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nécessité de passer un acte dans son intérêt personnel, doit aussi présenter requête à cet effet au président du tribunal, qui ordonne la communication au ministère public, et commet, par la même ordonnance, un juge pour faire son rapport sur cette demande à jour indiqué. C. civ, 222; C. proc., civ., 863, 864. Si le tribunal l'autorise à la poursuite de ses droits, nous pensons que la femme mineure, privée d'appui par l'interdiction ou par l'absence de son mari, doit être assistée d'un curateur ad hoc, qui lui sera nommé par le tribunal. En consultant le vœu de la loi sur la minorité, on ne peut douter du principe qui veut que le mineur ait un protecteur spécial pour l'assister et le diriger dans toutes les actions où il a besoin de conseil et d'appui.

Ce que nous avons dit au chap. 49, sur l'Expropriation pour la nomination d'un tuteur ad hoc par le tribunal, suivant l'article 2208, lorsqu'il s'agit de Ja minorité du mari et de la femme, ou lorsque le mari majeur refuse de procéder avec elle, il faut également le dire dans cette circonstance : l'idée qu'on attache à la première situation, ne diffère pas de celle qu'on peut concevoir de la seconde.

Peut-être objectera-t-on que le ministère public est présent dans toutes les causes où il y a une personne incapable de contracter, que la justice qui l'autorise à la poursuite de ses droits veille à ses intérêts; qu'ainsi, la formalité que nous exigeons est du moins superflue. Nous l'avons déjà dit, on reconnaît le caractère souverainement avantageux aux mineurs dans la protection du ministère public et dans l'œil vigilant de la justice; mais autre chose est le pouvoir de veiller aux intérêts d'un incapable dans la formation d'un jugement, ou d'y prendre une part active: le ministère public et la justice elle-même ne découvrent pas toujours le précipice dans lequel on veut entraîner celui qui ne connaît pas le danger d'entrer seul dans un élément où le moindre écueil peut lui ravir l'honneur et ses biens.

Supposez qu'un mineur soit pourvu d'un tuteur, que celui-ci soit présumé absent et que le mineur soit dans la nécessité d'agir en justice en demandant ou en défendant. Dans cette occurrence, que doit faire la justice? Elle doit ordonner qu'il sera nommé par le conseil de famille un tuteur ad hoc provisoire au mineur.

Ainsi, dans le cas où il y a interdiction ou présomption d'absence, ou absence déclarée du mari, (art. 222 du C. civ.) si la femme mariée est mineure, et si elle est dans la nécessité d'agir en justice, ou de faire un acte dans son intérêt personnel, il y a parité de raison pour lui nommer un curateur ad hoc, à l'effet de l'assister dans toutes les actions judiciaires et dans les actes qu'elle ne peut contracter sans autorisation.

1406. Lorsque la femme est interdite, le mari cesse d'avoir son autorité maritale sur elle: le pouvoir tutélaire remplace le pouvoir marital. On représente la personne qui est dans les liens de l'interdiction, et l'on agit pour elle et dans son intérêt, mais on ne l'autorise pas. Ainsi, lorsque le mari a perdu la tutelle de sa femme interdite, le tuteur qui le remplace n'a pas besoin de l'autorisation du mari ou de celle de la justice pour ester en jugement au nom de la femme interdite, il suffit qu'il soit autorisé par le conseil de famille dans les actions où cette autorisation est prescrite par la loi. V. chap. 19, sur l'Interdiction, ge sect., § Prodigue, ce que nous disons de l'autorisation de la femme dont le mari est pourvu d'un conseil judiciaire.

1407. EN DÉFENDANT on ne peut appeler la femme mariée majeure ou mineure devant la juridiction civile et de commerce, sans y appeler aussi son mari pour la validité de la demande qu'on dirige contre elle. Si le mari ne comparaît pas, le tribunal, saisi de l'action, considère son défaut de paraître comme un refus; et, suivant l'article 218 du Code civil, il donne à la femme toute autorisation utile et nécessaire pour se défendre sur la demande qu'on

a formée contre elle. Le jugement qui intervient en présence du mari qui fait défaut, est aussi valable que s'il eut, par son assistance dans toutes les formalités de la cause, couvert son épouse de sa protection maritale. (Art. 213 du C. civ.) 1408. Il y a une très-grande différence entre la circonstance de la présomption d'absence du mari et celle où il fait défaut de paraître en justice pour autoriser ou pour assister sa femme. Dans la première, le curateur ad hoc représente le mari ; et dans l'autre, le défaut qu'il fait en justice équivaut à une déclaration tacite, qu'il ne veut ni assister ni autoriser sa femme dans l'action qu'on dirige personnelle ment contre elle, laissant ainsi à la justice le pouvoir de l'assister et de l'autoriser elle-même, pour ne point s'exposer à quelques pertes ou garanties envers sa femme.

S III. De la femme mineure sous la puissance de son mari mineur (1).

1409. La considération du mariage est si grande que d'un enfant elle en fait une personne raisonnable, et capable d'administrer ses biens et ceux de son épouse, suivant les règles de l'émancipation.

Le mineur marié peut donc contracter et s'obliger personnellement pour tous les actes qui ne sont que de pure administration de ses biens et de ceux de son épouse sans espérance de restitution, si ce n'est dans tous les actes où le mineur lui-même est restituable. 481 et 1428.

Le droit de la puissance maritale, qui est indépendant de la majorité ou de la minorité, confère au mineur marié le pouvoir d'autoriser sa femme majeure ou mineure à faire tous actes qui sont sous l'influence de son administration de mineur émancipé.

(1) L'ordre de ce chapitre sur la procédure civile et l'idée d'épargner aux personnes les plus occupées le temps qu'elles passent aux recherches, en allant d'une chose à l'autre, pour former leur opinion, m'ont déterminé à

Toutefois, le mineur marié ne peut aliéner, ni hypothèquer ses immeubles, ni ceux de son épouse, sans une nécessité évidente, et sans l'autorisation du conseil de famille et de la justice, lorsqu'elle est requise. Il ne peut accepter une donation sans l'assistance de son curateur; même il ne peut intenter une action immobilière, ni y défendre, ni recevoir et donner décharge d'un capital mobilier, sans l'assistance de son curateur chargé d'en surveiller l'emploi. 482, 934, 2208.

1410. Du principe que celui qui est incapable de contracter ne peut conférer à un autre une capacité qu'il n'a pas, il suit que le mari mineur ne peut autoriser sa femme, même majeure, à accepter ni succession ni donation, à contracter des obligations sur ses biens par hypothèque ou autrement, à vendre ses immeubles, à poursuivre en justice toute expropriation forcée d'immeubles affectés à la garantie de sa créance personnelle, même pour défendre à l'expropriation forcée de ses propres immeubles, sans l'autorisation de la justice, et quelquefois encore sans l'assistance d'un tuteur ad hoc. Car, dans tous ces cas, et dans tous ceux de cette nature, <«< si le mari est mineur, porte l'article » 224, l'autorisation du juge est né» cessaire, soit pour ester en jugement, » soit pour contracter. » Le mari mineur ne peut donc transmettre à sa femme que la capacité que lui donne son état de mari mineur émancipé, celle de faire tous les actes qui ne sont que de pure administration. L'article 2208 confirme cet argument. Ainsi, la disposition des articles 218 et 219 du Code civil n'est point applicable au cas où la femme mariée est mineure

1411. Sa qualité de mari mineur émancipé ne lui confère pas la faculté de faire un acte que son incapacité lui refuse. La femme mineure ne peut avoir

répéter ici ce que j'ai déjà dit sur l'émancipation par mariage. Ainsi je prends sur mon compte la critique que je fais moi-même des répétitions qui déparent l'ouvrage du plus grand intérêt.

le droit d'exiger de son mari une autorisation qu'il est incapable de transmettre. Mais dans le cas de minorité du mari et de la femme, celle-ci peut s'adresser à la justice pour obtenir l'autorisation d'ester en jugement, et de faire les actes nécessaires à la conserva

tion de ses droits et à la prospérité de sa fortune. Toutefois, cette demande à la justice ne pourra être faite qu'en présence du mari mineur. Il n'a pas la capacité de conférer l'autorisation exigée par la loi; mais la capacité qu'il tient de la puissance maritale, lui donne le droit d'assister dans toutes les actions de son épouse.

1412. Cependant si la femme, même mineure, est séparée de biens, ou si elle est mariée sous le régime dotal, elle peut recevoir le revenu de ses biens paraphernaux, et en donner valablement quittance. Elle peut passer des baux dont la durée n'excède pas neuf ans, et faire tous actes de cette nature, et les actes conservatoires qui n'excèdent pas les bornes de l'administration d'un mineur émancipé : elle n'a besoin ni de l'autorisation de son mari ni de celle de la justice : émancipée par le mariage, elle tient cette autorisation de la loi. 481, 449 et 1576 combinés.

SIV. Nullité résultant du défaut d'au

torisation.

1413. La nullité fondée sur le défaut d'autorisation, suivant l'article 225, ne peut être opposée que par la

(1) Le défaut d'autorisation pour ester en justice, peut être opposé pour la première fois en cause d'appel, par la femme mariée qui, assignée comme célibataire, a plaidé en cette qualité devant le premier juge.

femme, par le mari, ou leurs héritiers. (1) Ainsi, d'après ce principe que nous avons développé dans le chapitre 26, tous ceux qui ont contracté avec une femme majeure ou mineure, en puissance de mari, ne peuvent lui opposer son incapacité pour se délier de leurs engagemens, et cependant ils sont sous le coup de la nullité que la loi dispose dans l'intérêt de la restitution légale en faveur des incapables. Arrêt de la Cour de cassation, du 28 mai 1823; Dalloz, t. 15, p. 91; Sirey, t. 24, page 7.

1414. Suivant ce principe, le donateur ne peut attaquer la donation faite à une femme qui l'a acceptée sans autorisation de son mari la femme non autorisée aurait seule le droit d'opposer ce défaut d'autorisation au donateur. Argument des articles 225 et 1125. V. sect. 6 du chap. 32.

SV. De la Ratification.

1415. Tout acte contracté par la femme mineure sans autorisation légale, peut être ratifié pendant le mariage, soit par la femme devenue majeure avec l'autorisation de son mari majeur ou de la justice, soit par elle-même après la dissolution du mariage, ou par les héritiers majeurs.

Le mari ne pourrait faire cette ratification pendant le mariage, sans le concours et le consentement exprès de la femme. V., surJa Ratification, le $ 5 du chap. 32.

La notification du jugement rendu contre elle en la même qualité, n'a pas fait courir le délai d'appel.-Liège, 24 déc. 1828. Jur. de B. 1829. 2. 413, L. cass. 16 déc. 1829. Jur. 19o s. 1831.3. 99. Dalloz, t. 19. p 305 et 346.

CHAPITRE LII.

De la Conciliation.

1416. Toute demande principale introductive d'instance entre parties capables de transiger (article 48 du Code de proc.), et sur des objets qui peuvent être la matière d'une transaction, ne

peut être reçue dans les tribunaux que le défendeur n'ait été préalablement appelé en conciliation devant le juge de paix, ou que les parties n'aient comparu volontairement devant ce magistrat.

Mais, suivant les nos 6 et 7 de l'article 49 de ce Code, sont dispensés des préliminaires de la conciliation, les mineurs, les interdits, les curateurs aux successions vacantes, les actions en matière de tutelles et curatelles, et enfin toutes les causes exceptées par les lois.

Pour donner une juste idée ce cette exception, nous dirons qu'en général toutes les affaires qui intéressent des personnes incapables de contracter et de transiger sont dispensées du préliminaire de la conciliation, soit en demandant, soit en défendant.

Ainsi l'action dirigée contre un tutueur du chef d'un mineur est dispensée de la conciliation, par la raison que le tuteur ne peut transiger pour son pupille sur l'objet de la demande, à moins qu'il n'y soit autorisé par le conseil de famille; mais, dans ce cas encore, la transaction ne peut être reçue que par le tribunal, et non par le juge de paix. V. sur la transaction le chap. 45; sur l'homologation, la sect. 6 du chap. 12, et sur le ministère public, le chap. 53.

1417. La demande qui intéresse la reddition du compte de tutelle, soit que le mineur devenu majeur la dirige contre son tuteur, soit que celui-ci la

forme contre son pupille, est dispensée du préliminaire de conciliation. Nous l'avons déjà dit, les personnes qui sont incapables de transiger sont incapables de se concilier. Or le mineur, quoique devenu majeur, ne pouvant transiger avec son tuteur (art. 472) que dix jours après la reddition du compte de tutelle, ne peut se concilier avant la reddition détaillée de ce compte et la remise des pièces justificatives, selon la forme indiquée par cet article.

Mais cette dispense du préliminaire de conciliation, ne s'applique pas à l'action en reddition de compte formée par le tuteur contre un tiers auquel il a donné mandat de toucher une somme due au mineur.

1418. Le second alinéa de l'art. 883 du Code de procédure autorise les tuteur, subrogé-tuteur ou curateur, même les membres du conseil de famille, à se pourvoir contre une délibération de famille dont l'avis n'est pas unanime, et à former leur demande contre les membres qui ont été d'avis de la délibération, sans qu'il soit nécessaire d'appe ler en conciliation.

Nous pensons que le législateur aurait pu se dispenser d'insérer dans cet article l'exception du préliminaire de conciliation. Plus on excepte inutilement ce qui est compris dans une règle générale, plus on affaiblit sa disposi tion, plus on donne accès à l'interprétation. La règle tracée par l'article 49 du Code de procédure, qui excepte de la conciliation toutes les causes qui inté ressent les mineurs, est si bien sentie,

qu'il est superflu et même inutile d'énumérer le plus grand nombre de celles qui sont dispensées de cette formalité.

1419. Dans une affaire où il y avait trois parties dont deux majeures avaiant des intérêts distincts de ceux des mineurs, la Cour de cassation, par son arrêt du 30 mai 1814, a décidé que dans cette situation les deux parties majeures, capables de transiger, n'étaient pas, aux termes de l'article 48 du Code de procédure, dispensées du préliminaire de la

conciliation; que l'état de minorité des autres parties n'était pas un obstacle à cette tentative de conciliation.

1420. Lorsque dans le doute il arrive qu'on fait procéder l'action qui intéresse un mineur de l'épreuve de la conciliation, la citation et le procès-verbal sont seulement surabondans : l'assignation, après cette formalité, n'en serait pas moins valable et aussi bonne que si le préliminaire de la conciliation n'eût point existé.

CHAPITRE LIII.

Du Ministère public: des Affaires sujettes à communication (1).

1421. Le ministère public est dans les tribunaux l'œil du Roi, la sentinelle qui veille à la sûreté publique et à ce quela justice,soit rendue dans le ressort où il exerce ses fonctions, le vengeur du crime et l'appui du malheureux, le magistrat chargé de l'exécution des lois, des réglemens, des jugemens et arrêts qui intéressent l'ordre public; le protecteur des mineurs, des interdits, et en général de tous ceux qui sont incapables de contracter.

Nous avons une loi admirable, dit Montesquieu; c'est celle qui veut que le principe, établi pour faire exécuter les lois, propose un officier dans chaque tribunal pour poursuivre en son nom tous les crimes, de sorte que la fonction des délateurs est inconnue parmi nous; et si ce vengeur public était soupçonné d'abuser de son ministère,

(1) Par l'expression de ministère public, on comprend le procureur-général, l'avocat général, le procureur du Roi et le substitut.

on l'obligerait de nommer son dénonciateur.

1422. Le ministère public est indépendant de la censure des tribunaux auxquels il est attaché. Cour de cassation, 6 octobre 1791; Denevers, t. 1, page 3.

1423. La délibération des conseils de famille, sujette à l'homologation des tribunaux, doit être préalablement communiquée au ministère public.

1424. Dans toutes les affaires judiciaires où les mineurs, les interdits, et en général où les incapables de contracter sont intéressés, les pièces qui y sont relatives sont sujettes à la communication du ministère public. C. de proc. civ., art. 83. Cette formalité est applicable aux mineurs, même en matière d'expropriation. Cassation, 30 octobre 1811; Sirey, 1812, p. 93.

Dans toutes les causes de ce genre, même dans les causes qui intéressent personnellement les femmes mariées majeures, et à plus forte raison les

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