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naire (art. 69, § 3, no 2, de la loi du 22 frimaire an VII). Cette disposition, faite pour les baux à durée limitée, n'a pas été répétée pour les baux à durée illimitée ou à vie. Il est évident cependant que les sous-baux et cessions de baux sont des baux, et qu'ils peuvent être imposés en vertu de la disposition générale qui frappe les baux à durée illimitée d'un droit de 4 p. 100. Quant aux rétrocessions, les règles d'interprétation juridique ne nous paraissent pas autoriser l'extension. Il est, en effet, contraire aux principes que la rétrocession du bail soit considérée comme un bail. Il répugne à la nature des choses que le bailleur devienne locataire de ce qui lui appartient. La rétrocession ne peut être ici qu'une renonciation et n'est pas, comme en matière de vente, une reconstitution du droit qui avait été transmis. A la vérité, pour les baux à durée limitée, il faut appliquer l'article qui impose formellement la rétrocession comme le bail. Mais cette disposition ayant été faite contra rationem juris, nous pensons qu'il ne faut pas l'appliquer aux baux à durée illimitée. Ce serait une extension contraire à la maxime: Quod contra rationem juris receptum est non est producendum ad consequentias1.

416. Il y a deux opérations qui présentent de l'analogie, l'une avec le bail à fermage, l'autre avec le loyer des maisons, et qui, quoique différents dans le fond, pourraient être confondus avec le louage. Ainsi la vente des récoltes ou fruits ressemble au fermage, et cepen

1 Un arrêt de la Cour de cassation, du 18 janvier 1825, considère cependant comme constant que le droit de 4 p. 100 est applicable aux rétrocessions de baux à durée illimitée.

dant il Ꭹ a cette différence que la vente ne confère de droit à l'acquéreur que sur les fruits, tandis que le fermage donne au preneur un droit à se servir de la chose affermée. La perte fortuite des fruits vendus est supportée par l'acquéreur, tandis que la perte fortuite des récoltes sur la ferme est à la charge du bailleur. Au point de vue fiscal, la vente des fruits supporte un droit proportionnel de 2 p. 100, tarif des ventes mobilières, et le bail à durée limitée ne paye que 20 cent. p. 100. Il serait facile cependant de dissimuler sous la forme d'un bail une véritable vente de fruits. C'est ce qui aurait lieu, par exemple, s'il était convenu que le propriétaire continuerait à cultiver, que la perte fortuite serait à la charge du preneur, etc., etc. Les tribunaux examineront, d'après les faits de la cause, ce que les parties ont voulu faire, et appliqueront le tarif suivant la nature de l'acte quelle que soit la qua lification adoptée par les parties'.

417. Une opération qui est souvent jointe, par des clauses accessoires, au bail à ferme, c'est l'obligation par le preneur de construire sur le sol. Voici les deux combinaisons qui peuvent s'offrir, et cette distinction est importante pour la perception du droit proportionnel 1° Le preneur s'engage à construire, et il est convenu qu'en fin de bail la propriété entière appartiendra au bailleur, sans aucune indemnité.

1 En ce qui concerne le bail des mines, minières et tourbières, la Cour de cassation décide qu'il ne peut être qu'une vente de fruits et non un louage. Elle en donne pour motif que l'exploitation épuise le fonds, tandis que le bail suppose un fruit périodique dont l'extraction n'épuise pas le fonds. C. cass., ch. civ., arr. des 17 janvier 1844, 26 janvier 1847, 6 mars 1855, et ch. req., 28 janvier 1857.-V. contrà, Troplong, Louage, n° 93, et Lebon, Revue critique, 1855, t. VI, p. 432.

L'obligation de construire est une charge du bail, charge dont l'évaluation est ajoutée à la redevance pour former le capital sur lequel sera perçu le droit de 20 cent. p. 100. 2° S'il était convenu qu'à la fin du bail, le bailleur deviendra propriétaire sur le prix qui sera fixé après expertise, le preneur serait propriétaire des constructions sous condition résolutoire, et le bailleur propriétaire sous condition suspensive. A la fin du bail, il y aurait une vente qui donnerait lieu à la perception du droit proportionnel de 5 fr. 50 c. p. 100. Aussi, en ce cas, l'obligation de construire ne serait pas, comme une charge, ajoutée au prix du bail pour asseoir le droit de 20 cent. par 100 fr., puisque la construction donnera plus tard lieu à une mutation de propriété immobilière.

418. Remarquons, en terminant, que le droit de bail n'est qu'un droit d'acte. Il n'est donc exigible qu'autant que l'enregistrement en est requis par la partie, et il n'appartient pas à la régie de rechercher les conventions de louage non déclarées, comme elle peut le faire pour les mutations secrètes.

419. En cas de résolution prononcée pour défaut de payement du prix, y a-t-il lieu d'exiger un droit proportionnel de bail sur le jugement qui prononce la résolution? L'administration prétend que ce droit est exigible, puisque la rétrocession de bail est imposée au droit proportionnel, et qu'il serait aisé, si le jugement était affranchi de ce droit, de dissimuler une rétrocession au moyen d'un procès fictif. Cette crainte de la fraude est la seule raison qu'allègue la régie. Aussi lorsque la résolution est prononcée pour une

autre raison que le défaut de payement du prix, par exemple lorsqu'il s'agit de résolution pour abus de jouissance, l'administration ne demande pas à percevoir un droit proportionnel sur le jugement qui prononce la résolution. Nous pensons que la facilité de la fraude n'est pas une raison suffisante pour exiger un droit qui n'est établi par aucun texte formel. Ce motif peut servir à expliquer la disposition de la loi du 27 ventôse an IX, art. 12, qui soumet au droit proportionnel le jugement prononçant la résolution d'une vente pour défaut de payement du prix, Mais ce qui suffit pour rendre compte d'une disposition formelle, alors qu'elle s'éloigne des principes ordinaires, ne peut pas justifier une extension par analogie d'une disposition exorbitante. S'il y a fraude, que l'administration la prouve. Tant que la preuve n'est pas faite, il n'y a pas à en tenir compte, puisque la fraude ne se présume pas.

420. Louage d'ouvrage. - Le droit civil distingue le louage de services, l'entreprise ou marché de travaux et le louage pour le transport. Nous ne trouvons dans la loi fiscale aucune disposition qui soit particulière au louage de services. Quant aux marchés de travaux, l'art. 69, § 3, no 1, établit un droit proportionnel de 1 p. 100 sur les adjudications <«< au rabais et marchés........... pour constructions, répa«rations et entretien, et tous autres objets mobiliers susceptibles d'estimation faits entre particuliers, qui «ne contiendront ni vente ni promesse de livrer des « marchandises, denrées ou autres objets mobiliers. » La loi dit « faits entre particuliers,» parce que les

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marehės administratifs sont au nombre des actes dispensés. Elle exige aussi que l'acte ne contienne ni vente ni promesse de fournir des marchandises. Autrement il y aurait lieu de percevoir le droit de vente mobilière ou 2 p. 100, au lieu du droit spécial de 1 p. 100.

421. Si l'entrepreneur ne fournit pas les denrées ou matériaux nécessaires pour l'ouvrage, il ne donne que son travail, et alors c'est un louage de services. Il y a cependant, entre le louage de services et le marché, une grande différence qui est bien exprimée par les mots ouvrier et entrepreneur. L'entrepreneur est indépendant, et n'est tenu que de se conformer aux termes et conditions de son contrat. Au contraire, celui qui loue ses services est dans la dépendance du maître qui a le droit de lui donner des ordres et de changer ses résolutions. La disposition ci-dessus ne s'applique textuellement qu'aux marchés et non aux louages de services. Aussi quelques écrivains ont-ils proposé de n'appliquer à ces derniers que le droit fixe auquel sont sujets tous les actes civils innomés. Dans la pratique, on les considère comme des marchés, sujets au droit proportionnel de 1 p. 100. Au reste, s'il ne rentrait pas dans la catégorie des marchés, il faudrait percevoir le droit de 1 p. 100, en vertu du principe qui établit ce droit proportionnel sur tous les actes contenant obligation de sommes. C'est aussi le droit d'obligation qui serait exigible sur les obligations de services intellectuels. Même dans le système de ceux qui admettent qu'en ce cas il n'y a pas louage, mais mandat,

1 En droit romain, locatio operis et locatio operarum.

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