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Conclufion,

Quid, si un laïc vient à commettre

Lettre E. Ch. XIX, no 47, édition de 1771, & M. Jouffe en fa Justice Criminelle, Tom. I, pag. 291, no 405, lequel cite plufieurs Arrêts.

D'après cela, l'on penfe que dans la pratique l'on ne doit pas pourfuivre devant l'Official les laïcs Officiers de Cour d'Eglife, même pour raifon des délits & malverfations qu'ils peuvent commettre dans l'exercice de leurs fonctions. Le parti qu'il faudroit prendre contre eux, ce feroit de les faire deftituer par l'Evêque, & de les faire pourfuivre par le Prélat ou le Promoteur devant le Juge féculier qu'il appartiendra.

6o. Une derniere question fe présente, qui eft de savoir fi un délit un laïc qui viendroit à commettre un délit dans le Prétoire dans le Prétoire de l'Officialité en préfence de l'Official, pourroit être fuivi pardevant ce Juge.

de Officialité.

pour

L'Auteur des Mém. du Clergé, Tom. VII, col. 610 & fuiv. qui traite encore cette queftion, eftime que pour la décider on peut diftinguer la qualité du délit commis dans le Pré"toire de l'Officialité, & la partie qui pourfuit le laïc accusé. » S'il ne s'agiffoit que d'irrévérence & manquement de ref» pect, dont le Promoteur demanderoit la réparation, il pa» roît que le Juge d'Eglife pourroit l'ordonner, & que c'eft » une fuite de la Jurifdiction qui lui a été accordée. Mais s'il » étoit question d'un crime qualifié comme homicide, ou au»tre qui intéreffe la fûreté publique, il paroît certain que le » Juge d'Eglife ne pourroit punir le laïc qui en feroit accufé, » n'ayant pas le pouvoir d'ordonner des peines convenables » ni de prononcer fur les dommages & intérêts des Parties: " en ce cas, ajoute le même Auteur, quoique le crime eût » été commis dans le Prétoire du Juge d'Eglife, le crimi» nel feroit renvoyé au Juge féculier; le Juge d'Eglise pour roit faire faire feulement la capture, »

Enfin l'Auteur des Mém, du Clergé invoque le témoignage d'Auboux, Official de Cahors, lequel dit que « fi un féculier » commet quelque infolence ou excès dans l'Auditoire de » l'Officialité, ou en présence du Juge d'Eglife faifant fa charge, » au mépris de fa dignité, ce Juge peut le condamner en » une aumône, comme pris en flagrant délit; mais fi le délir » cft grave & mérite punition corporelle, il le renverra par» devant fon Juge pour le punir, »

Delà l'on peut conclure que l'Official ne pourroit connoître d'un délit commis dans fon Auditoire, ou en fa préfence dans le temps qu'il exerce fes fonctions, lorfqu'il mériteroit une peine afflictive ou infamante, ou même une condamnation pécuniaire.

Mais s'il ne s'agiffoit que de condamner le laïc coupable à une aumône applicable à quelque œuvre pie, il pourroit le faire fur le requifitoire du Promoteur.

L'on voit, par ce qui vient d'être dit, que le pouvoir des Juges d'Eglife fur les perfonnes laïques en matiere criminelle n'est pas fort étendu, & qu'il ne doit prefque jamais arriver qu'un laïc foit pourfuivi criminellement devant l'Official.

S IV.

Des Récufations & des Prifes à partie.

Pour qu'un Juge puiffe connoître d'une affaire, non-feulement il est néceffaire qu'il foit compétent ratione materia & ratione perfona, mais encore il faut qu'il ne foit pas récufable.

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Elle eft fondée d'un côté, fur ce que l'impartialité la plus grande doit préfider aux jugemens; & de l'autre, fur ce que l'expérience journaliere apprend que les hommes font fujets à la prévention, lorfqu'ils ne font pas entiérement fans intérêt. C'est pour éviter l'inconvénient qui pourroit en résulter, que les Légiflateurs ont cru devoir ordonner aux Juges de s'abstenir & permettre aux Parties de les récufer dans certains cas où les hommes font d'ordinaire plus expofés à la préoccupation.

Ces notions fuppofées, dans ce paragraphe, nous examinerons 1°. quelles font les caufes de récufation en matiere criminelle.

Obfervation.

Ce que c'eft que

La récufation eft une efpece de déclinatoire propofée par la Partie, pour empêcher qu'un Juge puiffe connoître d'une affaire la récufation. portée devant lui.

Raifons qui ont fait introduire las

récufation.

2°. Quels Juges & Officiers peuvent être récufés.

3°. Enfin nous parlerons de la procédure & du jugement des récufations.

En premier lieu, les caufes de récufation en matiere crimi- Caufes de récu

fation en matiere nelle qui nous font marquées par le Tit. XXIV de l'Ordon nance civile de 1667, font:

criminelle.

La parenté.

Obfervation.

1o. La parenté.

Le Juge peut être récufé en matiere criminelle, s'il eft parent de l'Accufateur ou de l'Accufé jufqu'au cinquieme degré inclufivement. Art. II, Tit. XXIV de l'Ordonnance de 1667.

Il faut obferver deux chofes: la premiere, c'eft que les degrés de parenté pour les récufations fe comptent fuivant le Droit canonique, comme pour les mariages, ainfi qu'il résulte de l'Art. I, même Tit. La feconde chose à observer, c'est que les degrés de parenté, fuivant le Droit canonique, se comptent en ligne directe par génération, enforte que le pere & le fils font au premier degré, l'aïeul & le petit-fils au fecond degré, & ainfi jufqu'à l'infini.

Mais en ligne collatérale pour compter les degrés de parenté fuivant le Droit canonique, il faut diftinguer, fi ceux dont on veut connoître le degré de parenté, font également éloignés de la fouche commune, ou non.

S'ils font également éloignés de la fouche commune, ils font entr'eux au même degré que l'un & l'autre le font avec la fouche commune. Delà deux freres font au premier degré, & deux coufins germains au fecond degré, & ainfi de fuite.

Mais fi ceux dont on veut connoître le degré de parenté, ne font pas également éloignés de la fouche commune, ils font entr'eux au même degré que l'eft avec la fouche commune celui qui en est le plus éloigné, fuivant la regle remotior trahit ad fe proximiorem. Delà le neveu & l'oncle font au fecond degré, parce que le neveu eft éloigné de deux degrés de la fouche commune.

Ainfi quand l'Ordonnance civile dit que le Juge peut être récufé, s'il eft parent de l'une ou de l'autre des Parties, jufqu'au cinquième degré inclufivement, cela s'entend, s'il eft ́enfant de remué de germain, ou pour se fervir des termes mêmes de l'Ordonnance, s'il a pour pere un enfant de coufin iffu de germain. Car le frere eft au premier degré; le coufin germain au deuxieme; le coufin iffu de germain au troifiéme; le remué de germain ou l'enfant de coufin iffu de germain au quatrième, & enfin l'enfant de remué de germain au cin quieme,

2o. L'alliance

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2o. L'alliance est la feconde caufe de récufation marquée par l'Ordonnance. On entend par alliance l'union que le mariage produit entre un des conjoints & les parens de l'autre. Ainfi tous les parens de la femme font alliés au mari au même degré qu'ils font parens de la femme. L'Ordonnance compare l'alliance à la parenté, & veut qu'un Juge allié de l'Accufateur ou de l'Accufé jufques au cinquième degré inclufivement soit dans le cas de la récufation, comme s'il étoit parent. O

3°. Le même Article II, Titre XXIV de l'Ordonnance, ordonne encore que fi le Juge porte le nom & armes, ou qu'il foit de la famille de l'Accufateur ou de l'Accufé, il fera tenu de s'abftenir en quelque degré de parenté que ce puiffe être.

Tout ce qui eft ci-deffus ordonné a lieu, quand même le Juge feroit parent ou allié commun des Parties. Article III, même Titre XXIV.

L'alliance.

Même nom & mêmes armes.

Obfervation.

Quid, de l'alliance fpirituelle

4°. On peut demander fi l'alliance fpirituelle peut donner lieu à la récufation en matiere criminelle. M. Jouffe, en son Traité de l'Administration de la Juftice, tom. I, pag. 452, examine cette queftion. Il rapporte plufieurs Arrêts de différentes Cours du Royaume, qui font contraires les uns aux autres. Mais ces Arrêts étant antérieurs à l'Ordonnance de 1667, nous penfons que la décifion de la queftion n'en peut dépendre, & qu'il faut feulement confulter l'Ordonnance.

Ór, d'après l'Ordonnance, il femble que l'alliance fpirituelle ne peut donner lieu à la récufation. En effet, fi le Légiflateur avoit eu intention de comprendre dans le nombre des caufes de récufation, l'alliance fpirituelle, il eft certain qu'il s'en feroit expliqué: un cas auffi ordinaire que celui de l'alliance fpirituelle n'eût pu échapper à l'attention des célébres Magiftrats dont l'Ordonnance Civile eft l'ouvrage; & il n'eft pas à préfumer qu'après avoir prévu les cas les plus rares, ils en aient omis un très- ordinaire. Du filence de l'Ordonnance fur l'alliance Conclufion. spirituelle, il semble donc que par elle-même & indépendamment de toute autre circonftance, elle ne donne pas lieu à la récufation; car les cas de récufation ne font pas laiffés à l'arbitrage des Juges; l'on ne doit admettre que ceux que la Loi a voulu que l'on admit.

Si cependant il y avoit d'ailleurs quelque fujet de fufpicion Obfervation. valable, le Juge devroit s'abftenir de lui-même.

H

Autres cas de réculation.

Suite.

Suite;

5°. Le Juge peut encore être récufé, aux termes de l'Article VI, même Titre XXIV, s'il a donné confeil ou connu auparavant de l'affaire comme juge ou comme arbitre; s'il a follicité ou recommandé, ou s'il a ouvert fon avis hors la vifitation & jugement, en tous lefquels cas il doit être cru à fa déclaration, s'il n'y a preuve par écrit.

6°. L'Art. VIII, même Titre, veut pareillement que le Juge foi récufable pour menaces par lui faites verbalement ou par écrit depuis l'inftance, ou dans les fix mois précédens la récufation propofée, ou s'il y a eu inimitié capitale.

7°. L'article fuivant porte que le Juge fera auffi récusable, fi lui, fes enfans, fon pere, fes freres ou fes neveux ou fes alliés en pareil degré, ont obtenu quelques bénéfices des Prélats, Collateurs & Patrons Eccléfiaftiques ou Laïcs, qui foient parties ou intéreffés en l'affaire, pourvu que les collations & nominations ayent été volontaires & non néceffaires.

Obfervation. Il ne faut pas conclure delà qu'un Official ne peut connoître d'une affaire dans laquelle l'Evêque feroit intéreffé, parce que lui, ou quelqu'un de fes parens ou alliés en auroit reçu un Bénéfice.

Suite.

L'Official ne feroit récufable que dans le feul cas où l'Evêque, de la libéralité duquel, lui ou quelqu'un de fes parens ou alliés, auroit reçu un Bénéfice, feroit intéreffé perfonnellement; car toutes les fois que l'Evêque ne prend intérêt dans une affaire que pour la confervation du bon ordre & le maintien de la Difcipline Eccléfiaftique, fon Official n'eft pas pour cela récufable, en eût-il obtenu plufieurs Bénéfices.

L'Official ne feroit pas non plus récufable dans le cas où l'Accufé pourfuivi par-devant lui feroit en procès avec l'Evêque. Ainfi jugé en faveur de M. l'Evêque d'Auxerre, par Arrêt du 15 Juillet 1702, rapporté au Journal des Audiences. M. Joly de Fleury, Avocat-Général, plaida que c'étoit une maxime conftante que le Juge ne peut être récufé du chef de celui dont il tient fon Office. Cette maxime cependant n'est pas générale & univerfelle; car il eft certain que les Juges des Seigneurs ne peuvent connoître des caufes perfonnelles de ceux dont ils font les Officiers.

8°. Il est ordonné par l'Art. X, même Tit. XXIV, que fi le Juge eft Protecteur ou Syndic de quelque Ordre, & nommé

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