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MARDY, III. JOURNE'E.

La mort défirable au Chrétien comme membre de Jesus-Christ, pour accomplir fon corps mystique.

L

Adveniat regnum tuum.

Que votre regne arrive.

'HOMME n'eft rien dans la nouvelle création, que ce qu'il eft en JesusChrist;car c'eft en lui qu'il eft (a) créé après avoir été élu en lui avant la création du monde (b); c'eft en lui qu'il eft appellé (c) qu'il eft (d) beni, qu'il eft (e) adopté, qu'il eft (f) fanctifié, qu'il eft (g) agréable à Dieu, (b) qu'il eft fecond en bonnes œuvres, & enfin c'eft en lui qu'il fera glorifié ; ou, pour mieux dire encore, c'eft J. C. même qui fera glorifié dans fes faints membres,& qui fera rendu admirable dans tous ceux qui auront cru en lui (i), & c'eft ainfi que

(a) Ephef. 2. 10.
(b) Ephef. s. 4.
(c) Ephef 1.1.
(d) Chap. 1.3.
(c) Verf. 5:

(f) Ephef. 2. 5.
(g) id. 1. 6.
(h) ibid. 31.
(i) 2. Thessal. 1. 10.

s'établit le royaume de Dieu dont nous demandons tous les jours l'avenement.

Or tout ce que nous fommes, & tout ce que nous ferons en lui, c'eft encore pour lui que nous le fommes & que nous le ferons. Dieu nous ayant prédestinez (a), dit S. Paul, à l'adoption des enfans par Jefus-Chrift, pour J. C. même, in ipfum ; c'eft-à-dire, pour lui donner des membres, & en les uniffant à ce chef adorable, former ce corps mysterieux qu'il aura dans le ciel durant toute l'éternité, & qui ayant commencé d'être formé dés le commencement du monde, ne fera parfait & accompli que par la mort du dernier des élûs. Ils font donc fa plenitude & fon entier accompliffement. C'est pour cela que J. C. se forme en tous fes membres, & y accom plit de nouveau tous les myfteres, qui ont déja été accomplis en fa perfonne (b). Corpus ejus & plenitudo ejus qui omnia in omnibus adimpletur.

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Que fi dans un fens nous fommes pour Jefus Chrift notre Chef comme fes membres, dans un autre fens, nous fommes pour Dieu fon Pere; puifque ce grand corps qui fe forme par l'union des membres, avec le Chef, ne s'éleve (b) Ephef. 1. 23.

(a) Ephef. 1.5.

que

pour

pour être un feul fils de Dieu, un temple éternel de fa majefté & de fa gloire, un feul royaume de fa charité, royaume dont le Fils de Dieu même, felon la verité de la parabole(a),eft venu prendre poffeffion pour fon Pere, & qu'il lui remettra entre les mains lorsqu'il l'aura entierement reconquis, qu'il aura détruit tout empire, toute domination, & toute puisfance contraire (b): car-Jefus-Chrift doit regner jufqu'à ce que le Pere lui ait mis tous fes ennemis fous tes pieds (c), & que la mort, qui eft la derniere de tous, foit détruite. Lors donc que toutes chofes auront été affujetties à Fefus-Chrift, alors le Fils fera lui-même affujetti à celui qui lui aura affujetti toutes chofes ; c'est-à-dire, que Jefus-Chrift accompli & parfait par Funion de tous fes membres, affujettira lui-même & le corps & le chef de ce corps à celui qui lui aura affujetti toutes chofes, afin que Dieu foit tout en tous (d). Nous connoiffons par ce que nous venons de dire, que nous demandons à Dieu par cette priere, Que votre regne arrive, trois chofes qui ne peuvent s'accomplir parfaitement dans cette vie.

.

D

(a) EnS. Luc, chap. 19. 11. (b) 1. Cor. ch.15. 24. (c) verf. 25. (d) verf. 28.

G

C

Nous demandons la perfection du regne & du royaume de Dieu dans les cœurs par leur entier affujettiffement à fon fouverain pouvoir: & nous avons grand fujet de le demander, & par la vûë des interêts de Dieu même, & pour notre propre confolation. Car quel trifte & défolant fpectacle aux yeux de la foi, de voir comment Dieu eit fervi dans le monde prefent, & par ceux qui fe font honneur d'en être les citoyens, & par ceux qui font profeffion de n'en être pas. La plus grande partie du monde eft dans l'idolâtrie & dans l'infidelité, & le diable y eft adoré en la place de Dieu. Entre ceux qui portent le nom de Chrétiens, le plus. grand nombre eft miferablement engagé dans le fchifme ou dans l'héréfie. Et dans cette poignée de Catholiques qui reftent, helas! qu'il s'en faut bien que Dieu y regne! Ce qui regne dans la plupart, c'est l'impieté, Firréligion, ou la fuperftition envers Dieu; une vie molle, voluptueuse & payenne à l'égard de foi-même; envie, fcandale, & injuftices envers le prochain ; & l'on diroit à voir les mœurs de la plûpart, qu'ils ne demeurent dans l'Eglife que pour faire regner le peché dans,

le royaume même de Dieu, & pour renoncer à fon regne plus infolemment par leurs œuvres, que ne font ceux qui les repréfentent dans l'Evangile par ces paroles (a): Nous ne voulons point que celuici foit notre Roi. Ceux-ci font bien éloignez de faire cette priere: Que votre regne arrive, auffi bien que ceux dont parle Caffien, quand il dit: (b) Qu'il n'y a point de pecheur ni d'impie qui ofe dire ces paroles, ou faire ces fouhaits; parce que perfonne ne defire de voir le tribunal de ce grand Fuge, lorsqu'il fait que par fa fentence il doit recevoir non la récompenfe de fa vertu, mais la peine de fes crimes.

II.

Mais nous, nous qui faifons profeffion de n'avoir point d'autre roi de nos cœurs que celui qui en eft le Dieu & le maître abfolu; nous qui devons être paffionnez pour l'établissement de fon regne, & qui le voyons attaqué & défolé de toutes parts par le peché ; nous qui devons être pénetrez de douleur de voir le regne de la cupidité, &, pour parler avec l'Ecriture, le regne de l'enfer s'établir par toute la terre fur les ruines de celui de Dieu, qui eft comme retranché & refferré dans un

(a) Luc. 19. 14. (b) Cassien. 9. č. 18.

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