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Des expériences faites avec le sulfure d'argent et celui d'arsenic dans les mêmes conditions ont donné des quantités très-différentes d'hydrogène sulfuré. Pour le sulfure de manganèse et celui d'argent encore davantage, le dégagement reste constant pendant un temps assez long, presque jusqu'au moment où tout le sulfure a été oxydé. Les quantités d'eau et de sulfure ayant été doublées et triplées, les unes par rapport aux autres, le dégagement d'hydrogène sulfuré n'a ni augmenté ni diminué. C'est là une première preuve de la dissociation. Le sulfure d'arsenic seul a fait exception. Voici comment on peut expliquer cette anomalie. La tension de dissociation des sulfures d'argent et de manganèse étant relativement très-faible, une très-petite quantité de matière suffit pour maintenir la tension complète. Au contraire, la tension du sulfure d'arsenic étant très-considérable, les quantités qui ont été employées n'étaient pas suffisantes pour obtenir la tension complète. On a tenté, en augmentant progressivement les quantités de sulfure d'arsenic, d'arriver au point où le dégagement serait resté constant, mais on a été obligé de renoncer à ces expériences à cause des difficultés que présentent les essais numériques avec des masses aussi considérables de sulfure.

Les expériences précédentes ont toutes été faites à l'air libre, et l'hydrogène sulfuré était entraîné au fur et à mesure de sa formation; en vase clos, les choses se passent autrement. Le même sulfure d'arsenic, qui, chauffé en vase ouvert, donne lieu à un dégagement abondant d'hydrogène sulfuré, n'occasionne pas la plus petite augmentation de pression, quel que soit le temps que dure l'expérience, lorsqu'on le soumet en vase clos à l'ébullition avec de l'eau.

Ce fait, joint à celui de la constance du dégagement d'acide sulfhy drique, quelle que soit la quantité de matière employée, fait bien voir que c'est à une dissociation qu'on a affaire.

Les sulfures donnant donc lieu à un phénomène de dissociation, il n'est guère possible de penser que le sulfure réagisse sur l'eau dans laquelle il est en suspension; ce serait là une hypothèse en contradiction directe avec l'idée de dissociation. L'explication la plus simple et la plus plausible consiste à admettre la formation d'un hydrate qui se dissocie par la chaleur en hydrogène sulfuré et en oxyde métallique. Cette prévision a, du reste, été pleinement confirmée par l'expérience. On a constaté, en effet, que les sulfures, préalablement desséchés, se dissociaient beaucoup plus lentement que les sulfures restés humides, et que ces sulfures desséchés reprenaient les propriétés premières par un contact prolongé avec l'eau. En résumé, on a établi dans ce travail que les hydrates de sulfures se dissocient par la chaleur, plus ou moins rapidement, suivant la tension particulière à chacun d'eux.

Un certain nombre d'autres sulfures ont été examinés au même point

de vue. Les uns, comme les sulfures de fer, de nickel, de cobalt, d'antimoine, d'étain, d'arsenic, d'argent et de manganèse se dissocient plus ou moins rapidement; d'autres, comme les sulfures de cuivre, de zinc, de mercure, de cadmium, d'or, de platine et de molybdène, ne donnent lieu à aucun dégagement d'acide sulfhydrique, probablement parce que ces sulfures ne sont pas susceptibles de former des hydrates.

Ces expériences seront continuées; on examinera plus spécialement, au point de vue de la dissociation, les sulfures alcalins et alcalino-terreux. Cette étude fournira sans doute des données intéressant la constitution des eaux minérales sulfureuses.

MM. Ph. de CLERMONT et J. FROMMEL

SUR UNE NOUVELLE MÉTHODE DE SÉPARATION DE L'ARSENIC
DES AUTRES MÉTAUX.

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En nous occupant de la dissociation des hydrates de sulfures en présence de l'eau bouillante, le cas particulier de l'arsenic nous a suggéré l'idée d'un nouveau procédé de séparation de l'arsenic des autres métaux, opération fort délicate, comme on le sait. Cette méthode, d'une grande simplicité, s'applique soit à l'analyse qualitative, soit à l'analyse quantitative.

En effet, un grand nombre d'hydrates de sulfures se dissocient à 100° en hydrogène sulfuré d'un côté, et en oxyde de l'autre; or le sulfure d'arsenic est le seul qui donne un oxyde soluble, l'acide arsénieux. Si donc on soumet un mélange de sulfure d'arsenic et d'autres sulfures à l'ébullition, les sulfures seront tous oxydés et resteront insolubles dans l'eau, à l'exception de l'acide arsénieux, qu'il sera dès lors facile d'isoler.

Pour un essai qualitatif, il convient d'opérer ainsi qu'il suit: on met le mélange des sulfures en suspension dans une certaine quantité d'eau, et l'on fait bouillir pendant quelque temps; on retrouve immédiatement l'acide arsénieux dans le liquide filtré. La dissociation du sulfure d'arsenic est si rapide qu'il suffit de deux ou trois minutes d'ébullition pour trouver une quantité notable d'acide arsénieux.

Lorsqu'il s'agit d'un dosage, il faut prendre quelques précautions qui sont indispensables.

Supposons un mélange d'arsenic, d'antimoine et d'étain; on transforme

le tout en sulfure en faisant passer un courant d'acide sulfhydrique après avoir acidulé par l'acide chlorhydrique et par l'acide tartrique, s'il y a de l'antimoine. Lorsqu'on est certain que la totalité de la matière a été transformée en sulfure, on laisse reposer dans un endroit chaud jusqu'à ce qu'on ne sente plus l'odeur de l'acide sulfhydrique, et l'on jette le tout sur un filtre. Le lavage doit être fait avec beaucoup de soin, car la plus petite quantité d'acide chlorhydrique restant dans le précipité occasionnerait une perte d'arsenic qui se volatiliserait sous la forme de chlorure. Le précipité, complétement lavé, est placé avec le filtre dans un ballon rempli d'eau, et est porté à l'ébullition. On a constaté que la réaction est beaucoup plus rapide dans un appareil distillatoire; cela tient, sans doute, à ce que la tension de dissociation est plus considérable dans la vapeur d'eau que dans l'air, et à ce que l'hydrogène sulfuré se dissolvant rapidement dans l'eau condensée permet à une nouvelle quantité de se produire. On peut accélérer encore la décomposition en faisant passer dans l'appareil un courant d'air qui entraîne l'acide sulfhydrique à mesure qu'il se dégage. On a reconnu que, pour une quantité d'arsenic ne dépassant pas 2 décigrammes, la distillation de 300 à 600 centimètres cubes d'eau suffit à la dissociation complète du sulfure.

On filtre le résidu et dans le liquide filtré se trouve la quantité intégrale d'acide arsénieux, qu'on dose alors par un des procédés connus. Sur le filtre restent les sulfures non décomposés et les oxydes qui ont pris naissance. Ce procédé permet la séparation de l'arsenic de tous les autres métaux.

Différents essais faits avec les sulfures d'étain, d'antimoine, d'or, de fer, etc., ont démontré la rigueur de cette méthode.

MM. Ph. de CLERMONT et J. FROMMEL

SUR LA VALEUR DE LA MAGNÉSIE COMME ANTIDOTE

DE L'ACIDE ARSÉNIEUX.

Séance du 29 août 1878.

L'influence perturbatrice de l'acide arsénieux sur la dissociation du sulfure d'arsenic ayant été constatée dans les expériences décrites dans la note précédente, on a tenté à plusieurs reprises d'en combattre l'effet et de l'éliminer au fur et à mesure de sa formation. On a essayé, par exemple, de le rendre insoluble au moyen d'une addition de magnésie.

Or, lorsqu'on ajoute de la magnésie à de l'eau tenant en suspension du sulfure d'arsenic, celui-ci est presque instantanément décoloré et il se forme deux combinaisons: un sulfarsénite de magnésie Mg3 2 (As S3) soluble dans l'eau et un arsénite Mg H As O3 insoluble; voici l'équation qui rend compte de cette réaction :

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3

Mg3 2 (As S3) + 2 Mg H As 03.

Ce sulfarsénite soluble qu'on peut séparer par filtration de l'arsénite insoluble, étant soumis à l'ébullition, se dissocie et abandonne tout son soufre en se transformant en arsénite insoluble :

3

Mg3 2 (As S7 H20= 2 Mg H As 036 HS + Mg O. Une conséquence curieuse de ce fait se présente à l'esprit. On sait que dans les cas d'empoisonnement par l'acide arsénieux, un des contrepoisons indiqué est la magnésie. Rien de mieux, si réellement l'arsenic reste à l'état d'acide arsénieux dans l'organisme, l'arsénite qui se forme est, en effet, complétement insoluble. Mais en supposant qu'une partie de cet acide arsénieux passe à l'état de trisulfure, soit dans l'estomac, soit dans les intestins, en administrant de la magnésie, dans ce cas on rend soluble et assimilable ce sulfure qui par lui-même n'aurait pas été actif.

Or cette transformation d'acide arsénieux en sulfure n'est pas une hypothèse; on n'en mentionne qu'un exemple. M. L. A. Buchner (1) a constaté en effet dans les membranes intestinales d'une personne empoisonnée par l'acide arsénieux la présence d'une certaine quantité de trisulfure à l'état d'une fine poudre jaune.

On voit donc que la magnésie n'est pas un antidote aussi efficace qu'on le supposait, puisqu'elle rend soluble précisément ce sulfure d'arsenic qui aurait plus ou moins échappé à l'absorption à cause de son insolubilité.

MM. HENNINGER et LEBEL

PRÉSENTATION D'UN APPAREIL A DISTILLATION FRACTIONNÉE
(EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL.)

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MM. HENNINGER et LEBEL présentent un appareil à distillation fractionnée qui leur a rendu les plus grands services pour analyser les vapeurs et séparer des liquides dont les points d'ébullition sont très-voisins. Cet instrument, vé

(1) Neues Repertorium der Pharmacie, t. XVII, p. 386.

ritable appareil à colonne, est un tube en verre de 1,50 environ de hauteur, s'articulant en trois parties rodées l'une dans l'autre. Chacune de ces parties présente quatre boules se succédant par un étranglement. Au niveau de cet étranglement, on a soin de mettre un petit dé en toile de platine destiné à retenir le liquide condensé et à forcer ainsi les vapeurs ascendantes à traverser cette couche de liquide; elles y subissent un véritable lavage et abandonnent les parties les moins volatiles. Le liquide condensé dans chaque boule retourne, par un petit tube latéral, à la boule placée immédiatement en dessous, et ainsi de suite, de manière à rentrer, en dernier lieu, dans le vase distillatoire.

A l'aide de cet appareil, MM. Henninger et Lebel ont pu séparer les alcools homologues provenant de la fermentation alcoolique, sans être obligés de passer par leurs dérivés iodés, opération nécessaire autrefois. Nous ajouterons, pour montrer combien cet appareil est précieux, que M. Lebel a pu séparer en grande partie l'alcool amylique actif de l'alcool amylique inactif en distillant l'alcool du commerce sous pression réduite.

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M. GIRARD communique, au nom de M. E. CAVENTOU et au sien, leurs recherches sur l'action du potassium sur l'aniline.

Dans cette action, il se forme une masse pâteuse d'où l'on peut retirer de l'azobenzol et de l'amidoazobenzol. En faisant réagir le potassium sur la méthylaniline, on obtient de l'hydrogène, de la méthylamine et de l'indol.

Du produit de la réaction de l'aniline sur la nitrobenzine, M. Girard retire l'azoxybenzol et l'azobenzol. Avec le chlorhydrate d'aniline, l'azoxybenzide donne la violaniline, tandis que l'azobenzol fournit une matière qui est probablement de la triphénylène diamine.

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