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n'est point regardé comme un avantage sujet aux formalités des donations, mais comme une convention de mariage (art. 1516, C. civ.). De ces deux dispositions il résulte que le droit de mutation n'est pas exigible à raison des conventions matrimoniales constitutives d'un préciput ou de tout autre avantage de cette espèce. Mais les principes ont été longtemps incertains sur cette matière.

2903. La cour de cassation a longtemps considéré ces espèces d'avantages, soit qu'elles dérivassent de la loi, soit qu'elles résultassent de conventions matrimoniales, comme des libéralités passibles du droit proportionnel. Cette doctrine avait été consacrée par des arrêts des 23 floréal an xu, 20 frimaire an xiv, 19 août, 5 novembre 1806 et 26 mai 1807. Celui du 23 floréal an XIII, relatif à des avantages lėgaux, était ainsi motivé: «Attendu que les «droits et avantages de survie, accordés par la « coutume de Luxembourg, ont été acquis à la « veuve seulement à l'événement du décès de « son mari, et que la loi du 22 frimaire an vi << assujettit au droit proportionnel toute trans«mission de meubles ou d'immeubles... » Celui du 26 mai 1807, rendu dans une espèce où s'agissait de stipulations conventionnelles, repose sur ce que la loi ne porte aucune excep«tion pour les gains de survie ou autres avan<< tages du survivant : que les dispositions des « art. 1515, 1516 et 1525 du Code civil, en ré«glant les conventions qu'elles rappellent, et «en les exemptant des règles relatives aux do<< nations, ne portent aucune dérogation à la loi « du 22 frimaire an vi et ne peuvent recevoir << aucune application relativement aux droits << dus pour la transmission des avantages sti«pulés en faveur du survivant..... »

Sous l'ancien droit, certaines coutumes attribuaient au survivant des époux, sous le titre de gains de survie, des avantages soit sur les biens de la communauté, soit sur les biens de l'autre époux. Ces dispositions légales ont été abolies par la loi du 17 nivôse an 11; mais cette abolition n'a produit ses effets que pour l'avenir, en sorte que les époux mariés avant la loi du 17 nivôse an doivent recueillir aujourd'hui les avan-il tages qui leur étaient assurés par les statuts auxquels ils étaient soumis, pourvu toutefois que ces statuts eux-mêmes n'aient pas été abolis comme féodaux. Ces avantages, réalisés aujourd'hui, sont affranchis ou frappés du droit proportionnel, suivant qu'ils offrent ou n'offrent pas le caractère de libéralités.

Sous l'empire des lois nouvelles, il n'existe plus d'avantages légaux; mais nous venons de voir que le Code civil autorise des conventions modificatives du partage égal de la communauté. Le préciput n'est qu'une application particulière d'une règle générale établie dans l'article 1320 du Code civil, ainsi conçu: « Les époux peuvent déroger au partage égal établi * par la loi, soit en ne donnant à l'époux survivant, ou à ses héritiers dans la communauté, qu'une part moindre que la moitié, soit en ne << lui donnant qu'une somme fixe pour tout droit de communauté, soit en stipulant que << la communauté entière, en certains cas, << partiendra à l'époux survivant ou à l'un d'eux Seulement.» A l'égard d'une stipulation, l'article 1525 reproduit les dispositions de l'article 1516, en disant : « Cette stipulation n'est « point réputée un avantage sujet aux règles relatives aux donations, soit quant au fond, soit quant à la forme, mais simplement une << convention de mariage et entre associés. » De ces décisions, l'on doit tirer les mêmes conséquences que nous avons déduites des art. 1515 el 1516, c'est-à-dire l'affranchissement de tout droit de mutation, des effets de ces stipulations matrimoniales, ainsi qu'on va le voir par ce qui suit; nous examinerons en même temps les principes qui régissent les préciputs, les gains de survie légaux et les stipulations de partage inégal, parce que les principes de perception sont absolument les mêmes (1).

Ainsi qu'on le voit, la décision relative aux avantages résultant de la loi n'était qu'une application d'une solution plus générale et embrassant tous les gains de survie, soit légaux, soit conventionnels. Mais depuis ce dernier arrêt, la cour de cassation a changé sa jurisprudence, implicitement à l'égard des gains légaux, et expressément à l'égard des avantages stipulés.

Dans le bailliage de Caux, la coutume de Norap-mandie, exclusive de la communauté entre époux, accorde cependant à la femme la moitié des conquêts faits par le mari, en bourgage, et l'usufruit de la moitié de ceux faits hors bourgage. L'administration prétendit que ces deux avantages constituaient des gains de survie donnant ouverture à un droit de mutation au moment où ils se réalisaient. Mais cette doctrine fut repoussée par plusieurs arrêts de la cour de cassation: l'un du 30 mars 1825, ainsi conçu :

(1) Add Voy. Suppl., no 733 (Lille, 4 juillet 1844; Douai, 1er février 1845; Arras, 9 juin 1846; solution du 12 août 1846).

«Attendu que, quoiqu'il soit vrai de dire << que la coutume était exclusive de la commu

nauté entre époux, on ne peut pas en con«clure que le droit que l'art. 529 attribuait à «la femme sur les conquêts immeubles faits « par son mari constant le mariage fùt un droit << purement successif, puisque les art. 331 et «332 supposent que la propriété de la moitié « desdits acquèts était acquise à la femme du « vivant de son mari, et qu'elle était même, en <«< cas de prédécès, transmise à ses héritiers, « sauf le droit d'usufruit que la loi réservait en « ce cas au mari sur cette moitié. » (Instr. gén. du 29 mai 1823, no 1176, § 8.)

Le second, sous la date du 26 juin 1826, est ainsi motivé :

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lent que des immeubles, loin d'être attributifs de leur propriété en faveur de l'épouse survivante, ils la lui supposent déjà parfaitement acquise; le mari (porte l'art. 331) doit jouir par usufruit, sa vie durant, de la part que sa femme a eue en propriété aux conquêts; le mari et ses héritiers (porte l'art. 332) peuvent retirer la part des conquêts ayant appartenu à la femme;

« L'esprit : les meubles, tout aussi bien que les immeubles, proviennent également de la collaboration commune des époux; la cause étant donc la même, l'effet ne pouvait aucunement être différent... » (Contr., art. 1654.)

«Attendu que le droit d'usufruit attribué à la femme, après la mort de son mari, sur la « moitié des conquêts faits hors bourgage, par l'art. 329 de la coutume de Normandie, est « comme son droit de propriété sur la moitié des conquèts faits en bourgage; que le même article lui attribue une condilion attachée par ule statut local à l'association conjugale, comme « étant le résultat de la collaboration commune, « suite de cette association; que, par consé«quent, les mêmes règles concernant l'époque à laquelle ces droits prennent naissance sont Dans ces divers arrêts, la cour n'admet plus, applicables à l'un et à l'autre desdits droits; comme règle générale et absolue d'une percep« et qu'ainsi, dans l'exécution des contrats de tion, l'existence d'une mutation; elle distingue << mariage passés sous l'empire de la coutume entre les cas où les mutations ne sont que l'effet susénoncée, de même que l'entrée en jouis- d'un droit préexistant et ceux où elles ne sont «sance de la femme dans la propriété des con- que l'exécution d'une libéralité, distinction que «quêts en bourgage, après le décès du mari, ne nous allons voir formellement établie à l'égard « donne ouverture à aucun droit proportionnel des avantages conventionnels. Ainsi, elle abande mutation, de même son entrée en jouis donne le principe de ses premières décisions, à «sance de l'usufruit des conquêts hors bour-l'égard des avantages légaux ; il en résulte qu'on "gage, ne peut donner ouverture à un semblable droit... » (Contr., art. 1200.) Enfin le troisième a été rendu dans l'espèce suivante : Au décès du sieur Morand, ses enfants firent au bureau de Falaise une déclaration de la moitié du mobilier de sa succession. La régie prétendit que sa veuve devait le droit sur l'autre moitié; mais cette prétention fut repoussée par arrêt du 22 juillet 1828, ainsi conçu :

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doit leur appliquer les règles qui vont être développées relativement aux gains de survie dérivant des contrats, c'est-à-dire que le droit de mutation par décès ne devra être perçu qu'autant que les coutumes attribueraient aux avantages établis par elles le caractère de libéralité, caractère que leur reconnaissaient, en effet, certaines législations coutumières.

2904. Le contrat de mariage des époux Tribard, passé en 1771, contient communauté de tous biens meubles et conquéts immeubles, et cette clause : « L'époux, survivant à la future « épouse sans enfants, ne sera tenu de rendre

aux héritiers de la future que ce qu'il aura << reçu d'elle ou à cause d'elle.» Au décès de la dame Tribard, sans enfants, la régie a poursuivi le droit de mutation des biens échus au sieur Tribard; mais, le 6 mars 1822, arrêt qui déclare que ce droit n'est pas exigible.

Attendu, en droit, que, d'après les principes du droit commun reçus en France, toutes les fois qu'il n'y était pas dérogé par le statut local, les femmes n'étaient pas héritières de leurs maris, hors le cas prévu par la loi unique, au Code, Unde vir et uxor; - Attendu que ce n'est pas à titre lucratif de succession, mais bien à titre correspectif de collaboration commune, que la coutume de Normandie, par ses art. 329, 592 et 393, accordait à l'épousé survivante une part dans les biens pendant le mariage; que la lettre et l'esprit de cette coutume écartent également la distinction entre les immeubles et les meubles, proposée par les demandeurs, suivant laquelle les immeubles avaient été dévolus à l'épouse survivante, à titre correspectif de collaboration commune, tandis que les meubles lui avaient été dévolus à titre lucratif de succes-femme n'a jamais eu un droit acquis aux bénésion;

« Attendu que la stipulation du contrat de mariage des sieur et dame Tribard, portant, qu'en cas de prédécès de la femme sans enfants, le mari n'aura à rendre aux héritiers de cette dernière que ce qu'il a reçu d'elle ou à cause d'elle, n'est qu'une modification formellement autorisée par l'art. 1525 du Code civil; — altendu que l'effet d'une telle clause est que la

fices de la communauté ; d'où il suit que, par l'événement de son prédécès, le mari recueillant seul, à l'exclusion des héritiers de la femme, les acquets de cette communauté, cette circonstance n'opère pas, au profit de ce dernier, une mutation de propriété qui donne ouverture à un droit proportionnel d'enregistrement.» (Contr., article 367.)

«La lettre en effet, les art. 392 et 393, qui confèrent à l'épouse survivante une part sur les meubles, sout, de l'aveu mème de la partie de manderesse, conçus presque dans les mêmes termes que l'art. 529, qui lui confère une part sur les immeubles; la femme (porte l'art. 329), après la mort du mari, a la moitié de la propriété des conquéis. Api ès la mort du mari (por- En 1812, contrat de mariage entre le sieur tent les art. 592 et 395) la femme a le tiers des Delahaye et la demoiselle Delaplace, par lequel meubles; que si les art. 331 et 332 ne par-les futurs époux se soumettent au régime de la

« nel lors du décès du premier mourant, sur « les biens dont il s'agit. »

communauté. Il est convenu que le survivant aura un préciput et un augment de préciput, ainsi que l'usufruit des biens qui formeront le Une délibération du 11 septembre 1829 (Conlot des héritiers, excepté les reprises. Après le trôleur, art. 1903) a reconnu que cette décision décès de la dame Delahaye, arrivé en 1818, on était applicable aux stipulations des contrats de a exigé de son mari un droit de mutation à titre mariage antérieures au Code civil, parce que gratuit, tant sur la moitié du préciput et aug-l'art. 1525, C. civ., n'a fait que reconnaître des ment de préciput, que sur l'usufruit de la part afférente à sa succession dans la communauté; mais il a été reconnu que cette perception n'était pas fondée, par arrêt de la cour de cassation du 50 juillet 1823, ainsi conçu :

« Attendu que les clauses du contrat de mariage des sieur et dame Delahaye, par lesquelles il a été stipulé que le survivant des époux, déclarés communs en biens, après le prélèvement des reprises respectives sur les biens de la communauté, jouirait, sur ces mêmes biens, d'un préciput et d'un augment de précipút, ainsi que de l'usufruit de la part du prémourant dans la dite communauté, ne doivent être considérécs, aux termes de l'art. 1525 du Code civil, que comme des conventions de mariage et entre associés; Attendu que l'effet de telles conventions entre associés est que l'associé prémourant est censé n'avoir jamais eu de droit acquis audit préciput, ni à l'usufruit des biens à lui afférents dans le partage de la communauté; d'où il suit que lorsque, par l'événement de son décès, l'époux survivant a recueilli seul ces mêmes avantages, cette circonstance n'a pas opéré, au profit de ce dernier, une mutation passible du droit proportionnel d'enregistre ment, et qu'en jugeant, dans l'espèce, que le sieur Delahaye n'était pas redevable d'un tel droit, pour raison de l'usufruit ouvert à son profit sur la dame Delahaye, dans les biens de la communauté, ainsi que sur les gains de survie à lui dévolus sur ces mèmes biens par le prédécès de son épouse, en vertu de son contrat de mariage, le jugement attaqué n'a fait qu'une juste application de l'article précité du Code civil, et n'a pas violé l'art. 69, § 4, n° 2, de la loi du 22 frimaire an vii; rejette (1). » (Contr., art. 593.)

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principes préexistants.

2906. On conçoit qu'il en serait autrement si les époux disposaient au profit de l'un d'eux d'un objet qui ne ferait pas partie de la communauté; cet objet se trouverait nécessairement transmis à titre gratuit, et ne pourrait l'être que par succession ou par libéralité; en sorte que, dans cette hypothèse, le droit fixe de 5 francs serait dù sur le contrat et celui de mutation par décès, à l'événement.

2907. L'instruction générale, no 1113, précitée, ne s'expliquait pas sur le cas d'un préciput limité; on avait élevé quelques difficultés à cet égard, parce que l'art. 1516, semble moins étendu que l'art. 1525, en ce qu'il ne parle pas, comme ce dernier article, des effets au fond, mais seulement quant à la forme, d'où l'on avait voulu conclure que le préciput, quoique non assujetti aux formalités des donations, n'en avait pas moins le caractère. Mais l'instruction du 26 septembre 1828, no 1256, après avoir rappelé les arrêts des 6 mars 1821 et 30 juillet 1824, ajouta :

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Le principe, ainsi adopté, est la conséquence de celui d'après lequel toutes les stipulations d'un contrat de mariage, relatives à l'établissement de la communauté et au partage qui aura lieu lorsqu'elle sera dissoute, ne sont que des conventions entre associés. Il importe donc bien de distinguer le cas où des stipulations de ce genre portent seulement sur les biens de la communauté, et celui où elles s'étendent à des biens personnels à l'un des époux, ou à ceux confondus dans la succession du mari, parce que la communauté aurait été répudiée par la femme. Dans le premier cas se trouvent, outre ce qui a déjà été prévu par l'instruction, no 1113, les gains de survie et préciputs à prélever par le survi2905. Cette jurisprudence qui, d'ailleurs vant sur la communauté. On doit y comprendre sera confirmée par plusieurs arrêts que nous encore la reprise des apports de la femine, d'arapporterons plus bas, établit suffisamment que, près les stipulations spéciales autorisées par l'arquelles que soient les stipulations que les époux ticle 1514 du Code, et tous les cas prévus par font sur les biens de la communauté, le droit les art. 1515, 1520, 1522 et 1525. Mais, lorsde mutation n'est pas exigible; cette doctrine, que le contrat de mariage établit que la femine, longtemps combattue par l'administration, a été si elle survit, pourra prélever son préciput. reconnue par elle dans l'instruction du 8 jan-même en renonçant à la communauté, ce n'est vier 1824, no 1113, qui porte, en règle générale, plus la communauté seule qui est affectée au qu'il ne sera pas perçu de droit fixe d'eure-gain de survie ainsi convenu. Par la renoncia"gistrement, sur les contrats de mariage, pour la clause qui attribue la totalité des biens de la communauté au survivant des époux ou à l'un d'eux seulement, ni de droit proportion

(1) Add. Voy. Supp., no 752 (Seine, 7 juillet 1841).

tion qu'elle a la faculté d'exercer, la femme survivante devient étrangère à la communauté, qui accroit à la succession du mari: l'effet d'une telle clause est même de grever les biens propres de ce dernier, de telle sorte que l'insuffisance de la communauté répudiée ne pourrait étre alléguée par les héritiers du mari, pour se

dispenser d'acquitter le montant du préciput. Ce | n'est plus une simple convention entre associés, mais une donation éventuelle.

En conséquence, conformément à une décision du ministre des finances du 6 mai 1828, l'instruction décida :

« 1° Que les préciputs stipulés en vertu de l'art. 1515, C. civ., lorsqu'ils sont à prendre uniquement sur les biens de la communauté, ne donnent lieu, ni à la perception du droit fixe de donation sur le contrat de mariage, ni à la perception du droit proportionnel de mutation par décès lors de l'événement;

« 2o Qu'il en est de même de la reprise des apports, d'après la stipulation autorisée par l'article 1514, ou de la clause qui n'attribuerait à l'un des époux qu'une part moindre que la moitié de la communauté, ou une somme d'argent à titre de forfait, en vertu des art. 1520 et 1522; 3° Que le droit fixe de donation éventuelle continuera d'être perçu sur le contrat de mariage, lorsqu'il y sera stipulé que la femine aura la faculté de prendre son préciput, même en renonçant à la communauté.

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«4° Et que, dans cette espèce, en cas de prédécès du mari et de renonciation par la veuve à la communauté, le droit proportionnel de mutation par décès entre époux sera exigé sur le préciput. »

dans les autres; l'art. 1516, qui d'ailleurs ne fait aucune distinction, doit donc recevoir son application. Il importe peu que les propres du mari soient grevés du préciput; car cette affectation 'a lieu qu'à titre d'hypothèque, comme on le voit dans l'art. 2155, C. civ. Les propres du mari sont grevés aussi des apports de la femme, sans que personne prétende qu'il en résulte une donation; enfin, le préciput de la femme qui renonce, devient un véritable forfait de communauté; or, ce forfait peut être à la charge personnelle de l'un des époux, et cependant l'instruction reconnaît qu'il n'a pas le caractère de don. Nous pensons donc que dans aucune hypothèse le préciput ne doit être assimilé à une libéralité, et que la distinction établie par l'administration ne doit pas être suivie (1).

2908. Nous avons fait connaitre supra, n° 2889 et suiv., les principes du droit ancien et ceux du Code civil sur les effets de l'ameublissement; nous avons dit que la régie, en reproduisant la doctrine des feudistes, s'était méprise sur le motif de leur système, et n'avait pas aperçu que si un droit de mutation était exigible dans le cas d'attribution de l'immeuble à l'époux qui ne l'avait pas apporté, c'était parce que la mise en communauté même donnait ouverture au droit, tandis que, sous l'empire de la loi du 22 frimaire an vit, elle en est exemple. Comme on le voit, la direction reconnaît de Il résulte de cette observation que l'immeuble la manière la plus générale, que la jurisprudence ameubli, faisant partie des biens de la commude la cour de cassation est applicable à toutes nauté, comme les meubles mêmes, peut être les stipulations que les époux peuvent faire sur l'objet spécial d'une stipulation avantageuse, les biens de la communauté. Mais elle tranche sans qu'il y ait libéralité entre époux. Cette soune question fort grave, en décidant que lors-lution a été consacrée dans l'espèce suivante, où que la femme a le droit de prendre son préciput, même en renonçant, la disposition a le caractère d'une libéralité. Nous ne dissimulerons pas que cette distinction peut être appuyée de l'autorité de plusieurs jurisconsultes; cependant elle nous parait susceptible de difficultés sérieu

ses.

Sans doute, dans l'hypothèse dont il s'agit, le preciput sera quelquefois un avantage réel, mais il en est de même de tous les préciputs; cependant le législateur n'en a fait qu'une convention entre associés par le motif que la possibilité de l'avantage ne suffit pas pour lui attribuer le caractère de libéralité; or, dans l'hypothèse où la femme en renonçant conserve le préciput, pas plus que dans tout autre, l'existence d'un avantage réel n'est certaine; il peut arriver, en effet, qu'une femme économe et laborieuse, ou qui a des revenus considérables, prévoyant que son mari pourra faire usage des biens communs, stipule que, même en cas de renonciation, elle aura un préciput; elle ne cherche point par là à acquérir la fortune de son conjoint, mais seulement à éviter de perdre entièrement le fruit de son travail ou de ses économies; il y a donc, dans ce cas, incertitude relativement à l'avantage, et dès lors, mêmes raisons de décider que

sont en même temps posés les véritables principes de l'ameublissement.

Par son contrat de mariage du 26 avril 1829, le sieur Charpentier déclara consentir l'ameublissement pur et simple d'un immeuble à lui appartenant et renoncer au bénéfice de l'article 1509, aux termes duquel il aurait le droit de reprendre l'objet ameubli en tenant comple de la valeur. Cette disposition ne fut soumise à aucune perception particulière; mais, par un autre article du contrat de mariage, la jouissance de cet immeuble fut attribuée au survivant. La régie vit dans cette clause la disposition au prolit d'un des époux d'un immeuble qui, d'après son système, devait cesser de faire partie de la communauté, aussitôt la dissolution, ce qui donnait en conséquence ouverture au droit fixe de 5 fr., comme donation éven tuelle.

Mais la cour de cassation a déclaré, par arrêt du 26 décembre 1851, que ce droit n'était pas dù : dispose

« Attendu que l'art. 1507, C. civ.,

(1) Add Voy. Suppl., nos 777, 778 (solution du 15 janvier 1840).

que l'effet de l'ameublissement déterminé est de rendre l'immeuble ou les immeubles qui en sont frappés, biens de la communauté, comme les meubles mêmes; que l'art. 1525 du même Code porte, que la stipulation par laquelle tout ou partie des biens de la communauté est attribué par le contrat de mariage à l'époux survivant, n'est pas réputée un avantage sujet aux règles relatives aux donations, soit quant à la forme, soit quant au fond, mais seulement une convention de mariage entre associés; et qu'il suit de la combinaison de ces articles, que la stipulation portée dans les art. 5 et 4 du contrat de mariage des époux Charpentier n'est pas passible du droit fixe de 3 fr. 50 c., établi par l'art. 45, no 4, de la loi du 28 avril 1816, sur les libéralités et donations faites par contrat de mariage entre époux. » (Contr., art. 2574.)

L'affaire fut renvoyée devant le tribunal de Soissons, qui jugea dans le même sens, et la régie acquiesca (1). (Contr., art. 2657.)

2909. Cependant elle a depuis contesté les principes que l'arrêt contient ;

Dans le contrat de mariage des époux Thièbe, portant ameublissement de biens immeubles appartenant au futur, il était dit qu'en cas de dissolution du mariage sans enfants, le survivant aurait toute la communauté, à la charge de payer toutes les dettes. Le sieur Thièbe décéda sans enfants; ses héritiers ne déclarè rent que les biens qu'il s'était réservés propres. La régie prétendit qu'ils auraient dù comprendre dans leur déclaration les biens ameublis. Cette prétention fut rejetée par un jugement du tribunal de Saint-Quentin, du 22 août 1832, en

çes termes :

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décès n'étant dù que sur l'actif dont le décès saisit les héritiers, et la cause d'ameublissement combinée avec la convention matrimoniale entre les époux Thièbe ayant privé les héritiers du sieur Thièbe de tout droit dans les immeubles par lui ameublis, c'est à tort que le receveur de l'enregistrement au bureau de Saint-Quentin a fait comprendre lesdits immeubles dans la déclaration de l'actif échu auxdits héritiers, et perçu le droit de mutation sur une somme de 77,860 fr., valeur desdits immeubles. »

L'administration a exécuté le jugement, mais la délibération qui l'ordonna (21 décembre 1822; Contr., art. 2613) se fonde, pour approuver ce jugement, sur ce que l'immeuble ayant été attribué à la femme par le contrat de mariage, et effectivement recueilli par elle, on avait à tort exigé des héritiers du mari le droit d'une mutation, qui ne s'était pas opérée à leur profit; mais que ce droit eùt été régulièrement réclamé de la femme, parce que l'art. 1523 ne permet aux époux de disposer à titre de convention entre associés que des bénéfices de la communauté, et non des biens ameublis qui ne peuvent être attribués à celui qui ne les apporte pas, sans qu'une mutation s'opère, et que par conséquent un droit proportionnel soit acquitté.

C'est, comme on le voit, la reproduction du système que la jurisprudence a rejeté; il est inutile d'insister davantage sur ce point (2).

2910. Il est fréquemment stipulé dans les contrats de mariage que l'un des époux aura la faculté de retenir soit la totalité de la communauté, soit telle portion désignée, soit un immeuble ameubli, à la charge de remettre aux héritiers de l'époux prédécédé la moitié de la valeur des objets retenus. Cette clause n'est qu'une convention entre associés, et ne constitue, lors de la réalisation, aucune mutation passible d'un droit particulier.

Considérant que l'effet de la clause d'ameublissement déterminé est de rendre biens de la communauté les immeubles qui, sans cette clause, en auraient été exclus, de sorte que, s'ils n'ont pas été aliénés durant le mariage, l'époux C'est ce que l'administration a reconnu à l'ocsurvivant et les héritiers du prédécédé se trou-casion d'une clause de même nature stipulée vent saisis respectivement de la propriété des- dans un acte de société. Il avait été convenu dits immeubles; que la faculté accordée par qu'à l'époque de sa dissolution l'un des associés l'art. 1509 à l'époux auteur de l'ameublissement aurait la faculté de retenir le fonds social en et à son héritier, de retenir l'héritage ameubli, payant une somme aux autres; ce qui eut licu. en le précomptant sur sa part, confirme, au lieu Une délibération du 16 juin 1826 (Contr., artide le détruire, le principe que cet héritage fait cle 1188), antérieure à une décision précédente partie de la masse à partager comme bien de du 19 octobre 1825, décida que le droit fixe communauté; Considérant qu'aux termes seul était exigible, et ajouta : d'une autre clause du contrat des sieur et dame Thiebe, la veuve Thièbe se trouve, à titre d'association conjugale, propriétaire de la totalité de la communauté mobilière et immobilière, de sorte que, dans l'espèce, les héritiers du sieur Thiebe n'ont été saisis par le décès de leur auteur d'aucune partie des immeubles ameublis; - Considérant que le droit de mutation par

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(1) Add. Voy. Supp., no 730 (Amiens, 24 août 1848); Journ. de l'Enreg., no 4699 (Mamers, 14 mai 1850).

« Il en est de cette décision comme de la clause d'un contrat de mariage par laquelle l'époux survivant a le droit de conserver la totalité des biens acquis pendant la communauté, à la charge de remettre aux héritiers de l'autre époux la moitié de la valeur de ces biens. Or, il a été reconnu, par décision des ministres de la justice et des finances des 17 et 24 août 1813,

(2) Add. Voy. Supp., no 779 (Rennes, 24 décembre 1844, 11 juin 1845).

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