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imposait l'arrière-déclaration de command du 13 juin 1776, l'héritier mineur de la famille Chabannais fit assigner Alexandre et Armand Lafite, fils et béritiers de Jean, pour se voir condamner hypothécairement à la payer pour lui. Les frères Lafite mirent en cause Nicolas-Hercule Arnoud, vendeur de leur père, et demandèrent qu'il fût tenu de les garantir et indemniser de cette condamnation.

Jugement du tribunal de première instance du département de la Seine, du 8 minal an 10, qui, adoptant les moyens de défense du sieur Arnoud, le décharge de la demande en garantie des frères Lafite.... Motifs. « Attendu que le droit hypothécaire réclamé par le mineur Chabannais n'a point été dissimulé dans l'acte de la vente faite par le sieur Arnoud au sieur Lafite père; que, dans ce cas, le recours en garantie ne peut avoir lieu que contre le coobligé solidaire; que, par le même acte, il a été stipulé que le sieur Arnoud ne serait tenu à la garantie (de ce droit hypothécaire), que dans le seul cas où il exercerait la faculté de réméré qu'il s'était réservée. »

Appel de ce ce jugement de la part des frères Lafite au tribunal d'appel de Paris, qui, par jugement du 25 pluviose an 11, dit qu'il a été mal jugé; et ordonne que le sieur Arnoud sera tenu de faire cesser l'effet des condamnations prononcées contre les frères Lafite, par le jugement dont est appel, au profit du mineur Chabannais; sinon le condamne à acquitter, garantir et indemniser lesdits Lafite des condamnations, tant principales qu'accessoires...... Motifs. « Attendu qu'un vendeur est de droit garant de toutes les charges autres que celles dont il a chargé l'acquéreur, et dont l'acquittement fait partie de son prix; que par le contrat du 26 mars 1785, Arnoud s'est expressément obligé de garantir Lafite de toutes dettes et hypothèques ; qu'il s'est soumis de rapporter main-levée de toutes oppositions quelconques, qui pourraient survenir au sceau des lettres de ratification, procédant du fait dudit Arnoud ou de ses auteurs, autres que celles des créanciers délégués; qu'il a contracté particulièrement l'obligation (dans le cas où il exercerait la faculté de réméré qu'il s'était réservée) de rendre à Lafite tous les capitaux et prinTome XIII.

cipaux délégués qu'il aurait remboursés, et tous les autres capitaux qu'il justifierait pareillement avoir remboursés à Chabannais et sa femme; et qu'aucune clause, dans ce contrat, ne limite l'étendue de cette garantie ; que la déclaration faite par Arnoud à Lafite de l'hypothèque existant sur les maisons vendues, pour la rente de 762 1. 10 s. dont Lafite n'était pas chargé, a bien pu avoir l'effet de soustraire Arnoud aux dommages-interêts de l'acquéreur, dans le cas où il serait troublé par suite de ladite hypothèque, mais non de le dispenser de rembourser à l'acquéreur les sommes qu'en Vertu de ladite hypothèque il aurait été obligé de payer; que l'engagement souscrit par Arnoud, pour le cas d'exercice du réconséquence, et nullement une restriction méré, n'est qu'une confirmation et une de la garantie générale promise par Arnoud; qu'enfin le contrat n'est point aléatoire ; que tout y est certain et déterminé; et qu'il serait souverainement injuste que le vendeur ne fit pas jouir son acquéreur de la plénitude de l'objet vendu, lorsqu'il a reçu la totalité du prix.... »

Pourvoi en cassation de la part du sieur Arnoud. Il a soutenu que par l'acte de vente du 26 mars 1785, il ne s'est obligé à garantir Jean Lafite de l'hypothèque de la rente de 762 liv. 10 s., que dans le cas où il exercerait la faculté de rachat qu'il s'était réservée; que ne s'y étant obligé que dans ce seul cas, il s'en était affranchi dans tous les autres ; et que telle était la conséquence de la maxime: Inclusio unius est exclusio alterius ; qu'ainsi le tribunal de Paris, en prononçant comme il l'avait fait, avait violé la loi du contrat.

On a répondu au sieur Arnoud : Y a-t-il dans le contrat de vente du 26 mars 1785, une clause qui prive formellement Jean Lafite de tout recours contre Arnoud, à raison de l'hypothèque de la rente de 762 liv. 10 s. due par Hémart à la famille Chabannais? Y a-t-il dans ce contrat une clause qui dispense expressément Arnoud de la garantie de cette hypothèque? Non seulement le contrat ne présente point de clause semblable, mais toutes ses dispositions manifestent une intention contraire.

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D'abord, ce n'est pas sans garantie, ce n'est pas même sous la seule garantie de ses faits et promesses qu'Arnoud vend à Jean Lafite; il lui vend avec l'obligation positive de le garantir de tous troubles, dons, douaires, DETTES, HYPOTHÈQUES...., et autres empêchemens généralement quelconques; et certainement ce ne serait pas le garantir de toutes dettes et hypothèques que de le laisser sans garantie relativement à la rente de 762 liv. 10 s. dont il s'agit.

Ensuite le contrat oblige le sieur Arnoud, en cas que Jean Lafite obtienne des lettres de ratification, de faire lever et rayer toutes les oppositions qui pourront survenir de la part des créanciers du sieur Arnoud luimême, ou de ses auteurs: il l'oblige donc, dans cette hypothèse éventuelle, à rapporter la main-levée de l'opposition que la famille Chabannais pourra former pour la rente de 762 liv. 10 s.: il prouve donc que la rente de 762 liv. 10 s. est entrée dans la stipulation générale de garantie de toutes les dettes et hypothèques....

La seule objection plausible que puisse faire le sieur Arnoud est celle qui résulte de l'article du contrat, par lequel il a donné connaissance à Jean Lafite de l'hypothèque de la rente de 762 liv. 10 s.; aussi n'a-t-il pas manqué de la présenter aux premiers juges, qui en ont fait la base de leur jugement. Mais est-il donc vrai que, pour ôter tout recours à un acquéreur évincé par une action hypothécaire, il suffise de prouver. qu'au temps du contrat il a eu connaissance de l'hypothèque qui est le principe de cette action ?

L'affirmative paraît, au premier coup d'œil, nettement établie par la loi 27, C. de evictionibus. Si Anthénocle, dit-elle, savait, en achetant tel fonds, qu'il n'appartenait pas à son vendeur, ou qu'il était hypothéqué, et qu'il n'ait rien stipulé, en cas d'éviction, ce qu'il a donné à ce titre est perdu pour lui; les règles du droit s'opposent à ce qu'il en fasse la répétition: Si fundum sciens alienum vel obligatum comparavit Anthenocles, neque quidquam de evictione convenit, quod eo nomine dedit contrà juris poscit ratio

nem.

Mais il se présente à cet égard deux observations également tranchantes: la pre

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mière, c'est que, dans notre espèce, il y a,: de la part du vendeur, une obligation générale de garantir Jean Lafite de toutes dettes, de toutes hypothèques ; c'est que le vendeur n'a pas excepté formellement de cette obligation l'hypothèque dont il donnait connaissance à Jean Lafite; c'est qu'en ne l'exceptant pas de cette obligation, il l'y a nécessairement comprise; c'est qu'enfin la stipulation de garantie est obligatoire, même dans le cas où l'acquéreur a eu connaissance vendeur, soit de l'hypothèque existant sur en achetant, soit de la non propriété de son la chose vendue, et qu'il a été ainsi jugé par arrêt du 10 décembre 1640, rapporté dans Louet, lettre A, § 13. les additions de Brodeau, au recueil de

C. de evict., ne doit pas être entendue dans La seconde observation est que la loi 27, le sens qu'elle semble d'abord présenter. Les dans son Commentaire sur ce texte; Voët, plus célèbres interprètes, notamment Cujas, sur le digeste, titre de evict., no 32; Pothier, dans son Traité du Contrat de Vente, no 188, établissent que par ces termes quod eo nomine dedit, la loi désigne, non ce que Anthenocle avait payé au vendeur. ce qui, disent-ils, serait d'une injustice criante, mais ce qu'il avait été contraint de donner à la partie qui l'avait évincé, ce qu'il avait donné à cause de l'éviction, eo nomine; qu'ainsi la loi refuse bien à Anthenocle une action en dommage intérêts, mais non pas une action en répétition de son prix ; et cette interprétation que Voët, entre autres, justifie par un grand nombre d'autres lois, a été reçue dans la jurisprudence moderne, comme l'atteste Caillet, sur la loi citée du Code, Groeneweghen, de legibus abrogatis, sur la même loi, et Pothier.

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DEUXIÈME QUESTION. La reconnaissance du demandeur en garantie de n'avoir pas payé une de ces dettes que la loi présume acquittées après un court espace de temps, privet-elle le garant du bénéfice de cette présomption légale ?

Jugé négativement par la cour de cassa

tion.

:

Espèce.... En messidor an 2, arriva à Brest le navire la Jeune Camille, chargé, entre autres objets, de trois boucauds de café, à la consignation du sieur Viard; celui-ci, qui demeurait alors au Havre, confia an sieur Colombel, se rendant à Brest, le soin de retirer ces cafés du navire la Jeune Camille Colombel les retira en effet, et les vendit. De retour au Havre, il en remit le prix à Viard. En le recevant, Viard, dit-il, lui demanda s'il en avait déduit le fret; et, s'il faut en croire Viard, Colombel ne fit aucune réponse. Cependant il importait à Viard de savoir positivemeut à quoi s'en tenir; le prix des cafés ne lui appartenait pas, il était tenu de le compter aux propriétaires, et il fallait qu'il retint le fret, s'il était encore dû.

Viard, aprés avoir inutilement pressé Colombel de s'expliquer, et concluant de son silence que le fret était payé, se détermina à remettre aux propriétaires le prix entier des cafés, sans faire aucune déduction pour le fret. Ainsi le sieur Viard narrait les faits.

Six ans après, le capitaine du navire la Jeune Camille a assigné Colombel au tribunal de commerce du Havre, pour se voir condamner à lui payer le fret des trois boucauds de café en question. Colombel reconnaît ne l'avoir pas payé ; et cependant il lui oppose la prescription introduite par l'article 10 du titre 12 du liv. 1er de l'ordonnance de la marine de 1681; en outre il fait assigner Viard en garantie.

Viard comparaît par le sieur Gollain son défenseur, et dit « qu'il n'était point propriétaire des trois boucauds de café dont il s'agit ; qu'à la vérité il avait été chargé de les retirer du navire la Jeune Camille, capitaine Mabon, alors à Brest; que ne pouvant aller lui-même à Brest, il transmit son mandat, ainsi que son connaissement, au

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sieur Colombel, qui se rendait dans ce temps à Brest; que celui-ci a retiré les trois boucauds de café, et s'est empressé de les vendre au maximum au sieur Lavigne, affréteur même du navire la Jeune Camille, à qui le fret en était dû; que ce fret a dû être compensé contre le prix desdits cafés; qu'il est vrai que depuis, et il y a environ Colombel lui a remis le résidu du prix desdits cafés que lui Viard a transmis aux propriétaires de la chose; que depuis ce temps celui-ci n'a plus entendu parler de cette affaire; qu'il n'y est pour rien; mais qu'il croit de bonne foi que le fret a été acquitté; que, dans cet état et à toutes fins, il soutient Colombel non recevable,etc.»

six ans,

Jugement du tribunal de commerce du Havre, du 16 germinal an 9, qui, sans avoir égard à la fin de non recevoir proposée par Colombel et joints, les condamne ;.... et statuant sur leur action récursoire, sans avoir égard à la fin de non recevoir proposée par Viard, le condamne... Motifs. « Considérant, d'une part, que les sieurs Colombel, Bezognet et Barabé, reconnaissent avoir retiré les trois boucauds de café dont il s'agit, du navire la Jeune Camille, et n'en avoir pas payé le fret; d'autre part, qu'il est suffisamment justifié aux yeux du tribunal que le fret et augmentation de fret n'ont pas été passés en compte au sieur Viard........

Pourvoi en cassation de la part du sieur Viard. Ce jugement, a dit M. le procureur général impérial dans ses conclusions, est-il contraire à l'article cité de l'ordonnance de 1681 ? Il en est de la prescription établie par cet article, comme de celle dont parlent les art. 7 et 8 du titre 1er de l'ordonnance du commerce de 1673, et à laquelle sont assujettis les marchands et les ouvriers, c'est que cette prescription n'est, à proprement parler, qu'une présomption de paiement. Aussi remarquons-nous qu'elle cesse lorsqu'il y a cédule, obligation ou arrêté de compte. L'art. 9 du titre 1er de l'ordonnance de 1673 en contient une disposition expresse; et cette disposition se retrouve mot pour mot dans l'art. 10 du tit. 12 du livre 1er de l'ordonnance de 1681. Dès que cette prescription n'est fondée que sur une présomption de paiement, il est évident qu'elle ne peut pas être opposée par celui qui convient n'avoir pas payé; et voilà pourquoi, par l'art. 10

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Or, dans l'espèce, le sieur Colombel reconnaissait n'avoir pas acquitté le fret dû au capitaine Mahon; c'était donc à tort qu'il opposait à celui-ci la prescription; et conséquemment le tribunal de commerce a dû, comme il l'a fait, le condamner à payer le fret pour lequel il était poursuivi.

Mais était-ce une raison pour condamner également le sieur Viard, à garantir de ce paiement le sieur Colombel? C'est à ce point que se réduit en dernière analyse toute cette affaire.

Il est de principe que la confession judiciaire d'une partie ne peut nuire qu'à ellemême, et que jamais elle ne peut être opposée à un tiers. Sans doute Colombel a bien été le maître de renoncer à la prescription qui lui était acquise, en reconnaissant qu'il en reconnaissant qu'il n'avait pas payé ce qu'on lui demandait; mais, en faisant par cette reconnaissance, revivre contre lui-même l'action du capitaine Mahon, il n'a pas pu faire revivre à son profit personnel une action récursoire qu'il n'avoit plus contre le sieur Viard. Viard était libéré par la prescription annale, ou, pour parler plus juste, la prescription

annale avait élevé en faveur de Viard une

présomption de paiement; et l'avantage de cette présomption juridique ne pouvait pas lui être enlevé par le fait d'un tiers.

Admettre un autre système, ce serait dire que Colombel aurait pu, quoique ayant réellement payé le fret en l'an 2, et l'ayant, dans le temps, retenu à Viard, s'eutendre avec le capitaine Mahon pour forcer Viard à le payer une seconde fois. Sous ce rapport, le jugement du tribunal de commerce du Havre a sans doute prononcé contre le texte formel de l'ordonnance de 1681; mais ne peut-on pas, ne doit-on pas même envisager l'affaire sous un rapport?

autre

Le jugement attaqué se fonde sur ce qu'il est suffisamment justifié aux yeux du tribunal que le fret et l'augmentation de fret n'ont pas été passés en compte au sieur Viard. Le tribunal a donc acquis la certi

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L'affirmative paraît, du premier abord, ne souffrir aucun doute, d'après le principe que la prescription introduite par l'article 2 du titre 12 du liv. 1er de l'ordonnance de 1681 n'est pas une prescription véritable et réellement libératoire, mais seulement une présomption légale de paiement. Mais il y a de la différence entre la présomption légale de paiement, et la prescription proprement dite d'une dette : celleci éteint absolument la dette, et par conséquent empêche le créancier de l'exiger, quelque certitude qu'il y ait d'ailleurs qu'elle n'est pas acquittée; celle-là, au contraire, n'est qu'un soupçon autorisé par la loi d'un paiement effectif. Mais ce soupçon légal, cette présomption de droit, suffit-il à un juge, pour les faire taire, de déclarer qu'il est justifié à ses yeux que le paiement n'a pas été effectué? Ici nous devons rappeler la distinction que l'on a toujours faite, et qui est écrite dans tous nos livres, entre les diverses espèces de présomptions.

l'une qu'on appelle juris et de jure; la Ces présomptions sont de trois sortes : seconde, que l'on nomme simplement juris ; tion humaine, præsomptio hominis. la troisième que l'on qualifie de présomp

La présomption juris et de jure est une disposition de la loi qui présume qu'une chose est véritable, et veut qu'elle passe pour telle aux yeux du juge, comme s'il en était personnellement convaincu. Elle est, dit Menochius, appelée præsumptio duite, et on ajoute à cette qualification les juris, parce que c'est la loi qui l'a introfondement d'un droit certain, d'une dismots de jure, parce que la loi en fait le fondement d'un droit certain, d'une dis position constante, qu'on ne peut éluder, par la

même

preuve

du contraire.

Ainsi, une sentence qui a acquis l'autorité de la chose jugée est tellement regardée comme juridique, que les preuves les plus claires de son injustice ne seraient pas reçues. Ainsi, lorsqu'un plaideur a prêté en justice le serment décisoire qui

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lui a été déféré par son adversaire, celui-ci ne doit pas être admis à faire la preuve, même par pièces nouvellement recouvrées, que le serment est faux et renferme un parjure. Ainsi, lorsqu'il s'est écoulé trente ans après la stipulation d'une créance sans que celui au profit de qui elle a été faite ait exercé aucune poursuite contre l'obligé, la prescription la fait tellement présumer éteinte par un paiement effectif, que le créancier ne serait pas même recevable à déférer le serment au débiteur.

La présomption de droit, præsumptio juris, est, suivant la définition d'Alciat, une conjecture probable, fondée sur un signe ertain que la loi prend pour une preuve, jusqu'à ce qu'elle soit détruite par une preuve contraire.

La présomption humaine, præsumptio hominis, est ainsi appelée, parce qu'elle n'est pas écrite dans le droit, qu'elle est incertaine, et qu'elle dépend entièrement de la prudence du juge. Elle a cela de commun avec la présomption de droit, præsumptio juris, que, co ne celle-ci, elle peut être détruite par ne preuve contraire; mais sur ce point même, il existe entre l'une et l'autre une très-grande dif

férence.

La présomption humaine étant toute entière à la disposition du juge, et absolument abandonnée à sa conscience, le juge est toujours maître de préférer à cette présomption la preuve qui la combat, et de se déterminer par l'une plutôt que par l'autre ; mais il n'en est pas de même de la présomption de droit, præsumptio juris. « La présomption capable d'attaquer celle de la loi, dit le célèbre d'Aguesseau dans son plaidoyer du 15 juin 1693, doit être écrite dans la loi même; elle doit être fondée sur un principe infaillible, pour pouvoir détruire une probabilité aussi grande que celle qui sert de fon

dement à cette preuve. »

Nous trouvons la même doctrine dans le commentaire de Voët sur le Digeste, titre de probationibus et præsumptionibus, no 15. Ce savant jurisconsulte y établit que la présomption de droit, par cela seul qu'elle émane de la loi, est hors de la dépendance du juge : juris præsumptio, cùm

ex ipso jure descendat, in potestate vero judicis, facti quæstio sit, non juris auctoritas, consequens est arbitrio judicis haud dependere. Voët cite à l'appui de son assertion la loi 15 D. ad municipalem, et le § 4 de la loi 1ere D. ad senatûs consultum Turpilianum.

Il ne dépend donc pas du juge de déterfaire taire une présomption de droit. La miner quelles sont les preuves qui peuvent loi qui a établi cette présomption en a seule le pouvoir. Quels sont les cas où l'ordonnance de 1681 fait cesser la présomption de paiement, ou, ce qui est la même chose, la prescription annale, qu'elle établit par rapport au fret? Ces cas sont fixés par l'article 10 du titre déjà cité Les présomptions ci-dessus, y est-il dit, n'auront lieu lorsqu'il y aura cédule, obligation, arrêté de compte ou interpellation judiciaire. Voilà donc les seuls moyens que la loi reconnaît de pouvoir imposer silence à la présomption de paiement qu'elle fait résulter, relaaprès le voyage fini; il faut pour cela, ou tivement aux frais, du laps d'une année que le capitaine ait poursuivi judiciairement le débiteur du fret daus le courant

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de cette année même, ou que celui-ci ait reconnu sa dette, soit par une cédule, soit par une obligation, soit par un arrêté de compte. La loi n'indique ni n'admet aucun autre moyen, et nous venons de voir qu'en cette matière, comme en toute autre semblable, le juge est obligé de s'en tenir à la loi, sans pouvoir y rien ajouter de son chef.

résoudre la question proposée : le tribunal Maintenant, rien de plus aisé que de de commerce du Havre a-t-il pu juger que faveur du sieur Viard, parce qu'il était la prescription ne devait pas opérer en suffisamment justifié à ses yeux que Viard n'avait pas payé le fret qui lui était demandé? 11 l'aurait pu incontestablement, s'il eût existé de la part de Viard une reconnaissance écrite de sa prétendue dette; il n'aurait fait, dans cette hypothèse, qu'appliquer l'article 10 de l'ordonnance. Mais Viard n'avait contre lui aucun titre personnel de non paiement; et d'après cela, qu'a fait le tribunal de commerce du Havre en le condamnant? il a déclaré suffisant un genre de preuve que la loi ne

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