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M. l'Abbé MAZE

A Harfleur.

OBSERVATION D'UN PHÉNOMÈNE NÉBULEUX PRÈS DU HAVRE.
(EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL.)

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M. L'ABBÉ MAZE fait connaître un phénomène nébuleux qu'il a observé à Harfleur le 28 novembre 1877 à 3 heures 1/2 du soir: le ciel était en partie couvert de nuages isolés et élevés, courant de l'est à l'ouest; à 3 heures 1/4 il s'est formé cinq rayons nébuleux, composés de filaments blanchâtres d'un aspect corné. L'un d'eux, dirigé du côté du pôle, présentait des stries parallèles aux rayons solaires et des stries perpendiculaires; tout l'ensemble de l'apparition tournait autour du rayon solaire avec un angle d'environ 65°, il a disparu à 4 heures 10 minutes et M. l'abbé Maze l'a revu un quart d'heure plus tard avec une couleur rose carmin. Le baromètre n'a pas été observé.

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M. DE TASTES expose la théorie des grands mouvements de l'atmosphère sur laquelle sont basées ses prévisions du caractère des saisons.

La première prévision relative à la sécheresse de l'année 1870 et au grand hiver qui devait la suivre, fut signalée à l'Académie des sciences par Ch. Sainte-Claire Deville; une seconde application de cette théorie, publiée en divers recueils, a été faite aux caractères généraux de l'année 1872, puis une troisième à la prévision de l'hiver si doux de 1874.

Une des principales propositions de ce système est que les cyclones sont dus à l'action toute mécanique résultant du battement de deux courants aériens animés de vitesses différentes; elle a eu la bonne fortune d'être adoptée par M. Faye. L'auteur a trouvé également dans les travaux de M. Brault, dont il ne saurait admettre toutes les conclusions sans restrictions, une confirmation de ses idées.

Encouragé par ces adhésions indirectes, il a entrepris de publier chaque jour, pendant trois ans, dans les journaux de Tours, un Bulletin contenant des prévisions à lointaine échéance et il a dû signaler des cas où celles de l'Observatoire de Paris étaient en défaut; c'est ainsi, par exemple, qu'il annonça pour les côtes algériennes la fameuse tempête du 12 janvier 1876, inaperçue par l'Observatoire, et qui fit de si grands dégâts dans notre colonie.

Passant successivement en revue les divers systèmes d'avertissements du temps, M. de Tastes critique à la fois l'excès de prudence de l'Obervatoire de Paris, qui ne formulait pas de prévisions au delà de vingt-quatre heures et net s'appuyait sur aucune théorie, et la hardiesse des avertissements du NewYork-Herald, qui, sans avoir publié la doctrine sur laquelle il fonde ses prévisions, se hasarde à annoncer à jour fixe et sur un point déterminé l'arrivée en Europe des tempêtes qui quittent l'Amérique, alors qu'une minime déviation angulaire dans la direction de la trajectoire observée au départ suffit pour faire varier le point d'arrivée du centre du météore des côtes de la Laponie à celles du Portugal.

C'est également à tort, suivant l'auteur, qu'on attribue tous les changements de temps aux cyclones originaires des régions équatoriales, qui arrivent dans nos pays après avoir décrit d'immenses trajectoires. M. de Tastes expose ensuite le résultat de ses propres recherches, basées sur l'étude quotidienne des cartes du temps; il montre que les courbes isobares peuvent se classer dans, un certain nombre de catégories dont il montre des spécimens et que ces situations générales de l'atmosphère ont un caractère marqué de persistance, ce qui permet, avec beaucoup d'habitude, de prévoir, à l'inspection d'une série de cartes quotidiennes la disposition que prendront les grands courants aériens pendant les jours suivants. Les phases lunaires ont, suivant lui, de l'influence sur les changements de temps, et ceux-ci se manifestent d'abord dans les hautes régions avant d'atteindre les couches inférieures de l'atmosphère; aussi les observations sur les hauts pics isolés ont-ils une importance particulière pour les progrès de la science.

M. l'abbé DURAND

Professeur de sciences géographiques à l'Université catholique de Paris.

LES PLUIES DE POUSSIÈRE DES DÉSERTS DE L'ASIE CENTRALE.

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Au centre de l'Asie s'étendent trois grandes dépressions dont le niveau se maintient cependant au-dessus de celui de la mer Caspienne et du lac d'Aral.

La première est celle du Khorassan, qui s'étend au sud de la mer

LES PLUIES DE POUSSIÈRE DE L'ASIE CENTRALE 475 Caspienne, le deuxième celui de Lout, qui s'avance au midi du précédent jusque dans le Kirman, et le troisième le Kizil-Koum (désert rouge) qui couvre les régions occidentales du territoire compris entre le Syr daria et l'Amon daria.

Ces déserts ont été parcourus récemment par le célèbre voyageur russe M. de Khanikoff, qui en a rapporté des observations curieuses; nous les extrayons de ses ouvrages pour les grouper et en faire profiter la science.

Les déserts de Khorassan et de Lout ou Grand Désert salé se composent de quatre terrasses couvertes soit de dunes sablonneuses, sur lesquelles on n'aperçoit que quelques touffes de tamarin, soit d'une couche argileuse formée de sable grisâtre à gros grains, qui recouvre une autre couche sablonneuse et devenue ferme par un ciment de sel.

Çà et là, sur la surface, s'étendent d'immenses plaques d'efflorescences salines, qui deviennent plus nombreuses dans le désert de Lout.

Ce désert est la continuation de celui du Khorassan.

Tous deux réunis forment un immense trapèze de 350,000 kilomètres de superficie sur lesquels il y en a 200,000 en Perse le reste couvre l'Afghanistan et le Seistan.

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La deuxième des quatre terrasses est la plus élevée, elle a de 900 à 1,200 mètres d'altitude. Vers le Sud-Est se trouve sa région la plus basse; elle n'en a plus que 380. De ce côté le sol se creuse et forme la dépression du Seistan, au fond de laquelle s'étend le lac Hamoud: son point le plus bas se tient entre 120 et 150 mètres. Ces déserts sont balayés par les courants du Samiel, vent brûlant semblable au sirocco. Sa chaleur est si intense que le voyageur est pris de vertige et court risque d'être asphyxié. M. de Khanikoff a constaté jusqu'à +65° centigrades et ses provisions de stéarine et de sulfate de soude ont été fondues, ce qui l'a mis plusieurs fois dans l'impossibilité de continuer ses observations.

Ces déserts donnent également naissance à des trombes considérables, d'une poussière argileuse et noirâtre, qui atteignent de 48 à 50 mètres de hauteur.

Ce même voyageur a observé :

1° Que la température de ces trombes est plus élevée à l'intérieur qu'à l'extérieur;

2° Qu'elles se changent en nuages ou brouillards secs que le vent emporte à des distances considérables;

3o Que ces brouillards et nuages obscurcissent la lumière du soleil comme une éclipse;

4° Qu'ils se dissipent et tombent à terre; après une forte pluie, on en retrouve la poussière dans l'eau à l'état de sédiment;

5 Que pendant le passage d'un de ces nuages le baromètre reste sans oscillation.

Dans ces déserts, la pression atmosphérique est constante et le baromètre oscille fort peu.

Le phénomène du mirage s'y montre très-intense. M. de Khanikoff affirme que tous ces phénomènes sont beaucoup plus puissants dans le Kizil-Koum ou désert de la Transoxiane que sur le plateau de Kho

rassan.

D'un autre côté, les voyageurs anglais les ont constatés également dans le désert indien du Sind.

MM. Haywart, Schaw et Johnston ont étudié les nuages de poussière dans le Turkestan oriental. Ce dernier voyageur a été témoin de plusieurs de ces phénomènes pendant son séjour à Koten.

Ces nuages viennent tomber régulièrement dans la plaine de cette contrée en une poussière impalpable, c'est le seul engrais qui en féconde le sol. En effet, les habitants regardent celle-ci comme nécessaire à leurs récoltes. Sans elle ils seraient décimés par la famine.

Or, le Turkestan oriental ou chinois forme une vaste baie oblongue du désert de Gobi, entourée de hautes montagnes de trois côtés. Au nord, c'est la chaîne du Tian-Chan; à l'ouest, c'est le Bolor qui mesure jusqu'à 6,500 mètres d'altitude; au sud, ce sont les Kouen-lin, dont l'altitude moyenne est de 5,000 mètres environ; à l'est, entre l'Altaï et le Kouen-lin, s'ouvre un détroit couvert d'ondulations sablonneuses communiquant avec le désert de Gobi. La mer de sable commence à peu de distance à l'est d'Ilitchi et se prolonge à l'est jusque dans l'intérieur de la Mongolie où elle s'étend sur une très-vaste superficie.

Le Turkestan oriental forme donc une cuvette profonde couverte de sables dans sa région orientale, arrosée par la Yorkand et la Kaschgar et divisé en trois plaines dont celle de Koten est la plus méridionale.

Or, cette cuvette se trouve à environ 2,500 mètres au-dessous de la zone des courants atmosphériques.

Les nuages de poussière qui engraissent ces campagnes ne peuvent donc venir ni du nord, ni de l'ouest, ni du sud. Ils se forment probablement dans la région orientale de la cuvette ou dans le désert de Gobi, et pénètrent dans celle-ci par le détroit dont nous venons de parler.

Mais les mêmes voyageurs ont constaté que l'atmosphère de cette partie du Turkestan est très-calme, que son climat est doux et constant et préférable à celui de la belle vallée de Cachemire, située au pied du versant opposé.

Nous croyons donc que ces nuages de poussière arrivant du nord-est

et de l'est viennent se heurter le long de la muraille des Kouen-lin, où, livrés à eux-mêmes dans une atmosphère tranquille, ils tombent tout doucement en brouillard sur le sol qu'ils fécondent, comme les matières en suspension dans une eau tranquille. Les explorateurs russes et les missionnaires catholiques de la Mongolie ont rencontré sur les plateau▾ sablonneux de ce pays les mêmes tempêtes et les mêmes trombes de sable poussées par les vents d'ouest ou par les vents d'est selon la saison.

Ajoutons à ce qui précède qu'un voyageur, qui a traversé plusieurs fois le Far-West, ou grande plaine centrale des États-Unis, nous a raconté que les mêmes phénomènes se produisaient dans cette région et dans les mêmes conditions.

DISCUSSION

M. TACCHINI, président d'honneur, expose les caractères que présentent les pluies de poussière en Sicile; les phénomènes qu'elles produisent sont trèsdifférents de ceux que l'on observe en Asie; la baisse du baromètre et le passage des tourbillons atmosphériques les accompagnent toujours. Quand l'air est sec, il tombe une poussière rougeâtre qui se dépose partout en couche uniforme; quand il pleut, la pluie fait des taches couleur ocre et on trouve la même poussière au fond du pluviomètre en quantité très-notable. Il serait très-utile de recueillir et faire analyser ces poussières qui peuvent avoir des origines différentes.

C'est surtout au moment du passage des cyclones que tombent les pluies de sable; il se produit en même temps une odeur très-caractéristique, et, le plus souvent, il y a sirocco.

La Sicile est un pays exceptionnel pour l'étude du sirocco; d'ailleurs, chaque mois il y en a deux ou trois; en hiver il est très-agréable; mais, en été, il est très-fatigant. Loin d'être un engrais pour la culture, comme ceux qui accompaguent les pluies de poussières de l'Asie centrale, il constitue une véritable brûlure, et, si l'on pouvait supprimer le sirocco, il en résulterait un avantage considérable pour l'agriculture; c'est ce qui arriverait probablement si le projet de création d'une mer intérieure dans le Sahara réussit et ce serait un véritable bienfait pour le sud de l'Europe, dont le climat se trouverait modifié dans un sens favorable. Mais, indépendamment des siroccos, qu'on observé à la surface du sol, il y en a d'autres qui traversent constamment l'atmosphère; ceux-là ne sont relevés que par les observations spectroscopiques, parce que les observations spectroscopiques de la photosphère ne sont possibles qu'avec une large couche d'air calme; or, quand il y a calme en bas et agitation en l'air, beaucoup de phénomènes passent inaperçus. On éviterait cet inconvénient en se plaçant au-dessus des couches nuageuses ou agitées, et M. Tacchini recommande de faire de la météorologie en haut et non en bas. Les observatoires sur les hautes montagnes et notamment sur les pics isolés

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