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C-3352 1336 V3

INTRODUCTION.

ANDOVER HARVARD THEOLOGICAL LY CAMBRIDGE: MAD..

Toutes les personnes qui liront la Raison du Christianisme se demanderont, à la vue de ce faisceau imposant des plus grandes autorités en faveur de la révélation chrétienne et de la divinité de Jésus-Christ, comment les hommes qui dans le dernier siècle attaquèrent le Christianisme ont osé présenter la croyance à la religion comme une preuve de petit esprit.

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Rien n'est comparable à la mauvaise foi avec laquelle cinq ou six écrivains du 18e siècle ont agi à l'égard de leurs prédécesseurs et contemporains, tant étrangers que nationaux, si ce n'est peut-être la grossière imposture qui a présidé à leurs discussions sur les livres saints. Si à l'égard de ceux-ci ils ont employé les falsifications, les alté rations, les imitations infidèles, ils ont imaginé à l'égard des autres un moyen beaucoup plus facile, l'omission et la suppression. Il n'était pas possible de cacher aux hommes l'existence d'un Ancien et d'un Nouveau-Testament, ces évangiles devenus le code du monde chrétien, de ces actes admirables de l'apostolat et de ces sublimes instructions des pères de l'Église, qui ont répandu la lumière et la civilisation sur toute la terre. C'était un malheur pour les matérialistes que l'existence de ces livres : les anéantir n'était pas possible; mais profiter de ce que les textes primitifs ne sont à la portée que d'un petit nombre d'intelligences; travestir le sens des expressions, le détourner de son caractère et de sa simplicité; décolorer et même altérer | la beauté des images, pour leur substituer de grossières imitations ou des exagérations révoltantes; accompagner enfin cette œuvre d'iniquité de commentaires plein de dérision et de mépris, telle a été la tactique d'une incrédulité sans pudeur, qui avait besoin de troubler les sources pures du spiritualisme chrétien pour introduire dans les esprits des doctrines matérialistes.

Ce système de falsification, de mensonge et de dénigrement a été porté jusqu'à l'effronterie, même jusqu'au sacrilege. Mais nous ne voulons pas dresser ici un acte d'accusation; notre seul but est de démontrer la mauvaise foi d'une secte qui n'a dù qu'à son audace les déplorables succès qu'elle a obtenus.

La conspiration philosophique ne s'est pas bornée là. C'eût été une grande contradiction que de rendre la Bible méprisable et ridicule, de présenter le Christianisme tra- | vesti et parodié, de l'outrager dans sa source divine, et de laisser subsister cependant les témoignages favorables à la religion laissés par les plus grands génies qui aient éclairé le monde. Fallait-il permettre que l'on sût au midi de l'Europe que Newton, Bâcon, Leibnitz, Euler et d'autres illustres maîtres de la science humaine avaient cru et enseigné ce dont se moquaient les encyclopédistes? Quelle humiliation pour Voltaire et la secte d'incrédules, si le monde avait pu être convaincu que la doctrine nouvelle se trou

vait combattue par les écrits de ce que la philosophie et la science ont eu de plus profond et de plus élevé!

Et comme on mentait au monde intelligent, il en coûtait peu de commettre une fraude plus facile en dérobant aux regards des pièces accusatrices. Tel a été le système généralement suivi par la conspiration philosophique dans les publications qu'elle a faites des œuvres de ces grands génies. On ferait une histoire fort curieuse de tous les moyens employés pour la poursuite de cette guerre de l'impiété contre le Christianisme, histoire aussi curieuse que le serait celle des faussaires, et, nous devons le dire, des filous dans tous les genres: guerre de mensonges, d'escroqueries et d'escamotages dont il ne nous est permis en ce moment que de signaler quelques traits.

Le parti a publié de 1799 à 1802, à Dijon, une traduction portant le titre trompeur d'OEuvres complètes de Båcon. Dans cette production informe et infidèle, tout ce que nous avons présenté des opinions religieuses de l'illustre chancelier a été omis. Le savant et consciencieux Deluc, qui avait fait de Bâcon une étude particulière, indigné de la mauvaise foi avec laquelle le traducteur avait fait disparaître tous les passages favorables au Christianisme, publia à Berlin, en 1800, une brochure très curieuse sous le titre de Bacon tel qu'il est, ou Denonciation d'une traduction française des ouvrages de ce philosophe. Il fit paraître peu de temps après un livre d'un grand intérêt, le Précis de la philosophie de Bâcon et des progrès qu'ont fait les sciences naturelles, dans lequel se trouvent réparées quelques-unes des omissions volontaires de l'éditeur des œuvres complètes.

Voilà un tour de passe-passe bien constaté. Nous pourrions dire: Ab uno disce omnes; mais il nous importe de montrer toute l'extension que ce système a reçue. Dans ses Lettres à une princesse d'Allemagne, tout en traitant des questions relatives aux sciences, Euler voulut établir en forme de démonstration l'immatérialité de l'âme et défendre, comme il le disait lui-même, la révélation contre les esprits forts. Condorcet publia une édition de ces lettres.

Que fait-il? Ecoutons-le lui-même. Il s'est proposé de purger ces lettres des choses qu'il pensait qu'une raison éclairée ne pouvait que désapprouver. C'est ici qu'il faut admirer la hauteur de l'orgueil philosophique. M. Condorcet substitue sa raison à celle d'Euler, qu'il ne trouve pas assez éclairée, et il se permet de purger les œuvres d'un savant qui a commandé l'admiration à toute l'Europe.

Et Newton! ce puissant génie, après avoir demandé aux cieux, à la terre, à la lumière, à l'air leurs conditions et leurs lois, avait été conduit par sa raison à la méditation et à l'étude des saintes Ecritures. Les Prophètes, l'Apocalypse, les Épitres de saint Jean, de saint Paul, furent surtout les objets d'une sérieuse application de la part

de cet esprit si vaste et si sublime. Les preuves de la divi- | fonctions de second éditeur, a renforcé le travail de nité de Jésus-Christ et de sa mission lui ont apparu dans Condorcet de nouvelles notes dans une édition qui paces témoignages antérieurs et postérieurs à la rédemption, rut en 1778. A la lecture de ce recueil et du double comet il les a mises en évidence dans plusieurs écrits que les mentaire qui l'accompagne, le livre tombe des mains. La · éditeurs et compilateurs de ses œuvres se sont bien gardé mauvaise foi et l'indécence y éclatent à chaque page, sans de traduire. Comme Barrow, son maître, et Clarke son parler de la faiblesse du raisonnement dans les passages où disciple, Newton était pénétré de l'esprit du Christianisme, les auteurs ont voulu être sérieux. Si ce travail est un démais ni le prétendu philosophe de Ferney, qui s'est paré plorable monument des efforts de l'incrédulité, il atteste du d'un rayon de cette grande gloire, ni la femme bel esprit moins l'impuissance des auteurs dans une triste cause, par qui a cru comprendre les principes de la philosophie natu- la perfidie des moyens qu'ils sont réduits à employer. relle, n'ont pas voulu suivre cette grande intelligence dans ces voies où suivant Newton la philosophie expérimentale conduit à être Chrétien.

« Ces moyens sont ceux qu'emploient les volcars qui méditent une surprise. Si la lumière les importune, ils l'éteignent ou la mettent sous le boisseau. »

Il est à remarquer, en voyant tant de duplicité, que les écrivains qui ont pris la défense de la religion n'ont jamais redouté de produire les argumens les plus forts de leurs adversaires.

L'accueil fait à la première édition de la Raison du Christianisme prouve que le siècle a besoin de croire et que l'incrédulité lui était imposée en quelque sorte par l'autorité de cinq ou six écrivains dont le style avait fait illusion

Plusieurs éditions des œuvres de Locke ont été publiées en France par les soins de la secte philosophique; mais elle n'y a pas compris le Christianisme raisonnable, livre dans lequel l'auteur de l'Essai sur l'entendement a voulu montrer que la religion chrétienne n'offre rien de contraire à la raison, laquelle s'accorde avec la foi dans ce qu'elle explique, ou s'y soumet dans ce qui lui est supérieur. Le philosophe anglais indiquait dans cet écrit ce que Leibnitz avait touché avant lui, la possibilité de l'accord des diffé-sur leur défaut de jugement et de science. Cette autorité rentes communions chrétiennes sous un même symbole usurpée s'est trouvée détruite par les noms seuls des Bâcon, qu'il résumait ainsi : « Jésus est le Messie. » Mais cet des Newton, des Leibnitz, des Descartes, des Euler, des accord était trop contraire aux vues de la conspiration Erskine, des Stolberg, des Grotius, dont nous avons rephilosophique, et la secte fit subir au Christianisme rai- produit les imposans témoignages en faveur de la divinité sonnable le sort réservé par elle à toute opinion favorable à de la religion chrétienne. De l'ironie, le siècle est forcé de la foi chrétienne. passer à l'examen ; et cet examen ne peut mieux se faire que dans les ouvrages de ceux qui, ayant nié l'autorité des traditions, ont été obligés d'établir à force de travail et d'investigation les preuves de l'inspiration des Écritures, de la divinité de Jésus-Christ et de l'établissement miraculeux du Christianisme. Ainsi, non-seulement le nom de ces hommes est une puissance dans cette question, mais leurs écrits sont de nature à compléter le retour de l'opinion pu

Un des penseurs les plus profonds, des esprits les plus pénétrans et en même temps les plus ingénieux appartenant à la France, Blaise Pascal, avait plus d'un titre au respect des philosophes. Il ne l'ont pas plus respecté que Bâcon, Euler et Newton. L'audace ici a été portée jusqu'à l'impudeur: Condorcet donna en 1776, une édition des Pensées, précédées d'un éloge de l'auteur. En lisant ce livre infidèle et informe, on ne s'aperçoit que trop que l'éditeur ablique; car qui pourrait mieux examiner, sous le point de suivi la loyale invitation que lui adressait Voltaire : « Mon vue historique, philosophique et scientifique, tous les ami, ne vous lassez point de répéter que, depuis l'accident faits divins du Christianisme que ces esprits si vastes et du pont de Neuilly, le cerveau de Pascal était dérangé. si positifs qui dominent encore aujourd'hui toutes les réVoyez un peu la sincérité philosophique! c'est depuis l'ac-gions de la métaphysique et des sciences? cident du pont de Neuilly qu'ont été composées les Pro- Le temps va bientôt arriver où il sera établi que l'incréduvinciales, les Solutions des problèmes, la Lettre touchant lité est un préjugé et que c'est la foi seule qui est raisonnable. la possibilité d'accomplir les commandemens de Dieu, et enfin la Dissertation sur le véritable sens des paroles du concile de Trente.

Écoutez ce que dit, sur cette falsification scandaleuse, un des écrivains de la Biographie universelle, ouvrage qu'on n'accusera pas d'un excès de partialité pour les idées catholiques : « Cette édition, dit M. D. Raymond, auteur de l'article Pascal, ne mérite aucune confiance; l'éloge contient des erreurs et se ressent, sur beaucoup de détails, de l'esprit dans lequel il a été composé. L'auteur affecte de se contredire lui-même dans des notes, ce qui jette un louche continuel sur ce qu'il dit de son héros, toujours placé de cette manière entre la louange et le sarcasme. Ce procédé est celui d'un écrivain qui ne respecte pas plus le public qu'il ne se respecte lui-même. Les Pensées de cette édition sont incomplètes ; quelques-unes sont mutilées, et d'autres même falsifiées. Voltaire, faisant les

DE LA RÉUNION DES COMMUNIONS CHRÉTIENNES.

Depuis l'époque funeste pour l'humanité où d'abord les Grecs et ensuite les protestans se séparèrent de l'Eglise, depuis la fin de ces temps où la foi catholique romaine tendait de plus en plus chaque jour à s'universaliser sur la terre, bien des hommes célèbres ont développé, dans des ouvrages lumineux, l'indispensable nécessité qui existe de réunir les croyances chrétiennes, de ramener tous les Chrétiens dans le giron de la primitive Église.

Aux jours où ces grands hommes de toutes les religions écrivaient et se réunissaient pour aplanir les difficultés qui s'opposent à la réunion des communions chrétiennes, cette réunion était, comme elle l'est encore aujourd'hui, un universel moyen de salut spirituel; mais elle serait de plus,

à l'époque désastreuse à laquelle nous sommes arrivés, l'unique moyen de salut temporel.

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qu'ils trouvent à dominer la religion de leur pays, et sacrifier au besoin qu'ils doivent ressentir d'aider l'accomplissement du bien immense qui résulterait d'une seule religion existant sur la terre, en trouveraient facilement les moyens; il leur suffirait, pour y parvenir, de rectifier les fausses croyances que les protestans entretiennent relativement à la religion catholique romaine, d'affaiblir l'intolérance et de faire céder les préjugés innombrables que les hommes de cette religion entretiennent.

Ces protestans croient encore, et leur princes négligent

L'intérêt des sociétés humaines réclame la fusion des croyances non moins que ne le fait l'intérêt de la religion. Les individus n'ont plus d'autre ressource pour obtenir du repos, les gouvernemens n'en ont plus d'autre pour assurer leur conservation; tous les intérêts poussent done à l'accomplissement de ce principe salutaire : « Une seule « croyance religieuse doit un jour exister dans le monde.» Cependant, il ne saurait paraître possible, même au sectaire le plus fanatisé, qu'une autre religion que la cathode leur apprendre le contraire, que les catholiques romains lique romaine soit celle qui est prédestinée à s'universali adorent les saints; qu'ils font autre chose que recourir à ser. Au défaut de la foi, les faits en fournissent la preuve. l'intercession de la Sainte-Vierge; que pour eux la validité Ne voit-on pas s'user tous les cultes nouveaux, alors que de l'absolution n'est point dépendante du repentir, de la le culte primitif reste dans sa pureté? Elles sont done peu correction et de la réparation. Les protestans voient toudignes d'attention cette foule de religions qui naissent, jours la cour de Rome ambitieuse, menaçante comme elle changent et s'anéantissent journellement! C'est le délire de le fut aux jours où la chaire de saint Pierre était indignel'imagination où se montre la folie des hommes et non pas ment occupée; ils rêvent encore les dépositions des rois, la sagesse du Créateur. Leur anéantissement serait l'ou- les indulgences à prix d'argent et tous les abus dont le vrage d'un jour; mais la religion grecque, qui remonte à concile de Trente et ceux de Milan ont purgé l'Église. Ce sont autant de faussetés, mais des faussetés accrédiquatre siècles, la religion protestante, qui en atteindra bientôt trois, ont des cultes passés en habitude chez beau-tées parmi les protestans, et qui s'opposent à la réunion des coup de peuples, et qui seront plus difficile à ramener à communions chrétiennes. Ces obstacles disparaîtraient, si les souverains des états protestans remplissaient le devoir l'unité. l'Évangile impose à leur conscience de faire connaître la vérité par tous les moyens qui sont en leur pouvoir, et s'ils faisaient aussi fidèlement sentir à leurs peuples l'obligation dans laquelle ils sont de rendre à saint Pierre ce qui lui appartient, que la cour de Rome professe ouvertement la face de l'univers la nécessité de rendre à César ce qui

Cependant le passé autorise à fonder des espérances sur l'avenir. Un traité d'union a déjà existé entre les religions romaine et grecque. Ce fut sous Clément VIII qu'il fut sigué entre le pape, d'une part, et les évêques russes, de l'autre. Paul V et Benoit XIV ont depuis reconnu que, dans un cas de réunion complète, ils ne prétendraient qu'à l'intégrité des dogines, que nul ne peut changer sans renonciation aux usages qui sont établis.

La Sorbonne, elle aussi, a tenté la réunion des deux Églises grecque et romaine. Ce fut l'entremise du czar par en France Pierre 1er lui-même et à l'époque de son Voyage que la Sorbonne proposa aux évêques russes un arrangement sur les bases suivantes : on offrait à l'Eglise grecque de conserver sa forme liturgique et sa discipline, de laisser subsister l'article dogmatique concernant la procession du Saint-Esprit, dont la dissidence ne roule dans le fait que sur une dispute de mots signifiant une même chose. Quant à la consécration de l'Eucharistie, la Sorbonne reconnaissait qu'elle n'est pas moins bonne avec du pain levé qu'avec du pain azyme.

Ces négociations ont depuis été renouvées à Pétersbourg par le cardinal Litta, sous les règnes de Paul et d'Alexandre.

Le protestantisme, religion qu'un grand nombre de peuples professent, ne refuse la foi à rien de ce que contient l'Evangile; seulement il met pour interprète l'autorité des fidèles à la place de celle des successeurs des apôtres, que Jésus-Christ a chargés de ce soin. Mais une dissemblance encore plus grande provient de ce qu'à la prédication et à la communion près, le protestantisme fait disparaître la presque totalité du culte catholique romain. Ce vide matériel passe de l'Église dans l'âme des protestans; car, dans tous les où il en existe, on leur fait facilement reconnaître que, s'ils ont la morale de l'Evangile, ils n'en ont point la paix. Leur princes, s'ils pouvaient comprimer la vanité

pays

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que

à

est à lui.

L'intérêt personnel, au défaut de sentimens religieux, devrait, à l'époque où nous vivons, dire aux princes protestans que c'est la diversité des croyances religieuses qui fait naître la diversité des croyances politiques; qu'une foi s'anéantit avec l'autre, que si la réforme à sa naissance leur a procuré des richesses, c'était pour les leur arracher plus tard avec leurs trônes, et que les peuples qu'on encourage à constester l'autorité du souverain spirituel en viennent bien vite à contester celle de leur souverain temporel. Henri VIII, plus que tout autre souverain, protégea la réforme, et le trône d'Henri VIII fut le premier renversé; et du renversement de ce trône provient le danger que courent à présent tous les autres. Partout où la loi du Créateur est méconnue, celle du prince ne tarda point à l'être; le doute passe si vite de l'âme dans l'esprit, que le succès d'une réformation conduit promptement à l'autre, et partout le pouvoir du prince s'affaiblit dans la proportion où le culte du vrai Dieu diminue.

Le remède à tant de maux déjà existans et aux maux sans nombre que l'impiété du siècle nous prépare se trou-. verait dans la réunion d'un concile œcuménique, uniquement assemblé pour procéder à la réunion des communions. Ce n'est que par ce moyen que l'invariabilité des articles de foi pourrait être fixée, que les pratiques du culte pourraient être universellement arrêtées. Ce serait à l'empereur de Russie, qui soumet à son sceptre presque tous les peuples de la religion grecque, ce serait aux princes protestans, à interroger leurs conscience, à demander à leurs intérêts s'il

est temps d'arrêter le torrent révolutionnaire que soulève | protestantes dans les mêmes réunions, et à leur faire adopl'impiété, et si pour y parvenir il existe un autre moyen que celui d'un concile œcuménique, dans le but d'amener le jour où tous les hommes seront d'accord au lieu d'être divisés.

Si Dieu permettait que par ce moyen les croyances et les cultes en vinssent à se confondre en Europe, cette uniformité se généraliserait bien vite, elle passerait promptement de notre partie du monde dans les autres. Le spectacle magnifique de cent cinquante millions d'hommes agenouillés devant un même culte au Créateur serait assez imposant pour que, dans la voix de tant de nations, l'univers en vint à reconnaitre la voix de Dieu. La Raison du Christianisme n'a été entreprise que dans ce but.

ter une liturgie qui emprunte une partie des cérémonies du culte catholique romain. Cette circonstance fournit l'incontestable preuve qu'une conciliation est possible.

Un tel progrès n'avait point encore eu lieu aux différentes époques où la réunion de tout ou partie de communions | chrétiennes a été tentée; il n'y avait alors ni une facilité aussi grande, ni une aussi grande nécessité pour exécuter la chose que la sagesse prescrit et que l'Evangile commande. On avait sans doute, alors comme à présent, à sauver les individus du funeste avenir que prépare l'hérésie; mais on n'avait pas à tirer les sociétés de la situation la plus déplorable dans laquelle elles aient jamais existé; il ne fallait dans le siècle dernier ni reconstituer les sociétés qui se disCette union des cultes chrétiens, dont un indispensable solvent maintenant, ni raffermir les trônes qui s'ébranlent besoin d'ordre fait en tous lieux sentir la nécessité, a déjà aujourd'hui, ni raviver la foi qui se perd de nos jours; été tentée de beaucoup de manières et dans des temps bien toutes choses qu'il n'est possible de parvenir à exécuter spondivers. Dès les premiers jours de la réforme, les ministres tanément qu'en rentrant tous à la fois sous le joug du Saude Strasbourg entreprirent de concilier Luther avec Zuin- | veur, de celui qui a dit : « Il viendra des jours où ma loi gle, de réunir les Chrétiens réformés à ceux de la confes- sera celle de tout l'univers. » sion d'Augsbourg. Il y eut sur ces matières des conférences à Marsbourg, à Sultzbach. Le savant Bruce eut recours à une multitude de subterfuges pour concilier les sectes, mais il n'y parvint point; l'hérésie alors naissante n'avait encore rien perdu de son exagération.

Il en est autrement aujourd'hui que les religions dissidentes tombent dans un tel vague de croyance, qu'on voit à chaque instant naître des sectes nouvelles. Il ne reste maintenant aux protestans que la morale de l'Évangile, et cette morale est celle sur laquelle la religion catholique romaine est fondée; ce qui doit nécessairement faciliter beaucoup le moyen de s'entendre. La secte des piétistes, qui se répand maintenant en Europe, trouverait-elle tant d'adeptes, si les hommes ne sentaient pas le besoin de se réunir dans une seule croyance!

Jésus-Christ est l'Homme-Dieu pour les Grecs comme pour les protestans; nos devoirs sont les mêmes, et nos espérances se confondent. Tant de similitude conduit au rapprochement. Quelques interprétations différentes de la parole sacrée, des usages dissemblables, une suprématie différente sont ce qui nous sépare; mais, sur ces différens points, serait-il donc impossible de se réunir, si un concile œcumé nique était assemblé? Il n'est donc qu'une réunion des communions chrétiennes qui soit praticable, c'est celle qui serait fondée sur l'unité de la foi. Ni l'hétérodoxie, ni la philosophie ne sauraient parvenir à mettre d'accord les Romains, les Grecs et les protestans, parce qu'elles agissent en dehors de la foi, et que la foi seule peut déterminer une aussi grande quantité de princes et de peuples à sacrifier des habitudes et des préjugés au devoir d'accélérer la venue des jours où il n'y aura qu'une croyance dans le

monde.

Parce qu'elles sont complètement en dehors de la foi, l'hétérodoxie et la philosophie ne sauraient atteindre le résultat de réunir les peuples dans de mêmes croyances et de leur faire adopter des principes semblables.

Dans tous les pays, ce n'est ni par le mensonge, ni par le sophisme qu'on peut fixer la raison humaine et que les consciences peuvent se coordonner. Les préceptes hétérodoxes et philosophiques sont des nouveautés que l'homme s'approprie par l'étude; les maximes évangéliques sont des sentimens que l'homme trouve en lui-même aussitôt que son attention se fixe; de là vient que l'univers peut s'approprier les uns, tandis que les autres peuvent tout au plus dans le temps s'accréditer successivement en différentes localités. Et de là suit la conséquence que, par la foi seulement, et non par les hétérodoxies ou la philosophie, toutes les croyances religieuses peuvent se fondre.

Quelques-uns diront peut-être : on peut aussi par la politique atteindre ce résultat ; mais ceux-là comme les autres se trompent. Rien d'universel ne saurait provenir d'une force qui diverge en différens lieux. Il faut pour réunir l'espèce humaine dans les mêmes croyances ne reconnaître qu'un intérêt, l'intérêt de Dieu; et la politique sacrifie à autant d'intérêts divers qu'il y a de souverains différens. Un souverain pontife seul existe dans le monde, et les rois sont nombreux; on ne vit jamais le chef de l'Église faire plier la religion aux intérêts des localités, et c'est ce que font les princes séculiers, en tous pays où, par le schisme, ils sont parvenus à se rendre les souverains dominateurs de la religion.

En Prusse, par exemple, le monarque actuellement régnant a bien entrepris d'opérer la fusion des cultes : cela est même devenu sa principale affaire, celle à laquelle il donne son temps et consacre son pouvoir; mais quelle fusion

Il faut le reconnaître pour ne se point égarer, une réunion fondée sur l'unité de la foi est la seule qui soit possi-veut-il faire? Une fusion hétérodoxe, fondée sur des forble, parce qu'à de faibles différences près l'unité des croyances existe déjà dins les communions chrétiennes. Quant à l'unité du culte, on a des motifs pour la croire possible aussi, depuis qu'on a vu l'Allemagne, en plusieurs états différens, facilement parvenir à confondre toutes les sectes

mes et sur l'abandon de la foi; une fusion politique qui fortifie par leur assimilation quelques Églises protestantes et renverse toutes les autres ; une fusion contre laquelle proteste la nation prusienne tout entière par l'ouverture spontanée de temples piétistes. On marche en Prusse vers le

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