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missions de l'Institut. L'Annuaire de l'Institut publiera la composition de ces commissions, qui doivent être formées en vertu d'un nouveau règlement d'ordre intérieur arrêté à Heidelberg. Nous nous bornons ci-dessous à indiquer leur objet et les noms des rapporteurs :

1. Droit de famille et de mariage. - Conflits des lois. - Des lois qui régissent les effets du mariage ou des contrats matrimoniaux, quant à la personne et aux biens des époux (complément des résolutions votées à Heidelberg).

Rapporteurs MM. de Bar, BRUSA et KOENIG.

2. Principes communs au droit civil et au droit commercial. Rapporteur M. de Bar.

3. Conflits des lois et unification de la législation en matière d'abordage maritime (question nouvelle).

Rapporteurs: MM. LYON-CAEN et SACERDOTI.

4. Conflits des lois relatives aux sociétés par actions (question nouvelle).

Rapporteur M. LYON-CAEN.

5. Conflits des lois en matière d'extradition (revision du projet voté à Oxford).

Rapporteur M. ALBÉRIC ROLIN.

6. Occupation des territoires (examen de la théorie de la conférence. de Berlin).

Rapporteur M. de Martitz.

7. Droit international des chemins de fer, des télégraphes et des tėlėphones en temps de guerre.

La question est nouvelle en ce qui concerne les télégraphes et les téléphones.

Rapporteurs: MM. DE STEIN et MOYNIER.

8. Expulsion des étrangers.

Rapporteur: M. DE MARTITZ.

9. Histoire du droit international. — Publication des traitės.

Rapporteur M. de Martitz.

10. Preuve des lois étrangères devant les tribunaux.

Rapporteur M. PIERANTONI.

11. Police sanitaire internationale.

Rapporteur M. DE LANDA.

12. Recherche des réformes désirables dans les institutions judiciaires actuellement en vigueur dans les pays d'Orient, par rapport aux procès dans lesquels est engagée une personne ressortissant à une puissance chrétienne, d'Europe ou d'Amérique (question nouvelle).

Rapporteur à désigner ultérieurement

ÉDOUARD ROLin,

secrétaire adjoint de l'Institut de droit international.

CONFLITS DE LOIS EN MATIÈRE D'ABORDAGE

MARITIME.

RAPPORT PRÉSENTÉ (1) A L'INSTITUT DE DROIT INTERNATIONAL

PAR

M. LYON-CAEN,

professeur à la faculté de droit et à l'école des sciences politiques de Paris.

Dans sa session tenue à Bruxelles en 1885, l'Institut de droit international a adopté plusieurs solutions importantes relatives aux conflits de lois en matière maritime. Sans vouloir admettre qu'un principe unique doive servir à résoudre tous ces conflits, l'Institut a reconnu que, dans l'intérêt des relations maritimes et du crédit, un très grand nombre d'entre eux doivent être résolus par la loi du pavillon, c'est-à-dire par la loi du navire dont il s'agit, en quelque pays qu'il se trouve et quel que soit le tribunal saisi de la contestation. Mais il s'en faut que l'Institut de droit international se soit prononcé sur toutes les questions importantes. La commission de droit maritime n'a pas terminé son œuvre. Il est de son devoir d'attirer l'attention de l'Institut sur les difficultés dont elle désire que l'étude lui soit spécialement renvoyée. Il n'en est pas certainement qui aient actuellement plus d'importance pratique et qui soient plus délicates que celles qui naissent des conflits de lois en matière d'abordage maritime.

Les abordages étaient autrefois assez peu fréquents, ils ne se produisaient guère que dans les ports et ne causaient le plus souvent aux navires que de simples avaries sans gravité. Aujourd'hui, il n'en est plus de même. Les abordages sont nombreux, ils se produisent souvent

(1) En séance du 9 septembre 1887, à Heidelberg, M. Lyon-Caen, rapporteur de la sous-commission du droit maritime, a donné lecture de ce rapport à l'Institut, qui en a adopté les conclusions. En conséquence, la question des conflits de lois en matière d'abordage maritime figure à l'ordre du jour de la session de 1888. (Voir ci-dessus, p. 355.) Sur la proposition de M. Sacerdoti, l'Institut y a ajouté la question de l'unification de la législation en matière d'abordage.

même en pleine mer, ils occasionnent fréquemment la perte totale des navires et des cargaisons et la mort de passagers ou de gens de mer. L'augmentation considérable du nombre des abordages et l'accroissement de leur gravité sont dus à la fois au développement de la marine marchande et à celui de la navigation à vapeur. Un grand nombre de navires suivent les mêmes routes sur mer, et leur force d'impulsion est parfois telle qu'ils ne peuvent guère être arrêtés brusquement, et qu'ils sont projetés les uns sur les autres avec une violence extraordinaire.

Les abordages ont souvent lieu entre navires appartenant à des nationalités différentes; tous les pavillons se heurtent sur toutes les mers. Comme les lois sur les abordages ne sont pas identiques dans tous les pays, des conflits de lois s'élèvent. Ces conflits ont plusieurs objets; car les questions soulevées par un abordage sont multiples.

Quand un abordage survient, il y a lieu de déterminer : 1° qui supporte le dommage causé; 2° quel est le tribunal compétent pour connaître des actions en indemnité; 3° quelles sont les formalités à remplir pour la conservation des droits des intéressés et dans quels délais ces formalités doivent être remplies. Sur chacun de ces trois points, on rencontre dans les diverses législations ou jurisprudences des différences notables.

Ainsi, dans tous les pays sans doute, en cas d'abordage causé par la faute d'un capitaine, celui-ci supporte le dommage; en cas d'abordage fortuit, chacun supporte le dommage souffert par son navire ou par ses marchandises. Mais les solutions admises diffèrent notablement pour les abordages douteux, c'est-à-dire dont on ne peut préciser la cause réelle (faute ou cas fortuit) et pour les abordages causés par une faute commune de deux ou de plusieurs capitaines. La majorité des législations admet, conformément aux principes du droit commun, qu'en cas d'abordage douteux, par cela même qu'aucune faute n'est prouvée, l'abordage doit être traité comme provenant d'un cas fortuit, c'est-à-dire que chacun supporte le dommage qui lui a été causé sans autre recours que celui qui peut dériver d'assurances maritimes. Mais quelques codes, spécialement le code français de 1807, admettent qu'en cas d'abordage douteux, le dommage causé aux navires est réparti par moitié entre le navire abordeur et le navire abordé. De même, quand il s'agit d'un abordage provenant de la faute des deux capitaines, on reconnaît dans quelques pays, spécialement en Angleterre, que le dommage est réparti par moitié; dans d'autres, notamment en France, la répartition du

dommage se fait en proportion de la gravité de la faute de chaque capitaine; enfin en Allemagne, dès qu'il y a faute commune, chacun supporte le dommage qu'il a souffert. Par suite, on est fort embarrassé pour déterminer qui supporte le dommage lorsque les deux navires sont régis par des lois divergentes. Faut-il avec la pratique anglaise admettre l'application de la loi du tribunal saisi? Ne doit-on pas, au contraire, faire abstraction de la lex fori pour se référer à la loi soit du navire abordeur, soit du navire abordé? Le lieu dans lequel l'abordage s'est produit (eaux intérieures, mer territoriale, pleine mer) ne doit-il pas exercer sur la solution à donner quelque influence?

Les questions de compétence auxquelles donnent naissance les abordages maritimes ne sont pas moins graves. Il importe aux intéressés de savoir devant quel tribunal ils peuvent porter leurs réclamations. L'importance de la question de compétence se trouve augmentée si l'on admet que la loi du tribunal compétent sert à résoudre la question de responsabilité. Doit-on reconnaître compétence exclusive au tribunal du domicile du capitaine ou de l'armateur actionné, au tribunal le plus voisin du lieu de l'abordage? Ne faut-il pas avec la jurisprudence anglaise admettre la compétence du tribunal du port quelconque dans lequel le navire abordeur peut être saisi?

Les législations different beaucoup quant aux formalités et délais à observer par les personnes lésées. La loi anglaise n'impose aucune formalité spéciale et ne fixe non plus aucun délai particulier. Le code de commerce allemand accorde un délai de deux ans à partir de l'abordage. Le code de commerce français (art. 435 et 436) est d'une grande rigueur; il déclare tous les intéressés déchus de leurs droits par cela seul que le capitaine n'a pas signifié une protestation dans les 24 heures, à partir du moment où il a pu agir, ou n'a pas formé dans le mois une demande en justice. Quand un abordage a lieu, par exemple, entre un navire français et un navire anglais ou allemand, quelle loi le capitaine doit-il observer pour la conservation des droits des intéressés? La lex fori doit-elle être appliquée? Faut-il de préférence appliquer la loi du navire abordeur ou du navire abordé? Faut-il tenir compte du lieu dans lequel s'est produit l'abordage?

La sous-commission de droit maritime demande que l'Institut veuille bien la charger spécialement d'examiner les conflits de lois en matière d'abordage maritime et de présenter un projet de résolutions pour la prochaine session.

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