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démontré reposer sur de trop légers fondemens, ou être absolument fausses. La vérité ne peut que gagner à cet aveu. C'est à elle seule que j'ai consacré toutes mes veilles. Je me suis empressé de revenir a elle dès que j'ai cru l'avoir mieux saisie. Puisse cet hommage que je lui rends dans toute la sincérité de mon cœur, me faire absoudre de toutes les erreurs que je puis avoir hasardées, et que j'ai cherché propager. Il est difficile sans doute de reconnoître ses torts avec plus de franchise et de candeur, et ces aveux ne prouvent pas moins la modestie que la piété du savant académicien. Toutefois il ne se contenta pas d'une déclaration déjà si formelle, et pour calmer les regrets d'une conscience droite et délicate, il rédigea la pièce suivante qu'il remit à un ecclésiastique investi de toute sa confiance. Cette pièce curieuse, que nous avons en original sous les yeux, est conçue en ces termes: Je soussigné, Pierre-Henri Larcher, reconnois que m'étant lié avec quelques-uns des prétendus philosophes, je résolus avec quelques-uns d'entr'eux de détruire autant qu'il seroit en moi la religion chrétienne. Dans cette vue j'ai avancé, dans mes notes sur Hérodote, des maximes et des propositions tendantes à la subversion de toute religion. Quoiqu'il soit bien permis dans un essai sur la chronologie d'Hérodote de présenter le systéme du père de l'histoire, ou plutôt celui des Egyptiens, tel que l'avoit conçu cet historien d'après le récit de leurs prêtres, j'avoue cependant à ma honte que je n'exposai ce systéme, et que je ne le revêtis de toutes les preuves dont il étoit susceptible, que dans le dessein de décréditer la chronologie des livres saints. Persuadé de toutes les vériés qu'enseigne la religion catholique, apostolique et romaine, je déteste sincèrement et de coeur ces odieuses maximes et ces absurdes opinions. Je voudrois ne les avoir jamais avancées, et j'en demande pardon à Dieu et aux bonnes ames que j'ai scandalisées. Je veux vivre et mourir dans le sein de l'Eglise catholique, apostolique et romaine. Je crois toutes les vérités qu'elle enseigne, et je veux avec la grâce de Dieu, y conformer toutes mes actions. Fait à Paris, le 5 mai 1795. Signé, Larcher. Tel est le texte exact de cette déclaration précieuse que M. Larcher remit à un prêtre sous une enveloppe cachetée, en recommandant de ne l'ouvrir qu'après sa mort. La déclaration est écrite toute entière de sa main, ainsi que la recommandation placée sur l'enveloppe. Voilà donc un homme revenu à la religion, qui atteste qu'il avoit résolu avec quelques philosophes de la détruire autant qu'il seroit en lui. C'est une preuve à joindre à mille autres, de l'existence d'un complot anti-chrétien. On a voulu quelquefois le révoquer en doute, et quelques intéressés ont taxé d'exagération ce qui a été dit à cet égard. Mais quand mille autres faits ne démontreroient pas cette ligue et ces efforts combinés, comment résister au témoignage d'un homme grave, d'un savant, d'un vieillard respectable, qui avoue qu'il s'étoit lié avec quelques philsophes pour détruire autant qu'il seroit en lui la religion? Com ment ne pas être frappé d'un tel aveu? Comment ne pas voir la liaison de ce fait avec tant d'autres qui attestent la formation d'une ligue contre la religion? Au surplus, M. Larcher persista daņs lus hoño

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rables sentimens qu'il témoigne dans cet écrit. Il a vécu encore 17 ans depuis qu'il avoit dressé sa déclaration, et il a passé ces 17 ans dans la pratique des vertus chrétiennes. Sa déclaration existe en original, Nous l'avons lue avec intérêt, et nous ne doutons pas qu'elle ne fasse le même plaisir à nos lecteurs.

Fragmens d'une traduction de Job.

Ces fragmens nous sont adréssés par un abonné qui nous demande notre avis sur leur mérite. Nous lui dirons franchement qu'ils ne sont pas tous de la même force; que plusieurs auroient besoin d'être retouchés; que son style n'est pas assez serré; qu'il y a quelques répétitions. Voici ce que nous avons trouvé de mieux à citer dans son envoi. L'auteur a probablement songé plus d'une fois à la chute de celui sous lequel nous gémissions il y a un an:

Qui peindroit d'un tyran les cruelles alarmes?

En vain s'enivre-t-il du succès de ses armes.

Il tremble au moindre bruit; la nuit lui fait horreur;
Jusqu'au sein de la paix il frémit de terreur,
Ainsi qu'un rocher tremble au fort de la tempête.
Un glaive teint de sang brille et pend sur sa tête....
Jadis, rempli d'audace et d'un front menaçant,
Il opposoit son bras au bras du Tout puissant,
Et s'armant contre lui d'un orgueil indomptable,
Aux traits même du ciel se crut invulnérable...
Il a tombé pourtant. Surpris dans ses filets,
Il voit s'évanouir ses superbes projets.

En vain il s'appuyoit sur quinze ans de victoire,
En vain il étaloit sa puissance et sa gloire.
De son trône hautain soudain précipité,
Loin des bornes du monde il se voit transporté.
Il crut de son éclat environner sa race,
Et déjà de son nom on recherche la trace....
Tel sera le mortel qui, dans son insolence,
D'un Dieu juste et puissant affronte la vengeance.
Trompé dans ses calculs, son vain et fol orgueil
Par ses mains même aura préparé son cercueil.
Il rougit des excès d'une audace insensée,
Il se voit confondu dans sa folle pensée.
Tel d'un insecte vil se rompt le fil léger.........

N. B. C'est par erreur que les Sermons de M. l'abbé SIMON ont été annoncés, dans notre No. XLVIII, aux prix de 8 fr. et fr. 50 cent. port franc; il n'est que de 5 francs, et 8 fr, port franc.

TRADITION de l'Eglise sur l'institution des évéques (1).

SECOND ARTICLE.

DANS l'état actuel de la littérature, l'apparition d'un livre de la nature de celui-ci est presque un phénomène et un prodige. La décadence des études ecclésiastiques ne permettoit guère d'espérer de ces productions vastes et savantes qui demandent du temps, des recherches, et une connoissance approfondie de l'antiquité. Nous n'avons plus de ces corps voués au travail, où se préparoient, dans le silence de la retraite, des entreprises utiles, où le goût de l'érudition et de la critique se perpétuoit comme par tradition, et où toutes les parties de la science ecclésiastique étoient cultivées avec zèle. Nous ne sommes plus au temps des Sirmond, des Petau, des Mabillon, des Sainte-Marthe, et des autres laborieux et infatigables cénobites qui débrouilloient le chaos de l'histoire, interrogeoient les monumens, recueilloient les écrits des Pères, et servoient l'Eglise et la religion par leurs utiles recherches et par des collections précieuses. Les congrégations où se formoient ces hommes rares ont disparu, et avec elles les secours qu'elles offroient, les bibliothèques qu'elles avoient amassées, les entreprises qu'elles avoient commencées. Leurs ouvrages restent interrompus, et nous n'avons plus à espérer de les voir continuer au milieu de la disette où nous sommes de bons livres et de bons travailleurs.

Dans un tel état de choses, ce n'est pas un événement peu surprenant que de voir publier un ouvrage d'érudition ecclésiastique, et où les monumens de l'antiquité soient cités, comparés, discutés; un ouvrage où

(1) 3 vol. in-8°.; prix, 16 fr. 50 cent,, et 21 fr. franc de port. Tome II. L'Ami de la R. et du R. N°. 50. Bb

la théologie et l'histoire se prêtent un mutuel support, et où la critique soit appelée au secours du dogme. Indépendamment de la nature du sujet, il falloit du courage pour se livrer à de telles études, dans des temps de révolution, au milieu du deuil de l'Eglise, des troubles de l'Etat, du feu des guerres et du fracas des commotions politiques. Il falloit avoir la tête forte pour ne pas être absorbé par les images du présent et par la terreur de l'avenir, et pour pouvoir embrasser dans ses recherches un plan aussi vaste, et l'examen de la question la plus importante et la plus étendue. A cette question se rattachoient les monumens de la tradition, l'histoire de l'Eglise, ses droits les plus sacrés, ses intérêts les plus chers. Ces grands objets touchent tous les chrétiens, et nous croyons que les lecteurs nous sauront gré de leur détailler les différentes parties d'un travail dont la religion a tant à se féliciter, et auquel doivent applaudir tous ceux qui prennent part aux biens et aux maux de cette mère commune des fidèles.

L'ouvrage commence par une introduction qui traite de la primauté du saint Siége, et où on montre l'origine, les preuves, l'étendue et les effets de cette prérogative. Cette prérogative est fondée sur les paroles du Fils de Dieu. C'est lui qui a dit à Simon, fils de Jean: Tu es Pierre, et sur cette pierre je bátirai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle. C'est lui qui a dit au même apôtre : J'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point, et une fois converti, affermis tes frères. C'est encore lui qui a dit à Pierre: Paissez mes agneaux, paissez mes brebis. Toutes ces paroles sont la source et le fondement de l'autorité du 'saint Siége. Car sans doute les promesses, les prières et les ordres de Jésus-Christ ne doivent pas être comme ceux des hommes, et celui sur lequel il a báti son Eglise, comme sur un fondement solide, celui qu'il a chargé d'affermir ses frères et de paître ses brebis, doit avoir un pouvoir analogue à cette haute mission. Le Seigneur a

prié pour lui, afin que sa foi ne défaille point. Qui oseroit dire que la prière du Fils de Dieu aura été vaine et stérile? Il faut donc reconnoître dans les successeurs de Pierre une autorité suréminente et centrale qui s'étend sur toute l'Eglise. Ne lui accorderons-nous qu'un privilége d'honneur, qu'une dignité sans pouvoir? Mais un tel titre, qui ne seroit propre qu'à flatter l'orgueil, ne seroit pas dans l'esprit de l'Evangile et de son divin auteur. Cette primauté est aussi de juridiction. Les clefs du royaume des cieux ont été données à Pierre. Il lui a été dit que tout ce qu'il lieroit sur la terre seroit lié dans le ciel, et que tout ce qu'il délieroit sur la terre seroit délié dans le ciel.

Quelques-uns, à qui tant d'autorité fait ombrage, ont imaginé, pour l'atténuer, un systême de gouvernement un peu différent. Se flattant de s'y entendre mieux que le fondateur même de l'Eglise, ils détournent à un autre sens ses paroles les plus précises et ses promesses les plus magnifiques, et ils transmettent à l'Eglise universelle les pouvoirs accordés à son chef. Ils supposent que c'est à elle que Jésus-Christ donna les clefs quand il les confia à Pierre. Ils séparent, en quelque sorte, le corps des pasteurs de son chef, sans faire attention que l'un ne peut exister sans l'autre. Ils supposent que ce sont les pasteurs qui se donnent les clefs, comme s'ils pouvoient se les donner à eux-mêmes. Ils comparent sérieusement la constitution de l'Eglise à celle de la république de Venise. Ce n'étoit pas ainsi que pensoit l'antiquité. Les premiers Pères ne parleut jamais qu'avec respect du pouvoir de la chaire apostolique et du Pontife qui y est assis. Les docteurs de l'orient, comme ceux de l'occident, proclament les droits de l'Eglise de Rome, recourent à ses décisions, la regardent comme la source, comme le centre, comme le lien de toutes les églises. Les plus grands Papes eux-mêmes relèvent avec magnificence les prérogatives de leur siége. Les plus saints d'entr'eux en ont paru les plus jaloux.

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