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pour exil. A ses yeux, les hommes étant tous frères, elle leur témoigne la même tendresse, leur donne les mêmes lois, leur promet les mêmes biens. Mais, comme d'immortelles récompenses ne sauraient être données au juste dans un monde qui passe et qui le déchire en passant, c'est dans sa véritable patrie, c'est dans le sein de Dieu qu'il goûtera un bonheur dont ses passions vaincues ne viendront plus troubler l'éternelle extase.

Pour faire arriver ses enfants à ce céleste repos, que de soins, que de secours ne va pas leur prodiguer cette mère spirituelle, dont l'affection semble croître en raison de leur faiblesse! L'homme, en effet, est à peine entré dans la vie qu'il devient l'objet de la sollicitude de la religion. Elle sait que tout fils de la femme naît impur, enclin aú mal, et, dans son inquiète prévoyance, elle se hâte de lui administrer le baptême, bain salutaire qui purifie l'âme de toute souillure originelle. L'enfant a-t-il atteint l'âge où s'acquiert la notion du bien et du' mal, elle lui fait un devoir de la confession, second baptême qui rend à l'âme l'innocence et la vigueur qu'elle peut avoir perdues. Mais cette innocence, cette vigueur, comment les conserver pendant ce dangereux pèlerinage qu'on appelle la vie? Au printemps de ses jours, le chrétien s'unira pour la première fois à son Créateur, et il trouvera dans cette union mystérieuse la force dont il a besoin pour se maintenir dans le chemin de la vertu. Un autre sacrement, en l'enflammant d'une nouvelle ardeur pour le bien, viendra encore raffermir ses pas; et, à l'aide de ces divins appuis, il pourra résister aux séduc

tions qui l'environnent. Cependant les dangers se multiplient, la route devient de plus en plus difficile, et le pauvre voyageur a déjà fait quelques chutes qui ont un peu ralenti son courage. La religion l'abandonnera-t-elle dans sa détresse? Un commandement salutaire lui prescrit de recourir à ce tribunal secret, d'où le repentir rapporte toujours et le pardon qui console et le conseil qui éclaire. Quel moyen plus efficace, quel frein plus puissant, pour contenir la violence de nos passions, que l'obligation de rendre compte de toutes nos fautes à un ministre de Dieu, tenu par devoir de diriger les âmes avec la sévérité d'un juge, unie à la tendresse d'un père et au dévouement d'un fidèle ami! Combien cette sage institution ne détourne-t-elle pas de malheureux des voies du crime (1) pour les rendre au bonheur en les rendant à la vertu! « Aussi, dit l'illustre auteur du Génie du christianisme, tous les hommes, les philosophes même, quelles qu'aient été d'ailleurs leurs opinions, ont-ils regardé le sacrement de pénitence comme l'une des plus fortes barrières contre le vice, et comme le chef-d'œuvre de la sagesse. Sans cette institution salutaire, le coupable tomberait dans le désespoir. Dans quel sein déchargerait-il le poids de son cœur? Serait-ce dans celui d'un ami? Eh! qui peut compter sur l'amitié des hommes? Prendra-t-il les déserts pour confidents? Les déserts retentissent toujours, pour le

(1) Si le secret de la confession permettait aux prètres de faire connaitre le nombre des forfaits dont ils empêchent journellement l'exécution, on verrait que ce nombre va infiniment au delà du chiffre effrayant que fournissent les statistiques de la criminalité,

crime, du bruit de ces trompettes que le parricide Néron croyait ouïr autour du tombeau de sa mère. Quand la nature et les hommes sont impitoyables, il est bien touchant de trouver un Dieu prêt à pardonner. Il n'appartenait qu'à la religion chrétienne d'avoir fait deux sœurs de l'innocence et du repentir:» Après mille traverses et mille chutes, l'homme est enfin parvenu au terme de sa course; le moment est arrivé où il va rendre compte de ses actions à celui qui sonde tous les cœurs. Comment sera-t-il jamais assez pur pour se présenter devant le miroir de l'éternelle justice? La religion, qui bénit sa naissance, vient aussi à son lit de mort adoucir les souffrances qu'il endure, et le fortifier pour le dernier combat. Les excès des passions ont-ils souillé son àme, elle n'exige de lui qu'un sincère repentir. Regrette-t-il les affections permises et les douceurs passagères qu'il laisse dans la vie, elle lui en demande le sacrifice, en expiation de ses fautes, et lui montre, en échange, d'ineffables, d'éternelles douceurs. Mère souvent offensée, mais toujours compatissante, elle dit au criminel: Espère; au juste : Voilà le ciel !

Outre les sacrements qui purifient l'âme, en même temps qu'ils diminuent les souffrances du corps (1),

(1) C'est une chose étrange que si peu de médecins emploient la religion comme auxiliaire dans le traitement des maladies! Et cependant, quand on connaît l'immense influence du moral sur le physique, il est facile d'entrevoir de quelle ressource doit être cette vraie médecine de l'âme, principalement dans beaucoup d'affections nerveuses qui résistent aux moyens thérapeutiques ordinaires. Tissot soignait, à Lausanne, une jeune dame étrangère dont il

la religion prescrit l'usage journalier de la prière, comme une armure invincible opposée aux attaques continuelles des passions. Je ne sache pas, en effet, de moyen plus propre à dissiper ces dangereux ennemis de notre repos, que cette fréquente communication de l'homme avec son Créateur.

Quand vous avez prié, dit un de nos grands écrivains, ne sentez-vous pas votre cœur plus léger, et votre âme plus contente?

« La prière rend l'affliction moins douloureuse et la joie plus pure; elle mêle à l'une je ne sais quoi de fortifiant et de doux, et à l'autre un parfum céleste.

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Que faites-vous sur la terre, et n'avez-vous rien à demander à celui qui vous y a mis?

« Vous êtes un voyageur qui cherche la patrie. Ne marchez point la tête baissée: il faut lever les yeux pour reconnaître sa route.

n'avait aucun espoir de conserver les jours. Instruite, par imprudence, du danger de sa position, et vivement tourmentée du regret de quitter sitôt la vie, la malade se livra à toute l'agitation du plus violent désespoir. Le célèbre médecin jugea que cette nouvelle secousse allait encore abréger les derniers instants de cette femme; et, selon l'usage, il avertit sa famille qu'il fallait se båter de lui faire administrer les sécours de la religion. Un prêtre est appelé ; la mourante décharge le poids de sa conscience dans le sein de ce médecin spirituel; elle reçoit avec attendrissement les paroles de clémence et de consolation qui sortent de sa bouche. Devenue plus calme, elle ne s'occupe plus que de Dieu, de ses intérêts éternels, et reçoit les sacrements avec la plus grande édification. Le lendemain matiņ, la fièvre était baissée, et les symptômes les plus alarmants entièrement dissipés firent bientôt place à ceux d'une parfaite guérison. Tissot, qui était protestant, aimait à répéter ce fait, dont les exemples ne sont pas rares, et s'écriait avec admiration: Quelle est donc la puissance de la confession chez les catholiques!

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Votre patrie, c'est le ciel; et, quand vous regardez le ciel, est-ce qu'en vous il ne se remue rien? Est-ce que nul désir ne vous presse, ou ce désir est-il muet?

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« Il passe quelquefois sur les campagnes un vent qui dessèche les plantes, et alors on voit leurs tiges flétries pencher vers la terre; mais, humectées par la rosée, elles reprennent leur fraicheur et relèvent leur tête languissante.

Il y a toujours des vents brûlants, qui passent sur l'âme de l'homme et la dessèchent; la prière est la rosée qui la rafraîchit. »

Aux sacrements et à la prière, la religion joint encore le jeûne et l'abstinence, moyens hygiéniques propres à amortir la violence de nos passions; et, dans sa profonde sagesse, elle les prescrit plus longs et plus sévères, précisément à l'époque de l'année où toute la nature est sur le point d'entrer en fermentation. La rigueur de la saison, la misère, une constitution affaiblie par l'àge, la maladie ou le travail, s'opposent-ils à ce que l'on suive le précepte, elle en dispense facilement; mais elle veut chaque cun y supplée par une aumône proportionnée à sạ fortune. C'est ainsi qu'en combattant deux vices, malheureusement si communs, l'intempérance et l'avarice, elle affaiblit l'impétuosité de la colère et les transports de l'amour, en même temps qu'elle verse le superflu du riche entre les mains du pauvre. Merveilleuse institution, qui fait expirer sur les lèvres de l'indigent le blasphème contre la Providence, et change en bénédictions les fureurs que lui eût inspirées l'envie! Les institutions humaines ont-elles

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