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lument simple ou absolument physique, ils ne se sont plus entendus.

Les médecins modernes, s'occupant peu de la nature intime ou du nombre des principales passions, nombre toujours arbitraire, mais envisageant plutôt leur influence sur l'organisme, ont préféré les distinguer en agréables et en pénibles; en violentes, en douces et en tristes; en persistantes ou en passagères; en expansives ou en oppressives; en excitantes ou en debilitantes, etc.

Les économistes, les considérant dans leurs rapports avec le bonheur public, ont admis des passions permises et des passions défendues, ou bien encore des passions vertueuses, vicieuses et mixtes.

La religion distingue des péchés mortels et des péchés véniels (1). Quant à la législation, elle reconnaît des contraventions, des délits et des crimes.

Dans ses considérations générales sur les sentiments moraux, le brillant et ingénieux auteur de la Physiologie des Passions, Alibert, reconnait quatre

(1) Les péchés peuvent tous se réduire à un seul, qui est l'amour désordonné de nous-mêmes. L'amour de nous, qui est bon en soi, devient, dans ses écarts, la source de toutes les infractions à la loi de Dieu. Les légères infractions constituent les péchés véniels, c'està-dire pardonnables; les infractions graves, les péchés mortels, ainsi nommés parce qu'ils ôtent à l'âme la vie de la grâce, jusqu'à ce qu'elle se soit régénérée par la pénitence et le repentir; on les appelle aussi les sept péchés capitaux (du latin caput), parce qu'ils sont les chefs, le principe, la source des autres péchés. L'orgueil, Favarice, l'envie, la colère, la paresse, sont des péchés de l'âme; la gourmandise et la luxure, des péchés du corps. La différence qu'il y a entre eux, selon saint Grégoire, c'est que les péchés de l'esprit sont plus graves, plus coupables, et que ceux de la chair por tent avec eux une plus grande infamie..

penchants innés, qu'on peut envisager comme les lois primordiales de l'économie animale, savoir: 1° l'instinct de conservation, 2o l'instinct d'imitation, 3o l'instinct de relation, 4o l'instinct de reproduction. Un savant physiologiste, M. Magendie, distingue des passions animales et des passions sociales,

M. Scipion Pinel admet des passions viscérales et des passions cérébrales; Marc les classe en innées et en factices ou acquises.

Dans un traité fort remarquable sur les Passions appliquées aux beaux-arts, M. Delestre les divise en excentriques, en concentriques et en concentrico-excentriques, suivant qu'elles agissent de dedans en dehors, de dehors en dedans, ou qu'elles participent de ces deux modes d'action.

D'après Gall, Spurzheim et d'autres phrénologistes, il y aurait autant de passions que de facultés primitives; mais ces auteurs ne sont d'accord ni sur la distinction ni sur le nombre de ces facultés. Quoi qu'il en soit, Spurzheim partage les facultés humaines en affectives et en intellectuelles; puis il subdivise ces deux ordres, le premier, en penchants et en sentiments; le second, en facultés perceptives et en facultés réflectives (1).

(1) Division topographique de Spurzheim.

ORDRE I. FACULTÉS AFFECTIVES. Genre 1. Penchants: A. Alimentivité; B. amour de la vie; 1 amativité;

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2 philogéniture;

-3 habitativité;- 4 affectionivité;- 5 combativité;—6 destructivité; 7 secrétivité; 8 acquisivité;

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Genre 2. Sentiments: 10 estime de soi;

12 circonspection; - 13 bienveillance;

9 constructivité;

11 approbativité;

14 vénération; — 15 fer

meté; — 16 conscienciosité; — 17 espérance; — 18 merveillosité;

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On a encore voulu faire admettre, 1o des instincts, comme expression de désirs matériels et organiques; 2o des passions proprement dites, correspondant à des désirs moraux indépendants de la volonté : division aussi erronée en physiologie qu'en morale, puisque toutes nos fonctions sont essentiellement solidaires, et qu'elles ne s'exercent que pour l'ensemble d'un être créé intelligent et libre.

Enfin, un célèbre utopiste de nos jours, Charles Fourier, distingue douze passions primitives, qui, d'après son système, rendent l'homme sociable, le stimulent aux belles actions, et enfantent toutes les merveilles de l'industrie. Les cinq premières, appelées sensitives, parce qu'elles proviennent de nos sens, sont plutôt matérielles que spirituelles ( la vue, l'ouïe, le goût, l'odorat, le tact): ce sont elles qui d'abord excitent l'homme au travail et à l'industrie. Quatre autres passions, au contraire, plutôt spirituelles que matérielles, forment la chaîne de tous les liens sociaux, et font vivre l'homme dans ses semblables plus qu'en lui-même : ce sont l'amour, l'amitié, l'umbition, le famillisme; les trois dernières, nommées distributives, sont la cabaliste, ou esprit de parti; la papillonne, ou besoin de variété périodique; et la composite, ainsi appelée parce qu'elle naît de l'assemblage de plusieurs plaisirs des sens et de l'âme, goûtés simultanément; elle crée l'enthousiasme, ou

ORDRE II. FACULTÉS INTELLECTUELLES. — Genre 1. Facultés perceptives: 22 individualité; - 23 configuration; 24 étendue; 25 pesanteur, résistance; - 26 coloris;-27 localité; - 28 calcul; – 29 ordre; - 30 éventualité; 33 lan31 temps; 32 tons; gage.-Genre 2. Facultés réflectives: 34 comparaison;-35 causalité.

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fougue aveugle, dans les travaux, en opposition avec la fougue réfléchie de la cabaliste, source précieuse des rivalités émulatives. L'usage des passions distributives est de faire concorder les ressorts sensuels avec les ressorts affectueux, et de servir de base à tout le mécanisme des groupes et séries passionnées. «Titrées de vices, quoique chacun en soit idolâtre, ces trois passions, selon Fourier, sont réellement des sources de vices en civilisation, où elles ne peuvent opérer que sur des familles ou corporations. Dieu les a créées pour opérer sur des séries de groupes contrastées; elles ne tendent qu'à former cet ordre, et ne peuvent produire que le mal si on les applique à un ordre différent... Lorsqu'on connaîtra en détail l'ordre social auquel Dieu nous destine, on verra que ces prétendus vices, la cabaliste, la papillonne ou alternante, la composite, y deviendront trois gages de vertu et de richesse ; que Dieu a bien su créer les passions telles que les exige l'unité sociale ; qu'il aurait tort de les changer pour complaire à Sénèque et à Platon; qu'au contraire, la raison humaine doit s'évertuer à découvrir un régime social en affinité avec ces passions. Aucune théorie morale ne les changera jamais; et, selon les règles de la dualité d'essor 27, elles interviendront à perpétuité pour nous conduire au mal dans l'état morcelé ou limbe social, et au bien dans l'état sociétaire ou travail sériaire, qui assure le plein développement des passions et de l'attraction. » Telle est la division du système passionnel de Fourier, système dont je suis loin de garantir les merveilleux résultats. (Voyez le Traité de l'Association domestique agricole.)

Après cette longue nomenclature, qui atteste les vains efforts que l'on a faits pour arriver à une classification exacte des passions, je m'abstiendrais certainement d'en présenter une nouvelle, si elle n'avait reçu l'approbation de quelques savants, et si M. Casimir Broussais ne l'avait déjà adoptée dans son Hygiène morale.

Théorie des Besoins.

Tout être organisé a des besoins l'animal et le végétal ont chacun les leurs; qui pourrait prouver que le minéral lui-même en est dépourvu? Quant à ceux de l'homme, il nous apparaissent infiniment plus nombreux que ceux des autres créatures, par cela même que son organisation résume toutes les merveilles des trois règnes. Dieu n'a rien fait d'inutile l'existence des organes annonce donc l'existence de fonctions destinées à entrer en exercice. Or, toutes les fois que nos appareils sont aptes à fonctionner, nous en sommes avertis par une certaine sensation, sorte de voix intérieure qui n'est autre chose que le besoin, le besoin, vraie puissance motrice du mécanisme individuel comme du mécanisme social. Une fois distingué par l'attention, le besoin amène bientôt le désir; le désir, la volonté, sous le contrôle de la raison; et la volonté, la passion, en l'absence ou au mépris de ce contrôle.

On peut sans doute, en thèse générale, dire que nos besoins sont bons, par cela même que Dieu nous les a donnés; mais ils ne restent tels qu'autant que nous nous bornons à en faire un bon usage, et que nous parvenons à les gouverner; autrement, ils ne

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