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sans lesquels l'action n'a plus d'intérêts, voilà ce qui peut faire l'objet d'une ordonnance en référé, dans les matières qui ne sont pas réservées à la connaissance du juge de paix.

Dans tous les cas, autres que ceux qui sont déterminés par la loi, où il s'agit de l'exercice d'un droit litigieux fondé sur des faits permanens, quelque célérité qu'exige la décision, c'est au trib. à statuer sur assignation à bref délai.

N'est-il pas évident qu'en prenant la voie du référé, hors des circonstances qui prescrivent une mesure conservatoire ou la levée d'un obstacle au cours de la justice, on aurait deux instances pour une, puisque le lendemain de l'ordonnance en référé, on jugerait la cause au principal, et que le tribunal se trouverait en état d'accorder, s'il y avait lieu, le provisoire sur lequel il aurait été inutilement prononcé la veille.

Si sous prétexte d'urgence ou de provisoire, le président était juge en référé, il y a peu d'affaires qu'on ne trouverait moyen de commencer ainsi, et bientôt nous tomberions dans une confusion de pouvoirs sur lesquels on ne verrait plus que des appels d'incompétence sur les ordonnances en référé.

Il paraît donc résulter de ces diverses observations, que le premier membre de l'art. 806 du Code de Procédure, n'a pas laissé un pouvoir discrétionnaire au magistrat qui statue en référé, et que ces expressions, dans tous les cas d'urgence, se réfèrent aux cas qui sont prévus par les anciens et nouveaux

règlemens, ou qui sont dans la même cathégorie. (Extrait du journal intitulé, Décisions notables de la Cour d'appel de Bruxelles, tom. 16, p. 233.)

REMARQUE

Sur la signification des jugemens par défaut, faite à avoué, dans ses rapports avec le délai de l'appel.

Le délai de trois mois pour interjeter appel, courtil, pour les jugemens par défaut rendus contre avoué, du jour où expire la huitaine de la signification à l'avoué, ou bien seulement du jour de la signification à la partie ?

vue,

Décidée d'après le sens apparent des art. du Code de Procédure, cette question présente, à première des inconvéniens majeurs qu'assurément le législateur eût prévenus, s'il avait eu sous les yeux les conséquences qui semblent découler des expressions littérales dont il s'est servi.

En effet, rapprochons les articles 157 et 443 du Code; nous verrons que, si on s'attache littéralement au texte, il sera possible qu'un jugement par défaut acquière la force de la chose jugée, avant qu'il ait dû être notifié à la partie contre laquelle il a été rendu; en voici la preuve :

<< Si le jugement est rendu contre une partie ayant un avoué, l'opposition ne sera ne sera recevable que pendant huitaine, à compter du jour de la signification à avoué.» (Art. 157.)

« Le délai pour interjeter appel sera de trois mois;

il courra, pour les jugemens contradictoires, du jour de la signification à personne ou à domicile; »

<< Pour les jugemens par défaut, du jour où l'opposition ne sera plus recevable. » ( Art. 443.)

Ainsi pour interjeter appel d'un jugement rendu contre une partie dont l'avoué ne se sera pas présenté pour plaider, le délai est de trois mois, à compter du jour où l'opposition n'est plus recevable.

Or, elle n'est plus recevable à compter de l'échéance de la huitaine de la signification à l'avoué.

Donc ce jugement peut devenir inattaquable avant qu'il ait été signifié à la partie, ou même avant qu'il ait été connu d'elle, si l'avoué néglige de l'en instruire pendant trois mois et huit jours.

Cette conséquence nécessaire paraît d'autant plus révoltante que l'esprit de la loi a été d'accorder un délai plus long pour l'appel des jugemens par défaut que pour l'appel des jugemens contradictoires, et qu'il impliquerait contradiction que le délai pour appeler d'un jugement rendu, l'avoué absent, courût avant la signification de ce jugement à la partie, tandis que le délai d'un jugement contradictoire, où l'avoué a été entendu, ne court qu'après la signification à la partie défendue.

Cette étonnante disparité, et l'abus qu'on peut si aisément faire des dispositions de l'art. 443, a porté plusieurs praticiens à penser que la seconde partie de cet article n'était applicable qu'aux seuls jugemens par défaut, rendus contre des parties qui n'ont pas constitué avoué, et envers lesquels l'opposition

est recevable, non-seulement après la huitaine de la signification à la partie, mais encore jusqu'au moment des exécutions faites en vertu de ces jugemens; ce qui conciliait à la fois la raison, l'équité et la loi.

Mais M. Pigeau est d'un avis contraire ; il décide la question ou plutôt il énonce la thèse en ces termes: << on ne peut prendre la voie de l'appel que lorsqu'on » n'a plus celle de l'opposition; le délai de l'appel » ne commence que du jour où expire celui de l'op> position. De là dérivent deux conséquences:

» La première, que, si le jugement est rendu con>> tre avoué, comme on ne peut former opposition » que pendant la huitaine de la signification, le » délai de l'appel commence à l'expiration de cette >> huitaine ;

» La deuxième, que, si le jugement est rendu >> contre partie, comme on peut former opposition » jusqu'à son exécution, le délai de l'appel com» mence du jour où l'exécution est consommée. »

Il est évident que M. Pigeau parle ici en professeur, qui se borne à rapprocher et à analiser les art. 157 et 443 : il enseigne la these sans en examiner les conséquences. Toutefois le moyen le plus assuré de juger de la force et de l'esprit d'une disposition législative, et de saisir les nuances qui en appellent ou repoussent l'application, c'est de remonter de la conséquence au principe, et de voir si l'esprit qui a dicté celui-ci, n'est pas en opposition avec cellelà en droit la lettre tue et l'esprit vivifie.

:

Cependant,

Cependant, l'opinion de M. Pigeau a aussi ses partisans.

Est-il bien vrai, répondent-ils, qu'elle ne puisse être étayée que par la lettre de la loi ?

Le raisonnement ne l'appuie-t-il pas également ? Signifié à avoué, le jugement par défaut est censé être signifié à la partie elle-même: dès qu'il y a constitution d'avoué, elle est légalement représentée par lui. Ne doit-on pas penser que l'avoué, instruit que son client n'a pour appeler que trois mois, à partir de la signification à lui faite du jugement par défaut, s'empressera de lui donner connaissance de ce jugement et du délai fatal dans lequel il faut qu'il se pourvoie, s'il est dans l'intention d'en appeler?

Dira-t-on que l'avoué chargé d'une multitude d'affaires peut en négliger une? Que celui surtout qui a laissé condamner sa partie par défaut, et laisse encore écouler le délai de l'opposition sans la former, peut bien pousser la négligence jusqu'à ne rien faire pour l'en avertir et lui faire connaitre le terme dans lequel il faut qu'il appelle? Une telle négligence de la part de l'avoué deviendrait un véritable dol, une lourde faute au moins qui, d'après nos maximes, est parfaitement semblable au dol: lata culpa quæ dolo æquiparatur.

A ce titre, l'avoué serait responsable envers sa partie des dommages - intérêts qu'elle éprouverait par l'impossibilité d'appeler, et courrait en outre le danger de perdre son état par une interdiction

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