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liturgic, comme il n'y a qu'une seule Eglise et une seule foi. Mais ce n'est pas, ce semble, à ceux qui jouissent d'un travail plus parfait à y renoncer pour en adopter un autre dont tout le monde doit recon→ noître les imperfections.

9°. Quant aux conseils donnés par l'auteur des Observations, et par M. Choron, de rétablir le chant de l'Eglise de Rome dans toutes les églises de France, ils seroient plus plausibles que celui d'y rétablir l'office romain. Ce chant nous a conservé, quoique bien défiguré, les restes de cette musique des Grecs, dont les anciens racontent tant de prodiges, et dont les foibles monumens échappés aux ravages du temps, n'en produisent plus d'autre, que l'étonnement qu'ils en aient tant produit. Mais pour rétablir ce chant dans la liturgie de Paris, il n'est pas besoin d'y rétablir l'office de Rome. Ces sortes de chants non me→ surés, et faits sur de la prose, peuvent s'adapter à tout, et les paroles de la liturgie romaine, sur les→ quelles ils sont, n'étoient pas plus coupés pour la prosodie des Grecs, que celles de la liturgie pari

sienne.

Au surplus, il ne faut pas croire, d'après cet éloge fastueux, que tous les morceaux du chant grégorien soient dignes de leur renommée. Il en est quelquesuns vraiment d'un caractère original, et préférables à la plus belle musique; ce sont : l'introït et le graduel du jeudi-saint, quelques répons de la semaine sainte, le Domine non secundum, et l'Adjuva nos Deus du carême; la prose, l'offertoire et le Libera des morts; le Sacris solemniis, la prose du SaintSacrement, les quatre grandes antiennes de la sainte Vierge à complies, le Vexilla regis, le Veni creator, les messes des doubles, de la sainte Vierge, des di

manches du carême et de Pâque. A part ces morceaux, tout le reste est très-commun, et souvent d'un caractère si vague, qu'on ne sait en quel ton on est, et que, sans le livre, le chantre le plus exercé ne sauroit donner l'intonation convenable. Or, la plupart des morceaux que nous venons de citer sont dans la liturgie de Paris, comme dans celle de Rome; rien n'est si aisé que d'y adapter le reste. D'ailleurs la liturgie de Paris a en tout une richesse qui doit inspirer de l'envie, et n'a rien à envier; car sur les huit tons des psaumes, elle a quatre variétés de plus que le romain, et toutes fort belles; le chant des hymnes du mètre ïambique, inconnu dans le romain, et celui des proses des grandes fêtes, est très-noble et trèsmajestueux.

D'après tout ce que nous venons de dire, il semble qu'il faut plutôt engager les églises de France qui ont encore le Bréviaire romain, à prendre celui de Paris, que celles qui ont celui de Paris, à le quitter pour l'autre. La religion le permet, le bon goût, la raison et le sentiment l'ordonnent.

Au reste, je tranche la difficulté, fallût-il renoncer pour cela aux beaux morceaux du chant grégorien, et ce chant fût-il encore plus admirable que tout ce que la musique ancienne et moderne a jamais produit de plus beau, il faudroit encore le sacrifier s'il n'y avoit que ce moyen de conserver dans l'Eglise un ouvrage que je regarde comme une des plus belles conceptions qu'ait enfantées l'esprit humain. Quel plaisir pour un prêtre éclairé, en remplissant un devoir que l'habitude rend trop souvent insipide et monotóne, de faire, pour ainsi dire, un cours de litté rature, et de nourrir son goût en nourrissant sa piété! J'ai l'honneur 'ne.

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NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

ROME. S. S. vient de prendre une grande mesure qui étoit déjà annoncée depuis quelque temps, mais que la sagesse du souverain Pontife avoit voulu peser et mûrir. Elle a rétabli la société des Jésuites dans son ancien état, par une constitution solennelle qui commence par ces mots: Sollicitudo omnium ecclesiarum, et qui est datée du 7 des ides d'août. Le saint Père fait mention des instances qui lui ont été faites, à cet égard, par des personnes de tous les rangs et de tous les pays. Nous donnerons dans le numéro prochain cette pièce intéressante, que nous avons reçue trop tard pour la faire entrer dans celui-ci, et qui doit tenir sa place dans l'histoire de l'Eglise de ces derniers temps.

PARIS. La fête de Saint-Louis a été célébrée dans cette ville avec un empressement général. Il semble que nous avons voulu faire amende honorable pour tant de fêtes où la religion n'avoit pas plus de part que l'allégresse publique, et dont la police seule faisoit les frais. Ici il n'y avoit point eu d'ordre de fermer les boutiques, et toutes l'étoient. Les fidèles s'étoient portés en grand nombre dans les églises, où presque partout l'office a été fait avec beaucoup de solennité. Chacun s'est empressé d'aller offrir à Dieu ses prières pour la prospérité du règne du fils de saint Louis, et pour la perpétuité de cette maison, qui est aussi nécessaire à notre bonheur que nous pouvons l'être au sien. Aux sentimens d'une juste reconnoissance pour le passé se mêloient de pieuses demandes pour l'avenir. On a remarqué que beaucoup de personnes ont voulu participer, en ce jour, à ce que la religion a de plus saint, pour solliciter plus puissam'ment les grâces divines sur ce royaume. Hors des églises, le spectacle, sans être aussi édifiant, n'étoit pas moins curieux. Le mouvement étoit général. On voyoit bien

que cette fête ne réveilloit point de fâcheux souvenirs', et qu'elle ne coûtoit point de larmes. Y a-t-il en effet de plus beau jour pour un peuple que la fête d'un bon Roi?

M. de Coucy, évêque non-démissionnaire de la Rochelle, arriva dans cette ville, le 21 août. On sait qu'il fut un des derniers évêques nommés par le Roi en 1789. II fut un des trois choisis sous le court ministère de M. de Pompignan, et il étoit digne de ses vertueux collègues. Ses Instructions pastorales sont un monument de son zèle. Il vient d'Espagne, où il se réfugia en 1791. Pendant son long exil, il trouva le moyen d'être utile, et aux prêtres déportés et à beaucoup de familles émigrées. Son zèle et son courage ne se démentirent jamais. Le refus qu'il fit, en 1801, de donner sa démission de son siége, l'exposa à de nouvelles traverses. Le despote qui s'irritoit des moindres contradictions, demanda, dit-on, au gouvernement espagnol, que M. de Coucy lui fut livré. Pour préserver ce prélat de tomber en des mains ennemies, Charles IV se vit dans la nécessité de l'exiler. On l'enferma, en 1803, dans un couvent de Franciscains, à deux lieues de Séville, où il fut pendant plus de deux ans privé de toute communication extérieure. Il ne récouvra sa liberté qu'en 1806. Pendant la guerre qui vient de déchirer l'Espagne, il a été exposé à mille dangers. Il a passé des mois entiers, errant et fugitif, dans des bois et des rochers. Le roi Ferdinand, auquel il a présenté ses hommages en passant par Madrid, lui a témoigné beaucoup d'intérêt. Ce prélat n'en excitera pas moins dans sa patrie, où il a laissé de précieux souvenirs.

AMIENS. On a vu ici avec beaucoup de peine une calomnie avancée dans un de ses pamphlets qui circulent et qui affligent les honnêtes gens. On y lit cette phrase: M. l'évêque d'Amiens dit dans son Mandement, que le Tout-Puissant ayant créé Napoléon, se reposa de ses travaux. Loin d'être coupable d'une adulation aussi indigue de son caractère, notre évêque a toujours parlé du

dernier gouvernement avec une mesure qui n'avoit pas échappé aux yeux les plus attentifs. Il ne laissoit passer aucune occasion de rappeler au despote des vérités utiles, et dans ces temps fâcheux où il étoit si difficile de tenir un juste milieu, il a su concilier ce qu'il devoit à la religion avec ce qu'exigeoit un homme absolu. Il nous est donc pénible de le voir accusé d'une flatterie qui seroit en quelque sorte un blasphême dans la bouche d'un évêque. Cette flatterie n'est pas de lui. Nous savons tous qu'elle est d'un officier civil, encore vivant, et qui n'avoit pas appris dans les camps le langage de l'orthodoxie. Il faut lui en laisser le blâme, en et laver un prélat qui s'est conduit dans les derniers troubles, et notamment au concile, avec celle sage réserve qui n'exclut pas le courage.

SENS. Madame la duchesse d'Angoulême, à son passage par cette ville, a voulu visiter le tombeau du dauphin son grand père, qui avoit été enterré avec la dauphine son épouse, dans notre église métropolitaine. S. A. R. a paru prendre plaisir à voir ce monument érigé à la gloire de son vertueux aïeul. Ce monument est cher à notre ville, et nous n'avions pas attendu le passage de la princesse pour songer à replacer ce mausolée dans un lieu plus convenable. Dès le 14 mai, notre conseil municipal avoit pris une délibération pour le relever et le restaurer. M. Person, architecte, à qui on en doit la conservation, a été chargé de ce travail, et il a été ouvert une souscription pour faire face aux dépenses. On a arrêté aussi de rétablir la pompe funèbre qui se célébroit annuellement dans l'église métropolitaine, le 19 décembre. Le mausolée sera replacé dans le choeur. On espère que tout sera en état pour cet automne. La commission nommée, à cet effet, est composée d'habitans zélés, qui se sont adjoints deux ecclésiastiques recommandables, MM. de Vaudricourt et de Formanoir. A l'espérance de rendre au monument sa première dignité, se joint aussi celle de voir rendre à l'église, où il étoit placé, son titre et ses honneurs. Sens étoit un des plus

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