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priété intellectuelle sous la rubrique de la propriété mobilière, et de trouver celle de la vente exposée, pour une moitié, à propos des modes d'acquisition de la propriété et, pour l'autre moitié, dans le livre des contrats. On a souvent reproché au code français de n'avoir vu, dans les successions légitimes et testamentaires, qu'un mode de transmission de la propriété et de n'en avoir pas fait l'objet d'un livre à part; nous aurions mauvaise grâce à reprocher au législateur new-yorkais de suivre cet exemple, mais il ne nous paraît pas que cet ordre soit le plus logique. Enfin, on a relégué dans le quatrième livre diverses matières relatives aux effets et à la résolution des contrats que, d'ordinaire, on traite dans la théorie même des obligations ou des contrats et qu'on serait porté à chercher ici dans le livre précédent.

Toutefois, nous nous hâtons de le dire, ces questions ayant une importance secondaire et en quelque sorte locale, il est tout naturel que les rédacteurs se soient conformés aux traditions et aux habitudes de leur pays plutôt que de se préoccuper d'un classement peut-être plus scientifique, mais qui aurait dérouté leurs concitoyens. La plupart des ouvrages classiques anglais groupent les matières comme nous les trouvons présentées dans le texte de M. Field. Si l'on entre dans le détail de chaque titre, on est frappé de son ordonnance méthodique, de la clarté et de la sobriété des divers articles. On reconnaît à chaque pas l'œuvre de jurisconsultes rompus à la pratique aussi bien qu'à la théorie et qui ont cherché à adapter aux besoins modernes de vénérables institutions, souvent un peu archaïques. Ils ont conservé du vieux droit tout ce qui était utile, respectable, entré dans les mœurs; ils ont supprimé tout ce qui n'aurait plus été qu'un vieil appareil rébarbatif et inapplicable. Pour peu qu'on ait étudié le droit anglais, on peut mesurer toute l'étendue et les difficultés de la tâche; on se prend d'admiration pour ceux qui l'ont vaillamment conduite à son terme, et l'on fait des vœux pour que ce premier et bel essai de codification sorte, enfin, de sa longue période de préparation pour entrer dans le domaine des lois positives. Nous terminerons, par ce vou, notre trop rapide esquisse.

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Le 11 février dernier est décédé à Gand, à l'âge de 76 ans, un des plus illustres juristes de notre époque, M. François Laurent.

Nous consacrerons prochainement à sa mémoire une notice étendue. Il nous suffira de rappeler aujourd'hui aux lecteurs de la Revue combien fut laborieuse et remplie l'existence de l'éminent écrivain.

Son œuvre est gigantesque. Historien, il a écrit les dix-huit volumes d'Études sur l'histoire de l'humanité; jurisconsulte, il a fait les trentetrois volumes de Principes de droit civil, les quatre volumes de Cours élémentaire de droit civil, l'Avant-projet de revision du code civil, les huit volumes de Droit civil international; polémiste ardent, il s'est jeté dans les luttes politiques de son pays, et laisse des écrits nombreux sur l'Église et l'État, sur les jésuites, sur les théories ultramontaines.

N.

Le plus grand des commentateurs français du code civil a suivi de près dans la tombe le grand commentateur belge.

M. Demolombe professait à Caen depuis 1827. Il avait été à cette date nommé suppléant, après un brillant concours d'agrégation; en 1831, à la suite d'un nouveau concours, il avait été nommé professeur. Toute sa carrière, exceptionnellement longue, singulièrement bien remplie, s'est écoulée à Caen, et ce fait est digne de remarque. En ce siècle où la province est volontiers désertée et où Paris attire d'une façon exclusive les hommes de talent, M. Demolombe a su résister à l'entraînement général; il refusa en 1864 un siège à la cour de cassation pour ne pas abandonner ses études, auxquelles le séjour d'une ville secondaire et tranquille était favorable. Tout en tenant le premier rang au barreau comme dans la faculté, M. Demolombe vivait à Caen d'une façon très simple et très indépendante. Il laisse, de ses travaux, un monument magnifique son cours de droit civil, commencé en 1845, inachevé, mais continué par M. Guillouard.

M. Demolombe, né à La Fère en 1804, est mort à Caen le 20 février 1887. A. R.

BIBLIOGRAPHIE.

RECUEILS ET REVUES.

1. Recueil manuel et pratique de traités et conventions, sur lesquels sont établis les relations et les rapports existant aujourd'hui entre les divers États souverains du globe, depuis l'année 1760 jusqu'à l'époque actuelle, par le baron CH. DE MARTENS et le baron FERD. DE CUSSY. Deuxième série, par F.-H. GEFFCKEN, ancien ministre résident et professeur de droit public. Tome second, 1870-1878. in-8°, 799 pages. Leipzig, Brockhaus, 1887.

La Revue a déjà annoncé cette nouvelle et très utile publication de notre collaborateur M. Geffcken, t. XVII, p. 305. Ce second volume, qui complète la série, s'ouvre par la convention consulaire hispano-allemande du 22 février 1870 et se termine par le traité de commerce austro-italien du 27 décembre 1878. Il contient plus de 150 pièces de tout genre, où sont parties la Confédération de l'Allemagne du Nord, l'Empire allemand, le Zollverein, divers États allemands, l'Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, la Grèce, l'Italie, le Luxembourg, le Montenegro, les Pays-Bas, le Portugal, la Roumanie, la Russie, la Serbie, la Suède et la Norvège, la Suisse, la Turquie, les États-Unis d'Amérique, la Confédération Argentine, le Brésil, Costa-Rica, Guatemala, Honduras, le Mexique, le Paraguay, le Pérou, Salvador, Venezuela, l'Annam, la Birmanie, la Chine, la Corée, le Japon, Mascate, la Perse, l'Égypte, Zanzibar, Funafuti, Hawaï, Jaluit, Makada, Mioko, Samoa, Tonga.

Je mentionne spécialement les conventions de commerce et de navigation de l'Allemagne avec Funafuti et Jaluit (1878), le traité d'amitié entre l'Allemagne et Tonga (1876); l'achat, par l'Allemagne, des ports de Makada et de Mioko (1878); le traité de commerce des États-Unis avec Samoa (1878), avec Hawaï (1875); les conventions de la Grande-Bretagne avec le sultan de Zanzibar et avec l'iman de Mascate (1873), pour la suppression de la traite des noirs.

Le Japon a conclu en 1871 un traité de paix et d'amitié avec la Chine et en 1876 avec la Corée; en 1878, un traité de commerce avec les États-Unis. La Perse a fait des traités d'amitié et de commerce, en 1873, avec l'Allemagne et avec la Suisse. Le Japon et la Perse sont entrés dans l'Union postale universelle, cette magnifique création de la période 1870-1878.

Si les traités de commerce, les traités d'extradition, les traités constatant la solidarité croissante des intérêts matériels (Union postale, télégraphique, monétaire, etc.), sont nombreux durant cette période, elle a vu se conclure aussi des traités politiques de la plus haute importance; il suffit de rappeler ceux qui ont donné naissance à la Confédération allemande (1870) et à l'Empire allemand (1871); le traité de Francfort (1871), le traité de Berlin (1878), les traités pour le maintien de l'indépendance et de la neutralité de la Belgique

(Prusse et Grande-Bretagne, 9 août 1870; France et Grande-Bretagne, 11 août 1870); le traité pour la revision des stipulations relatives à la mer Noire du 13 mars 1871; la convention anglo-turque du 4 juin 1878, etc.

Je tiens à répéter que M. Geffcken, en rendant facilement accessibles tant de documents précieux, a fait une œuvre très utile. On lui saurait sans doute gré s'il consentait à donner un troisième volume allant jusqu'à l'époque actuelle.

A. RIVIER.

2. Revue d'histoire diplomatique, publiée par les soins de la Société d'histoire diplomatique. Première année, n° 1, in-8°, 168 pages. Paris, Ernest Leroux, 1887.

Voici encore une revue nouvelle. Nous sommes d'autant plus heureux de la recommander à l'attention de nos lecteurs qu'elle est l'organe d'une société qui a droit à toutes nos sympathies.

La Société d'histoire diplomatique, fondée l'an dernier à Paris et que préside M. le duc de Broglie, réunit, comme le dit un manifeste récent, ceux qui écrivent l'histoire diplomatique passée et ceux qui préparent l'histoire diplomatique future: les érudits et les diplomates. Rien ne parut aux fondateurs devoir être plus fécond en heureux résultats que la réunion de ces deux éléments qui se connaissaient à peine et qui vont pouvoir se rendre réciproquement les services les plus signalés.

Au diplomate, l'explorateur d'archives fournira telle pièce, tel souvenir que, dans la sollicitude des préoccupations du présent, le premier n'aurait pas eu le temps de rechercher, et qui deviendra pourtant dans ses mains une arme précieuse.

A l'érudit, l'homme de la carrière donnera la clef de telle situation mal connue, dont il aura eu l'occasion de voir l'analogue dans un de ses postes. Ayant par expérience l'intelligence des choses diplomatiques, il pourra éclairer les recherches du collègue historien, les diriger du bon côté et en abréger les inévitables lenteurs.

En un mot, le diplomate guidera l'historien; l'historien instruira le diplomate; l'aspirant diplomate s'instruira, à l'une et l'autre école, des choses de sa future carrière; cet échange de services et de lumière sera le résultat et la récompense de la Société d'histoire diplomatique. »

La Revue d'histoire diplomatique se propose un double but: étudier au point de vue critique, dans leurs origines historiques, les questions internationales, et retracer les rapports, de quelque nature qu'ils soient, de la France avec les divers pays; publier ou signaler les pièces intéressantes recueillies chaque jour dans les dépôts d'archives. Elle se composera chaque année de quatre fascicules in-8°, d'environ 160 pages chacun.

Nous avons sous les yeux le premier fascicule. Il contient plusieurs articles instructifs et intéressants.

D'abord, communiqué par M. le duc de Broglie, un document curieux dû à la plume de Voltaire. Le grand écrivain se croyait qualifié pour la diplomatie. Le marquis d'Argenson lui confia la rédaction d'un mémoire destiné à être répandu en Allemagne, et c'est ce mémoire que M. le duc de

Broglie a exhumé, avec les critiques qu'en a faites un diplomate expérimenté, qui le traite de vraie capucinade politique.

Viennent ensuite des études de M. le baron d'Avril, ministre plénipotentiaire, sur l'Autriche et la Confédération germanique (1850-1851); de M. Rothan, ministre plénipotentiaire, sur l'alliance de l'Allemagne et de l'Autriche en 1879; de M. le comte Édouard de Barthélemy sur Struensée (d'après les dépêches de M. de Blosset, ministre de France à Copenhague, 1769-1772); de M. Bikélas, sur la formation de l'État grec depuis le congrès de Laybach; de MM. Manno, Ferrero et Vayra sur les relations diplomatiques de la maison de Savoie. M. de Maulde, directeur de la revue et secrétaire général de la Société d'histoire diplomatique, communique, comme résultat de recherches sur l'extradition au XIVe siècle, dans le comté de Génevois, deux conventions d'extradition, l'une entre le comte de Savoie et l'évêque de Genève, l'autre entre deux seigneurs haut justiciers moins considérables. M. Franz Funck-Brentano met en lumière le caractère religieux de la diplomatie du moyen âge.

Des comptes rendus d'ouvrages, une chronique de M. de Maulde, et une bibliographie ou liste de publications faites récemment en France, en Allemagne, en Angleterre, en Autriche, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas et en Roumanie, complètent utilement ce premier fascicule.

A. RIVIER.

DROIT INTERNATIONAL.

3. Traité de droit international public européen et américain, suivant les progrès de la science et de la pratique contemporaines, par P. PRADIERFODÉRÉ. T. II et III, in-8°, 973 et 1,267 p. Paris, Durand et Pedone

Lauriel, 1885-1886.

J'ai dit au t. XVII de la Revue, p. 305-309, le bien que je pensais du premier volume de cette œuvre considérable. Je pourrais, à propos des deux volumes suivants, répéter les mêmes éloges. M. Pradier-Fodéré élève au droit international un monument qui durera et qui fait grand honneur à la science française et à l'éminent conseiller à la cour d'appel de Lyon, fondateur et doyen de la faculté des sciences politiques et administratives de l'université de Lima. Il suffira, dans ce nouvel article bibliographique qui n'est pas le dernier que la Revue doive consacrer au Traité de droit international public européen et américain, d'indiquer les principales matières contenues aux tomes II et III.

Continuant à étudier les droits absolus des États, l'auteur expose, au tome II, ce qui concerne le droit d'égalité et le droit de propriété. Pour lui, l'égalité est un droit des États, comme elle est un droit de l'homme; il la base sur la nature même de l'homme, ce qui ne l'empêche point de reconnaître que les inégalités de fait sont rationnelles et juridiques. Au reste, il traite sous la rubrique du droit d'égalité diverses questions qui trouveraient peut-être plus naturellement place ailleurs, ainsi celles de l'usurpation de droits souverains d'un État, de titres, dignités, emblèmes, pavillon, armoiries, contrefaçon de monnaies, contrebande et en général ce que l'on désigne

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