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En effet, il y a une très-grande différence entre la mort civile perpétuelle et l'interdiction légale.

La mort civile perpétuelle enlève au condamné tous ses droits civils: ce genre de mort est l'image de la mort naturelle; car, dans cet état, il est hors de la société dont il faisait partie. Dans l'interdiction légale, le condamné est privé de ses droits civils pendant la durée de sa peine, mais il conserve l'espoir de survivre à son châtiment et de rentrer dans la jouissance et la possession de tous ses biens; et, en supposant qu'il mourût dans les liens de son interdiction légale, ses héritiers lui succèdent comme dans l'état civil ordinaire. Sous ce double rapport, il est juste que la famille ait le droit de veiller à la conservation de ses biens, et de lui nommer elle-même à cet effet un curateur pourvu de sa confiance.

Ainsi les fonctions de ce curateur ou tuteur, à l'égard des biens du condamné à l'interdiction légale temporaire, sont done absolument les mêmes que celles du tuteur nommé à l'interdiction d'une personne en démence (1). Ce curateur n'a d'autres règles à suivre dans son administration que celles qui sont développées dans la section 6 du chapitre 13. Il peut contester tous les actes qui n'ont pas date certaine, surtout s'il apparaît d'ailleurs qu'ils ont été souscrits depuis la condamnation. C'est en vain qu'on objecterait que le curateur, représentant le condamné, ne peut pas plus que lui-même désavouer la date de ses propres écrits ; on répondrait avec raison que le curateur est le représentant de la famille du condamné comme du condamné lui-même, et qu'en cette qualité il a toute capacité pour rejeter des actes qui font un préjudice à son interdiction légale. (Arrêt de la Cour de cass. du 22 mars 1825.)

Mais, sous le rapport de la person

fets de ce genre d'interdiction et les effet de l'interdiction légale d'un condamné.

(1) Le nouvel article 29 du Code pénal

ne, la différence est considérable; car, dans l'interdiction mentale, le tuteur doit prendre soin de la personne de l'interdit, tandis que dans l'autre le curateur ou tuteur ne peut lui donner aucun soin, à raison de ses fonctions; tout au plus il peut communiquer avec lui pour obtenir les renseignemens dont il a besoin sur sa famille et sur ses biens; et même, d'après la disposition de l'article 31 du Code pénal, il ne peut, pendant la durée de sa peine, lui remettre aucune somme, aucune provision, aucune portion de ses revenus.

Aucune somme, aucune provision, aucune portion de ses revenus ! Mais cette prohibition comprend-elle la défense de lui donner des alimens ? Nous avons lieu d'en douter (C. civ., 25) Nous l'avons déjà dit, la loi punit, mais elle n'étouffe pas les sentimens de la nature; elle ne fait pas cesser l'obligation de fournir des alimens à celui qui est mort civilement.....

Ainsi tout curateur ou tuteur, nommé à l'interdiction légale d'un condamné à une peine temporaire, peut toujours, de l'avis du conseil de famille, lui fournir des alimens. Le condamné libéré ne serait pas fondé à rejeter du compte de son curateur ou tuteur les dépenses qu'il aurait faites pour cet objet, surtout quand il est démontré qu'elles lui ont été utiles ou qu'il en a profité (Argument de l'art. 1312 du Code civil). L'incapacité n'est pas la sauvegarde de l'injustice!

Voyez le chapitre 72, sur l'interdiction légale.

SECTION III.

Carateur ou tuteur à l'interdiction légale temporaire d'un mineur qui était alors pourvu d'un tuteur.

38. La tutelle de la minorité ne tient pas lieu, de plein droit, de la curatelle

portant qu'il sera nommé à ce condamné un tuteur et un subrogé-tuteur pour gérer et administrer ses biens, dans les formes prescri

ou tutelle à l'interdiction légale du mineur condamné à une peine afflictive ou infamante emportant temporairement privation des droits civils. Ce changement d'état change l'état de l'administration de sa personne et de ses biens. Il n'y a pas, comme dans la minorité, un tuteur pour protéger sa personne ; il n'a qu'un curateur ou tuteur pour prendre soin de ses biens.

Les pères et mères ne sont jamais curateurs ou tuteurs de droit à l'interdiction légale de leurs enfans mineurs condamnés à une peine afflictive ou infamante emportant interdiction légale temporaire. Le curateur ou tuteur à cette interdiction légale doit, dans tous les cas, être nommé par le conseil de famille aussitôt après l'exécution de la condamnation.

39. Le tuteur du mineur condamné, dont les attributions de la tutelle ont cessé au moment même de l'exécution, continue l'administration des affaires de la tutelle jusqu'à l'entrée en fonctions du curateur ou tuteur, auquel il doit rendre compte de sa gestion en présence du subrogé-tuteur

Si le tuteur est nommé lui-même à cette commission, il doit présenter au conseil de famille le compte sommaire de sa gestion, afin de donner au conseil le moyen de se fixer sur l'administration des biens du condamné

Voy.ceque nous avons dit sur les peines encourues par les mineurs, ch. 63.

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41. Le contumax, ayant cinq ans pour purger sa condamnation à la mort civile, est considéré, à l'égard de ses biens, pendant ce délai de grâce, comme un absent qui a disparu sans donner de ses nouvelles. C'est pour cette raison que la loi elle-même le considère comme un absent; car, dit l'article 28 du Code civil: « Les condamnés par contumace seront pendant les cinq ans, ou jusqu'à ce qu'ils se représentent ou qu'ils soient arrêtés pendant ce délai, privés de l'exercice des droits civils.

« Leurs biens seront administrés et leurs droits exercés de même que ceux des absens.»

Ce que les auteurs du Code civil ont d'abord si largement indiqué sur l'administration des biens de ces sortes de condamnés, ceux du Code d'instruction criminelle l'ont déterminé d'une manière précise, en disant, par l'artiele 471, « que si le contumax est condamné, ses biens seront administrés et régis comme biens d'absent, et le compte du séquestre sera rendu à qui il appartiendra, après que la condamnation sera devenue irrévocable par l'expiration du délai donné pour purger la contu

mace. >>>

Ainsi, en considérant que les biens des contumax doivent être administrés et régis de même que ceux des absens, il n'est pas permis de douter, à moins que de fermer les yeux à la lumière de ces principes, que le curateur chargé de cette administration doit être nommé par l'autorité judiciaire, par le tribunal du domicile de droit du condamné, comme en matière d'absence, quand il s'agit de nommer un curateur à l'individu présumé absent, pour régir et administrer ses biens, conformément à la disposition de l'article 112 du Code civil.

Cependant, par une erreur échappée à l'observation de l'article 28 du Code

la question de savoir si ce genre de curateur ou tuteur devait être nommé par le tribunal ou par le conseil de famille.

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Voyez surtout l'arrêt de la Cour de Caen du 3 mars 1828; j. du 19e siècle 1830, 2o, pag. 134.

Ainsi, dans toute administration des biens des condamnés par contumace, on pourvoit à la nomination d'un curateur, devant le tribunal du domicile du condamné, de la même manière que cela se pratique à l'égard des absens. Voyez Curateur à l'absent, section 1. 42. Lorsque le condamné se présen tera volontairement dans les cinq années, à compter du jour de l'exécution, ou lorsqu'il aura été saisi et constitué prisonnier dans ce délai, dit l'article 29 du Code civil, le jugement sera anéanti de plein droit;

L'accusé sera remis en possession de ses biens;

Il sera jugé de nouveau ; et si, par ce nouveau jugement, il est condamné à la même peine, ou à une peine différente emportant également la mort civile. elle n'aura lieu qu'à compter de l'exécution du second jugement. »

Si l'on exécutait cette disposition du Code civil à la lettre, il semble que, dans le cas où le condamné se présente volontairement dans le délai de cinq ans, fixé par l'article 29 ou dans le cas où il a été saisi et constitué prisonnier dans ce délai, le condamné ait le droit de demander à son curateur le compte de son administration, et que celui-ci n'ait aucun motif pour s'y refuser; car, dit cette disposition, l'accusé sera remis en possession de ses biens.

Dans le sens littéral de cette disposition, dès que le condamné par contu

mace a été remis en possession de ses biens, il a le droit de demander à son curateur le compte de sa gestion, de régir lui-même ses biens jusqu'à l'exécution du second jugement, de les vendre, de les aliéner de la même manière que s'il n'était pas sous le coup d'une accusation. Mais les auteurs du Code d'instruction criminelle, ayant prévu l'abus que l'accusé pourrait faire de ses biens dans l'intervalle de ce délai au second jugement, ont détruit cette règle par une autre : ils ont dit, par l'article 471 de ce Code, que les biens du contumax seront, à partir de l'exécution de l'arrêt, considérés comme les biens de l'absent; et par suite de cette disposition, ils ont mis ses biens sous le séquestre. en déclarant que le compte de ce séquestre ne sera rendu à qui il appartiendra qu'après que la condamnation sera devenue irrévocable par l'expiration du délai donné à l'accusé pour purger la contumace.

Ainsi, avant la Charte, le curateur au contumax ne pouvait rendre son compte à qui de droit qu'après ce délai : à ses héritiers, s'il avait été condamné à une peine emportant mort civile; ou à la régie, si la condamnation emportait confiscation de ses biens; mais l'anticle 66 de cette constitution ayant aboli le droit odieux de la confiscation, le curateur n'est plus, à proprement dire, que le séquestre dans l'intérêt du coutumax ou de ses héritiers présomptifs. La condamnation à la mort civile étant devenue définitive par l'expiration du délai donné à l'accusé pour purger la contumace, le curateur ne doit rendre son compte qu'aux héritiers du contumax.

43. Durant le séquestre, porte l'article 475 du Code d'instruction criminelle, « il peut être accordé des secours à la femme, aux enfans, au père ou à la mère de l'accusé, s'ils sont dans le besoin. Ces secours seront réglés par l'autorité administrative »

La revocation de la confiscation ayant fait cesser l'attribution des biens aux domaines de l'état, l'autorité admi

nistrative est sans intérêt pour régler les secours dont parle cet article 475; et cette disposition est même sans objet depuis la cessation de l'intérêt de l'état. Ainsi tous les droits de la femme, des enfans, du père ou de la mère de l'accusé, doivent être réglés de la même manière que si celui-ci était simplement absent.

SECTION V.

Du curateur à la mémoire d'un condamné, ou à la révision de la condamnation d'une personne morte depuis cette condamnation.

44. Lorsqu'il y a lieu de réviser une

condamnation pour les causes exprimées en l'article 444 du Code d'instruction criminelle, c'est-à-dire pour homicide dans les cas prévus par l'article 447 du même Code, la Cour de cassation doit créer un curatèur à la mémoire do l'individu mort depuis la condamnation.

A la Cour de cassation seule appartient le choix de ce curateur.

45. L'instruction de la révision du procès criminel commence et se poursuit avec ce curateur, qui représente le condamné, et propose les moyens de sa jutification, de la même manière que si celui-ci était existant.

CHAPITRE III.

De la Naissance, des Prénoms et des Noms dans leur rapport avec la Minorité.

46. La naissance est l'instant où l'homme a respiré pour la première fois. D'après cette règle, l'enfant n'acquiert en naissant ses droits civils qu'autant qu'il est né vivant et viable, car s'il est né mort, ou s'il est né vivant mais non viable, il est réputé n'avoir jamais vécu et comme tel il est incapable de succéder, et de transmettre des droits qu'il n'a jamais eus. ( Code ci vil, 725.)

Voilà la règle positive du droit civil; mais dans les écarts de la nature, est-on toujours certain de reconnaître ce signe de la vie, ainsi que la viabilité néces saire pour constituer l'état civil d'un enfant né vivant? La réponse à ces deux questions fait le sujet des sections 5 et 6 du chapitre 8 de ce traité. Dans celui-ci nous n'expliquerons que les règles relatives aux actes de naissance dont parle

le second chapitre du titre 2 du livre 1or du Code civil.

47. Suivant les articles 55 et 56, les déclarations de naissance doivent être faites, dans les trois jours de l'accouchement, à l'officier de l'état civil du lieu, par le père, ou, à défaut du père, par les docteurs en médecine ou en chirurgie, sages-femmes. officiers de santé ou autres personnes qui ont assisté à l'accouchement; et, lorsque la mère est accouchée hors de son domicile, par la personne chez qui elle est accouchée.

L'enfant doit être présenté à l'officier de l'état civil dans les trois jours de la naissance, lequel doit de suite rédiger l'acte de naissance en présence de deux témoins.

48. Lorsque la naissance de l'enfant n'a pas été inscrite sur les registres des naissances, si on le présente sans vie à

l'officier de l'état civil, celui-ci ne doit pas exprimer qu'il est décédé : il doit déclarer sur les registres des décès qu'on le lui a présenté sans vie.

Cet acte, quoique porté sur les registres des décès, ne préjuge rien sur la question de viabilité ou d'inviabilité. Voyez chapitre 8, section 5, ce qu'on entend par l'expression d'enfant né viable.

49. L'article 57 veut que l'acte de naissance énonce le jour, l'heure et le lieu de la naissance, le sexe de l'enfant, et les prénoms qui lui seront donnés. Les prénoms, noms, profession et domicile des père et mère, et ceux des témoins. (1)

50. On a jugé avec raison que, lors que la déclaration de naissance n'a pas été faite dans les trois jours, suivant l'article 55, cette déclaration ne peut plus être reçue par l'officier de l'état civil qu'en vertu d'un jugement ordonnant la réparation de l'omission. La règle est sévère, mais, outre qu'elle est nécessaire pour la conservation de l'état des personnes, elle est conforme aux dispositions du Code pénal sur cette matière.

51. L'article 346 du Code pénal exige que la déclaration de la naissance d'un enfant soit faite dans le délai de trois jours, sous peine d'un emprisonnement de 6 jours à 6 mois, et d'une amende de 16 fr. à 300 fr. Cependant si quelques circonstances avaient mis la personne tenue de faire cette déclaration dans l'impossibilité de la faire dans ce délai de rigueur, devrait-on lui infliger cette peine correctionnelle? Nous ne le pensons pas. Les lois n'ordonnent que Ja punition des crimes, des délits, ou des contraventions, que lorsqu'ils ont eu lieu par la volonté, le refus ou la négligence de celui auquel on les impute. On n'est pas responsable du mal qu'on n'a pu prévenir ou empêcher, parce que, suivant la maxime, impossibilium nulla est obligatio, personne

(1) Sur les conséquences de l'état civil qui résultent des déclarations de la naissance des

n'est obligé à faire ce que certaines circonstances rendent impossible. Voyez ce que nous avons dit sur la disposition de l'article 346 du Code pénal, au chapitre 65, section 4.

52. Les déclarations de naissance à l'armée doivent être faites (art. 92) dans les dix jours qui suivent l'accouchement. Et l'officier chargé de la tenue du registre de l'état civil doit, dans les dix jours qui suivent l'inscription d'un acte de naissance sur ce registre, en adresser un extrait à l'officier de l'état civil du dernier domicile du père de l'enfant, ou de la mère, si le père est inconnu. ( C. civ. 93. )

Les peines portées par l'article 346 du Code pénal contre le défaut de dé claration de la naissance d'un enfant dans le délai de trois jours prescrit par l'article 55 du Code civil, sont aussi ap plicables au défaut de déclaration dont parle l'article 92 du même Code.

Voyez ce que nous avons dit sur les devoirs de la personne qui a trouvé un enfant nouveau né, chapitre 15, section 14.

Après avoir expliqué les règles de droit sur le mode des déclarations de la naissance des enfans et sur la forme de l'acte qui constitue leur état civil, nous allons examiner celles qui sont relatives aux noms et prénoms dans leur rapport avec la minorité.

Des prénoms et des noms.

53. On s'attend bien que nous n'avons pas l'intention de présenter l'état de notre législation ancienne et mo derne sur cette matière. Nous n'en parlons dans ce traité que parce que plusieurs articles de nos lois modernes prescrivent des formalités nécessaires lorsqu'il s'agit de la rectification des noms et prénoms des mineurs.

L'une de ces lois relative au change ment de prénoms et de noms est du 4 germinal an 11, correspondant au 1er avril 1803.

enfans, il faut voir ce que nous avons dit, au chapitre 8, sur la filiation.

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