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tion des jugements n'a été prescrite que par la loi du 23 mars 1855.

480. La survenance d'enfants, au contraire, anéantit la donation rétroactivement et résout les droits réels conférés sur l'objet donné par le donataire (art. 963 C. Nap.). Le donateur reprend donc sa chose de plein droit et en vertu d'une cause ancienne (ex causâ primævá et antiquâ). Aussi la résolution ne donne-t-elle pas lieu à un second droit de transmission. Il semble résulter de là que si le donateur renonçait au bénéfice de la résolution en faveur du donataire, il faudrait payer un deuxième droit de transmission. Mais on applique, en ce cas, la règle générale d'après laquelle un droit fixe seulement est dû sur « les actes refaits, « pour cause de nullité ou autres motifs, sans aucun changement qui ajoute aux objets des conventions « ou à leur valeur1. »

481. C'est aussi en vertu d'une cause ancienne que le donateur reprend sa chose lorsqu'il y a clause de retour (art. 951 C. Nap.). L'exercice du retour, en cas de mort sans enfant du donataire avant le donateur, n'est donc pas taxé à un nouveau droit proportionnel de transmission.

482. Il en devrait être de même de l'inexécution des conditions, cette cause de résolution produisant ses effets rétroactivement ou ex tunc, pour employer une expression scolastique. Comme le donateur reprend la chose donnée ex causâ primævâ, les principes ne s'accordent pas avec la perception d'un

1 Loi du 22 frimaire an VII, art. 68, 2 1, n° 7, et loi du 28 avril 1816, art. 43, n° 3.

deuxième droit; mais, dans la pratique, le jugement qui prononce la résolution est considéré comme un acte judiciaire translatif de propriété à titre onéreux'. On exige, en conséquence, un droit proportionnel de 2 p. 100 en matière mobilière et de 4 p. 100 en matière d'immeubles. Ici le caractère onéreux résulte de ce que la résolution est demandée comme réparation du préjudice causé par l'inexécution des charges.

483. La donation est faite quelquefois sous la forme d'un acte à titre onéreux et, en ce cas, il y a donation indirecte. Il se peut même que l'acte onéreux enveloppe si bien la libéralité qu'il y ait donation déguisée. Ainsi le propriétaire d'un immeuble valant 100,000 fr. le vend pour 50,000 avec l'intention non dissimulée de faire un avantage à l'acheteur; c'est une donation simplement indirecte2. S'il vend pour 100,000 fr. et déclare avoir reçu le prix, quoiqu'il ne l'ait réellement pas touché, la donation est déguisée. Une jurisprudence constante admet la validité de la donation indirecte, même celle de la donation déguisée, sauf l'art. 1099 C. Nap., relativement aux donations entre époux. Comment seront taxées les donations indirectes ou déguisées ?

484. Pour la donation indirecte, le droit proportionnel de transmission est dû d'après le tarif de l'acte à titre onéreux réellement subsistant. Ainsi quoiqu'il y

1 Art. 69, § 5, no 1, et § 7, n° 1.

• La cession d'un office, avec donation d'une partie du prix, donne lieu au droit de vente sur une partie et au droit de donation sur l'autre. G. cass., req., arr. du 22 janvier 1866 (D. P., 66, I, 232).

ait libéralité pour partie, on appliquera le tarif de la vente, puisqu'il y a réellement vente, et que l'avantage tient à la réduction du prix. Seulement l'administration a le droit de provoquer une expertise pour faire établir la valeur véritable de l'immeuble donné; car il y a présomption que le prix a été dissimulé. Cette faculté n'appartient à la régie qu'en matière de translation de propriété immobilière, parce que pour les meubles ou même pour le louage d'immeubles, l'avantage indirect résultant d'un contrat réellement subsistant ne donne lieu à la perception d'aucun droit. Comme il n'y a pas mutation, la régie n'a pas à rechercher les avantages que les parties se font par des titres soumis seulement au droit d'acte.

485. En cas de donation déguisée, il pourrait arriver que le droit exigible sur l'acte apparent fùt moindre que celui auquel donnerait lieu l'acte réel. Ainsi la vente d'immeubles est taxée en principal à 5 fr. 50 c. p. 100, tandis que la donation du même immeuble à un étranger, c'est-à-dire à un non-parent, coûterait 9 p. 100 pour droits de mutation. Il y aurait donc, en ce cas, intérêt à dissimuler la libéralité faite à un étranger sous la forme d'une vente portant quittance du prix. Comme l'acte apparent est valable, il n'appartient pas à l'administration de rechercher par un procès la réalité cachée sous l'apparence. Cependant si plus tard il était démontré qu'il y avait donation, par exemple à la suite d'une action en nullité ou en rapport suivie pour les autres cohéritiers, les principes demanderaient qu'il fût perçu, à titre de supplément, un droit égal à la

IMP. ENREGISTREMENT. différence entre le tarif du contrat réel et celui du contrat apparent'.

486. La transcription des donations immobilières a été ordonnée par le Code Napoléon (art. 932 C. Nap.). Il est donc certain que c'était un acte de nature à être transcrit avant la loi du 23 mars 1855. Il résulterait de là que le droit de 1 fr. 50 c. p. 100 serait dû et exigible d'office par l'administration, alors même que la formalité ne serait pas requise par les parties intéressées. Mais cette proposition est restreinte par des textes spéciaux. Il est incontestable que pour les donations en ligne directe et pour les donations entre époux, le droit de transcription est exigible d'office2. Il n'en est pas de même pour les libéralités entre collatéraux et entre étrangers. Le tarif qui, pour ces derniers, a été fixé par la loi du 21 avril 1832, comprend à la fois le droit de mutation et celui de transcription exprimés par un chiffre indivisible.

487. Cette indivisibilité produit une conséquence importante dans l'application de la loi du 18 mai 1850, art. 10. D'après cette disposition, les transmissions de meubles, à titre gratuit, par donation entre-vifs ou pour cause de décès, sont assujetties aux mêmes droits que les transmissions d'immeubles. La partie du droit qui correspond à la transcription ne s'applique pas aux meubles, et elle n'est pas due pour les donations mobilières soit en ligne directe soit entre époux. Mais pour les

1 V. en ce sens Gab. Demante, op. cit., t. II, p. 559, no 600.

2 En ligne directe, la pratique qui perçoit d'office le droit de transcription a été confirmée implicitement par la loi du 16 juin 1824. Quant aux donations entre époux de biens présents, elles sont comprises dans l'art. 53 de la loi du 28 avril 1816, et l'art. 54 leur est, par conséquent, applicable.

donations mobilières entre collatéraux ou étrangers, le tarif de la loi du 21 avril 1832 est appliqué tout entier aux meubles comme aux immeubles; car la loi ne décompose pas le chiffre en droit de transmission et droit de transcription'. Cette doctrine s'appuie sur la division du droit dans un cas et sur l'indivisibilité du tarif dans l'autre. Le résultat est assurément fort bizarre, mais l'incohérence s'explique par la diversité des dates auxquelles ont été faites les lois à exécuter. L'interprétation est conforme aux règles; il faut convenir seulement que les lois dont l'interprétation conduit à ces résultats appellent une modification qui les ramène à l'unité.

488. Les donations de biens présents par contrat de mariage sont sujettes au droit proportionnel de transmission. Seulement la loi accorde une réduction en faveur du mariage. Cette modération ne s'appliqué qu'au droit lui-même et non à la transcription. Lors done que le droit de transcription est distinct du principal, on perçoit 1 fr. 50 c. Pour les donations entre collatéraux et étrangers, la modération est accordée sur le tout, le tarif étant indivisible. Cette modération s'applique non-seulement aux donations faites par des étrangers aux futurs, mais aussi à celles que les époux se feraient entre eux; qu'elles émanent d'un tiers ou d'une des parties contractantes, il s'agit toujours d'une donation faite aux futurs, et cela suffit pour que la réduction soit accordée (art. 53 de la loi du 28 avril 1816).

C. cass., arr. du 17 novembre 1851.

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