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les propriétaires des fonds de terre Aussi peut-on, en recherchant dans la loi annuelle de finances, l'excédant de la contribution foncière et de la contribution des portes et fenêtres, se rendre compte de la prospérité publique dans chaque département et comparer ceux qui progressent avec ceux qui restent stationnaires ou qui déclinent.

135. La loi dont nous venons d'exposer le mécanisme a ingénieusement résolu le problème de la peréquation de l'impôt relativement aux maisons. Le problème est encore à résoudre en ce qui concerne les propriétés non bâties. En vertu de la fixité cadastrale, tant que le cadastre n'est pas refait dans une commune, l'assiette de l'impôt foncier ne change pas. Il en résulte que l'impôt ne suit pas les mouvements de la richesse sur les propriétés non bâties, et que l'État réclame toujours la même somme, que la terre soit améliorée ou qu'elle soit détériorée. Ainsi les contribuables dont les terres ont augmenté de valeur continuent à payer ce qu'ils payaient auparavant, et ceux dont les terres produisent moins n'ont pas droit au moindre dégrè

vement.

136. Non-seulement il n'existe aucun moyen pour mettre exactement l'impôt foncier au courant de la richesse, mais la fixité cadastrale est considérée comme un principe salutaire pour l'agriculture. Si l'impôt variait chaque année, les améliorations seraient découragées par une augmentation d'impôt toujours prête à frapper. C'est pour concilier la justice, en matière de contributions, avec la crainte de décourager l'agriculteur que la loi du 7 août 1850, art. 7, a permis le

renouvellement du cadastre sous certaines conditions, qui sont : 1° que la commune soit cadastrée depuis trente ans au moins; 2° que le conseil municipal en fasse la demande; 3° que le conseil général ait donné un avis conforme; 4° que la commune paye les frais des nouvelles opérations'.

137. Avant la loi du 7 août 1850, c'était une question controversée que de savoir si l'administration pouvait procéder à la révision des évaluations cadastrales. Des administrateurs l'avaient pensé, et dans quelques communes cette opération avait été commencée. C'est pour trancher la question, dans le passé comme dans l'avenir, que la loi du 7 août 1850 a disposé que ces opérations commencées avec les fonds départementaux pourront être régularisées par un arrêté ministériel. Or le mot régulariser implique qu'avant la loi nouvelle la révision du cadastre ne pouvait pas être ordonnée par l'administration, et qu'une loi était nécessaire pour y faire procéder.

On voit par ce qui précède que, pour les propriétés non bâties, la révision du cadastre ne peut être faite qu'après trente ans, de sorte qu'on ne tient compte que des améliorations ou détériorations auxquelles le temps a donné de la consistance. Aussi peut-on dire que la loi du 7 août 1850 a concilié, autant que ses auteurs l'avaient cru possible, la justice de la répartition avec la crainte de décourager les améliorations agricoles.

1 Toutefois, d'après le même article, les opérations commencées avec les fonds de la commune peuvent être continuées avec les fonds départementaux.

138. La question de la péréquation ne se présente pas seulement au degré de la répartition individuelle. Il s'en faut de beaucoup que la fixation des contingents ait été faite proportionnellement. Il y a des communes, des arrondissements et des départements qui sont surchargés, et l'on entend s'élever dans les conseils d'arrondissement, les conseils généraux et le Corps législatif des réclamations tendant à obtenir la péréquation, c'est-à-dire une répartition plus juste des contingents. Assurément rien ne serait plus équitable que d'accorder une meilleure répartition des contingents; mais on craint de mécontenter les départements, arrondissements ou communes qui supporteraient l'augmentation; car toute augmentation d'impôt produit de l'irritation, quelle que soit l'origine de cette surtaxe. D'une autre part, les communes dégrevées trouveraient qu'on ne leur accorde que justice, même qu'une justice tardive, et plus d'une peut-être parmi elles se laisserait aller à un mécontentement rétrospectif. Les financiers de l'école politique s'accordent à penser que la péréquation ne doit être faite que par voie de dégrèvement, c'est-à-dire lorsque l'état des finances permet de diminuer les impositions. Alors, en effet, on pourrait n'accorder la diminution qu'aux départements, arrondissements ou communes surtaxés. Il n'y aurait ainsi que des contribuables contents, car la satisfaction des uns ne serait pas pour les autres une cause d'aggravation.

139. Quelques financiers de l'école économique pensent même que la péréquation serait injuste, que pour les uns elle serait une libéralité pure et pour les

autres une spoliation. Ils justifient leur proposition en disant que les propriétaires. ont, en devenant acquéreurs, fait entrer dans leurs calculs la charge de l'impôt foncier et qu'ils s'en sont déchargés à l'avance en diminuant d'autant leur prix d'achat. Or, ajoutent-ils, depuis soixante ans, il n'y a pas de propriété qui n'ait été l'objet d'une mutation, et conséquemment on peut aller jusqu'à dire que les propriétaires actuels ne payent pas l'impôt, les prix d'acquisition ayant été diminués par eux d'une somme égale au capital de la rente que représente l'impôt foncier. Nous nous bornons à exposer ce système sans le combattre, parce que nous l'avons réfuté dans un autre ouvrage1.

DROIT COMPARÉ.

140. Angleterre. - Le produit de l'impôt foncier ne forme aujourd'hui qu'une partie très-restreinte des ressources de l'Échiquier, tandis qu'à l'origine, lorsque les taxes de consommation n'étaient pas développées, il donnait la plus forte recette du trésor public. A la fin de 1864 cette branche du revenu ne rapportait que 1,107,517 livres st. ou 27,687,825 fr. Le tarif de la land-tax fut d'abord fixé à 4 shillings par livre ou à 20 p. 100 des revenus fonciers. A plusieurs reprises, il a été abaissé puis relevé, mais le mouvement ascendant de la richesse a fait que l'impôt est, à l'égard des revenus actuels, dans la proportion de 1 à 200; car il est exigé d'après les évaluations primitives, et n'a pas

1 V. nos Mélanges d'économie politique, p. 282, et notre Cours d'économie politique, t. II, 48° et 49° leçon.

été mis au courant des augmentations du revenu foncier. La répartition n'a pas varié depuis l'acte de Guillaume et Marie, qui fixa les contingents à fournir par les comtés. Aussi cette division n'est-elle plus en harmonie avec le développement relatif de la richesse dans les différentes parties du royaume. Des localités insignifiantes fournissent encore des contingents spéciaux, tandis que Liverpool et Manchester ne figurent pas dans la répartition ou n'y sont comprises que comme des parties du Lancashire. C'est à cause de ces graves défauts que, par un acte de Georges III (38, ch. 60) rendu sur la proposition de Pitt, la land-tax a été dé– clarée rachetable moyennant la remise d'une certaine quantité de rentes sur l'État (1 liv. 2 shill. de rente pour le rachat de 1 liv. st.). Cette faculté n'ayant produit que des effets lents, un acte de 1853, sur la proposition de M. Gladstone, a intéressé les contribuables au rachat par une réduction sur le prix. Depuis lors 90 liv. 3/4 de dividende dans la dette publique rachètent 100 livres de land-tax. Malgré tout, la libération ne se fait que lentement, et le produit actuel de cet impôt, (27,687,825 fr.) est égal à la moitié du chiffre le plus élevé qu'il ait jamais atteint.

Il faut ajouter à la land-tax l'impôt du revenu sur les terres (incom-tax) pour avoir une idée exacte des charges générales que supporte la propriété foncière. D'après l'acte du 25 juin 1842, la propriété foncière était imposée à l'incom-tax, à raison de 7 pence à la charge du propriétaire et de 3 1/2 à payer par le fermier; de sorte que le propriétaire exploitant lui-même était grevé de 10 pence 1/2 par liv. st. de revenu ou

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