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rienne des déformations céphaliques de notre Occident. En effet, contrairement à Am. Thierry, ainsi que je l'ai dit précédemment, la parenté des Volces du midi et des Belges du nord-est des Gaules, paraît insuffisamment prouvée. Toutefois, il est juste de constater que la proportion relativement élevée des recrues de haute taille dans le département de l'Hérault, remarquée par Boudin (1) ne peut guère s'expliquer ethnologiquement que par la présence dans cette région d'anciens immigrés de haute stature. Ces immigrés sont-ils des Volces-Belges-Germains, ou bien des Wisigoths, qui paraissent s'être retirés en grand nombre dans la Septimanie, sur ce littoral méditerranéen après la bataille de Vouillé?

A la question de M. Magitot, je répondrai que déjà j'ai rappelé certaines coïncidences dans la répartition géographique de certains peuples cimmériens et de quelques crânes macrocéphales. Mais comme la plupart des régions géographiques occupées par les Kimmériens l'ont également été par d'autres peuples, lorsque je tiens compte de l'époque à laquelle Sidoine Apollinaire signale la présence des soldats macrocéphales d'Hormidac sur les bords du Danube, ainsi que de l'époque Helvéto-Burgunde à laquelle se rapportent les crânes macrocéphales trouvés en Suisse et dans notre Jura, je suis porté à penser que ces macrocéphales n'étaient pas d'origine cimmérienne, mais appartenaient à des peuplades s'étant portées bien moins anciennement vers notre Europe occidentale. A voir l'isolement des rares squelettes au crâne macrocéphale au milieu d'autres squelettes au crâne nullement déformé dans les sépultures du Jura, on est porté à penser que les guerriers macrocéphales n'étaient qu'en petit nombre dans les hordes dévastatrices faisant des incursions jusque dans notre Occident.

M. Dimitri ANOUTCHINE

Secrétaire de la Section anthropologique de la Société des Amis des sciences naturelles de Moscou.

REMARQUES SUR LA CAPACITÉ MOINDRE DU ORANE CHEZ LES RACES INFÉRIEURES

· Séance du 27 août 1878.

M. Anoutchine ne pense pas qu'on puisse dire d'une manière absolue, que les « crânes les plus volumineux appartiennent, dans l'espèce humaine, aux races les mieux douées sous le rapport intellectuel, et dans chaque race aux sujets les plus intelligents ». En comparant les résultats

(1) BOUDIN: De l'accroissement de la taille en France: Mémoire de la Soc. d'anthrop., t. II. p. 230 et 2 carte. 7 mai 1863.

du cubage des crânes fait par le même procédé (avec le millet) par divers craniologistes, il a pu dresser la liste suivante :

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On voit que les Kalmouks et les Chinois ont le volume du crâne plus grand que plusieurs nations d'Europe et les Tchuktchi plus grand que, par exemple, les Hongrois. La grandeur de la tête chez les Kalmouks a été remarquée par plusieurs voyageurs, et Metchnikoff a trouvé chez 20 Kalmouks vivants une circonférence horizontale égale, en moyenne, à 576, et la même pour 20 crânes kalmouks. Baer a même trouvé chez les crânes qu'il a étudiés le chiffre de 588, tandis que chez les Parisiens modernes, il a seulement 525. M. Anoutchine pense aussi qu'on ne peut pas dire d'une manière absoluc que le volume du crâne chez les races préhistoriques d'Europe était, en général, plus petit que chez les races modernes. On sait que chez les Parisiens contemporains le volume du crâne est égal, en moyenne, à 1,558c (chez les femmes, 1,337). En comparant avec ce chiffre celui des crânes préhistoriques, nous trouvons :

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De ces chiffres on ne peut pas fixer la conclusion que le volume des crânes chez les races préhistoriques était sensiblement moindre que chez les Parisiens contemporains. Reste seulement la race de Canstad et surtout le crâne de Néanderthal, qui n'avait pas (comme on le suppose) un volume plus grand que 1,200. Mais ce caractère pouvait être individuel et exceptionnel, d'autant plus que nous savons que le crâne de Kay Lysse (personnage danois qui jouait un assez grand rôle dans la politique de son pays) a une capacité de 1,250°, et le crâne d'un Hongrois, étudié par Luschan, 1,195°C.

On ne peut pas dire aussi d'une manière absolue que la différence entre le volume des crânes masculins adultes les plus grands et les crânes

les plus petits tend à s'accroître chez les races civilisées. Il est vrai que M. le Dr Le Bon a trouvé chez les Parisiens modernes cette différence égale à 592, tandis que chez les Parisiens du vir siècle elle est de 472, et chez les nègres australiens 284. Mais, d'autre part, M. Mantegazza a trouvé que les crânes masculins des Papouas de la Nouvelle-Guinée présentent la différence de 1,738cc a 1,205cc, c'est-à-dire égale à 533. De même M. Metchnikoff a trouvé chez les Kalmouks la différence de 1,740cc à 1,210, c'est à-dire 539.

Enfin, on ne peut pas dire, d'une manière absolue, que la différence entre le volume du crâne masculin et féminin est beaucoup plus grande chez les nations civilisées que chez les peuples demi-sauvages. Welcker, par exemple, a trouvé (en comparant 30 crânes d'hommes avec 30 crânes de femmes; que cette différence chez les Allemands est égale, en moyenne à 148 (1,448-1,300). D'autre part, M. Mantegazza a trouvé que chez les Papouas elle est égale à 140 (1,425-1,285). Ces deux chiffres, 148 et 140, se rapprochent beaucoup, et cependant la différence dans le degré de la civilisation des deux peuples est immense.

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DISCUSSION.

M. LAGNEAU. Les crânes de la caverne de l'homme mort, qui sont assez nombreux (18) pour que leur moyenne de 1543cc88 ait une certaine valeur, montrent que des peuplades peu civilisées peuvent avoir une capacité cérébrale très-considérable, ainsi que le pense M. Anoutchine, et permettent de reconnaître en outre que la différence de capacité existant entre les deux sexes chez ces troglodytes néolithiques est minime (1): 1,6065 chez l'homme, 1,507cc0 chez la femme, différence sexuelle 99cc5.

Néanmoins la culture de l'intelligence semble favoriser le développement crânien, et principalement celui de la région antérieure. Les mensurations comparatives prises par Parchappe sur des savants et des ouvriers, par M. Broca sur des étudiants en médecine et pharmacie et des infirmiers, par MM. Lacassagne et Cliquet sur des médecins militaires et des soldats, montrent toutes un développement céphalique principalement frontal, plus considérable chez les savants, médecins, étudiants, que chez les ouvriers, infirmiers, soldats (2).

M. TOPINARD reproche à M. Anoutchine d'avoir mélangé des chiffres de cubage obtenus par des méthodes et des opérateurs différents. Les écarts qui en résultent peuvent aller, pour un même crâne, jusqu'à 100 et 125 centimètres cubes. Chacun, en effet, procède à sa façon, bourrant avec le doigt, tapant, secouant avec le doigt et la main, sans obéir à aucune règle uniforme. Les matières

(1) BROCA: Sur les crânes de la caverne de l'homme mort: Revue d'anthr., t. 11, p. ↑ à 35, 1873. (2) PARCHAPPE Rech, sur l'encéphale, 4or mém., p. 14. etc., Paris, 1836, n-8. — BROCA: Bull. de la Soc. d'anthrop., 2° série, t. VII, p. 878-896, 1872. LACASSAGNE et CLIQUET: Soc. de méd. publique Ann, d'hygiène, 2a série, t. L. p. 50-72, juillet 1878.

employées : sable, millet, graine de moutarde, plomb de divers calibres, donnent lieu aussi à des divergences, mais les écarts obtenus par des observateurs différents pour une même substance sont au moins aussi forts. Quelle que soit cette substance, les règles de son usage doivent être régularisées minutieusement, de façon à en obtenir des résultats constants. Dans l'état de la science il n'est qu'une substance, le petit plomb no 8, dont l'emploi ait ainsi été étudié et régularisé; avec celui-ci tout cubage par la méthode, les procédés et les instruments prescrits, est rigoureusement semblable à lui-même pour un même crâne quel que soit l'opérateur, en Russie, en Amérique ou en France. M. Topinard se met du reste à la disposition des membres de la section pour leur prouver ce qu'il avance. Autant tous les autres systèmes employés sont défectueux entre les mains d'opérateurs différents autant le système français est précis. En une séance il se charge de faire que chacun de ses auditeurs puisse cuber un crâne et obtenir un chiffre le même, à 5 centimètres près, pour tous. Or les écarts d'une opération à l'autre, lorsqu'on rapproche, comme l'a fait M. Anoutchine, des chiffres de diverses provenances, atteignent ceux que donnent les écarts caractéristiques entre races humaines ou entre

sexes.

M. HOVELACQUE. Il me semble impossible de ne pas admettre que, d'une façon généra e, la capacité crânienne soit un caractère de race; les tableaux comparatifs que l'on a dressés en font foi.

Au surplus, les Kalmouks ne constituent pas à proprement parler une race inférieure. Loin de là.

D'autre part, dans la capacité crânienne du Kalmouk, il y aurait à voir quelle est l'importance de la partie antérieure, quelle est l'importance de la partie postérieure.

J'ajouterai d'ailleurs qu'il n'existe pas en crâniologie une seule caracté ristique fixant par elle seule la série humaine. Plusieurs caractères importants priment celui de la capacité; par exemple, l'indice nasal.

M. Anoutchine parle de la grande capacité crânienne de plusieurs races préhistoriques. Il parle de la grande capacité de la race de Cromagnon; mais on n'a cubé qu'un ou deux crânes de cette race! M. Broca a établi, d'ailleurs, que nous ne possédions, pour l'ordinaire, que les débris des individus les plus résistants, les plus forts, les mieux doués des races préhistoriques.

En ce qui concerne la différence de capacité de sexe à sexe, que je persiste à croire plus importante dans les races supérieures que dans les races inférieures, je ferai remarquer que le fait se produit manifestement dans une seule et même race. Il y a, sous ce rapport, plus de différence entre le Français des classes instruites et la femme qu'entre les Français moins lettres et cette dernière. »

M. Gabriel de MORTILLET

Attaché au Musée des Antiquités nationales à Saint-Germain-en-Laye

PRÉSENTATION D'UN COMPTE-RENDU SUR L'OUVRAGE DE M. CHANTRE

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M. DE MORTILLET distribue un compte-rendu de l'ouvrage de M Chantre sur l'Age du Bronze, compte-rendu publié par lui dans la Revue d'Anthropologie, 1877, tome VI, page 492. Il profite de l'occasion pour faire remarquer combien les objets de l'âge de bronze découverts en France, sont nombreux et variés. Cela prouve contrairement à l'assertion de quelques archéologues, arriérés de Prusse et de France, que l'âge de bronze a bien existé dans toute l'Europe et a été de longue durée.

M. le D' MAUREL

Médecin de 1re classe de la Marine

DE LA FRÉQUENCE DE LA CARIE DENTAIRE
CONSIDÉRÉE COMME CARACTÈRE ANTHROPOLOGIQUE.

Séance du 28 août 1878.

Les résultats pleins d'intérêt des recherches du docteur Magitot sur la répartition de la carie dentaire en France m'ont depuis plusieurs années inspiré le désir de faire, pour les diverses races du globe, ce qu'il avait fait pour les deux qui se partagent le sol de notre pays. Quoique ma position de médecinn aviguant m'offrît quelques occasions de faire moi-même ces recherches, j'ai eu la pensée d'y associer un certain nombre de mes confrères et tout particulièrement mes collègues de la marine. Je dois entre autres remercier les docteurs BérangerFérand, Kermorgant et Viraben, auxquels je dois une partie des observations que je vais résumer. Mon but est loin d'être atteint, il est vrai, mais, telles qu'elles sont, ces observations m'ont paru suffisantes pour faire ressortir l'importance qu'elles peuvent avoir comme caractère anthropologique, et c'est à ce titre que j'ai cru devoir faire connaître

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