaire, et campaient dans les Champs-Élysées, demandant à grands cris que le roi ou les princes éprouvassent leur courage en les faisant sortir à la rencontre des régiments insurgés. Le roi ne consentit pas à faire couler inutilement, pour une cause qu'il considérait déjà comme perdue, le sang de tant de familles immolées dans leurs fils. Lui seul ne se flattait plus quand tous se flattaient encore autour de lui.

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Le palais des Tuileries retentissait de fausses nouvelles et d'espérances d'un prochain triomphe. Les capitaines des gardes, le duc de Blacas, les ministres montraient un visage rassuré et confiant. Le duc de Feltre disait en traversant la salle des maréchaux aux jeunes officiers de la maison militaire du roi : « Voilà huit jours que vous ne dormez pas; « vous pouvez dormir maintenant. Je dormirai moi-même «< cette nuit aussi tranquillement qu'il y a trois mois. Le général Marchand est rentré dans Grenoble, il s'est emparé de son artillerie, il marche avec une armée derrière « lui. La désertion est dans les troupes de l'usurpateur. Lyon a secoué le joug aussitôt que la garnison a eu éva«< cué la ville, le maréchal Ney s'avance avec trente mille

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