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pour la commune une somme supérieure à celle qui est perçue par l'État. Le même article cependant admettait qu'il pourrait être dérogé à la règle générale par une ordonnance royale. Une loi du 11 juin 1842, tout en maintenant la règle et les dérogations, décida qu'au lieu d'une ordonnance royale il faudrait une loi spéciale pour la validité de l'exception. La même loi portait qu'après une période de dix années (áu 31 décembre 1852), toutes les taxes seraient ramenées aux limites du droit d'entrée; cependant des dérogations ont été consacrées par des dispositions formelles qui ont prorogé le délai de dix années. D'ailleurs, avant l'expiration du délai, un décret-loi du 17 mars 1852 a diminué de moitié les droits d'entrée au profit du Trésor, diminution qui entraînait comme conséquence une réduction de l'octroi dans les villes où les taxes avaient été poussées jusqu'à la limite du droit d'entrée. Mais la loi de finances du 22 juin 1854, art. 18, est revenue sur cette concession en portant le maximum des droits d'octroi au double des droits d'entrée qui sont levés dans les villes de 4,000 àmes et au-dessus. Aucune dérogation à ce maximum ne peut être établie que par une loi spéciale.

587. La fraude serait très-fréquente dans les grandes villes si les communes des faubourgs n'étaient pas comprises dans le périmètre de l'octroi.

1 & L'effet dé des dispositions du décret du 17 mars 1852 a été un remanement assez profond dans les octrois d'un grand nombre de communes. Déjà les dispositions de la loi du 11 juin 1842 atteignaient 371 localites. On a calcule que la seconde réduction de 1852 réduirait de 3,558,303 fr. les ré cettes de 911 communes en France. » (De Parién, op. cit., t. IV, p. 2.)

L'art. 152 de la loi du 28 avril 1816 a prévu ce cas. * Des perceptions pourront être établies, dans les banlieues, autour des grandes villes, afin de restreindre la fraude, mais les recettes faites dans ces banlieues appartiendront toujours aux communes dont elles seront composées. » C'est là une disposition exorbitante puisqu'elle fournit le moyen de soumettre une commune à l'octroi, sans son consentement. Aussi faut-il qu'elle soit rigoureusement restreinte aux cas pour lesquels elle a été faite. Or l'art. 152 n'admet cette = exception que pour les banlieues autour des grandes villes. Ce serait done sortir des termes de cette disposition que de l'appliquer à de petites villes'.

Quoique l'extension de l'octroi à la banlieue puisse être faite sans le consentement de la commune du fautbourg, cependant il faut que le conseil municipal de cette dernière soit appelé à délibérer. Son avis ne sera pas obligatoire, mais il faut le demander, à peine de commettre un excès de pouvoir, ce qui rendrait annulable le décret approuvant l'établissement de l'octroi2.

L'art. 26 de l'ordonnance de 1814 dispose que «<les « dépendances rurales entièrement détachées du lieu « principal sont affranchies des droits d'octroi. » Cet article paraît être confirmé par l'art. 21 de la loi du 28 avril 1816, qui dispense aussi les habitations

Un arrêt du Conseil d'État, du 23 août 1836 (octroi de Mont-de-Marsan et commune de Saint-Pierre) a décidé que Mont-de-Marsan, n'ayant qu'une population de 3,774 habitants, ne pouvait pas être considéré comme une grande ville donnant lieu à l'application de l'art. 152 de la loi, et que son octroi ne pouvait pas être étendu au delà de son territoire.

* Décret du 17 mai 1809 combiné avec l'art. 152 de la loi du 28 avril 1816. Cétte opinion a été consacréé par la jurisprudence du Conseil d'État. Arr. du Cons. d'Et. du 28 décembre 1854.

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rurales des droits d'entrée. Il semble résulter de la combinaison de ces deux dispositions qu'on ne doit soumettre aux taxes que la partie agglomérée et non les dépendances rurales. Mais l'art. 21 de la loi du 28 avril 1816 ne s'occupe que du droit d'entrée levé sur les boissons au profit du trésor, droit qui n'est exigible qu'à la barrière, tandis que l'octroi peut être établi même dans les villages non fermés. D'un autre côté, la restriction écrite dans l'ordonnance de 1814 n'a pas été reproduite par la loi du 28 avril 1816. L'art. 147 permet d'imposer les objets de consommation locale, sans aucune restriction; il contient donc une abrogation virtuelle de l'ordonnance sur ce point, comme sur l'imposition des blés et farines. En résumé, l'art. 21 de la loi du 28 avril 1816 n'est pas applicable puisqu'il ne s'occupe que des droits d'entrée perçus par l'État, et quant à l'art. 26 de l'ordonnance de 1814, les termes généraux de l'art. 147 l'ont implicitement abrogé'.

588. Une commune ne peut recourir à l'octroi qu'en cas d'insuffisance de ses ressources. Il résulte de là que, pour l'autoriser à s'imposer les taxes de cette espèce, il faut examiner sa situation financière. C'est pour cela que l'affaire est instruite par deux sections du Conseil d'État : par la section de l'intérieur, au point de vue des ressources de la commune, et par la section des finances, au point de vue des tarifs.

1 La jurisprudence du Conseil d'État décide que les dépendances rurales peuvent être comprises dans l'octroi. Arr. des 1er septembre 1819 et 11 vrier 1836. Elle est d'accord avec celle de la Cour de cassation. C. cass., arr. des 26 mai 1827 et 19 mai 1836.

589. L'initiative appartient aux conseils municipaux. « La désignation des objets exposés, dit l'art. 147 de <«< la loi de 1816, le tarif, le mode et les limites de la << perception sont délibérés par les conseils munici« paux. » L'autorité supérieure ne pourrait donc pas modifier les propositions, mettre une taxe à la place d'une autre en changeant la matière imposable. Elle n'a que le pouvoir d'empêcher ou d'approuver, c'està-dire d'exercer les attributions inhérentes à la tutelle administrative. Le droit d'empêcher comprend celui de réduire une taxe proposée, la réduction n'étant pas autre chose qu'un empêchement partiel. Mais l'autorité supérieure dépasserait ses pouvoirs si elle mettait, à la place d'un article non approuvé, un autre droit que le conseil municipal ne propose pas. Décider autrement serait contrevenir au texte de l'art. 147 de la loi du 28 avril 1816 et porter une grave atteinte au droit d'initiative qui, en règle générale, appartient à la commune sur toutes les parties de son budget'.

1 La législation a varié sur cette question. D'après la loi du 11 frimaire an VII, l'initiative appartenait à l'administration municipale, et l'autorité supérieure n'était investie que du pouvoir d'annuler ou d'approuver. Au contraire, le décret du 17 décembre 1809, tout en appelant (art. 2) les conseils municipaux à délibérer sur la proposition des tarifs d'octroi, confère au gouvernement le droit d'établir d'office cette taxe locale dans le cas où le conseil municipal négligerait de la voter. Ce régime fut conservé par l'ordonnance du 9 décembre 1814. Mais ces dispositions ont été abrogées par la partie de l'art. 147 qui permet d'établir des droits sur la demande des conseils mnnicipaux. Cette abrogation fait d'autant moins doute que, par elle, la législation se trouve ramenée au système de l'initiative municipale, c'està-dire à la règle générale qui a prévalu dans la loi du 18 juillet 1837. Cette doctrine a été consacrée par la jurisprudence du Conseil d'État. Arr. des 16 décembre 1842 (ville de Troyes) et 5 juin 1848 (ville d'Auch). Mais l'autorité supérieure peut rejeter un article du tarif ou le réduire. Arr. du Cons. d'Ét. des 18 juillet 1838 (ville de Commercy) et 25 avril 1845 (ville d'Amboise).

La délibération du conseil municipal portant proposition d'établir un octroi est envoyée par le souspréfet au préfet, qui le transmet, avec son avis, au ministre de l'intérieur. La section de l'intérieur du Conseil d'État est appelée à délibérer et donne son avis sur la situation financière de la commune. Après avoir pris cet avis, le ministre autorise, s'il y a lieu, le conseil municipal à délibérer sur les tarifs. Une nouvelle délibération du conseil municipal propose les tarifs, et le préfet transmet le dossier au directeur général des contributions indirectes, avec l'avis du directeur des contributions indirectes dans le département. Le ministre des finances consulte la section des finances du Conseil d'État. L'assemblée générale est même appelée à délibérer d'après l'art. 13, n° 17, du règlement du 30 janvier 1852, Le décret est ensuite rendu par le chef de l'État, sur la proposition du ministre des finances qui le contre-signe. Pour abréger, le conseil municipal pourrait, par la même délibération, demander l'établissement de l'octroi et proposer les tarifs. Le dossier serait ensuite transmis avec les avis exigés par les règlements au ministre de l'intérieur, qui arrêterait le projet dans le cas où la situation financière de la commune ne demanderait pas l'établissement de l'octroi. Au contraire, dans le cas où il approuverait la proposition, le dossier serait transmis au ministre des finances, qui le renverrait au Conseil d'État (section des finances et assemblée générale). En suivant cette marche, on abrégerait l'instruction de l'affaire et on mettrait la section de l'intérieur à même de faire officieusement, sur les

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