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ritables que quand ils font accompagnez des vertus qui forment un vrai Chrétien. C'est pour cela qu'après avoir propofé à ceux qui defireront fe préparer à la mort par une retraite de quelques jours, les veritez qui fervent à la faire regarder comme desirable,on propofe deux vertus chaque jour, l'une le matin, & l'autre le foir, afin que l'on travaille à les renouveller dans fon cœur & à s'y établir plus folidement.

Rien n'eft plus capable de nous foûtenir dans ce travail que la priere: & les modeles que le faint Efprit a eu foin de nous en former lui-même font fans douto les plus parfaits, & ceux qu'il y a fujet de croire qu'il accompagne plus volontiers de fon oction divine. C'eft pourquoi l'on a fait choix de quelques Pfeaumes qui contiennent des affections conformes aux veritez de chaque jour.

Comme il n'y a rien de plus utile & qui foit plus du refpe&t que l'on doit à l'Esprit de Dieu, que de faire une attention particuliere aux veritez qu'il a daigné nous reveler lui-même dans fes Ecritures fur un fujet fi important, on a choifi les, endroits que l'on s'eft fouvenu être les plus propres à ranimer la foi de ces ā iiij

veritez, & les plus capables d'en remplir le cœur dans la méditation.

On n'a point diftingué les fujets de méditation du matin & du foir. Les veritez que l'on propofe chaque jour font affez importantes & affez fécondes pour occuper l'efprit & remplir le cœur durant une journée ; & il eft peut-être plus utile de repaffer en fon efprit, & méditer de nouveau l'après-dînée, les mêmes veritez dont on s'eft entretenu le matin, que de paffer à de nouvelles, & d'accabler en quelque maniere l'efprit par la multitude & la varieté des fujets, qui ne pouvant être envisagez que legerement & comme effleurez, ne peuvent jetter d'affez profondes racines dans le cœur, & avoir, pour ainfi dire, le tems d'y germer, & d'y porter des fruits de durée. Il y a néanmoins de quoi contenter les differens goûts; puifque la varieté ne laiffe pas de fe trouver dans l'unité du fujet que l'on propofe à mediter, & que l'on trouvera toujours diftingué en trois artiticles, qui peuvent fervir à trois differentes heures de méditation,

5.3. Pourquoi l'on a rapporté au PATER les veritez que l'on propofe dans

cette retraite.

Je recommande fort l'ufage de la Prio re du Seigneur dans ces exercices, parce que tous les devoirs du Chrétien fe trouvent renfermez dans le PATER Comme dans un excellent abregé de l'Evangile, ainsi que l'a nommé, il y a plus de quatorze cens ans, un celebre Auteur Ecclefiaftique. Si l'ufage en eft faint & utile dans tous les tems de la vie, il eft encore plus neceffaire dans celui de la mort & dans les jours où l'on s'applique à s'y préparer en fe renouvellant dans fes devoirs, & en

fe purifiant par des exercices de pieté de toutes les fautes de la vie. Car on fçait ce que faint Auguftin a dit en tant d'occafions de cette priere toute celefte: Que c'est la pénitence de tous les jours un moyen excellent de nous purifier des manquemens où la foibleffe de notre nature nous fait tomber durant cette vie, & comme un batême qui fe peut réïterer à

tout moment.

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C'est encore comme une femence divine qui renferme en foi le fruit de toutes

les veritez chrétiennes. C'eft un germe facré d'où naiffent tous les faints defirs que peut former une ame qui cherche Dieu. C'est un chiffre d'un artifice admi rable qui contient tous les fecrets du royaume de Dieu d'une maniere myfte rieufe & cachée, mais où ceux qui ont les yeux de la foi ouverts & attentifs, décou vrent tout ce qu'il faut croire; où ceux qui ont le goût des chofes celeftes, trou vent tous les biens qu'ils doivent efperer; où ceux qui ont le fentiment de la charité vif & délicat, voyent fans peine tout ce qu'ils font obligez d'aimer par la charité chrétienne. C'eft la priere de la charité même, puifque c'eft la priere des enfans de Dieu. C'est l'accompliffement de la Loi, des Prophetes, & de l'Evangile: & je ferois content de ne fçavoir & de ne pouvoir faire autre chofe que de dire mon PATER, fi j'étois fi heureux que de le bien dire.

J'entens par le bien dire, le dire avec un cœur plein d'une foi humble & fimple, d'une efperance vive, d'une charité ardente; avec un coeur détaché de la terre & élevé par toutes les affections vers ce Pere que nous avons dans le ciel ; un cœur brûlant de la foif de l'heritage qui

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hous y eft réservé; enfin un vrai cœur, d'enfant, qui ne connoît & n'aime que fon pere, qui ne fent de befoin que de lui, qui ne cherche que lui, qui ne foupire qu'après lui, qui ne court que vers lui, qui ne s'attache qu'à lui, à qui la main, les yeux, & le fein de fon pere font toutes chofes: fa main pour le conduire, le foûtenir, & le défendre dans le chemin : fes yeux pour veiller fur lui, fur fes pas, fur tous fes befoins: fon fein pour s'y repofer après la course, pour y recevoir fa nourriture, pour y jouir de fes careffes, de fes embraffemens, & de lui-même.

C'est quelque chofe des fentimens que la premiere parole de la priere divine doit reveiller dans tous ceux qui la diront avec l'application de leur efprit & de leur

cœur.

Car il eft prefque impoffible qu'un Chrétien appelle Dieu fon Pere, fans fe fouvenir qu'il eft fon fils, qu'il lui doit l'être, la vie & toutes chofes ; & que ce Pere qui eft dans le ciel, ne l'ayant fait que pour lui, il ne doit vivre que pour lui; qu'il doit tendre continuellement à lui, & afpirer fans ceffe à la vie du ciel, où ce Pere adorable veut faire vivre en lui-même & de lui-même tous ceux de

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