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première mutation et n'emporte pas une nouvelle transmission. Rien ne serait cependant plus facile que de qualifier une rétrocession de résiliement et d'échapper ainsi au deuxième droit proportionnel. C'est pour cela que la loi a déterminé les conditions constitutives du résiliement, conditions en dehors desquelles il y a rétrocession. Il faut pour cela: 1° que le résiliement soit pur et simple, c'est-à-dire que les parties ne tirent aucun profit du contrat ni du distrat; 2° que le résiliement soit constaté par acte authentique afin d'établir s'il a eu lieu dans le délai; 3° que le résiliement soit fait dans les vingt-quatre heures. Après ce délai ou même dans ce délai, si l'une des deux autres conditions venait à faire défaut, il n'y aurait pas résiliement, mais rétrocession. Au reste, en cas de résiliement, quoique le premier acte soit anéanti, les droits ne sont pas restitués; car ces droits avaient été régulièrement perçus, et il n'y a, par conséquent, pas lieu à restitution (art. 60 de la loi du 22 frimaire an VII).

374. Une autre fait juridique est régi par des règles analogues à celles du résiliement : je veux parler de l'élection de command ou d'ami. Il arrive quelquefois que l'acheteur n'achète pas pour son propre compte, mais qu'il agit en son propre nom pour autrui. En d'autres termes, il n'est que commandé, et il entend déclarer plus tard le nom de l'acquéreur, afin d'éviter la double mutation. C'est ce qu'on appelle la faculté d'élire command ou ami'. La loi distingue entre les ventes

1 L'élection de command peut être faite au profit d'une société dont l'existence n'est pas devenue certaine par l'enregistrement avant l'adjudication,

volontaires et les ventes judiciaires. Pour les premières, elle exige que la faculté d'élire command ait été réservée expressément et que la déclaration d'ami soit faite par acte authentique dans les vingt-quatre heures. L'acte authentique est nécessaire pour établir que les parties n'ont pas dépassé le délai légal. Dans les ventes judiciaires, les avoués qui se portent adjudicataires ont la faculté d'élire command; mais ce pouvoir leur ap. partient en vertu de la loi et sans qu'ils aient besoin d'insérer une réserve expresse dans le procès-verbal d'adjudication. Leur professiou emporte présomption qu'ils ont reçu mission d'enchérir et qu'ils sont commandés. D'un autre côté, les officiers ministériels ne sont pas tenus de faire leur déclaration dans les vingtquatre heures; la loi leur accorde trois jours. La déclaratiou de l'avoué est faite par acte au greffe, et la signature du greffier donne date certaine à la déclaration. Elle est tarifée au droit fixe d'un franc comme acte innomé1.

375. La résolution ne doit pas être confondue avec le résiliement. Tandis que celui-ci résulte toujours d'un accord de volonté, l'autre a lieu tantôt en vertu de la loi, tantôt en vertu d'une clause expresse ou tacite qui donne à l'une des parties le droit d'exiger, même sans

pourvu seulement que la formalité soit remplie avant la déclaration d'ami. C. cass., arr. du 4 décembre 1865 (D. P., 66, I, 135).

1 Un arrêt de la Cour de cassation, du 3 septembre 1840, distingue entre la déclaration de command dans les ventes volontaires et la déclaration d'adjudicataire par l'avoué dans les enchères sur vente forcée. Il résulte des motifs de cet arrêt que, dans le premier cas, la propriété de la chose vendue repose provisoirement sur la tête de l'acquéreur, sauf résolution en cas d'élection, tandis que dans le second la propriété ne repose pas

que

l'autre y consente, l'anéantissement du contrat. En un mot, le résiliement implique un accord de volontés, et la résolution peut être exigée par un seul des contractants comme un droit qui a sa source soit dans la loi, soit dans le contrat primitif. Ces causes de résolution sont nombreuses le pacte de réméré, le défaut de payement du prix, la lésion de plus de sept douzièmes, la surenchère, la folle enchère. La résolution peut même être demandée par des personnes étrangères au contrat, notamment par les créanciers fraudés (art. 1167 C. Nap.). Reprenons ces différentes causes de résolution.

lieu

376. Le réméré n'est qu'une condition résolutoire dont l'effet est d'anéantir la vente; il ne donne pas à une deuxième mutation et n'est que l'anéantissement de la première. Ce n'est donc pas un rachat, mais un retrait, et ce dernier terme, employé par la loi fiscale, est bien plus exact que le mot réméré dont se sert le Code Napoléon'. C'est une restitution du vendeur dans sa propriété ex causâ primævâ et antiqua. Aussi n'y a-t-il pas lieu à payer un deuxième droit de mutation de 5 fr. 50 c. p. 100. Quant au premier, il n'est

un seul instant sur la tête de l'adjudicataire; car l'avoué est obligé de faire déclaration de command dans les trois jours. Si cette distinction était vraie, il faudrait admettre que, dans les ventes judiciaires, la propriété de la chose adjugée n'appartient à personne après l'adjudication. En effet, le vendeur est dévêtu, puisqu'il y a eu vente, et l'adjudicataire, qui est inconnu encore, ne peut pas être propriétaire. Il est plus régulier de décider que dans les ventes judiciaires, comme dans les ventes volontaires, l'acquéreur ou adjudicataire devient propriétaire, sauf résolution rétroactive en cas d'élection de command ou d'adjudicataire.

1 L'expression pactum de retrovendendo était, au contraire, exacte en droit romain, parce que, d'après les principes de cette législation, il y avait rachat et, par conséquent, deux mutations.

pas restituable s'il a été payé avant l'exercice du réméré (art. 60 de la loi du 22 frimaire an VII). S'il était encore dû au moment du retrait, le droit de 5 fr. 50 c. ne serait pas, selon nous, exigible; car, l'acte de vente étant anéanti, la perception manquerait de base. Le seul droit proportionnel qu'il y ait à payer, c'est celui de 50 cent. p. 100; car le retrait suppose le remboursement du prix par le vendeur à l'acheteur, et il y a là un fait de libération pour lequel le droit de quittance est exigible. Les solutions qui précèdent supposent, au reste, que le retrait a été exercé dans le délai fixé au contrat. Après ce délai, le retrait ne pourrait être fait que par une rétrocession de l'acquéreur au vendeur, ce qui emporterait une deuxième mutation à 5 fr. 50 c. .p. 100. Au reste, pour que le retrait soit censé avoir été exercé à temps, il faut qu'il ait acquis date certaine avant l'expiration du délai. La date certaine résultera, pour l'acte notarié, de la mention mise sur l'acte par l'officier ministériel, et, quant aux actes sous seings privés, l'art. 69, § 2, no 11, porte que la date certaine résultera de la mention à l'enregistrement'.

Indépendamment de l'enregistrement, l'art. 1328 C. Nap. reconnaît deux autres moyens de donner date certaine aux actes. Ces moyens suffiront-ils pour prouver que le retrait a été fait dans le délai, alors que l'art. 69 pe reconnaît textuellement que l'enregistrement comme emportant date certaine? L'art. 69, § 2, n° 11, ne parle que de l'enregistrement, parce que c'est le seul moyen normal de donner date certaine aux actes, et que les deux autres moyens dont parle l'art. 1328 ne sont qu'accidentels. En somme, puisque l'enregistrement n'est exigé que parce qu'il a la vertu de donner date certaine aux actes, serait-il juste de ne pas attacher cet effet, en matière fiscale, aux deux autres causes qui, d'après les principes du droit commun, ont le même pouvoir?

377. Le délai du réméré peut être prorogé par un accord postérieur au contrat (art. 1660 C. Nap.), pourvu que le premier délai et la prorogation ajoutés ne dé-passent pas le maximum de cinq ans. La loi, il est vrai, dit que le délai est de rigueur, mais seulement pour signifier qu'il ne peut pas être prolongé par le juge (art. 1661 C. Nap.). La même défense n'est pas faite aux parties, et l'administration en conclut que si le retrait a lieu dans les cinq années, il n'est dû qu'un droit proportionnel de quittance de 50 cent. p. 100, alors même que le retrait ne serait exercé que postérieurement au premier délai et dans le courant seulement du délai prorogé '.

378. La vente est résolue pour défaut du payement du prix, soit en vertu de la clause résolutoire sous-entendue dans tous les contrats synallagmatiques (art. 1184 C. Nap.), soit en vertu d'une convention formelle (art. 1656 C. Nap.). La loi du 27 ventôse an IX, art. 12, distingue, au point de vue de la perception, entre le cas où la résolution est ordonnée avant que l'acheteur ne soit entré en jouissance et celui où l'entrée en possession avait précédé la résolution. Dans le premier cas, le jugement qui prononce la résolution n'est taxé qu'au droit fixe de cinq francs d'après le tarif augmenté par la loi du 28 avril 1816, art. 45, no 5. Dans le second, il donne lieu à la perception du droit proportionnel de mutation. Cette distinction s'accorde mal avec le principe de notre droit civil que le

1 Cette solution résulte d'un avis du comité des finances en date du 13 janvier 1830, approuvé par le ministre des finances le 22 février 1830. L'avis est rapporté in extenso par M. G. Demante, t. I, p. 142 et 143.

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