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comme c'est la destination du propriétaire qui en fait des immeubles, ce caractère immobilier ne dure qu'autant que la volonté persiste. Si donc le propriétaire fait cesser cette destination, les biens reprennent leur nature mobilière, et la vente n'est taxée qu'à 2 fr. p. 100. La puissance de la volonté est telle que si le vendeur aliénait, par le même acte, un domaine avec les animaux attachés à la culture, il pourrait diviser le prix, de sorte que la vente des animaux ne serait taxée qu'à 2 p. 100. Il peut, en effet, faire cesser la destination tout aussi bien dans un seul acte que par des actes séparés1.

1 Les constitutions de servitudes à titre onéreux rentrent dans les actes translatifs de propriété; car les servitudes sont des démembrements, et, pour ainsi dire, une propriété partielle. Ce sont des immeubles par l'objet auquel elles s'appliquent (art. 526 C. Nap.), et partant la vente donne lieu au droit de 5 fr. 50, le droit de transcription étant, pour les ventes, fondu avec le droit de mutation. Quant aux actes translatifs de propriété, autres que la vente, il y aurait lieu de se demander si la transcription des aliénations de servitudes présente une utilité quelconque aux parties (art. 54 de la loi du 28 avril 1816). Les actions tendant à revendiquer des immeubles sont considérées comme des immeubles et, par conséquent, la cession de ces actions donne lieu au droit de 5 fr. 50 p. 100. S'agit-il de la revendication d'un immeuble, le droit de 5 fr. 50 est perçu sur le prix de la cession. Si c'est une action en réméré, le concessionnaire est censé avoir acheté pour une somme qui serait formée par le prix de la cession ajouté à ce qu'il sera tenu de rembourser au premier acquéreur. Ainsi le prix d'achat étant de 6,500 fr., charges comprises, si l'action en réméré coûte 1,000 fr., le cessionnaire aura l'immeuble pour 7,500 fr. C'est donc sur cette somme que le droit de mutation sera calculé à 5 fr. 50 p. 100. On calculera, d'une manière analogue, pour la cession d'une action en rescision pour lésion de plus des sept douzièmes. Supposons que le prix payé soit de 50,000 fr. et que la cession soit faite pour 40,000 fr., le cessionnaire aura l'immeuble pour 90,000 fr. C'est donc sur ce prix qu'il faudra payer le droit de 5 fr. 50. La résolution donnera-t-elle lieu à la perception d'un nouveau droit de mutation avec droit de transcription? Pour le droit de mutation de 4 p. 100, nous avons vu qu'il est exigible même quand la résolution est prononcée entre le vendeur et l'acquéreur; à plus forte raison est-il dù si la résolution est prononcée sur la demande d'un cessionnaire. Quant au droit de transcription, il n'est pas exigible pour la résolution qui est prononcée au profit du vendeur.

397. Echange.-L'échange est le troc d'un corps certain contre un autre corps certain avec translation réciproque de propriété. Les parties peuvent changer: 1° un immeuble contre un immeuble; 2° un meuble contre un meuble; 3° un immeuble contre un meuble. Reprenons ces trois hypothèses.

L'échange d'un immeuble contre un autre immeuble a lieu tantôt sans soulte et tantôt avec soulte. S'il n'y a pas de soulte, le droit à percevoir est de 2 fr. 50 c. p. 100 sur la valeur de l'un seulement des objets échangés. Cette valeur est déterminée, non d'après une estimation de la valeur vénale, mais au moyen d'une capitalisation du revenu multiplié par vingt'. Dans le droit de 2 fr. 50 c. p. 100 sont compris les droits de transcription à raison de 1 fr. 50 c. p. 100. Le droit principal de mutation, en cas d'échange, est donc de 1 p. 100.

398. Si l'échange était fait avec soulte en argent, on percevrait le droit d'échange sur la plus petite portion. et quant à la soulte, elle serait soumise au même droit que la vente, c'est-à-dire à 5 fr. 50 c. p. 100. La loi ne se borne pas à dire que le droit de vente sera perçu sur

Mais lorsqu'il y a un tiers cessionnaire, ce droit est exigible; car les choses se passent, en ce cas, comme si le vendeur avait fait prononcer la résolntion, et qu'ensuite il eût cédé à un tiers (C. cass., arr. des 29 août 1839 € 6 mars 1855). Les actions de la banque de France peuvent être immobilisées (décret du 16 janvier 1808), et aussi longtemps qu'elles conservent œ caractère, elles sont assujetties aux règles sur la transmission des immetbles. Elles ne cessent d'être immeubles qu'en observant les formes prescrites par la loi du 17 mai 1834. Tant qu'elles ne sont pas mobilisées, leur transmission à titre onéreux donne lieu au droit de 5 fr. 50 p. 100. Il faut, pour leur rendre leur nature mobilière, que la déclaration en soit faite à la banque de France et inscrite au bureau des hypothèques de Paris.

1 Loi du 22 frimaire an VII, art. 69, § 5, n° 3, et même article, § 7, no 5, modifiés par la loi du 16 juin 1824, art. 2.

les soultes; elle ajoute qu'il sera dû pour la plus-value. Cette addition a été faite afin de prévenir une fraude facile. On n'aurait pas mentionné la soulte au contrat et, l'argent de retour étant donné de la main à la main, il n'y aurait eu qu'à payer le droit proportionnel d'échange. S'il y a plus-value de l'un des immeubles à l'égard de l'autre, l'administration peut provoquer une expertise à l'effet d'établir exactement l'assiette du droit à payer. Cette proposition serait applicable alors même qu'il n'y aurait pas eu de soulte par suite de raisons de convenance, le propriétaire n'en ayant pas exigé réellement. Si l'on avait pris en considération cette possibilité, la fraude aurait été multipliée par la difficulté de distinguer le silence sincère du silence frauduleux. Aussi le droit de 5 fr. 50 c. p. 100 est-il, sans distinction, exigible sur la plus-value.

399. L'échange d'un meuble contre un meuble est assujetti au droit de 2 fr. p. 100, c'est-à-dire au droit qui atteint tous les actes translatifs de propriété mobilière à titre onéreux. On ne perçoit du reste le droit que sur la valeur de l'un des meubles échangés et non sur la valeur des deux cumulativement. La transmission de l'un des objets est la condition de la transmission de l'autre. Aussi applique-t-on ici la règle que nous avons indiquée plus haut sur les clauses accessoires et dépendantes de l'acte principal.

400. L'échange d'un immeuble contre un meuble dissimule quelquefois une vente. Les tribunaux doivent donc rechercher quelle est l'opération qui a eu lieu réellement, et si d'après les faits il est prouvé que sous le nom d'échange les parties ont fait une vente

réelle, on appliquera le droit de 5 fr. 50 c. Mais c'est une preuve à faire, et il n'y a pas de présomption légale. Dans les cas où il y aura vente, les tribunaux appliqueront le tarif de 5 fr. 50 c., que l'acte soit ou non de nature à être transcrit (art. 54 de la loi du 28 avril 1816). Que s'il n'y a pas vente, mais échange, le droit de 1 fr. 50 c. p. 100 ne sera exigible que dans les cas où l'acte est de nature à être transcrit.

401. L'échange est résoluble, d'après l'art. 1705 C. Nap., lorsque l'une des parties est évincée de la chose qu'elle avait reçue. Celui qui éprouve l'éviction a le choix entre la résolution et l'action en dommages-intérêts. S'il demande la résolution, le jugement qui la prononce donne lieu au droit de mutation de 4 p. 100. En effet, le jugement qui résout l'échange n'est pas un échange, mais un acte translatif de propriété à titre onéreux. Comme il s'agit d'une résolution rétroactive et que, par conséquent, la transcription n'aurait pas d'utilité, on exige le droit de 4 p. 100 et non celui de 5 fr. 50 c. p. 100.

402. Transaction. -La transaction est un accord par lequel deux ou plusieurs parties terminent une contestation née ou à naître. Ordinairement elle est faite moyennant des sacrifices réciproques. Tantôt chaque contractant prend une portion des objets litigieux, et tantôt l'une des parties conserve le tout à la charge de payer soit une somme, soit une indemnité en nature'. Cette distinction est capitale au point de

1 Quelques jurisconsultes, et notamment M. Demante père, Programme, 3. édit., t. III, no 805, admettent que la transaction peut être falte à titre de

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vue du droit fiscal. L'art 68, § 1, n° 45, taxe au droit fixe (ce droit fixe a été élevé à 3 fr. par la loi du 28 avril 1816, art. 44, n° 8) « les transactions, en quelque matière que ce soit, qui ne contiennent « aucune stipulation de somme et valeur ni disposi«tions soumises à un plus fort droit d'enregistre«ment. >> D'après l'art. 69, § 3, n° 3, on perçoit le droit proportionnel de 1 fr. p. 100 fr. sur « les contrats, transactions..... et tous autres actes et écrits qui contiendront obligations de sommes sans li«béralité, et sans que l'obligation soit le prix d'une << transmission de meubles ou d'immeubles non enre«gistrée. » Si l'indemnité consiste dans une transmission de meubles ou d'immeubles, il y aura lieu de percevoir le droit de mutation sur les actes translatifs à titre onéreux, savoir: 2 p. 100 sur les meubles et 4 p. 100 sur les immeubles, plus, en ce dernier cas, 1 fr. 50 c. pour transcription, lorsque les parties ont intérêt à transcrire.

403. Quoiqu'elle soit écrite dans des dispositions formelles, cette distinction n'est observée ni par la pratique administrative ni par la jurisprudence de la Cour de cassation. L'administration de l'enregistrement perçoit souvent sur les transactions, même quand elles ne contiennent aucune obligation de somme ou de valeur, le droit proportionnel de mutation. Il y a, suivant la doctrine qui est au fond de cette pratique,

bienfaisance par considération pour une personne, quoique le renonçant n'abandonne qu'en protestant de son droit et en exigeant qu'il soit reconnu par les termes de la convention. M. Gab. Demante adopte l'opinion de son père, t. I, p. 264. V. contrà, Troplong, sur l'art. 2044, no 4 et 21.

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