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l'appareil sanguin qui prédomine dans sa volcanique organisation.

Lorsque la fougue de la jeunesse, en dépensant le trop plein de la vie, a ramené la sensibilité à de justes proportions, l'on voit ordinairement arriver la prudence, comme le calme après la tempête. A cette époque d'équilibre et de maturité, les transports de l'amour sont remplacés par les délices de l'amitié; la folle prodigalité disparaît pour faire place au froid calcul: on n'obéit plus aux premières impulsions de son cœur ; on réfléchit, on évite les fausses démarches, on mûrit ses desseins, on consulte avant tout son avantage et celui d'une famille qu'il faudra bientôt établir convenablement. C'est alors que l'homme devient ambitieux: il court après la fortune, les places, les honneurs, et, pour y arriver, il ne dédaigne plus d'employer la ruse et l'intrigue. Pendant l'âge mûr, ses habitudes commencent aussi à devenir plus sédentaires; il se délasse des soucis de l'ambition par les plaisirs de la table; placé enfin entre le jeune homme et le vieillard, il blâme les prodigalités de l'un, et méprise la parcimonie de l'autre.

Cependant la froide vieillesse amène la détérioration de nos organes par l'atrophie et la solidification de nos tissus. Dans cette triste saison, dans cet hiver de la vie, les fonctions languissantes conservent à peine les forces nécessaires pour s'exercer; tous les rouages de la machine se détraquent successivement; les sensations deviennent obtuses: l'ouïe, surtout, et la vue, éprouvent une perversion qui suffit pour rendre le vieillard morose et soupçon

neux. Par un effet dû encore à l'instinct de conservation, l'infortuné, à mesure qu'il se sent dépérir, s'attache de plus en plus à la faible existence qui lui reste. Mais alors, comme les enfants et les malades, il devient égoïste; il concentre en lui presque toutes ses affections. Ce n'est pas qu'il soit tout à fait indifférent aux malheurs d'autrui; mais, par un prompt et involontaire retour sur lui-même, il les regarde comme une portion de ceux qui l'attendent encore, ou bien il s'empresse de les mettre en comparaison avec les siens, qu'il trouve beaucoup plus insupportables. Enfin, triste, souffrant, inquiet de son avenir, dominé principalement par la circonspection, il épargne, il amasse, souvent même aux dépens de ses premiers besoins, pour un temps éloigné qu'il ne verra probablement pas (1).

(1) A l'appui de ces considérations générales, voici quelques documents statistiques relatifs au nombre et à la nature des crimes produits par les différents àges.

Sur 7,462 accusés, traduits pendant l'année 1841 devant nos cours d'assises, 50 étaient âgés de plus de soixante et dix ans; 183, de soixante à soixante et dix; 401, de cinquante à soixante; 1,142, de quarante à cinquante; 1,863, de trente à quarante; 1,265, de vingt-cinq à trente; 1,195, de vingt et un à vingt-cinq; 1,294, de seize à vingt et un ans; 69 enfin n'avaient pas encore atteint leur seizième année : 5 de ces derniers comptaient de dix à douze ans; 13, de douze à quatorze; 17 étaient dans leur quinzième, et 34 dans leur seizième année.

49 des accusés âgés de moins de seize ans étaient poursuivis pour des vols qualifiés ; 10, pour des incendies; les 10 autres, pour des crimes contre les personnes.

Sur un nombre moyen de 100 hommes accusés, 19 étaient âgés de moins de vingt et un ans; sur 100 femmes, 15 seulement n'avaient pas atteint cet åge. Le nombre proportionnel des accusés

Influence des Sexes.

Quoique l'homme et la femme diffèrent autant au moral qu'au physique, cette différence n'est guère sensible pendant les dix premières années

âgés de plus de cinquante ans est le même pour les deux sexes. Il est de 8 sur 100 pour les hommes comme pour les femmes.

La proportion des accusés âgés de moins de vingt et un ans est de 18 sur 100, pour tous les accusés indistinctement; cette proportion est de 20 sur 100 pour les accusés de crimes contre les propriétés considérés isolément; pour les accusés de crimes contre les personnes, elle n'est que de 15 sur 100.

Un fait digne de remarque, c'est que les crimes contre les personnes sont proportionnellement plus fréquents parmi les accusés d'un âge avancé que parmi les jeunes gens; ainsi, sur 100 accusés âgés de plus de cinquante ans, 39 étaient poursuivis pour des crimes contre les personnes, et 61 pour des crimes contre les propriétés. Sur 100 accusés âgés de moins de vingt et un ans, on compte 26 accusés de crimes contre les personnes et 74 accusés de crimes contre les propriétés.

C'est parmi les accusés de faux témoignage, de viol et d'attentat à la pudeur sur des enfants, qu'il existe, proportion gardée, le plus grand nombre d'accusés d'un àge avancé.

La proportion des accusés mineurs de vingt et un ans, qui est de 18 sur 100 pour tout le royaume, s'élève à 32 sur 100 dans le Loiret, à 0,28 dans les départements de la Seine et du Var, à 0,27 dans celui de Vaucluse, à 0,26 dans la Haute-Garonne et dans Illeet-Vilaine, à 0,25 dans la Marne.

C'est aussi dans ces départements que le nombre proportionnel des accusés àgés de plus de cinquante ans est le moins élevé. Ce nombre, qui est de 8 sur 100, pour tout le royaume, n'est que de 0,04 dans les départements de la Seine, d'Ille-et-Vilaine, de la Haute-Garonne et de la Marne.

Sur les 2,814 suicides constatés pendant cette même année, 148 suicidés étaient mineurs de vingt et un ans, 192 avaient de soixante et dix à quatre-vingts ans, et 49 étaient octogénaires. Parmi les mi

de la vie. Tous deux éprouvent alors les mêmes besoins, partagent la même ardeur pour les jeux de leur âge; tous deux ont encore la même mollesse de tissus, la même souplesse de membres, la même allure, le même timbre de voix. Si pourtant on les observe avec attention, on trouve le petit garçon plus vif, plus turbulent, plus destructeur, plus entier dans ses volontés; la petite fille plus douce, plus timide, et déjà plus coquette. Le premier, sollicité en quelque sorte par l'instinct du combat, marche avec plus d'assurance, brandissant fièrement son sabre, ou faisant résonner son tambour; la dernière, comme si elle éprouvait un avant-goût de l'amour maternel, prélude aux douces fonctions qu'elle est destinée à remplir, en habillant avec art sa poupée chérie, objet de ses plus tendres soins. On dirait que, dès cet âge, se partageant l'empire du monde, l'homme se réserve la force et la gloire, et laisse à la femme la faiblesse et l'amour.

A l'époque de la puberté, qui est partout plus précoce chez la femme que chez l'homme, celui-ci se fait bientôt distinguer par une structure carrée, des muscles saillants et vigoureux, une peau rude et velue, une voix grave et forte. La femme, au contraire, cet être délicat, conserve toujours quelque chose de la constitution propre aux enfants: ses membres perdent peu de leur mollesse primi

neurs, on trouve 1 enfant de neuf ans, 1 de dix, 7 de treize, 6 de quatorze, et 6 de quinze.

(Voir le Compte général de l'administration de la justice criminelle en France pendant l'année 1841.)

tive; sa peau reste lisse et transparente; un tissu cellulaire abondant vient arrondir plus gracieusement ses formes; un sang riche circule plus activement en elle; ses nerfs sont plus gros, mais moins fermes que ceux de l'homme; son système locomoteur est aussi moins développé, son appareil digestif moins volumineux et moins irritable. Cette différence dans la constitution répond exactement à celle que l'on trouve dans les attributs moraux des deux sexes: ainsi, généralement parlant, l'homme résiste mieux à la fatigue; la femme supporte mieux la douleur. N'était-il pas juste que, née pour souffrir davantage, elle s'accoutumât plus facilement à la souffrance? Les petites peines, les contrariétés même l'irritent, il est vrai; mais les grands chagrins la trouvent presque toujours plus énergique que l'homme. Les passions, portées à l'extrême, sont encore plus délirantes chez la femme que chez l'homme, parce que l'homme vit davantage sous l'influence de son cerveau, et par conséquent de sa volonté; la femme, sous l'influence du système nerveux ganglionaire, c'est-à-dire sous la prédominance du sentiment, qui ne raisonne pas. D'un autre côté, l'homme est intrépide, libéral, persévérant; la femme, craintive, économe, capricieuse. Confiant dans sa force, l'homme est franc, impérieux et violent; la femme est artificieuse, parce qu'elle sent sa faiblesse; curieuse, parce qu'elle craint toujours; coquette, parce qu'elle a aussi besoin de subjuguer elle attaque avec ses charmes, elle se défend avec ses pleurs. La passion dominante dans l'homme, c'est l'ambition; dans la femme, c'est

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