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cette action violente; et le cardinal Mazarin, qui savait l'extrême envie qu'avait Mademoiselle d'épouser une tête couronnée, dit alors : « Ce canonla vient de tuer son mari (*). »

Après ce combat inutile et sanglant, le parlement, peu intimidé par une cour errante loin de la capitale, et pressé par les partisans du duc d'Orleans et du prince de Condé, nomma le premier lieutenant général du royaume, quoique le roi fut majeur, et le second généralissime des armées. Aussitôt le roi, pour se venger, cassa par ordonnance tout ce que le parlement avait fait à Paris, et le déclara transféré à Pontoise. Les présidents et une vingtaine de conseillers obéirent seuls à cet ordre. Les deux parlements de Paris et de Pontoise se contestant mutuellement leur autorité, et donnant des arrêts contraires, s'accordèrent néanmoins à demander l'expulsion de Mazarin. La reine n'osa mépriser ces remontrances, et Mazarin fut renvoyé, mais seulement pour la forme, et momentanément. Il sortit une seconde fois du royaume; et c'est pendant cet exil qu'il écrivit au roi : « Il ne me reste pas un asile dans un royaume dont j'ai reculé toutes les frontières. » . Mais si l'on étoit dégoûté de la cour, on l'etoit beaucoup plus encore à Paris les uns des autres. Les parlementaires s'accommodoient mal entre eux, et ils s'accommodoient encore plus mal avec les princes. Les princes eux-mêmes n'étoient pas trop bien ensemble, et ils ne comptoient plus sur le parlement. Le peuple, de son côté, n'aimoit plus ni les frondeurs d'épée, ni ceux de robe.... Enfin, le prévôt des marchands alla, de la part de la ville et de tous ses habitants, supplier le roi de leur faire l'honneur d'y revenir (**). »

Louis XIV rentra dans Paris, après avoir publié une amnistie, et trouva tout paisible dans cette ville, qui avait éte naguère si agitée. Gaston d'Orléans fut relegué à Blois, où il passa le reste

Voltaire, siècle de Louis XIV. (**) Mémoires de madame de Motteville.

de sa vie dans le repentir. Le cardinal de Retz fut arrêté dans le Louvre, et après avoir été conduit de prison en prison, il mena longtemps une vie errante, qu'il finit enfin dans la retraite. Ceux des membres du parlement qui avaient le plus abusé de leur ministère, furent condamnés à l'exil; les autres, renfermés désormais dans les bornes de la magistrature, ne s'appliquèrent plus qu'à faire oublier leur conduite passée. Le prince de Condé, abandonné de tous ses partisans en France, et ne croyant pas pouvoir se fier à l'amnistie royale, alla se joindre aux Espagnols dans les Pays-Bas. Enfin, au mois de mars 1653, le cardinal Mazarin fut rappelé par une déclaration du roi. Il fut étonné, en rentrant dans Paris, de se retrouver tout-puissant sans contestation. Louis XIV le reçut comme un père, le peuple comme un maître. Les anciens frondeurs s'étouffaient dans ses antichambres. On lui fit à l'hôtel de ville un magnifique festin, au milieu des acclamations de la foule. Le parlement, qui avait mis sa tête à prix, demanda sa protection, et condamna par contumace le prince de Condé à perdre la vie.

Ainsi se termina, en 1653, la guerre de la fronde, qui avait eu pour prétexte le mauvais gouvernement de Mazarin. Elle eut pour résultat immédiat de rendre ce ministre plus puissant, et pour résultat éloigné l'apogée du pouvoir royal. « Cette autorité, dit Ancillon, ne fut pas toujours tutélaire et protectrice, et prévint, brisa ou punit les résistances sages, utiles et légales qu'elle rencontra dans sa marche. Il faut en accuser la fronde. Louis XIV fut frappé, dans sa première jeunesse, d'une résistance illégale, qui avait tous les caracteres de l'insurrection, et qui menaçait la France des plus grands malheurs. Les impressions profondes que ce spectacle fit sur son jeune cœur, ardent et fier, y développerent un penchant secret au despotisme; et ce fut la vue de la licence du peuple qui lui fit craindre la liberté. »

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1653-1661.

Événements extérieurs: Continuation de la guerre contre l'Espagne.

Alliance de la France avec Cromwell.-Paix des Pyrénées.—Mort de Mazarin. A la faveur des troubles de la fronde, les Espagnols avaient repris la plus grande partie de nos conquêtes. Ils avaient recouvré l'importante place de Dunkerque, chassé les Français de Barcelone, et repris Casal en Italie. Ainsi tout le fruit des victoires de Rocroi, de Lens et de Nordlingen, était perdu. Heureusement, grâce aux anciennes victoires de ce même prince de Condé, maintenant leur allié, ils étaient si affaiblis que rien en put les relever. En 1653, lorsque Louis XIV se trouva maître absolu de son royaume, et que la tranquillité régna sur tous les points de la France, l'équilibre ne tarda pas à se rétablir entre les deux puissances, et bientôt après les Espagnols s'accoutumèrent de nouveau à être vaincus.

se

« Louis XIV, dit Voltaire, trouva, en 1653, maître absolu d'un royaume encore ébranlé des secousses qu'il avait reçues, rempli de désordres en tout genre d'administration, mais plein de ressources, n'ayant aucun allié, excepté la Savoie, pour faire une guerre offensive, et n'ayant plus d'ennemis étrangers que l'Espagne, qui était alors en plus mauvais état que la France. Tous les Français qui avaient fait la guerre civile étaient soumis, hors le prince de Condé et quelques-uns de ses partisans, dont un ou deux lui étaient demeurés fidèles par amitié et par grandeur d'âme, comme le comte de Coligni et Bouteville, et les autres, parce que la cour ne voulut pas les payer assez chère

ment.

« Condé, devenu général des armées espagnoles, ne put relever un parti qu'il avait affaibli lui-même par la destruction de leur infanterie aux journées de Rocroi et de Lens. Il combattait avec des troupes nouvelles, dont il n'était pas le maître, contre les vieux régiments français, qui avaient appris

à vaincre sous lui, et qui étaient commandés par Turenne.

« Le sort de Turenne et de Condé fut d'être toujours vainqueurs, quand ils combattirent ensemble à la tête des Français, et d'être battus quand ils commandèrent les Espagnols.

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Turenne avait à peine sauvé les débris de l'armée d'Espagne à la bataille de Réthel, lorsque, de général du roi de France, il s'était fait le lieutenant d'un général espagnol; le prince de Condé eut le même sort devant Arras (25 août 1654). L'archiduc et lui assiégeaient cette ville. Turenne les assiégea dans leur camp et força leurs lignes; les troupes de l'archiduc furent mises en fuite. Condé, avec deux régiments de Français et de Lorrains, soutint seul les efforts de l'armée de Turenne; et, tandis que l'archiduc fuyait, il battit le maréchal d'Hocquincourt, il repoussa le maréchal de la Ferté, et se retira victorieux, en couvrant la retraite des Espagnols vaincus. Aussi le roi d'Espagne lui écrivit ces propres paroles : « J'ai << su que tout était perdu, et que vous << avez tout conservé (*). »

Après cette défaite, les Espagnols levèrent le siége d'Arras. Ainsi l'ennemi avait été repoussé sur la frontière du nord. Du côté de l'est, le comte d'Harcourt, devenu rebelle à la France, s'était emparé de quelques villes d'Alsace; mais le maréchal de la Ferté reprit Béfort, Thann, et mit le siége devant Brisach. Cette place allait être forcée à capituler, lorsque le comte d'Harcourt fit volontairement sa soumission. Ainsi les armées françaises étaient partout victorieuses. En même temps, le jeune roi faisait ses premières armes au siége de Stenay, dont il s'empara le 6 août. Mais le cardinal Mazarin l'éloigna bientôt du théâtre de la guerre, ne voulant pas qu'il exposât davantage sa personne à laquelle le repos du royaume et la puissance du ministre semblaient attachés.

Les Espagnols étaient trop affaiblis

(*) Voltaire, Siècle de Louis XIV.

pour continuer la guerre avec vigueur, et pendant plusieurs années elle ne fit que languir. Les noms de Louis XIV et de Philippe IV étaient ignorés de l'Europe; leurs ministres, Mazarin et don Luis de Haro, dirigeaient alors les affaires de la France et de l'Espagne. Tous deux s'adressèrent à Cromwell et briguèrent son alliance. L'orgueilleux protecteur, qui avait fait condamner à mort Charles Ier, eut la satisfaction de se voir recherché par les deux plus puissants royaumes de la chrétienté. Le ministre espagnol lui offrait de l'aider à prendre Calais. Mazarin lui proposait d'assiéger Dunkerque, et de lui remettre cette ville. Cromwell se détermina pour la France, espérant enlever le Mexique aux Espagnols; mais ceux-ci furent avertis à temps, et les amiraux de Cromwell ne réussirent à s'emparer que de la Jamaïque, qui assura aux Anglais le commerce du nouveau monde. Ce fut alors seulement que le protecteur traita avec la France. Il força Louis XIV à lui donner dans ses lettres le titre de frere, et le contraignit en outre à faire sortir de ses États les deux fils du malheureux Charles I. C'est à ce prix que Mazarin acheta l'alliance de l'Angleterre. Les ministres espagnols éclaterent en cris d'indignation contre le cardinal, qui sacrifiait, disaient-ils, les lois divines et humaines, l'honneur et la religion, au meurtrier d'un roi, et qui chassait de France Charles II et le duc d'York, pour plaire au bourreau de leur père. L'accusation était fondée, mais maladroite. Pour toute réponse, Mazarin leur présenta les offres qu'ils avaient faites eux-mêmes au protecteur.

Cette ligue avec Cromwell donna à la France une supériorité marquée. Pendant que l'amiral Blake allait brûler les galions d'Espagne, vingt vaisseaux anglais vinrent bloquer le port de Dunkerque, et six mille vieux soldats, qui avaient fait la révolution d'Angleterre, renforcèrent l'armée de Turenne.

Alors Dunkerque, la plus importante place de la Flandre, fut assiégée

T. 11. 2o Livraison: (ANNALES DE

par mer et par terre. Condé et don Juan d'Autriche ayant ramassé toutes leurs forces, se présentèrent pour la secourir. L'Europe avait les yeux sur cet événement. Le cardinal Mazarin mena Louis XIV auprès du théâtre de la guerre, sans lui permettre d'y monter, quoiqu'il eût près de vingt ans. Ce prince se tint dans Calais. Ce fut là que Cromwell lui envoya une ambassade fastueuse, à la tête de laquelle était son gendre, le lord Falcombridge. Le roi lui envoya le duc de Créqui et Mancini, duc de Nevers, neveu du cardinal, suivis de deux cents gentilshommes. Mancini présenta au protecteur une lettre du cardinal. Cette lettre est remarquable. Mazarin lui dit « qu'il est affligé de ne pouvoir lui rendre en personne les respects dus au plus grand homme du monde. »

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Cependant le prince maréchal de Turenne attaqua l'armée d'Espagne ou plutôt l'armée de Flandre, près des Dunes. Elle était commandée par don Juan d'Autriche, fils de Philippe IV et d'une comédienne, et qui devint, deux ans après, beau-frère de Louis XIV. Le prince de Condé était dans cette armée, mais il ne commandait pas; ainsi il ne fut pas difficile à Turenne de vaincre (14 juin 1658). Les six mille Anglais contribuèrent à la victoire; elle fut complète. Les deux princes d'Angleterre, qui depuis furent rois, virent leurs malheurs augmenter dans cette journée par l'ascendant de Cromwell.

« Le génie du grand Condé ne put rien contre les meilleures troupes de France et d'Angleterre. L'armée espagnole fut détruite. Dunkerque se rendit bientôt après. Le roi accourut avec son ministre pour voir passer la garnison. Le cardinal ne laissa paraître Louis XIV, ni comme guerrier, ni comme roi, il n'avait point d'argent à distribuer aux soldats; à peine étaitil servi: il allait manger chez Mazarin, ou chez le maréchal de Turenne, quand il était à l'armée. Cet oubli de la dignité royale n'était pas dans Louis XIV l'effet du mépris pour le faste, mais celui du dérangement de L'Hist. de France.)

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ses affaires, et du soin que le cardinal avait de réunir pour soi-même la splendeur et l'autorité.

« Louis XIV n'entra dans Dunkerque que pour la rendre au lord Lockhart, ambassadeur de Cromwell. Mazarin essaya si, par quelque finesse, il pourrait éluder le traité, et ne pas remettre la place; mais Lockhart menaça, et la fermeté anglaise l'emporta sur l'habileté italienne.

« Plusieurs personnes ont assuré que le cardinal, qui s'était attribué l'événement d'Arras, voulut engager Turenne à lui céder encore l'honneur de la bataille des Dunes. Du Bec-Crépin, comte de Moret, vint, dit-on, de la part du ministre, proposer au général d'écrire une lettre par laquelle il parût que le cardinal avait arrangé lui-même tout le plan des opérations. Turenne reçut avec mépris ces insinuations, et ne voulut point donner un aveu qui eût produit la honte d'un général d'armée, et le ridicule d'un homme d'église. Mazarin, qui avait eu cette faiblesse, eut celle de rester brouillé jusqu'à sa mort avec Turenne (*). »

La bataille des Dunes n'enleva pas seulement aux Espagnols la ville de Dunkerque; ils perdirent encore les places de Furnes, Dixmude, Gravelines, Oudenarde et Ypres. Ainsi la France était puissante au dehors par la gloire des armes, et elle commençait à tenir le premier rang en Europe, surtout depuis que la mort de Cromwell avait préparé de nouvelles révolutions à l'Angleterre. Mais le peuple souffrait et demandait la paix que ses victoires lui promettaient glorieuse. « Il fallait, dit Voltaire, deux choses au cardinal, pour consommer heureusement son ministère faire la paix, et assurer le repos de l'État par le mariage du roi. Les cabales, pendant sa maladie, lui faisaient sentir combien un héritier du trône était nécessaire à la grandeur du ministre. Toutes ces considérations le déterminèrent à marier Louis XIV promptement. Deux partis se présentaient, la fille du roi d'Espagne, et la

() Voltaire, Siècle de Louis XIV.

princesse de Savoie. Le cœur du roi avait pris un autre engagement: il aimait éperdument mademoiselle Mancini, l'une des nièces du cardinal; né avec un cœur tendre et de la fermeté dans ses volontés, plein de passion et sans expérience, if aurait pu se résoudre à épouser sa maitresse.

• Madame de Motteville, favorite de la reine mère, dont les mémoires ont un grand air de vérité, prétend que Mazarin fut tenté de laisser agir l'amour du roi, et de mettre sa nièce sur le trône. Il avait déjà marié une autre nièce au prince de Conti, une au duc de Mercœur celle que Louis XIV aimait avait été demandée en mariage par le roi d'Angleterre. C'étaient autant de titres qui pouvaient justifier son ambition. Il pressentit adroitement la reine mère : « Je crains bien, lui dit-il, que le roi ne veuille trop fortement épouser ma nièce. » La reine, qui connaissait le ministre, comprit qu'il souhaitait ce qu'il feignait de craindre. Elle lui répondit avec la hauteur d'une princesse du sang d'Autriche, fille, femme, et mère de rois, et avec l'aigreur que lui inspirait depuis quelque temps un ministre qui affectait de ne plus dépendre d'elle. Elle lui dit: « Si le roi était capable de cette indignité, je me mettrais avec mon second fils à la tête de toute la nation contre « le roi et contre vous. >>

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Mazarin ne pardonna jamais, diton, cette réponse de la reine; mais il prit le parti sage de penser comme elle; il se fit lui-même un mérite de s'opposer à la passion de Louis XIV. Son pouvoir n'avait pas besoin d'une reine de son sang pour appui. Il craignait même le caractère de sa nièce; et il crut affermir encore la puissance de son ministère, en fuyant la gloire dangereuse d'élever trop sa maison (*). »

Ne pouvant marier sa nièce avec le roi, Mazarin revint à son premier plan de lui faire épouser une infante d'Espagne. On cite de lui cette fameuse lettre qu'il écrivit à Louis XIV, pendant

(*) Voltaire, Siècle de Louis XIV.

les négociations de Munster : « Si le « roi très - chrétien pouvait avoir les Pays-Bas et la Franche-Comté en dot, « en épousant l'infante, alors nous pour«rions aspirer à la succession d'Espagne, quelque renonciation qu'on fit faire à l'infante, et ce ne serait pas une attente fort éloignée, puisqu'il n'y a que la vie du prince, son frère, • qui l'en peut exclure. » Ainsi, dès cette époque, Mazarin avait prévu le cas qui arriva cinquante ans plus tard, à la mort de Charles II.

Il envoya en conséquence son secré taire à Madrid pour proposer à don Luis de Haro les bases d'un traité. Lorsqu'on fut d'accord sur les préliminaires, les deux ministres signèrent une trêve et se rendirent à la frontière, Mazarin à Saint-Jean de Luz, et don Luis de Haro à Saint-Sébastien. Ils eurent ensuite plusieurs conférences dans l'ile des Faisans, formée par la Bidassoa, et le 7 novembre 1613, ils y signèrent cette paix si célèbre, connue sous le nom de paix des Pyré

nees.

La Franc acquit par cette paix le Comté d'Artois, à la réserve de SaintOmer et Aire, le Roussillon et le Conflans. Le prince de Condé obtint de rentrer en France. Mais l'article le plus important fut le mariage de Louis XIV avec l'infante d'Espagne, Marie-Thérese, fille de Philippe IV. Mazarin aurait voulu qu'on lui donnât pour dot la Franche-Comté et les Pays-Bas, mais on ne lui assigna, par le contrat de mariage, que cinq cent mille écus d'or, qui ne furent jamais payés. L'infante renonça formellement, pour elle et pour ses descendants, à toute prétention soit sur la totalité, soit sur une partie de la monarchie d'Espagne. Mazarin prévoyait bien le cas qu'on ferait de cette renonciation, si la posté rité måle de Philippe IV venait à s'éteindre, et l'on sait que les événements ont prouvé qu'il ne s'était pas trompé. Cette paix glorieuse placa la France au premier rang en Europe; l'Espagne et l'Autriche étaient abaissées pour toujours, la France succédait à leur prépondérance, et ainsi se trouvaient

réalisés les projets de Henri IV et de Richelieu.

une

Mazarin, qui avait eu la gloire d'attacher son nom aux traités de Westphalie et des Pyrénées, se trouva alors au comble de la puissance. Quoique le roi eût plus de vingt ans, il conserva sur lui et sur le royaume une autorité absolue. A son retour à Paris, il exigea et obtint que le parlement vînt le haranguer par députés. Il ne donna plus la main aux princes du sang, comme autrefois, dans les cérémonies publiques. Il marchait avec un faste royal, ayant, outre ses gardes, compagnie de mousquetaires. C'est ainsi qu'il régna jusqu'à sa mort (9 mars 1661). — Mazarin en mourant laissait la France plus respectée au dehors que florissante au dedans. En effet, au lieu de créer une marine, de favoriser l'industrie, le commerce, l'agriculture, il n'avait songé qu'à s'enrichir lui et sa famille. Quelquefois, lorsque Louis XIV demandait de l'argent à Fouquet, surintendant des finances, il lui répondait : « Sire, il n'y a rien dans les cof«fres de Votre Majesté, mais monsieur « le cardinal vous en prêtera. »> On sait qu'en mourant, Mazarin laissa une fortune de deux cents millions. « Il étoit si attaché à l'argent, dit Monglat, qu'il en faisoit des bassesses indignes à son rang. Il vendoit tout, offices et bénéfices, et faisoit commerce de tout (*) » On dit qu'avant de mourir il eut des scrupules, et qu'il fit au roi une donation de tous ses biens, mais que le roi refusa. Mazarin dicta alors son testament, par lequel il faisait à Louis XIV, à Marie-Thérèse, à Condé, à Turenne, à don Luis de Haro, des présents dignes d'un prince. Hortense Mancini, une de ses nièces, eut à elle seule vingt-huit millions. Il affecta par un codicille huit cent mille écus à la fondation d'un collége, qui fut appelé college Mazarin ou college des QuatreNations, parce qu'on y recevait des jeunes gens des quatre provinces d'Alsace, d'Artois, de Roussillon et de Vignerol, qu'il avait réunies à la France.

(*) Mémoires de Montglat.

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