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Ainsi, pour renfermer ces dispositions législatives dans leur objet, il faut appliquer la première dans tous les cas qui ne sont pas exceptés d'une manière formelle, et les autres, dans la circonstance particulière qu'elles déterminent. - Ce serait méconnaître la nature de l'une et l'autre de ces dispositions, que de penser que la prohibition consignée dans l'art. 442 C. P. C., peut entraver l'application des articles du Code de Com. Ceux-ci ont été promulgués postérieurement; ils abrogent d'ailleurs, en matière de faillite, la disposition prohibitive du Code de procé. ; ainsi ils ne peuvent être modifiés ou restreints, par les principes que ce Code consacre, d'après l'axiome de droit posteriora derogant prioribus, et la maxime de tout temps reçue que l'exception déroge à la règle. Aussi, quand la Cour de cassation a décidé (1) que le tribunal de première instance pouvait seul procéder à la vente des immeubles d'un failli, elle ne s'est pas fondée sur ce que l'art. 442 C. P. G. défend aux tribunaux de commerce de connaître de l'exécution de leurs jugemens, mais sur ce que plusieurs articles du même Code attribuent une compétencee exclusive aux tribunaux de première instance, pour les adjudications d'immeubles. (COFF.).

La veuve Mangani et le sieur Pasquinucci assignèrent les syndics provisoires de la faillite du sieur Barbieri, devant le tribunal de commerce de Florence, pour voir ordonner ce que de droit, relativement à l'administration des biens du failli.

Le tribunal ayant sursis à prononcer sur cette demande, les sieurs Maraffi et Goèzini, syndics provisoires, firent apposer les scellés dans les magasins du failli, en vertu d'une ordonnance du président du tribunal de première instance. La dame Mangani et le sieur Pasquinucci se pourvurent alors devant le tribunal de commerce, pour faire déclarer illégale et nulle l'apposition des scellés. Le tribunal, après s'être déclaré incompétent, ordonna la levée des scellés, comme ayant été apposés d'une manière illégale et nulle.- - Et le 13 mars 1811, arrêt de la Cour de Florence ainsi conçu: « - LA COUR; Considérant que la question qui s'était élevée sur l'exécution du jugement du tribunal de commerce de Florence était relative au mode d'administration des biens du failli Barbieri; et que ce tribunal était seul compétent, pour déterminer dans les circonstances de la cause, si l'intérêt des créanciers exigeait ou non l'apposition des scellés sur les magasins dudit sieur Barbieri; ou s'il y avait

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(1) Suprà no 49 l'arrêt du 28 octobre 1809.

d'autres mesures à prendre pour l'administration provisoire de ses biens; - Que si le tribunal de commerce a inal jugé, en déclarant nulle l'apposition des scellés à laquelle il avait été procédé, en exécution de l'ordonnance de référé, il est certain du moins qu'il n'appartenait qu'à ce tribunal de déterminer si l'effet provisoire de cette ordonnance devait continuer ou cesser, et s'il y avait lieu à ordonner la levée des scellés, objet pour lequel les parties avaient été renvoyées devant les juges compétens, par l'ordonnance dont il s'agit; sans s'arrêter à l'exception d'incompétence, etc. »

72. Les tribunaux de commerce ne sont pas compétens pour con naitre des contestations qui peuvent s'élever, sur la nature, l'existence et les effets d'une société, entre des tiers et l'un des prétendus associés ( Art. 51, 631 et 632, C. Comm.) (1).

Dans le livre er, tit. 3, sect. 2, dont l'art. 51 fait partie, le Code de Com. s'occupe de la manière de décider les contestations entre associés. Il veut qu'elles soient soumises à des arbitres qui procèdent sous l'autorité du tribunal de commerce. Ces dispositions ne peuvent être appliquées à l'espèce de la question posée, puisque les associés ne sont pas en discussion entre eux, mais avec des tiers. D'un autre côté, les attributions des tribunaux de commerce sont fixées par les art. 631 et 632 : ces attributions dérivent moins de la qualité des parties, que de la nature de la contestation; car un marchand ou un banquier, par exemple, n'est justiciable des tribunaux de commerce, que lorsqu'il a fait acte de commerce, ou lorsqu'il s'agit de ses engagemens.· On ne peut d'ailleurs trouver dans le Code aucun article qui déclare les tribunaux de commerce incompétens, dans l'espèce particulière dont il s'agit ici; et c'est le cas d'appliquer le principe reconnu par la Cour de cassation et par le conseil d'état, que les attributions des tribunaux d'exception doivent être renfermées dans les bornes que la loi leur a assignées. ( Coff. )

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Le sieur Michel jeune, banquier à Paris, avait été constitué en débet envers le gouvernement, de plusieurs sommes considérables, formant ensemble plus de 16 millions. L'agent du trésor public forme, entre

(1) Voy. J. A., t. 30, p. 414, un arrêt du 30 novembre 1825, qui décide que c'est le tribunal de commerce qui doit juger les contestations sur l'existence d'une société commerciale, mais la contestation existait dans l'espèce entre les associés. Voy. infrà, no 97 et 189 les arrêts des 11 mars 1812 et 7 avril 1819.

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les mains du sieur Boissière, une saisie-arrêt de toutes les sommes qu'il pourrait devoir audit Michel. -Appelé en déclaration affirmative, le tiers-saisi expose, que le sieur Michel s'est rendu son associé commanditaire, à concurrence d'une somme de 100,000 livres qui n'a pas été entièrement versée dans la caisse sociale; mais qu'il n'est comptable de cette somme, soit envers lui, soit envers ses représentans, qu'à la disso-, lution de la société. — Cette déclaration est contestée, principalement par le motif, que Boissière, alléguait, sans en justifier, l'existence d'une société entre lui et Michel, pour retenir entre ses mains les fonds appartenant à ce dernier. Alors Boissière demande son renvoi devant le tribunal de commerce, par le double motif, qu'ils s'agissait de contestations relatives à une société, et que sa qualité de banquier le rendait justiciable des tribunaux de commerce. Un jugement, sous la date du 1er février 1811, rejette le déclinatoire proposé... « Attendu que les tribunaux de commerce sont des tribunaux d'attribution; que la loi ne leur attribue pas la connaissance des contestations qui pourraient s'élever entre des prétendus associés et des tiers, relativement à la validité de la société alléguée; que les art. 631 et 632 C. Com. ne sont point applicables à l'espèce de la cause; attendu que Boissière, tiers-saisi dont la déclaration est contestée, est justiciable du tribunal civil. »

Le sieur Boissière s'est pourvu en appel contre ce jugement. Le 19 mars 1811, arrêt de la Cour de Paris, par lequel :—« «LA COUR, faisant droit sur l'appel interjeté par Boissière du jugement rendu au tribunal civil de Paris, le 1er février dernier, et adoptant les motifs des premiers juges, a mis et met l'appellation au néant; ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet. »

73. L'action en revendication d'effets perdus, dirigée contre des administrateurs de messageries, est-elle du ressort du tribunal de commerce? (Art. 632, C. Comm. ) (1)

(1) M. CARR. COMP., t. 2, p. 574, § 3, critique l'arrêt du 20 mars 1811. Sans doute on ne pourrait pas soutenir que celui qui confie des effets à l'entrepreneur fait un acte de commerce, mais il en est autrement de l'entrepreneur qui se charge des effets. Cet acte rentre dans l'objet de son entreprise; c'est précisément sur les transports que porte sa spéculation; en se chargeant d'un transport, il fait donc un acte de commerce. M. CARRÉ fait observer avec beaucoup de raison que l'art. 632 parle des entreprises sur les transports et non pas seulement des transports,

PREMIÈRE ESPÈCE.—Arrêt de la Cour de cassation, sect. des requêtes, du 20 mars 1811, en ces termes : «LA COUR; Attendu qu'on ne peut raisonnablement soutenir que le dépôt d'un sac de nuit à une diligence soit un acte de commerce; D'où il résulte que l'arrêt attaqué n'a pu contrevenir, en le décidant ainsi, à l'art. 631 C. Comm.; — rejette, etc. »

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DEUXIÈME ESPÈCE. - La Cour royale de Colmar, par arrêt du 22 novembre 1814, a confirmé un jugement du tribunal de commerce de la même ville, qui condamnait le sieur Traut, entrepreneur de diligences, à payer à la dame Garbin la somme de 150 fr. pour un sac qui avait été remis par l'entrepreneur à une autre personne qui s'était présentée sous le faux nom de Garbin. La question de compétence n'a pas été soulevée, elle n'est donc qu'implicitement décidée par l'arrêt.

74. La demande en paiement d'un compte provenant de trailes acquittées, peut être portée devant le tribunal de commerce du lieu où ces traites étaient payables (1).

Les héritiers Schmids de Trèves avaient tiré sur les sieurs Lescouvé et compagnie de Paris, pour 280,083 fr. 11 cent. de lettres de change que ceux-ci avaient acceptées et acquittées, un compte courant s'était établi entre les deux maisons. Les sieurs Lescouvé et compagnie ont assigné les héritiers Schmids en paiement de ce compte devant le tribunal de commerce de Paris, un déclinatoire ayant été proposé, jugement du 30 octobre 1810, qui le rejette en ces termes : — « Attendu que le compte courant a pour cause des effets payables à Paris, et qu'aux termes de l'art. 420, C. P. C., dans ce cas, les demandeurs peuvent à leur choix faire assigner devant le tribunal de l'arrondissement dans lequel le paiement devait être

de sorte que celui qui, sans en faire profession et accidentellement, se serait chargé de transporter des personnes ou des marchandises, ne ferait pas acte de commerce. Voy. Infrà, 11, 100 l'arrêt du 17 avril 1812. (1) MM. PARDESSus, t. 4, p. 34, et CARR., COMP., t. 2, p. 550, critiquent, cette décision; ils disent que les traites acquittées doivent se confondre avec le compte courant, et que lorsque des commerçans s'ouvrent réciproquement un compte, il n'entre pas dans leur pensée que celui qui sera débiteur pourra être assigné hors de ses juges naturels. Il nous semble que malgré l'opinion de ces savans auteurs, l'arrêt peut être justifié; en effet les traites étaient payables au domicile de celui qui les avait acquittées, c'était là que les tireurs s'étaient engagés à faire les fonds : dès-lors, l'art.420 devait recevoir son application. Voy. suprà, no 55 l'arrêt du 14 mars 1810, et infrà, no 82, celui du 5 août 1811.

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effectué. Sur l'appel, arrêt confirmatif de la Cour d'appel de Paris, en date du 23 mars 1811.

75. L'artisan ne doit pas être réputé commerçant dans le sens des art. 1o et 60 C. de Comm. (1).

I

Son excellence le grand juge, consulté par le procureur du roi du tribunal des Deux-Ponts, sur la question de savoir si un artisan doit être rangé dans la classe des commerçans, lui répondit ainsi qu'il suit, sous la date du 7 avril 1811: : « J'ai été consulté plusieurs fois, monsieur, dans le cas de l'application de l'art. 60 du Code de commerce, et j'ai toujours répondu que l'on devrait d'abord considérer comme tels tous négocians, banquiers, fabricans et marchands; mais qu'il ne paraissait pas qu'on dût ranger dans cette classe le simple artisan, qui, ne travaillant qu'à fur et mesure des commandes qu'il reçoit journellement, ne fait point de son état un objet de spéculation. Il serait, au surplus, difficile d'établir une règle bien précise à cet égard; c'est au nolaire à apprécier les circonstances dans les cas par ticuliers qui se présentent.

Recevez, monsieur, l'assurance de mes sentimens affectueux..
Signé le DUC DE MASSA.

cautionné par

divers

76. Ce n'est pas le tribunal de commerce, mais le tribunal civil qui est compétent pour ordonner le paiement d'un billet à ordre causé valeur reçue, sans désignation de la valeur. Un sieur Giegnal avait souscrit au sieur Richard, particuliers, un billet à ordre, vaguement énoncé valeur reçue, sans désigner ni indiquer quelle espèce de valeur. Assignation en paiement de ce billet devant le tribunal de première instance. Un déclinatoire est proposé et rejeté par le tribunal. Appel devant la Cour de Rennes; et, le 10 mai 1811, arrêt qui confirme en ces termes : «LA COUR; Considérant qu'aux termes de l'art. 188, C. Comm., le billet à ordre doit énoncer la valeur qui a été fournie en espèces, en marchandises, en compte ou de toute autre manière ; — Que le billet du 12 septembre 1809 n'énonce point la valeur qui été fournie; les mots valeur reçue ne remplissant point le vœu de la loi; le billet à ordre, pour être effet de commerce, doit indiquer, non pas vaguement, qu'il y a eu valeur reçue; le défaut d'énonciation dans le billet du 12 septembre, de l'espèce de valeur qui a été fournie, lui ôte le caractère de billet à ordre, et le range dans la classe d'une simple promesse, d'une obligation purement civile, justiciable des tribunaux ordinaires et non d'un ribunal d'attribution. »

(1) Voyez M. B. S. P., p. 59, note 76, no 2, et un arrêt de 6 décembr 1815, rapporté dans nos observations sur l'arrêt du 25 novembre 1814, infrà, no 143.

XXII.

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