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ressante au point de vue industriel, le devient doublement dans les circonstances présentes, et il est probable que le travail exigé par les gisements auri fères en sera singulièrement accéléré. Frappé de cet accroissement prodigieux de valeurs métalliques, dont le commerce de l'Amérique du Nord doit nécessairement recevoir un mouvement inaccoutumé, le président des ÉtatsUnis veut qu'un hôtel des monnaies transforme en espèces monnayées cette immense quantité d'or. Les prétentions de l'honorable M. Polk sont franchement avouées: en créant un atelier monétaire dans ces régions, où rien ne ressemble encore à une cité de quelque importance, il ne désire pas seule ment régulariser l'expansion des richesses nouvelles qui vont circuler désor mais dans les Etats-Unis, il a encore l'espérance de ravir à l'Angleterre une source de valeurs effectives, dont elle a profité jusqu'à ce jour. En même temps qu'il veut élever immédiatement l'or à sa véritable valeur, il veut hâter l'époque où la force industrielle de la GrandeBretagne cessera de puiser dans les mines de l'Amérique un secours sur lequel elle a toujours compté.

« Une succursale de la monnaie des États-Unis, établie dans le grand dépôt de la côte occidentale, dit-il, transformerait en espèces métalliques à l'effigie de notre république, non-seulement l'or tiré de nos propres mines, mais aussi les lingots et les espèces que le commerce apporterait de tous les points de la côte occidentale de l'Amérique centrale et méridionale. Cette côte et l'intérieur qui y est contigu renferment les plus riches et les meilleures mines du Mexique, de la Nouvelle-Grenade, de l'Amérique centrale, du sud et du Pérou. Les lingots et les espèces tirées de ces pays, notamment du Mexique et du Pérou occidental, s'élèvent annuellement à une valeur de plusieurs millions de piastres et sont aujourd'hui transportés par les navires anglais dans la Grande-Bretagne, où ils reçoivent l'effigie du souverain et contribuent à assurer la prépondérance commerciale de cette puissance.

« Si donc une succursale de la monnaie était établie à ce grand point commercial de la côte du Pacifique, une

vaste quantité de lingots et d'espèces y afflueraient pour y être frappes, et passer ensuite à la Nouvelle-Orléans, à NewYork et dans les autres villes de l'Atlantique. Ce nouveau courant augmenterait considérablement notre circulation constitutionnelle à l'intérieur et la développerait en même temps à l'extérieur. Ceux de nos marchands qui trafiquent avec la Chine et la côte occidentale de l'Amérique savent les inconvénients et les pertes qui résultent pour eux de la difficulté qu'ils éprouvent à faire accepter nos espèces métalliques au pair dans ces régions. Les puissances de l'Europe, éloignées des côtes occidentales de l'Amérique par la nécessité de franchir l'Atlantique et d'affronter la longue et dangereuse navigation autour de l'extrémité méridionale du continent américain, ne pourront jamais rivaliser avec les États-Unis pour le riche et vaste commerce qui s'ouvre pour nous dans des conditions si favorables par l'acquisition de la Californie (1). »

A côté des renseignements officiels qui nous sont fournis par le discours du président, viennent se placer tout naturellement ceux que la presse quotidienne nous a révélés naguère, et qui sont dus au rapport d'un officier digne de tout crédit. M. le colonel Mason, commandant de la Californie, adresse au ministre de la guerre un rapport sur son excursion dans les mines, dont se préoccupent si vivement aujourd'hui tous les esprits sérieux; et c'est, à vrai dire, pour la première fois que l'on a quelques détails précis, quelques renseignements circonstanciés, des documents dignes de foi en un mot, sur la région aurifère de la haute Californie.

Le fait n'est donc plus douteux aujourd'hui, c'est le Rio-Sacramento et ses affluents qui devient le siége du Nouvel-Eldorado. Sur ces rives parées d'une végétation luxuriante, où le capitaine Belcher ne trouva en 1840 que d'innombrables ossements résultats d'une épidémie qui avait désolé les tribus indiennes, et qu'au premier abord on eût pris pour un champ de bataille, la nature à déposé des richesses métalliques qu'on

(1) Voyez le Discours du président des ÉtatsUnis James Polk, dans le journal la Presse,

ne saurait encore évaluer, mais que l'on peut juger supérieures à la plupart de celles du nouveau monde.

Il paraît que c'est à vingt-cinq milles des Mormons, dans une scierie mue par les eaux du Sacramento appartenant à l'honorable M. Sutter, qu'à eu lieu la découverte des gisements aurifères; « c'est dans le gravier amoncelé au pied de l'écluse que sont apparues les premières parcelles du métal précieux. Par une probité rare, ajoute-t-on, les chercheurs d'or respectent religieusement les dépôts que les eaux continuent à entraîner et à accumuler au-dessus du moulin. »

Rien de plus simple du reste que le mode de travail adopté par les cher cheurs de paillettes. « Un vase en fer blanc, un panier forment la plupart du temps tout leur attirail d'exploitation; quelques-uns se sont fabriqué une sorte d'appareil grossier qu'ils appellent berceau, et qui, alimenté et manœuvré par quatre personnes, active et facilite l'opération du lavage » Il est infiniment probable que dans l'état actuel des choses nombre de parcelles aurifères sont perdues en raison de l'inexpérience des travailleurs. Sous ce rapport, il ne serait pas sans intérêt de rappeler le mode d'extraction usité au Brésil, tout simple qu'il est. Dans certaines régions de Minas on emploie des peaux écrues d'animaux, aux poils desquelles s'attache la poudre d'or, que l'on obtient ensuite en les battant.

Mais il est vrai que si nous prenons au pied de la lettre les expressions du rapport que nous avons sous les yeux, l'abondance du métal est telle, qu'on ne peut songer à l'emploi de certains moyens qui exigent ou de la patience ou du temps. C'est à peine, dit M. le colonel Mason, si l'or coûte la peine de se baisser, et cela non-seulement dans le Sacramento, mais dans le lit desséché de ses moindres affluents, dans les ravins des collines avoisinantes (1). »

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(1) Le rapport de M. Mason est bien dépassé, comme le fait observer le Journal des Débats: l'or est partout maintenant; et il cite les propres expressions du Californian: « Nous en sommes venus, dit ce journal, à craindre de voir creuser une mine dans notre rue et un puits dans notre cour.» De tels récits ont eu l'influence qu'ils devaient avoir sur les spéculateurs de Londres:

On n'a pas encore de documents précis sur les quantités métalliques produites par les diverses extractions. On suppose seulement que vers le mois de juin de l'année dernière le bénéfice annuel pouvait être évalué à cinquante mille dollars. Rien dans aucune partie du globe ne saurait être comparé à ce qui arrive aujourd'hui sur ces rivages. Entre autres faits extraordinaires, on cite deux hommes qui ont « recueilli en quelques jours une valeur de 17,000 dollars dans un canal long de cent yards et large de quatre pieds. » Cette circonstance, bien avérée, dispenserait au besoin de rappeler les nombreux détails réunis dans la dépêche; nous nous contenterons donc de dire ici qu'un fermier qui faisait travailler sous ses ordres une cinquantaine d'Indiens a pu accuser « au bout de cinq semaines 16,000 dollars de bénéfice ».

Jusqu'à présent, et ce n'est pas une des circonstances les moins remarquables du mouvement prodigieux qui s'est opéré dans ces contrées, tout s'est passé avec un ordre, avec une harmonie même qui sert d'heureux contraste à tout ce que nous raconte l'histoire. Le Pérou, le Mexique, le Brésil, ont vu des guerres déplorables ou tout au moins des rixes sanglantes succéder à la première surprise qu'excitait la découverte de richesses inespérées; ici rien de semblable; et, chose étrange! aucun crime à déplorer. « Ces hommes dorment sous des tentes, sous des hangars, parfois même en plein air avec des sommes considérables auprès d'eux; et il ne se commet pas de vol! à peine quelques colli sions éclatent-elles de loin en loin pour une question de priorité dans l'exploitation de tel ou tel terrain. »>

Le colonel Mason, cependant, est complétement d'accord dans sa dépêche avec l'honorable M. Polk; il exprime le vif désir que l'extraction des sables aurifères soit regularisée; et s'il n'a pas cru devoir intervenir jusqu'à présent pour empêcher la recherche du minerai, il souhaite qu'une loi émanée du pouvoir organise l'exploitation. Selon lui, le meilleur mode de faire participer le gouver

quatre compagnies viennent de se former, diton, en Angleterre pour l'exploitation des mines de la Californie.

nement des États-Unis aux prodigieuses richesses que se partagent les colons et les émigrants, ce « serait d'établir à Sut ter'sfort un intendant général des terres, qui les affermerait par fractions de cent acres, moyennant une redevance annuelle de cent à mille dollars suivant leur richesse minéralogique,» ou bien en core « de vendre ces terres par petites sections de vingt à cent acres. Le comman dant des forces militaires de la Californie est aussi d'accord avec le président des États de l'Union sur la nécessité de fonder un hôtel des monnaies sur quelque point de la baie de San-Francisco. C'est, en effet, le seul moyen à mettre en usage pour empêcher cette immense richesse métallique de se disséminer de toutes parts sans résultats pour le pays. « Actuellement l'or brut est considéré comme monnaie courante au taux de 16 dollars l'once.

L'administration locale n'a rien négligé, du reste, pour que cette région si peu fréquentée jusqu'à ce jour se trouvât en communication réguliere avec les grands centres de population.

Le message déjà cité est positif sur ce point; il y est dit en effet: La ligne mensuelle des steamers de la poste, qui vont de Panama à Astoria, a reçu l'ordre de s'arrêter à San-Diego, Monterey et San-Francisco.

Les dernières nouvelles prouvent en même temps, néanmoins, que le gouvernement des États de l'Union, a fini par se préoccuper de la foule avide qu'allaient attirer dans la baie de San-Francisco les bruits merveilleux répandus par toutes les feuilles périodiques de l'Amé

rique et même de l'Europe. Selon ces documents, plusieurs bâtiments de guerre auraient été expédiés afin d'organiser un embargo sur tous les navires marchands qui prétendraient entrer en rade de San-Francisco, ou même dans les autres ports de la Californie. Cette croisière aurait pour but de s'opposer à l'exportation du minerai d'or, ou de l'or même réduit en lingots. Dans cette occurrence on obtiendrait la promesse formelle des capitaines de bâtiments expédiés par le commerce, qu'ils ne transporteront aucune de ces valeurs précieuses, procédant des terres publiques ou des mines du Sacramento, sans en excepter tout autre lieu de la région aurifère de la haute Californie. Cette décision a été prise, dit-on, « pour empêcher les na« vires européens ou ceux de l'Amé. « rique du Sud de faire frapper de l'or << dans les monnaies étrangères sans « payer la taxe du cent au gouvernement des États-Unis.»

Le discours du président renferme un autre fait politique qui n'est pas moins important à nos yeux que la confirmation des nouvelles relatives aux richesses minéralogiques de la Californie: il apprend au congrès que les débats avec l'Angleterre touchant l'Orégon ont cessé, et que le 49° degré est adopté pour limites un gouverneur a été expédié par terre, afin de prendre définitivement possession de la portion de ce territoire qui échoit aux États-Unis (1).

(1) On peut consulter sur les nouvelles détravail plein d'intérêt inséré dans l'Illustration, couvertes métalliques faites en Californie un numéro du 13 janvier 1849.

FIN.

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