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184. Dans les villes de 5,000 âmes et au-dessus, comment déterminer la population? L'art. 24, § 2 de la loi du 21 avril 1832 dispose qu'on ne doit compter que la population correspondante aux maisons comprises dans les limites intérieures de l'octroi, et que les habitations de la banlieue seront taxées comme celles des communes rurales. S'il y avait deux lignes d'octroi, on ne tiendrait compte que de celle qui est la plus rapprochée du centre'.

185. S'il est juste de tenir compte du chiffre de la population pour la graduation du tarif, il est incontestable aussi que dans la même ville la différence des quartiers influe considérablement sur la valeur des maisons et des loyers. Serait-il équitable, par exemple, qu'à Paris une maison à six ouvertures et à cinq étages, dans la rue Mouffetard, fût imposée au même chiffre qu'une maison à six ouvertures et à cinq étages dans la rue de la Paix? Un décret-loi du 17 mars 1852 a autorisé la ville de Paris à établir, pour la répartition de son contingent dans la contribution des portes et fenêtres, un tarif spécial combiné de manière à tenir compte à la fois de la valeur locative et du nombre des ouvertures. Usant de cette faculté, la commission municipale de la ville de Paris a, dans sa séance du 11 juillet 1852, approuvé un tarif d'après lequel la contribution se compose de deux éléments, 1° un droit fixe qui est applicable à chaque ouverture et multiplié par le nombre des ouvertures; 2° un droit proportion

1 C'est la solution qui est adoptée par la jurisprudence du Conseil d'État. Arr. du Cons, d'Ét. des 17 juillet 1843 (aff. de la ville d'Amiens) et 22 juin 1848 (aff. Debouis).

nel qui est plus ou moins élevé, suivant l'importance du revenu cadastral. Ainsi on tient compte de la différence des quartiers.

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186. Quelles ouvertures sont passibles de la contribution des portes et fenêtres? D'après l'art. 2 de la loi du 4 frimaire an VII « cette contribution est éta«blie sur les portes et fenêtres donnant sur les rues, « cours et jardins des bâtiments et usines sur tout le « territoire de la république. - Sont imposables les

fenêtres, dites mansardes, pratiquées dans la toiture << des maisons, lorsqu'elles éclairent des appartements <«< habitables. Ainsi, en règle générale, l'impôt ne frappe que sur les ouvertures extérieures et n'atteint pas les ouvertures intérieures. Cette distinction n'est pas toujours facile à faire, et plus d'une fois la pratique s'est trouvée en présence d'espèces difficiles à résoudre. La jurisprudence du Conseil d'État a décidé que l'impôt serait dû pour des vitrages servant à éclairer des escaliers, lors même que ces vitrages seraient établis dans le toit de la maison'. La même solution a été adoptée pour les fenêtres donnant sur une galerie vitrée 2, pour les vitrages à la devanture des boutiques. Le principe qui résulte des solutions adoptées dans ces espèces, c'est que l'on doit considérer comme ouvertures extérieures, passibles de l'impôt foncier, celles qui servent à éclairer les appar

1 Arr. du Cons. d'Ét. des 22 février 1844 (aff. Bonfils); 9 juin 1843 (aff. Martin); 25 août 1865. Aff. Savournin (D. P. 66, 5o partie, col. 100, no 9). * Arr. du Cons. d'Ét. du 24 juin 1846 (aff. Lebesque).

* Arr. du Cons. d'Ét. des 11 mars 1843 (aff. Fabre), 22 février 1844 (aff. Reynaud) et 8 mars 1851 (aff. Berthet).

tements, alors même qu'elles ne rempliraient cet office qu'indirectement'.

187. Toutes les ouvertures extérieures ne sont ce

pendant pas sujettes à l'impôt des portes et fenètres. Dans l'intérêt de l'agriculture, quelques exceptions ont restreint la règle générale. Ainsi premièrement, dans les fermes et métairies, il n'est compté qu'une seule porte cochère ou charretière, alors même que la ferme ou métairie en aurait plusieurs (art. 27, § 1 de la loi du 21 avril 1832). D'un autre côté, la loi exempte entièrement « les portes et fenêtres servant à éclairer «ou aérer les granges, bergeries, étables, greniers, «< caves et autres locaux non destinés à l'habitation des hommes. (Loi du 4 frimaire an VII, art. 5'.) » 188. Dans un autre intérêt, la même disposition exemptait « les portes et fenêtres des bâtiments em

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ployés à un service public, militaire ou civil, d'in<«<struction et aux hospices. >> Cette exemption n'est faite que pour les locaux employés au service public. Par conséquent, elle ne profite pas aux fonctionnaires qui sont logés gratuitement, et, d'après l'art. 27 de la loi du 21 avril 1832, ces fonctionnaires sont tenus de payer leur cotisation pour les portes et fenêtres. Ces fonctionnaires, s'ils n'avaient pas été logés gratuitement auraient été obligés de louer un appartement pour lequel ils auraient payé la contribution des portes et fenêtres. La gratuité de l'appartement est une faveur à laquelle il ne faut pas ajouter une

Il faut que les ouvertures servent à des habitations. Ainsi les ouvertures d'un pavillon construit dans un jardiu ne sont pas imposables, parce que le pavillon n'est pas destiné à l'habitation. Arr. Cons. d'Et, du 23 juin 1865. Aff. Ferrand (D. P. 66, 3, 20).

dispense d'impôt. Il en serait de même, à plus forte raison, des portes et fenêtres des maisons ou bâtiments que l'administration louerait pour y loger des agents, par exemple, les employés des douanes'.

189. Remarquons que pour les établissements d'instruction la loi n'accorde l'exemption qu'autant qu'il s'agit d'un service public; car l'art. 5 de la loi du 4 frimaire an VII parle des « bâtiments employés à un ser« vice public civil, militaire ou d'instruction. » Par conséquent, l'exemption ne serait pas applicable aux ouvertures d'une maison qu'occuperait une congrégation religieuse, alors même qu'elle donnerait l'instruction gratuitement. Ce n'est pas là un service public, puisque l'école tenue par la congrégation religieuse n'est pas communale 2. Il en serait de la congrégation comme du particulier qui tiendrait une école gratuite; ce n'est là qu'une entreprise privée et nullement un service public. A peine est-il utile de faire remarquer qu'il en serait autrement si la congrégation avait été appelée régulièrement à tenir l'école communale. Il y a toujours lieu, au contraire, d'exempter les portes et fenêtres d'un bâtiment occupé par un bureau de bienfaisance; car le bureau de bienfaisance est un service public de l'ordre civil3. La même exemption a été justement accordée à un orphelinat qui était reconnu

1 Arr. du Cons. d'Ét. du 5 janvier 1853 (aff. Orhategaray); 21 juin 1854 (D. P. 55, 3, 12); 28 février 1856 (D. P. 56, 3, 49); 6 mai 1857 (D. P. 58, 3, 21); 27 mai 1857 (D. P. 58, 3, 60); 20 février 1861 (D. P. 61. 3, 78) et 25 août 1865. Aff. Puichaud (D. P. 66, 3, 44).

* Arr. du Cons. d'Ét. du 15 décembre 1852 (aff. Voisine).

3 Arr. du Cons. d'Ét. du 11 janvier 1853 (aff, du bureau de Villeneuvesur-Lot).

comme établissement d'utilité publique et subventionné par le département'. Mais avec raison aussi elle a été refusée pour un abattoir2, pour un vestiaire attenant à un jeu de paume et pour un théâtre communal".

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190. L'industrie manufacturière jouit aussi d'une exemption importante. Aux termes de la loi du 4 germinal an XI, art. 19, « les propriétaires des manufactures ne sont taxés que pour les fenêtres de leurs habitations personnelles, et pour celles de leurs préposés et commis. - En cas de difficultés sur ce que l'on doit entendre par manufactures, il y sera statué par conseil de préfecture. »

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C'est une exemption analogue à celle qui est accordée pour les fenêtres et ouvertures servant à éclairer ou aérer les granges et bergeries. La loi n'a pas voulu que, pour obtenir une réduction de l'impôt des portes et fenêtres, le propriétaire d'une manufacture diminuat le nombre des ouvertures. Cette économie aurait été d'autant plus déplorable que dans les locaux occupés par les manufactures se font ordinairement des agglomérations d'ouvriers telles que l'aération ne pourrait être diminuée qu'en altérant la santé d'un grand nombre de personnes.

191. La loi n'a pas défini le mot manufactures, et en cas de difficulté sur le sens de cette expression,

1 Arr. Cons. d'Ét. du 25 août 1858. Orphelines protestantes du Gard (D. P. 66, 5 partie, col. 100, no 12).

2 Arr. Cons. d'Ét. du 28 juin 1865. Aff. ville de Caen, (D. P. 66, 3, 20).

3 Arr. Cons. d'Ét. du 3 juin 1865. Aff. Laurent (D. P. 66, 3, 20).

* Arr. Cons. d'Ét. du 12 janvier 1865. Aff. ville de Nantes (D. P. 65, 5, col. 93).

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