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Par actes des 16 septembre 1812 et 18 septembre 1815, le sieur Béneteau donne à chacun de ses deux enfants, pour les remplir de leurs droits dans la succession de leur mère, une somme de 7,891 fr., moyennant quoi, ceux-ci se reconnurent remplis de leur lot « et promirent de ne jamais plus rien demander à leur père, tant du chef de la communauté que de leurs autres droits dans la succession maternelle, si aucuns il en revenait, consentant que leur père en jouît sans en rendre aucun «< compte; sans quoi les présentes n'auraient « pas eu lieu. » Le 30 septembre 1814, jugement du tribunal de Civray, qui reconnaît, conformément aux énonciations d'un acte du 29 avril 1814, passé entre les mêmes parties, que ceux des 16 septembre 1812 et 18 septembre 1813 n'ont constitué qu'un partage. Mais le 31 mars 1817, arrêt de cassation en ces termes; "Attendu que les actes litigieux n'ayant été précédés, accompagnés ni suivis d'aucune des formes constitutives d'un partage proprement dit, tracées dans le chap. 6, titre 1°, liv. 5, Code civ., et spécialement applicables aux partages de communauté entre époux, suivant l'art. 1476 du même Code, ces actes ne peuvent être considérés que comme un traité à forfait fait entre Béneteau et ses enfants, traité par lequel, moyennant un prix déterminé en argent, ces derniers abandonnent à leur père tous leurs droits héréditaires quelconques dans la succession de la dame Bénéteau; - Attendu que toute cession de droits successifs est passible du droit proportionnel établi par l'art. 69, §§ 5 et 7, de la loi du 22 frimaire an vii, et qu'en déchargeant le défendeur de la contrainte décernée contre lui, à raison d'une telle mutation de propriété, le jugement attaqué a violé ledit art. 69, et fait une fausse application de l'art. 68 de la mème loi; — Casse (1). » (Dall., t. 7, p. 151.)

2872. Le droit d'accepter ne peut être enlevé à la femme ou à ses héritiers par aucune convention antérieure à la dissolution (art. 1455, C. civ.); mais elle le perd par une renonciation postérieure.

Cette renonciation est expresse ou tacite. La renonciation tacite n'a lieu que dans le cas où la femme séparée de corps n'a pas fait inventaire dans les trois mois (2) (art. 1463, C. civ.).

ilors ce cas, la renonciation doit être faite au greffe, conformément à l'art. 784, C. civ. Cette renonciation est la seule que la régie puisse opposer à la femme, et que celle-ci peut lui opposer (no 517), lorsqu'il s'agit de la qualité qui lui appartient. La renonciation par acte civil

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ne produit ses effets que comme contrat. Voyez supra, no 519.

2873. Tant que la femme n'a point renoncé, elle est présumée commune (art. 1459, C. civ.), et les droits doivent être établis en conséquence, sauf rectification, si, dans les délais utiles, la femme opère sa renonciation.

2874. La femme qui a accepté soit expressément, soit tacitement, ne peut plus renoncer; toute renonciation postérieure produirait l'effet d'une abdication de propriété (no 565), et l'acceptation ou appropriation des héritiers du mari, à l'égard des biens reconnus à la femme dans la communauté. constituerait une mutation passible du droit de vente, d'échange ou de donation, suivant que la renonciation de la femme serait gratuite ou à titre onéreux (1o 561 et 562).

2875. Mais la régie peut-elle opposer à la femme renonçante les faits qui, aux termes des art. 1454 et suiv. du Code civil, constatent une acceptation tacite?

La raison de douter se tire de ce que la présomption d'acceptation a le plus souvent été établie dans l'intérêt des héritiers du mari ou des créanciers, et que l'intérêt de la régie est d'une nature différente.

Cependant l'administration doit incontestablement être admise à prouver l'acceptation, lorsque son existence a pour résultat une mutation passible d'un droit (no 634); aucune disposition de loi n'a restreint pour elle les preuves légales à l'acte exprès de renonciation; elle peut donc invoquer le droit commun et dès lors se prévaloir des présomptions établies par le Code. Cette faculté qu'elle peut exercer également à l'égard de l'héritier, et relativement au droit de mutation par décès (no 2564), se restreint naturellement dans les bornes que la nature des choses apporte aux investigations de la régie, qui ne doit pas, sous prétexte de prouver une acceptation tacite, chercher à pénétrer dans les secrets des familles, ni soulever des procès auxquels les parties intéressées n'ont pas pensé, ou que l'amour de la paix leur fait négliger (3).

2876. Les auteurs ont examiné la question de savoir si le jugement obtenu par un créancier, et déclarant une femme commune, a force de chose jugée au profit de ceux qui n'y ont pas été parties (4). La décision négative qu'ils donnent en général à cette question ne s'applique pas à la régie, tenue de respecter les jugements rendus contradictoirement entre les parties (no 105), et par conséquent pouvant en exciper. Un jugement de cette espèce pourra donc être

(1) Add. Voy. Suppl., no 786 (Belfort, 2 avril 1844). (2) Voy. Bellot, du Contrat de mariage, t. 2, p. 326. (5) Add. Voy. Journ. de l'Enregist., no 4612 (cass., 13 février 1850).

(4) Pothier, des Successions, no 557; Chabot, sur l'article 800, Cod. civ.; Toullier, 1. 10, no 236; Bellot, du Contral de mariage, t. 2, p. 304.

produit pour preuve d'une acceptation tacite, de même que les parties pourront lui opposer celui qui maintiendrait la renonciation, quoiqu'il n'eût point été rendu contradictoirement avec elle.

2877. Les créanciers de la femme qui renoncent à la communauté peuvent l'accepter de leur chef, aux termes de l'art. 1464, C. civ., mais cette acceptation ne rend pas la femme commune, et ses effets se bornent au droit des créanciers relativement à la régie. Il y aura acceptation jusqu'à concurrence des biens dont les créanciers disposeront; mais à l'égard du surplus, la femme demeurera renonçante et les droits des héritiers de l'autre époux seront tels que si les créanciers n'étaient pas intervenus. Voy., supra, no 2574, ce que nous avons dit de l'acceptation d'une succession dans le même cas. 2878. Nous avons expliqué supra, no 360 et suiv., les effets de la renonciation de la femme, relativement au droit à percevoir à raison de l'accroissement dont profitent les héritiers du mari, ou le mari lui-même; nous n'avons rien à ajouter sur ce point. Mais nous aurons à nous occuper, aux chapitres des Liquidations, des effets de cette même renonciation relativement au droit de mutation par décès.

2879. Les partages de communauté ont cela de particulier que leur opération comporte des prélèvements réciproques. Ces prélèvements sont réglés, pour le cas d'acceptation, par les art. 1468 et suiv. du Code civil. En thèse générale, tout prélèvement exercé par l'un ou par l'autre époux, sur les biens communs, n'est passible d'aucun droit particulier : c'est une disposition inhérente à la nature du partage de communauté et qui ne contient aucune transmission.

Il n'y a point de distinction à faire entre les causes de prélèvement, qu'elles consistent en restitution de deniers réservés propres, ou en récompenses du prix d'immeubles aliénés, ou enfin en indemnités. Il suffit que ce soit une dette de la communauté, pour qu'il y ait lieu à l'affranchissement du droit proportionnel.

Ce principe, établi par Dumoulin (1) sous l'ancien droit, avait été adopté par la généralité des auteurs (2) et consacré par la jurisprudence des arrêts (3); on le suivait également dans la perception du centième denier (4). Une solution du 24 ventôse an i en avait fait application au droit d'enregistrement (5); enfin l'instruction générale, du 11 octobre 1817, n° 809, examinant la question sous le rapport du droit de succession, reconnut implicitement la règle de l'ancienne jurisprudence. Elle établit « que, lors « de la dissolution de la communauté, l'époux

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«<et les héritiers du prédécédé se trouvent res"pectivement investis d'un droit de propriété << dans les biens communs, et non d'une simple << créance sur les biens. » C'était la doctrine de Dumoulin; et il en résultait qu'il n'y a ni cession ni soulte, et que par conséquent le droit proportionnel n'est pas exigible lorsque, dans le partage de la communauté, des biens communs sont prélevés par l'un des copartageants jusqu'à concurrence des reprises qu'il avait à exercer. Voy. supra, no 2848, ce que nous avons dit du remploi (6).

2880. Mais cette règle doit-elle souffrir exception dans le cas où les biens abandonnés pour les reprises n'ont pas été choisis dans l'ordre indiqué par le Code civil? Cette question s'est élevée dans l'espèce suivante.

Le 18 mars 1821, madame veuve Bulard et ses enfants ont passé devant notaire l'acte de liquidation de la communauté qui avait existé entre ladite dame et son défunt mari. Il a été déclaré qu'il ne serait point question, dans cet acte, du mobilier dépendant de la communauté, et qu'à cet égard l'indivision continuerait de subsister. Les biens-fonds ont été le seul objet du partage et ils ont été estimés 7,000 fr. Les reprises à exercer par la veuve s'élevaient à 5,800 fr., pour lesquels on lui a abandonné plusieurs immeubles. Le surplus a été partagé entre elle et ses enfants.

Cet acte a été enregistré au droit fixe; mais on a décerné, ensuite, une contrainte pour obtenir le payement du droit proportionnel.

A l'appui de cette demande, on disait que, d'après l'art. 1471, C. civ., les reprises devaient d'abord s'exercer sur l'argent comptant, ensuite sur le mobilier et subsidiairement sur les immeubles; que, dans l'espèce, les valeurs mobilières de la communauté, soit en deniers, soit en créances actives, étaient plus que suffisantes pour remplir la veuve Bulard de l'indemnité qui lui était due; que, dès lors, elle n'avait aucun droit aux immeubles qui lui ont été abandonnés pour cette indemnité; d'où l'on concluait qu'il y avait cession immobilière pour 2,997 fr., montant de la moitié des reprises.

Cette opinion n'est pas fondée. L'art. 1471, C. civ., a été rendu dans l'intérêt des veuves, et pour que leurs prélèvements s'exercent sur les valeurs les plus liquides; mais c'est un avantage dont elles peuvent ne pas user de concert avec les héritiers. Rien n'oblige non plus les parties à partager tout à la fois les meubles et les immeubles; elles peuvent, comme il a été fait par la liquidation du 18 mars 1821, laisser les meubles indivis, et ne partager que les immeu

(4) Dict. des Dom., vo Remploi,

(5) Dict. de l'Enregist., vo Reprise, no 14.

(6) Add. Voy. Supp., no 755; Journ. de l'Enregist., no 4738 (cass., 8 avril 1850), no 4680 (Châteaudun, 1er mars 1850).

bles (supra, no 2727). Il a été abandonné à la dame Bulard des immeubles de la communauté jusqu'à concurrence du montant de ses reprises. On ne peut voir dans cette stipulation ni cession, ni soulte; car les prélèvements de la veuve devant s'exercer sur les biens de la communauté, la nature des biens abandonnés est sans importance. (Délib. du 28 mai 1823; Contr., art. 543.) Cette décision a été confirmée par une solution du 12 mars 1828 et une délibération du 28 novembre suivant (Contr., art. 1719).

2881. Une solution du 9 janvier 1832 (Contr., art. 2443) porte que le partage de communauté n'est pas passible du droit proportionnel lorsque la veuve reçoit la totalité des biens communs, insuffisants pour le remploi de ses reprises, et se charge de payer toutes les dettes. Cette obligation, en effet, n'est que la conséquence forcée de l'art. 1471, C. civ. On ne pourrait, d'ailleurs, voir dans la convention dont il s'agit les caractères d'une vente, puisque la veuve ne reçoit rien en compensation de l'obligation qu'elle s'impose (1).

2882. Les reprises exercées par la femme sur les biens du mari n'ont pas, comme celles qui s'opèrent sur les biens communs, le caractère de partage; la femme n'a sur les biens du mari qu'une créance dont l'acquittement en immeubles ou en objets autres que de l'argent constitue la dation en payement, passible du droit de vente (no 1783). Cette décision avait été controversée, ainsi que nous l'avons dit en parlant du remploi (no 2855), dont les règles sont les mêmes que celles qui régissent les reprises à cet égard; la même hésitation se rencontre dans la jurisprudence de la cour de cassation. Le 6 floréal an x1, arrêt ainsi analysé par Teste-Lebeau, vo Partage, no 4:

L'acte par lequel des enfants abandonnent à leur mère les biens faisant partie de la succession paternelle. pour la remplir des reprises qu'elle a à exercer dans cette succession, n'est ni un acte de vente, ni un transport emportant mutation, mais un simple règlement de droits, un véritable partage qui n'est point assujetti au droit proportionnel. »

Mais dans un arrêt du 18 mai 1824, la cour a décidé que la femme n'ayant sur les propres du mari qu'un droit de créance, l'abandon qui lui était fait de ces biens pour le remploi de ses reprises ne donnait pas lieu à déduire leur valeur de la déclaration à faire par les héritiers. C'est juger implicitement que cet abandon dépouille la succession d'un bien qui lui appartient, et qu'en conséquence il opère transmission. Voy. cet arrêt aux Liquidations (2).

2883. La dette remplie au moyen des prélèvements sur des biens communs doit être celle de la communauté; si l'abandon fait à la

(1) Add. Voy. Suppl., no 748 (cass., 2 juillet 1844). CHAMPIONNIERE. 3.

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femme ou au mari avait pour objet d'éteindre une obligation personnelle de l'un des époux envers l'autre, il y aurait dation en payement; il en est de même dans le cas où l'époux survivant se rembourse de sa créance sur les héritiers du prédécédé.

Ce principe a été constaté dans l'espèce suivante :

La veuve Romanet avait, en 1819, constitué en dot à sa fille, la dame Plet, divers objets pour la remplir de ses droits dans la succession de son père, encore indivise... Il fut procédé, plus tard, entre la veuve Romanet et ses trois enfants, au partage de la communauté et de la succession. Les droits et reprises de la veuve furent fixés à 16,419 fr. 52 c. Il lui fut abandonné : 1o En argent. 2,455 f. 49 c. 12,641 96

2o En effets mobiliers.

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3o En immeubles de communauté. 12,225
4° En immeubles de la succession. 2,750

30,072 45

Dans la différence se trouvait comprise la somme de 7,839 fr. 87 cent., formant la part des effets mobiliers de la veuve Plet, « qui ont « été délaissés, est-il dit dans l'acte, à la veuve

Romanet, pour l'indemniser de l'avance « qu'elle a faite à cette dame dans son contrat « de mariage. » Le surplus avait pour objet diverses sommes, payées par madame Romanet en acquit de la succession et de la communauté.

Le tribunal de la Seine décida, par jugement du 19 août 1829, qu'aucun droit de soulte n'était exigible à l'égard de 7,859 fr. 87 cent. d'effets mobiliers abandonnés, comme il est dit ci-dessus, attendu que ces effets avaient été cédés à la veuve Romanet par la veuve Plet, dans son contrat de mariage, sur lequel on avait mal à propos perçu le droit de donation au lieu du droit de cession qui était exigible.

La régie s'est pourvue en cassation; elle a soutenu que les 7,839 fr. 87 cent. d'effets mobiliers abandonnés à la veuve Romanet étaient soumis au droit proportionnel de 2 p. c., pour dation en payement; on a dit, dans l'intérêt de la veuve Romanet, que le tribunal, saisi de la question de savoir s'il y avait soulte, ne pouvait pas statuer sur la question de dation en paycment, qui ne lui avait pas été soumise. Le 31 juillet 1853, la chambre civile a rendu l'arrét suivant :

« La cour, vu l'art. 69, § 5, no 1, de la loi du 22 frimaire an vii; - Attendu qu'il est indifférent que la régie ait réclamé, à titre de soulte plutôt qu'à titre de dation en payement, le droit proportionnel dù par la veuve Romanet, à raison de l'abandonnement qui lui a été fait, dans l'acte de partage du 16 juillet 1828, d'effets mobiliers autres que le numéraire, en payement

(2) Add. Voy. Suppl., no 763.

des sommes dont elle était devenue créancière par suite de la constitution dotale faite à sa fille, dans son contrat de mariage, puisque le droit de soulte et le droit de dation en payement d'effets mobiliers sont fixés l'un et l'autre par la loi à la même somme de 2 p. c.;- Attendu qu'en refusant à la régie le payement de ce droit proportionnel sur ladite somme de 7,859 fr. acquittée par un abandon d'effets mobiliers, le tribunal civil de la Seine a non-seulement fondé sa décision sur un motif contraire aux principes et à la jurisprudence, en supposant que la constitution dotale faite en 1819, par la veuve Romanet à sa fille, emportait de la part de celle-ci la cession de ses droits successifs à la dame sa mère, mais a de plus expressément violé l'art. 69, § 5, no 1, de la loi du 22 frimaire an vii; Casse (1). » (Contr., art. 2759.)

«si la femme n'est pas commune en biens, elle. n'est pas dans le cas de faire un partage; elle « est réellement étrangère aux acquets fails << pendant le mariage, qui ne peuvent lui être « transmis sans qu'il y ait une mutation effec«tive de propriété (4). » Le conseil des finances, en assimilant la femme non commune à la femme renonçante, confondait deux qualités fort différentes dans leurs effets.

La loi du 22 frimaire an vn garda le silence sur la question, et en abandonna ainsi la solution aux principes du droit civil et aux modifications que ce droit pouvait recevoir.

Le Code civil semble avoir adopté le système du centième denier, lorsqu'il dit (art. 1492); «La femme qui renonce perd toute espèce de

droit sur les biens de la communauté. » Cependant une divergence s'est élevée sur ce point entre les tribunaux. Un jugement du tribunal de Saint-Omer, du 7 février 1855 (Contr., art. 4025), a énergiquement soutenu la doctrine des anciens auteurs, et l'a fondée sur la combi

C. civ., sur les expressions reprises el reprendre, consacrées au droit de la femme renonçante à l'égard des objets tombés dans la communauté, enfin sur l'ancienne jurisprudence dont le Code civil est présumé ne s'être écarté qu'autant qu'il l'a formellement déclaré.

La cour de cassation a admis une opinion contraire, plus conforme au texte précis de la loi, et peut-être aussi aux principes plus absolus que comporte aujourd'hui le système du Code. Par arrêt du 22 novembre 1837, elle a cassé le jugement précité.

2884. La femme qui renonce à la communauté ne conserve-t-elle sur les biens qui la composent qu'un droit semblable à celui qui lui appartient sur les propres du mari? Cette question, après avoir été controversée dans l'an-naison des art. 1470, 1471, 1472, 1495 et 1494, cien droit avait été décidée en ce sens, que la renonciation n'avait d'autre effet que sou objet, savoir l'affranchissement des dettes; qu'à tous autres égards, la femme conservait un droit de copropriété; que les conquêts étaient d'ailleurs présumés payés de ses deniers et en remplacement de ses propres. Cette doctrine était celle des plus graves auteurs, notamment de Ricard, sur l'art. 5 de la coutume de Paris, de Lemaître et de Brodeau, sur l'art. 80 de la même coutume, de Duplessis, titre des Cessions, liv. 1, sect. 1, de Poquet de Livonière, Traité des fiefs, liv. 5, ch. 5, sect. 3, de Guyot, des Lods, chap. 4, sect. 7, distinct. 2, no 3, de Fonmaur, no 525, enfin de Pothier, qui s'exprime ainsi : «En renonçant à la communauté, elle ne re« nonce qu'à ce qui pourrait rester après le «prélèvement des reprises qu'elle aura à exer«cer sur cette communauté. Elle ne renonce « pas aux biens de cette communauté jusqu'à << concurrence de ce qu'elle a droit d'en préle-place de son droit primitif de copropriétaire sur «ver pour ses reprises. En prélevant pour ses reprises ces biens de la communauté, elle ne « les acquiert pas (2). »

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Ces auteurs avaient conclu des principes ainsi posés, que l'attribution de biens communs à la future renonçante avait le caractère de partage, et en conséquence ne donnait pas ouverture aux droits de mutation; plusieurs arrêts du parlement de Paris l'avaient ainsi jugé (3).

Mais la jurisprudence du centième denier n'avait pas suivi cette doctrine; appréciant les principes du droit civil plus favorablement aux prétentions fiscales, elle avait considéré «< que

(1) Add. Voy. Suppl., no 728. (2) Des Fiefs, part. 1, § 3.

-

Vu les art. 1192, 1495 el 1493, C. civ.;— Vu aussi les art. 4 et 15, n° 6, de la loi du 22 frimaire an vii; Vu enfin l'art. 52 de la loi du 28 avril 1816; Attendu que par la renonciation de la femme à la communauté, le mari devient seul propriétaire des biens qui la composent; que, par conséquent, l'action en reprise que la loi réserve à la femme au lieu et

les biens meubles et immeubles de cette communauté, et en cas d'insuffisance sur les biens personnels de son mari pour la remplir de ses reprises, elle ne l'exerce qu'à titre de créancière; que si, comme le reconnaît le jugement attaqué, il y a mutation soumise au droit proportionnel d'enregistrement, lorsque les biens donnés à la feinme pour la remplir de ses apports sont personnels au mari, il en résulte nécessairement qu'il y a mutation soumise à ce droit dans le cas même où ces biens ont fait partie de la communauté, puisqu'ils sont devenus la propriété personnelle du mari; qu'il suit de ce qui

(3) 14 juin 1619, 30 mars 1621, 28 mai 1644 et 23 juin 1665.

(4) Dicl. des Dom., vo Remploi, 4o.

précède qu'en annulant la contrainte décernée contre le sieur Dubuisson, le jugement attaqué a faussement appliqué les art. 1492, 1493 et 1495, C. civ., et violé l'art. 4, l'art. 15, no 6, de la loi du 22 frimaire an vii, et l'art. 52 de la loi du 28 avril 1816. »

en usage sont celles que le Code civil examine sous la rubrique de la communauté conventionnelle. Nous diviserons ces diverses clauses en deux distinctions; la première contiendra toutes les dispositions qui ont pour objet d'étendre ou de restreindre la communauté légale, et nous y placerons la séparation de biens conventionnelle ou l'exclusion de la communauté; la seconde comprendra les clauses qui dérogent à l'égalité du partage dans les biens de la com

Déjà la régie avait soutenu le système du centième denier, dans une délibération du 14 août 1824, et la cour de cassation avait rendu, le 10 août 1850, un arrêt dans lequel le même principe était admis, et que nous rappor-munauté. terons en traitant des liquidations (1).

2885. Le texte même des art. 1492 et 1495 conduit à reconnaître que, s'il est dù un droit proportionnel à raison de la dation en payement qui s'opère lorsque la femme renonçante est remplie de ses reprises en biens de la communauté devenus propres au mari, il n'y a ni vente, ni payement, 1° lorsqu'elle retire les linges et hardes à son usage, 2o lorsqu'elle reprend soit ses immeubles propres, soit le prix de ses immeubles aliénés dont le remploi n'a pas été fait et qui existe en nature dans la communauté. En conséquence, il n'est dù que le droit fixe.

2886. Par son testament du 11 juillet 1826, le sieur Gillet a institué un légataire universel, et légué diverses sommes à son épouse, pour lui tenir lieu de sa moitié dans la communauté. «En sorte, porte l'acte, que si elle accepte elle « sera réputée se contenter de ces valeurs, pour << sa part afférente dans ladite communauté. » Par acte du 25 février 1834, le testament a été exécuté. La régie a considéré que le sieur Gillet n'avait pas pu léguer utilement à sa femme ce qui lui appartenait déjà dans la communauté, et qu'en conséquence celle-ci, en exécutant la volonté du testateur, de concert avec le legataire universel, avait cédé à celui-ci sa part des objets communs, moyennant la somme qu'elle avait reçue de lui (Délib. du 13 juillet 1834, Contr., art. 3015). Cette décision n'est pas régulière, car il est évident que la veuve Gillet, en acceptant le legs, a renoncé virtuellement à la communauté, et qu'en conséquence il n'a été dù qu'un droit de mutation par décès sur la totalité des biens devenus propres au mari, droit acquitté d'ailleurs, dans l'espèce, par le légalaire universel. Voy. supra, no 2397.

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Distinction ITM.

DES CLAUSES DONT L'OBJET EST DE RESTREINDRE OU
D'ÉTENDRE LA COMMUNAUTÉ.

SOMMAIRE.

2888. Règles générales de l'association conjugale relati-
vement aux droits d'enregistrement.

2889. De l'ameublissement déterminé.
2890. Ni la mise en communauté, ni le partage ne don-
nent ouverture au droit proportionnel.
2891. Jurisprudence. Instruction générale du 24 mars
2892. Caractères de l'ameublissement d'un immeuble jus-
1829. Jugement du 5 janvier 1833.
qu'à concurrence d'une somme déterminée.
2893. De l'ameublissement indéterminé.
2894. L'apport d'une somme assignée sur un immeuble
n'opère pas ameublissement de cet immeuble.
2895. De la renonciation au bénéfice de l'art. 1509, Cod.
civ. Délibération du 15 mars 1823.

2896. De la clause de réalisation. Délibération du

30 novembre 1855.

2897. Du cas où la restitution s'opère en d'autres meu

bles, et de celui où elle consiste en choses fongibles.

Déli

2898. De la communauté réduite aux acquêts.
2899. De la stipulation d'une société d'acquêts.
Espèce dans laquelle les caractères de la société
bération du 13 juin 1827.
d'aequêts dans le ressort du parlement de Bor-
deaux déterminent la perception des droits.
Arrêt du 11 avril 1831.

2900.

2901. De la séparation de biens.
7 mai 1823.

Délibération du

2888. Les époux peuvent établir par leur contrat de mariage une communauté universelle de tous biens, tant meubles qu'immeubles, présents et à venir, ou de tous leurs biens à venir seulement (art. 1526, C. civ.). Les mutations qui peuvent résulter de cette stipulation ne sont point passibles d'un droit particulier; elles ne sont que la conséquence du contrat de mariage, et il faut leur appliquer, sous ce rapport, tout ce que nous avons dit sur les sociétés entre étrangers. (Voy. supra, no 2741 et suiv.) 2889. Lorsque les époux (porte l'art. 1505, « C. civ.) ou l'un d'eux font entrer en commu«nauté tout ou partie de leurs immeubles pré«sents ou futurs, cette clause s'appelle ameu«blissement. » L'ameublissement est déterminé

"

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