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je la repousse doublement lorsqu'elle s'applique à un traité comme celui qui nous est présenté aujourd'hui, par lequel on donne des faveurs sans en recevoir

aucune.

Pour les négociateurs de traités, il y a un principe dont ils ne devraient jamais s'écarter donnant donnant; si on accorde aux autres, il n'est que juste qu'il y ait compensation.

Ce n'est certainement pas ce principe qui a été appliqué dans le traité qu'on nous propose.

Je ne veux pas, messieurs, insister davantage : il appartient à la Chambre de décider si, par un vote nouveau, elle entend détruire les effets d'une délibération qu'elle a jugé utile l'année dernière.

Il appartient à la Chambre de décider si elle veut porter un coup funeste, un coup fatal à l'agriculture et au commerce de votre pays.

Il lui appartient de juger si elle veut, dans des limites qu'elle ne connaît pas et qu'elle ne peut prévoir, s'engager pour l'avenir au moyen d'un traité avec le Mexique.

Pour moi, je ne le pense pas et j'espère que la Chambre n'hésitera pas à repousser avec moi le projet qui lui est soumis. (Applaudissements à droite). M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. le rapporteur. Je ne retiendrai pas longtemps l'attention de la Chambre. Aussi bien, l'honorable M. Dellisse n'a discuté devant elle que l'article 12 du traité, l'article relatif au régime commercial établi entre la France et le Mexique.

Dans le rapport qui vous est soumis, il est rappelé qu'il ne résulte nullement de la convention commerciale du 27 novembre l'établissement d'un tarif conventionnel entre la France et le Mexique les deux Etats ont stipulé purement et simplement, an profit de leur nationaux, le traitement de la nation la plus favorisée. En l'absence de tout tarification spéciale, les inconvénients, les dangers même que semble redouter notre honorable collègue M. Dellisse, disparaissent.

Cependant la commission a voulu se rendre compte de la nature du commerce établi entre la France et Mexique, et elle a pu s'assurer que, dans son application, cet art. 12 si vivement critiqué ne manque d'offrir aussi quelques avantages au commerce français.

M. le ministre des affaires étrangères vient de rappeler que la balance du commerce entre la France et le Mexique est favorable à la France. C'est déjà un résultat trop rarement constaté dans nos relations commerciales. Mais il faut aussi rechercher quel est la nature des marchandises échangées. Sur un mouvement général d'importations et d'exportations de 40 millions environ, par année, le Mexique n'importe en France que pour six on sept millions environ, et la France exporte au Mexique rour 25 ou 30 millions.

M. Achard. Malgré la folie de l'empire, qui avait rompu nos relations commerciales avec ce pays.

M. le rapporteur. C'est la question politique qui est ici soulevée...
M. Achard. Elle n'est pas à dédaigner.

M. le rapporteur, Assurément, et c'est bien pourquoi je rappelais à la Chambre, tout à l'heure, que les conventions internationales ne doivent pas seulement être envisagées au point de vue exclusif du commerce; ce sont des traités dits d'amitié et de commerce... (Dénégations et interruptions à droite)... oui, messieurs, d'amitié et de commerce, et il n'est personne ici qui pourrait méconnaitre l'intérêt qu'il y a pour la France à renouer une politique d'amitié avec le Mexique.

M. le comte de Maillé.

Quel avantage y trouvez-vous ?

M. le rapporteur. Messieurs, vous me rendrez cette justice, que je n'avais pas invoqué à l'appui de ce traité des considérations politiques. Je ne croyais pas devoir me placer sur ce terrain; je reste, au contraire, pour ne pas abuser

ARCH. DIPL. 1888. -2° SÉRIE, T. XXVI (88)

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des moments de la Chambre, sur le terrain purement commercial qui a seulement ete abordé jusqu'ici.

Je rappellerai que la France est un pays importateur au Mexique, et je veux établir qu'il est de son intérêt de conserver cette situation.

Pour cela, il me suffira d'extraire quelques chiffres du tableau des échanges entre les deux pays, tableau annexé au rapport de la commission. Vous apprécierez quelle est la nature et quelle l'importance du commerce français au Mexique.

Sur une importation de 6 à 7 millions de marchandises du Mexique en France, les matières nécessaires à l'industrie, ou les denrées coloniales, qui sont toujours soumises aux droits du tarif général, sont comprises pour plus de 5 millions, c'est-à-dire, pour la presque totalité du chiffre des importations. Au contraire, les importations de France au Mexique comprennent les produits manufacturés dans la proportion suivante:

En 1880, sur 17 minions d'importations françaises, ces produits entrent pour 10 millions 400,000 fr.

En 1884, pour 15,200,000 fr.; en 1882, pour 18,200,000 fr.; en 1853, pour 15,200,000 fr.; en 1884, pour 12,900,000 fr.; en 1885, pour 11,400,000 fr.

Ce sont ces avantages qu'il importe de conserver.

Tel est, messieurs, Tintérêt qu'a la France à renouer d'abord ses relations politiques avec le Mexique, et, en outre, à placer sous la souvegarde d'un traité, d'un acte diplomatique, ses relations commerciales avec ce pays.

Il me semble inutile d'insister davantage.

Je dois seulement rappeler à la Chambre que le traité conclu avec le Mexique a été approuvé par le Sénat et que sa commission à l'unanimité, lui propose l'adoption du projet de loi qui en autorise la ratification. (Très bien ! très bien ! à gauche).

M. le président.-M. Dellisse a la parole.

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M. Dellisse. Messieurs, l'argumentation de l'honorable rapporteur m'a paru basée presque uniquement sur les relations politiques, mais je crois que, quand on a établi dans un traité, dans le traité qui nous est soumis, cet art. 12 qui vise nos relations commerciales, c'est qu'on a jugé faussi qu'elles avaient une certaine importance.

Eh bien, j'ai le droit de m'emparer de cet art 12 et de l'importance que le traité accorde aux relations commerciales des deux pays pour comparer la situation faite à chacun des contractants.

On aura beau assurer nos relations politiques, si à un moment donné nos relations commerciales sont telles que le commerce du pays avec lequel on aura traité vient ruiner le commerce français, on aura fait un acte détestable au point de vue des intérêts français.

Il ne suffit pas d'avoir des relations d'amitié avec les autres pays, il faut avoir des relations profitables pour notre commerce, et non pas ruineuses pour lui.

A tout instant, n'entendez-vous pas dire que l'agriculture est dans un état déplorable, qui appelle toute votre attention, qui exige que vous preniez des mesures en sa faveur?

Eh bien, vous ruinerez davantage encore cette agriculture, qui se réclame de vous, par ce trailé que vous nous proposez de faire.

Déjà nous avons perdu l'Angleterre. Le marché anglais nous est fermé; vous le savez, Messieurs; vous n'avez pas oublié qu'il y a très peu de temps encore, on est venu à cette tribune protester contre une mesure sanitaire prise chez nos voisins et qui arrête nos exportations.

Eh bien, quand on est impuissant à faire lever les barriéres que nous rencontrons à l'étranger, est-ce le moment de faciliter chez nous les importations de viandes étrangères, ces importations qui doivent tuer une des branches principales, une des branches les plus importantes de notre agriculture? Il ne peut y avoir, ce me semble, aucune contestation à ce sujet.

Si le traité nous donnait une réciprocité réelle, effective, nous pourrions voir, examiner, discuter les conditions dans lesquelles il nous placerait.

Mais dans le cas actuel, nous n'obtenons pas la réciprocité: vous donnez des avantages et vous n'en recevez pas. Bien plus, en donnant des faveurs au Mexique, vous en donnez à d'autres pays. Qui vous dit, en effet, que tout à l'heure notre marché ne sera pas envahi par ces redoutables exportations américaines dont on parle tant et au sujet desquelles un homme dont la compétence et l'autorité sont reconnues de tous ici, M. le président de la commission des douanes, vous disait récemment: «Si nous recevons aujourd'hui beaucoup de viandes abattues d'Allemagne, d'Italie, le jour peut venir où nous en recevrons aussi d'Amérique. »

Je vous engage à méditer ces paroles, Messieurs, et à retenir aussi cette phrase, qu'il ajoutait ensuite:

« Supposez que l'Angleterre fasse pour la viande abattue ce que, sous prétexte d'épizootie, elle fait pour la viande sur pied, vous verrez refluer la viande

américaine sur notre marché. »

Eh bien, par le traité que vous nous demandez de voter, vous nous ouvrez les barrières, vous attirez ici les viandes américaines, qui n'attendront peut-être même pas le moment où elles seront réfoulées de l'Angleterre pour arriver sur le marché français. (Applaudissements à droile.)

M. le président. La parole est à M. le Ministre des affaires étrangères. M. le ministre des affaires étrangères. L'honorable orateur qui descend de la tribune disait tout à l'heure à la Chambre que le traité qui est actuellement soumis à ses délibérations constituait un marché de dupe où la France avait fait toutes les concessions et où elle n'en avait obtenu aucune.

Je tiens à établir d'abord que, pour apprécier comme il doit l'être cet acte diplomatique, il serait équitable de ne pas examiner exclusivement l'article 12, et de concéder que dans les autres articles la France a stipulé et obtenu des avantages importants dont il y a lieu de tenir compte, notamment en ce qui concerne la protection de la propriété industrielle des marques de fabrique, des dessins industriels. etc., aussi en ce qui touche le droit pour nos nationaux de posséder des établissements aux Etats-Unis du Mexique et d'y avoir des propriétés immobilières. Ce sont là, ce me semble, des considérations qu'il ne faudrait pas écarter du débat.

Maintenant, pour examiner l'article 12, il y a lieu de se placer à deux points de vue au point de vue commercial proprement dit et au point de vue agricole.

En ce qui concerne le point de vue commercial, comme le disait tout à l'heure l'honorable rapporteur de la Commission, les importations des EtatsUnis du Mexique en France s'élèvent à peine à 4 millions et quelques centaines de mille francs, tandis que la France importe dans les Etats-Unis du Mexique pour plus de trenie millions par an. Dans cette situation, nos rivaux commerciaux ont déjà conclu ou sont sur le point de conclure avec les Etats-Unis du Mexique des traités de commerce.

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A droite. Et les Etats-Unis d'Amérique? M. le ministre. Vous parlez des Etats-Unis d'Amérique il y a des questions extrêmmeent délicates qui sont pendantes entre les Etats-Unis d'Amérique et les Etats-Unis du Mexique, notamment en ce qui concerne les acquisitions de propriétés immobilières dans certaines zones frontières. Mais il n'y a pas que les Etats-Unis du Mexique, il y a l'Angleterre et l'Allemagne qui en ce moment viennent de conclure des conventions commerciales avec les Etats-Unis du Mexique, qui poursuivent activement l'expulsion des produits français, et la substitution de leurs produits nationaux aux nôtres.

La question qui se pose actuellement devant la Chambre est bien simple; elle se résout dans les termes suivants : au point de vue commercial, si vous rejetez le traité qui vous est présenté, le commerce français sera écarté du marché mexicain.

Les produits d'Allemagne, d'Angleterre, viendront se substituer aux impor

tations françaises, vous aurez ruiné une partie du commerce français, vous lui aurez tout au moins causé un préjudice considérable, et cela sans aucun avantage appréciable.

Le but du traité de commerce se résume exclusivement en ceci empêcher que nos produits soient écartés au moyen de tarifs différentiels. Voilà la question qui est actuellement soumise à la Chambre. Il ne faut pas la compliquer de considérations étrangères au débat; elle est très simple, très nette: voulonsnous que des tarifs différentiels écartent du marché mexicain les produits françaís?

Au point de vue agricole on nous a dit que nous sacrifiions l'agriculture, qu'elle allait être écrasée par les importations du Mexique; or, ces importations, en totalité, pour les produits de toute nature, s'élèvent aujourd'hui à 4 milions. Comme vous le disiez tout à l'heure, nous ne pouvons raisonner que sur la situation actuelle. Et, dans ce chiffre modique de 4 millions, pour combien les produits agricoles entrent-ils? combien y a-t-il de viandes importées du Mexique? C'est ce que l'honorable M. Delisse a négligé de faire connaitre à la Chambre et c'est précisément ce qu'il aurait fallu établir.

On a dit devant la Commission : Si les Etats mexicains sont hors d'état d'importer en France soit du bétail, soit de la viande, il pourra en venir de la Plata et des autres Etats de l'Amérique par l'intermédiaire du Mexique.

Eh bien! si on jette les yeux sur la carte, si on veut se rendre compte des difficultés et des frais de transport, on arrive à se convaincre que ces craintes sont absolument chimériques.

C'est donc par la considération d'une crainte absolument chimérique...... (Non! non! à droite) qu'on demande à la Chambre de causer un préjudice actuel, né, évident, indiscutable au commerce français. Voilà la question. (Applaudissements à gauche.)

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ALLEMAGNE, AUTRICHE-HONGRIE, BELGIQUE, BRÉSIL,
FRANCE, etc.

Déclaration relative à la Convention pour la protection des câbles sous-marins.

1er décembre 1886.

Les soussignés, plénipotentiaires des gouvernements signataires de la convention du 14 mars 1884, pour la protection des câbles sous-marins (1), ayant reconnu la convenance de préciser le sens des termes des articles 2 et 4 de ladite convention, ont arrêté, d'un commun accord, la déclaration suivante :

Certains doutes s'étant élevés sur le sens du mot « volontairement > inséré dans l'article 2 de la convention du 14 mars 1884, il est entendu que la disposition de responsabilité pénale mentionnée dans ledit article ne s'applique pas aux cas de ruptures ou de détériorations occasionnées accidentellement ou nécessairement en réparant un câble, alors que toutes les précautions ont été prises pour éviter ces ruptures ou détériorations.

Il est également entendu que l'article 4 de la convention n'a eu d'autre

(1) V. cette convention, Archives, 1885. III. p. 5.

but et ne doit avoir d'autre effet que de charger les tribunaux compétents de chaque pays de résoudre, conformément à leurs lois et suivant les circonstances, la question de la responsabilité civile du propriétaire d'un câble qui, par la pose ou la réparation de ce câble, cause la rupture ou la détérioration d'un autre câble, de même que les conséquences de cette responsabilité, s'il est reconnu qu'elle existe.

Fait à Paris, le premier décembre mil huit cent quatre-vingt-six et le vingt-trois mars mil huit cent quatre-vingt-sept pour l'Allemagne.

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Les soussignés, plénipotentiaires des gouvernements signataires de la convention du 14 mars 1884 pour la protection des câbles sous-marins, réunis à Paris, à l'effet d'arrêter, conformément à l'article 16 de cet acte international, la date de la mise à exécution de ladite convention, sont convenus de ce qui suit (1):

I.

La convention internationale du 14 mars 1884 pour la protection des câbles sous-marins entrera en vigueur le 1er mai 1888, sous la condition, toutefois, qu'à cette date ceux des gouvernements contractants qui n'ont pas encore adopté les mesures prévues par l'article 12 dudit acte international se seront conformés à cette stipulation.

II. Les dispositions que lesdits Etats auront prises en exécution de l'article 12 précité seront notifiées aux autres puissances contractantes par l'intermédiaire du gouvernement français, chargé d'en examiner la teneur.

III. Le gouvernement de la Républiqne française reste également chargé d'examiner les mêmes dispositions législatives ou réglementaires que devront adopter, dans leurs pays respectifs, pour se conformer à l'article 12, les Etats qui n'ont pas pris part à la convention et qui voudraient profiter de la faculté d'accession prévue dans l'article 14.

En foi de quoi, les plénipotentiaires soussignés ont arrêté le présent protocole de clôture, qui sera considéré comme faisant partie intégrante de la convention internationale du 14 mars 1884.

Fait à Paris, le sept juillet mil huit cent quatre-vingt-sept.

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(1) Cette condition a été remplie, sauf par la Perse et les Etats-Unis de Colombie, signataires de la Convention, mais qui, n'ayant pas procédé à l'échange des notifications, ont cessé d'être parties contractantes. La Convention, avec ses annexes, est promulguée dans le Journal officiel de la République française du 25 avril 1888.

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