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avec la création nouvelle, grâce à une transformation merveilleuse, et la race des Indiens peuple la terre. Tels sont les traits les moins vagues de cette théogonie sauvage, qui doit varier singulière ment. Il est difficile, nous l'avouerons, de ne pas croire à l'influence d'un peuple plus avancé en civilisation dans la définition des attributs du grand Être qui nous est offerte par le même voyageur: « Ce grand Être n'a eu ni père ni mère; son origine est entièrement ignorée; ils croient qu'il est présent partout, qu'il voit tout, même au milieu des nuits obscures, qu'il est invisible à tous les yeux, qu'il est l'ami des bons et qu'il châtie les méchants. >>

Une sorte de lycanthropie semble présider à l'idée terrible que le peuple se fait des sorciers, qui remplissent chez les Californiens à peu près l'office que les piayes remplissaient chez les Tupis. Ces êtres redoutés se prétendent issus du loup des prairies; et ils expliquent ainsi la nécessité de ces repas abominables, en horreur aux autres Indiens et qu'ils renouvellent sans doute pour se revêtir d'un caractère plus terrible aux yeux de la tribu ou bien seulement en commémoration de quelques mythes sanglants dont l'origine échappe à nos investigations. Nous le répetons néanmoins, la theogonie d'un peuple de la Californie peut être complétement opposée à celle d'une nation voisine, et il peut même y avoir autant de croyances diverses qu'il y a d'idiomes differents; on sait par exemple aujourd'hui que ces terribles Apaches qui ont désolé jadis la Basse-Californie, et qui se font redouter encore sous le nom de Papagos dans le Sonora, obéissaient et obeissent encore, selon toute probabilité, à une sorte de sabeisme. Le soleil, la lune, les étoiles, sont pour eux l'objet d'un culte fervent. Dans l'impossibilité où nous sommes d'indiquer, même sommairement, ces diverses croyances, nous renvoyons aux récits des voyageurs et aux écrits des missionnaires, en faisant observer cependant que quelques-unes des idées fondamentales de ces peuples, aussi bien que plusieurs de leurs cérémonies solennelles, ont été profondément modifiees depuis la découverte; ne fût-ce que par l'introduction de bestiaux nombreux et surtout

par l'usage du cheval. Chez quelques tribus, par exemple, la cérémonie des funérailles emprunte pour les chefs un caractère terrible de l'usage où l'on est d'attacher le cadavre sur la croupe d'un animal indompté et de le contraindre par des cris effrayants (1) à se précipiter dans un abime, il y trouve la mort : et la tribu offre ainsi une sorte d'holocauste à la mémoire du guerrier qu'elle veut honorer.

ARMES DES INDIENS.

CHASSE.
GOUT POUR LA MUSIQUE.

Les armes des Indiens de la Californie sont celles de la plupart des peuplades de l'Amérique, elles en different néanmoins sous quelques rapports: ainsi, l'arc est en usage parmi eux; mais au lieu d'avoir les dimensions admises par les tribus du sud il ne conserve qu'un mètre environ de longueur, et pour conserver plus de force se trouve recourbé dans la partie opposée à la corde. Cette corde elle-même, filee de chanvre sylvestre, est garnie de peau afin d'éviter le sifflement qu'elle produirait en envoyant le trait; la flèche n'est armée ni d'un roseau affilé comme au Brésil, ni d'un fer comme cela a lieu dans certaines localités : elle est garnie à son extrémite d'un silex aigu et tranchant. Telle est, du reste, la force des archers californiens, qu'à une quarantaine de pas ils peuvent traverser de part en part un cheval lancé au galop. Comme cela avait lieu jadis sur les bords du Mississipi, les Californiens, savent préparer adroitement des peaux de cerfs, dont la tête est preservée soigneusement de toute altération visible, et recouverts de ce déguisement trompeur, ils imitent le cri de l'animal qu'ils veulent attirer avec un tel degré de vérité, que celui-ci, croyant bientôt reconnaître une voix familière, s'élance pour ainsi dire audevant du trait qui l'atteint, et fournit aisément aux premiers besoins du sau

dramatique dans laquelle M. de Mofras dô(1) Voy, une scène d'un caractère vraiment crit les obsèques d'un chef. Un autre voyageur moins connu, mais dont les recits sont égalequi eut lieu dans les solitudes voisines des ré ment pleins d'intérêt, raconte un fait analogué, gions dont nous nous occupons. Voy. le R. P. Smet, Voyage aux montagnes Rocheuses et une année de séjour chez les tribus indiennes du vaste territoire de l'Orégon, Malines, 1844, I vol. in-12.

vage (1). La chasse de l'ours présente aussi parmi ces peuples plus d'un trait original. Hâtons-nous de le dire néanmoins, dans la Californie, comme dans les pampas de l'Amérique du Sud, l'introduction du bétail et des chevaux a modifié nécessairement le régime intérieur des Indiens, et a singulièrement accru les ressources de leur vie nomade.

Un fait constaté par tous les voyageurs, c'est le goût inné de ces Américains pour la musique, c'est la faculté extraordinaire qu'ils possèdent de répéter avec une justesse singulière des chants assez compliqués. Les missionnaires ont su mettre à profit cette propension musicale; dans certaines occasions toutefois, ces chants prennent un caractère, presque effrayant pour une oreille européenne. «Ils frappent alors les mains l'une contre l'autre, dit Choris; ils agitent des morceaux de bois fendus et poussent un eri horrible qui ressemble beaucoup au bruit de la toux. » Un sifflement sinistre accompagne ce chœur étrange.

DANSES CARACTÉRISTIQUES.

LA

DANSE MACABRE EN ACTION CHEZ
LES CALIFORNIENS.

Nulle contrée du Nouveau Monde ne présente peut-être une aussi grande varieté de danses que la Nouvelle Californie et en général les régions de la côte nord-ouest, où les nations conservent encore leur originalité primitive. Moins sévères que les missionnaires méthodistes, qui ont impérieusement interdit dans la mer du Sud ce genre de divertissement à leurs catéchumènes, les jésuites, et plus tard les franciscains, firent servir ici les danses indiennes aux pompes du culte; mais nécessairement aussi ils durent les modifier. Dans les forêts, elles demeurent essentiellement dramatiques, et parfois aussi elles sont d'une extrême licence. La plupart du temps elles servent à rappeler quelque circonstance importante de la vie sauvage; la chasse au tigre par exemple, la rencontre de l'ours. Ce qu'il y a d'étrange, c'est qu'elles sont exécutées uniquement par les hommes. On trouvera des descriptions

(1) Voy.du Petit-Thouars, Voyage autour du Monde. Cet ouvrage renferme de curieux détails sur les chasses des Californiens.

exactes de ces danses dans le curieux ouvrage de Choris (1), qui les a même naïvement figurées et qui donne la musique de certains airs propres à régler leur mouvement. Mais il en est une sur laquelle les anciens voyageurs se taisent, et qui a un caractère trop essentiellement original pour que nous n'en reproduisions pas ici la description; elle eût fourni quelques traits excellents à ces vieux peintres du moyen âge, dont la fantasque imagination aimait à s'inspirer des danses macabres.

« Une fois, dit M. Duflot de Mofras, étant campé sur la rivière del Sacramento, nous aperçumes de loin une soixantaine de squelettes qui dansaient une danse guerrière autour d'un grand feu. En approchant, nous reconnûmes que ces Indiens étaient des guerriers Kosumnès qui avaient peint en blanc, sur leurs corps naturellement fort noirs, et avec une exactitude effrayante, toutes les côtes et les ossements de la charpente humaine (2). »

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ÉTAT DE LA CALIFORNIE DURANT LE DIX-HUITIÈME ET LE DIX-NEUVIÈME SIÈCLES. EXPULSION DES JESUITES. -PARTAGE DES MISSIONS ENTRE LES FRANCISCAINS ET LES DOMINICAINS.

Dans ce rapide coup d'œil, nous devions indiquer les divers établissements auxquels la population indienne avait servi de base, et les efforts persévérants qui leur donnèrent naissance; le tableau exact fourni par l'ouvrage de M. de Mofras répond, quant aux dénominations du moins, aux faits indispensables pour suivre le récit historique. On ne saurait exiger ici un rapport circonstancié des moyens mis en usage par les missionnaires pour opérer ce développement. Les missions formées a la suite de tant d'explorations laborieuses coûtèrent quelquefois plus d'efforts que celles du Paraguay, mais furent loin d'acquérir en Europe la célébrité dont celles-ci ne tardèrent pas à jouir. L'on peut dire même que sans le tra

des portraits de sauvages d'Amérique, d'Asie, (1) Voyage pittoresque autour du Monde, avec d'Afrique et des lles du Grand Ocean; Paris, 1821, I vol. in-fol. fig.

(2) Exploration de l'Orégon et de la Californie, t. II, p. 376.

vail du P. Buriel (1), ces réductions lointaines eussent été à peine connues de l'Europe. Soit que leur position géographique dont on ne comprenait pas toute l'importance les laissassent inaperçues, soit que la race indienne qui fournissait à leur population fût moins susceptible de développement intellectuel que celles du Paranná et de l'Uruguay, elles n'excitèrent ni le même intérêt ni les mêmes haines un grand phénomène dans l'ordre politique s'accomplissait silencieusement, sans qu'on le jugeât digne de ces éloges pompeux, ou de ces accusations passionnées, qui se renouvelèrent tant de fois à l'égard des autres missions. Les hommes d'Etat ne partagèrent pas toujours cette indifférence, et vers 1716 le cardinal Alberoni sembla deviner d'un œil plus perspicace les ressources que ce vaste pays pouvait offrir à l'Europe. L'année suivante, le comte de Liñares fit par son testament un don de 5,000 pistoles aux établissements religieux. Mais ces preuves d'intérêt ne furent ni assez durables ni d'une importance assez décisive pour changer la situation politique du pays. Les infatigables explorateurs de ces régions ignorées ne mettaient point de bornes à leur zèle; cependant, ils ne se reposaient que lorsque la mort venait les arrêter. En 1629 le père Piccolo mourut comme il allait atteindre quatre-vingts ans. L'année suivante le P. Ugarte le suivit dans la tombe, après trente ans de travaux, consacrés à la civilisation des Indiens. Les P. Tamaral, Sedelmayer, et tant d'autres dont les noms sont restés ignorés, les remplacèrent dignement; les épreuves de toute espèce, les entreprises difficiles ne manquèrent point à ces civilisateurs de la race indienne, pas plus qu'ils n'avaient manqué à leurs prédécesseurs : tantôt ce sont les féroces Apaches qu'il faut soumettre, tantôt les rives du Colorado ou du Gila qu'il faut explorer. Ces travaux furent accomplis avec un zèle incontestable; mais les déplorables empiétements politiques d'une compagnie célèbre arrêtèrent bientôt dans leur essor tant de louables entreprises: précisément à l'époque où l'on commençait

(1) C'est à lui que l'on attribue généralement la réunion des documents historiques publiés par Miguel Venegas.

à avoir des connaissances moins imparfaites sur l'intérieur de la Californie, le décret qui atteignait les maîtres du Paraguay frappa les missionnaires de la Californie; ils se trouvèrent enveloppés dans la mesure générale qui changeait l'administration temporelle des missions. En 1767 les jésuites, expulsés des seize villages fondés dans là presqu'île, se virent remplacés par les moines du couvent de S. Fernando, établis depuis longtemps dans la capitale du Mexique, mais étrangers jusqu'alors à la direction des Indiens; les franciscains continuèrent cependant avec zèle l'œuvre de leurs prédécesseurs.

Durant cette période la science a son martyr comme la religion a les siens. En 1769 l'abbé Chappe d'Haute roche vient observer en Californie le passage de Vénus sur le disque du soleil; mais il a apporté du Mexique les germes d'une maladie fatale, et arrivé à San-Jozé il meurt dans d'effroyables angoisses, sans que l'abattement qu'il éprouve arrête un instant ses travaux. Il meurt, mais le but de son voyage est atteint, et je ne connais guère dans les annales littéraires de récit plus noble que celui qui nous transmet ce dévouement presque ignoré. C'est la science dans toute son abnégation, qui triomphe de la douleur pour conquérir un fait inconnu, et qui ne demande plus rien aux hommes en échange de la vérité (1).

A la tête des nouveaux missionnaires chargés des destinées de la basse et de la haute Californie se présente un religieux infatigable. Digne successeur des Kino et des Ugarte, le P. Junipero Serra va bientôt exploiter ces terres fertiles que diverses explorations ont fait connaître, mais que l'on a abandonnées jusqu'alors à des hordes barbares de chasseurs. Alors seulement la grande mission de Monterey est fondée dans

(1) L'abbé Chappe d'Hauteroche, mort en 1769, a laissé le recit de son arrivée à Mexico, et il a rédigé jusqu'a la fin avec un incroyable chercherait vainement dans son Voyage en Cacourage ses dernières observations; mais on lifornie, publié en I vol. in-4°, des détails sur ce pays. Il était accompagné de deux astronomes espagnols, Doz et Velasquez, dont l'un succomba. Chappe d'Hauteroche à publié un Voyage en Sibérie,

la Nouvelle Californie, et pour accomplir cette œuvre de civilisation le préfet apostolique des franciscains est secondé par l'inspecteur général du Mexique, D. Jozé de Galvez. Grâce aux efforts combinés des deux pouvoirs, San-Diego s'élève en même temps, et dès l'année 1768 ce vaste pays est protégé efficacement par les deux établissements nouveaux, qui grandissent simultanément aux deux extrémités de la province et qui ont bientôt, comme point intermédiaire, la mission de San-Buenaventura. Secondés avec zèle par la marine espagnole, mais environnés de hordes barbares, les missionnaires ne pourraient réussir sans l'esprit plein de prévoyance qui préside alors en Espagne à un vaste système de colonisation. Nul établissement consacré à la civilisation des Indiens ne s'élève s'il ne repose sur un triple mode d'administration. La mission, peuplée d'indigènes, est exclusivement soumise au principe religieux; le pueblo reçoit des colons du Mexique, ou bien de la mère patrie, et fait prévaloir dans son sein le régime civil; le presidio est organisé exclusivenient sous le régime militaire. C'est là que résident, pour la protection du pays, ces compagnies bardées de cuir (compañias de la cuerra) que leur armure défensive met à l'abri des traits des Indiens, et qui après avoir protégé les missions durant quelques années, peuvent passer, habitants paisibles des villages, dans les rangs des puebladores, aidés alors des deniers de l'État (1). Ces détails administratifs, si peu connus de l'Europe, étaient en vigueur il

(1) Il existe dans d'autres parties de l'Amérique des soldats défendus ainsi par des cuirasses en cuir (Voy. le Brésil, p. 218). Les armures de la Californie paraissent avoir été plus simples que celles décrites déjà par nous, puisque l'on ne dit pas qu'elles fussent piquées en coton. Selon M. Duflot de Mofras, c'était une sorte de robe de peau de daim assez semblable à une cote de mailles qui ne pouvait être traversée par les flèches. Les « soldats n'endossaient cet uniforme qu'en campagne et au moment du combat; leur tête était couverte d'un casque à deux visières. Un bouclier en cuir passé au bras gauche leur servait à repousser les flèches, et les coups de lance, dans les luttes corps a corps, alors que, se défendant avec le sabre ou la lance, ils ne pouvaient faire usage de leurs pistolets ni de leurs mousquets. Les chevaux eux-mêmes, comme ceux des anciens chevaliers,

étaient couverts d'une armure en cuir. »

y a quatre-vingts ans à peine; et pour la Californie c'est de l'histoire ancienne, puisque le système qui les avait créés a cessé de prévaloir. Le rapide développement que prirent néanmoins alors les deux provinces prouve que ce mode d'action était basé sur une connaissance approfondie des localités et sur un besoin réel du pays. On ne saurait donc sans injustice passer sous silence une organisation qui amena après tout de remarquables résultats, puisque vingt et un établissements animèrent en peu d'années ces déserts, et que des milliers d'Indiens, qui très-probablement eussent disparu du sol, comme il en a tant disparu dans l'Amérique du Nord, passèrent dans la civilisation. Ce qui contribua à hâter ce développement rapide, il ne faut pas l'oublier, ce qui créa même pour l'avenir des sources de richesse incalculables, ce fut l'esprit prévoyant, qui n'hésita pas à jeter dès l'origine trois cents têtes de bétail sur ces terrains vierges. Le phénomène qui avait eu lieu dans les pampas de Buenos-Ayrès se renouvela dans cette partie du nouveau monde, et à mesure que les ressources d'alimentation se multipliaient la population des colonies nouvelles put s'accroître sans aucun danger.

Vers cette époque, un changement eut lieu dans la vaste province dont nous esquissons l'histoire à grands traits: frappés des résultats qu'obtenaient les religieux de l'ordre de Saint-François, les dominicains de Mexico prétendirent partager leurs travaux, et ils s'adressèrent à l'autorité pour qu'on leur concédât quelques missions dans la haute Californie. Les franciscains firent observer avec raison qu'il était difficile d'immiscer de nouveaux directeurs dans des établissements fondés d'après un système homogène; mais ils offrirent aux dominicains la direction générale des anciennes missions, et ceux-ci allèrent gérer toutes celles qui avaient été formées par les jésuites dans la basse Californie.

Au temps où nous sommes parvenus ce pays ne relevait plus directement de la vice-royauté de Mexico en 1777 le roi d'Espagne avait créé une capitainerie générale des provinces internes, et cette vaste région comprenait le Nouveau

L'UNIVERS.

Mexique, le Sonora, ainsi que les deux Californies. Le chevalier Théodore de Croix avait été chargé de diriger l'administration qui pourvoyait aux besoins temporels des quatre provinces, tout en laissant une action libre aux missionnaires; et il s'acquitta avec zèle des devoirs qui lui étaient imposés en 1781, cependant, on crut pouvoir soustraire le pouvoir militaire au commandement immédiat des religieux; un déplorable massacre, prévu par les franciscains, eut lieu sur les rives du Colorado, et prouva tout le péril qu'il y avait à irriter les Indiens en s'appropriant violemment leurs terres.

A l'exception de quelques événements de cette nature, durant lesquels les sauvages se montrent rarement les agresseurs, l'histoire de cette contrée se traîne pendant près d'un demi-siècle sous un aspect uniforme, et c'est tout au plus si l'arrivée de quelque grande expédition maritime, telle que celle de Lapérouse (1) par exemple, vient rompre dans les missions de la côte la monotonie d'une paternelle administration, qui par la régularité de ses rouages, ses formes presque monastiques, excluait jusqu'à la probabilité qu'il pût s'offrir des incidens nouveaux. Si nous voulions nous étendre, les révolutions intérieures de ces aggrégations d'Indiens auraient aux yeux du lecteur un caractère d'uniforinité qui en rendrait le récit peu attachant. De barbares représailles peu fréquentes, il faut le dire, de secrets complots, ourdis dans l'ombre par les devins contre l'autorité des pères, les efforts incessants renouvelés par les missionnaires, pour faire marcher dans la même voie ces êtres grossiers, différents souvent de mœurs et presque toujours de langage; voilà ce qui composerait ces annales: l'intérêt qu'elles pourraient offrir serait un pur intérêt local.

En 1822 les choses changent tout à coup d'aspect, et la révolution qui a émancipé le Mexique a son écho dans la Californie. Le gouverneur espagnol D. Pablo de Sola, refusant de servir la nouvelle république, s'éloigne de Monte

(1) Nous rectifions ici l'orthographe de ce nom illustre d'après des documents officiels. Galop de Lapérouse relacha à Monterey en 1786.

Rey; et un Californien de naissance, D. Luiz Arguello, est nommé gouverdéclarée territoire, ayant droit à la dé. neur par interim. La Californie est putation provinciale : le premier député qu'elle envoie au congrès de Mexico un'est pas admis: sa qualité d'Espagnol fait annuler sa nomination. En 1824 la nouportant aussi le titre de chef politique, velle république installe un gouverneur pour diriger la Californie. D. Jozé Maria Echandia nomme des administrateurs aux missions, et veut enlever la direcchef politique maintient cependant l'ortion temporelle aux missionnaires. Ce dre, un instant compromis en 1830; mais des plaintes graves s'élèvent contre lui: il est accusé de s'être prêté au pillage, et le lieutenant-colonel D. Manuel Victoria vient le remplacer. Homme intègre, cet officier à à lutter contre les loigne, laissant l'exercice de l'autorité mauvaises passions, et bientôt il s'ésupérieure aux capitaines des presidios.

En 1831 le commandement est dévolu au général de brigade D. Jozé Fipolitique et l'autorité religieuse; mais gueroa il y a conflit entre l'autorité ce n'est que trois ans plus tard qu'un décret de la junte provinciale enlève aux missionnaires « toute participation l'écrivain qui nous sert ici de guide, à l'administration des biens. »> Selon on leur promit une indemnité annuelle, effectué dix ans plus tard. dont le payement ne s'était pas encore

D

ce qui a rapport à une compagnie qui Nous passerons rapidement sur tout se fonda à Mexico en 1834, sous le titre de Compañia cosmopolitana. Son fornie; mais l'absence d'agriculteurs et but avoué était de coloniser la Caliles elements hétérogènes dont elle se impropre au rôle difficile qu'elle s'était composait la rendaient essentiellement impose; on lui prête d'ailleurs des vues piques. Elle échoua complétement. Ce qui n'étaient rien moins que philanthrofut cependant à elle que l'on dut l'innie: quelques ouvriers typographes qui troduction de l'imprimerie en Califorportèrent en 1834 une petite presse à faisaient partie de la compagnie transMonterey; la première qui, dit-on, eût été apportée dans ces régions lointaines. Un événement plus important et dont les

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