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rédigé en loi le 26 octobre par le ministre de sa maison, M. de Blacas; et le 28, à la majorité de cent quatre-vingt-cinq voix contre quatre, la Chambre sanctionna son propre you. La loi donnait annuellement au roi 25,000,000, et 8,000,000 aux membres de sa famille; elle désignait en outre les nombreux domaines composant la dotation de la couronne, conformément à loi du 1er juin 1791, et aux sénatus-consultes qui réglaient la dotation de la couronne impériale.

4o Loi qui prescrit l'observation extérieure des jours de repos et des fêtes reconnues par le gouvernement. — C'est encore sur la proposition d'un de ses membres, M. Bouvier, que la Chambre supplia le roi de présenter cet acte. La proposition est du 30 juin; la résolution de la Chambre du 27 juillet; la présentation du projet dans les formes dites constitutionnelles, faite par M. de Montesquiou, du 8 octobre; l'adoption définitive par la Chambre, du 14 du même mois, à la majorité de cent trente-neuf voix contre cinq. Dès le 7 juin une ordonnance du directeur de police Beugnot, motivée sur des règlemens de l'ancien régime, avait exigé la fermeture des boutiques et la suppression de tout étalage public les jours de dimanche et de fête. Cette mesure avait provoqué des plaintes; la réformation en était sollicitée par des pétitions à la Chambre, lorsque les députés confirmèrent par une loi l'ordonnance de police.

5° La loi sur la liberté et la police de la presse. - Cette question est celle que la Chambre de 1814 a traitée avec le plus de franchise et de développement. Le 30 juin, M. Durbach, frappé des actes arbitraires que se permettaient les ministres, avait développé une proposition tendant « à supplier le roi de vouloir bien faire présenter une loi qui concilie les droits garantis par la Charte aux citoyens avec la répression des délits que la presse peut servir à commettre. Cette proposition fut ajournée par la Chambre. Le 5 juillet M. de Montesquiou, ministre de l'intérieur, présenta un projet au nom du roi. Ce projet avait été, dit-on, rédigé par MM. Guizot et Royer-Collard, amis et conseiller du ministre. Le 1er août, M. Raynouard, organe de la commission

centrale, fit un rapport sur ce travail ministériel, dont il demanda le rejet. La discussion s'ouvrit le 6, et se continua jusqu'au 10 inclusivement, La Chambre intendit vingt-deux orateurs, moitié pour, moitié contre. Le 11, M. de Montesquiou défendit son ouvrage, et admit quelques modifications; M. Raynouard réfuta le ministre, en persistant dans les conclusions de son rapport; néanmoins, dans la même séance, la Chambre adopta le projet du gouvernement à la majorité de cent trentesept voix contre quatre-vingts. La Chambre des Pairs fit encore quelques amendemens; le roi les consentit, et ils furent adoptés le 8 octobre par les députés. La discussion avait été vive et prolongée. Selon l'article 8 de la Charte, la loi devait réprimer les abus de la presse. Le ministre et les ministériels s'efforcèrent de prouver que réprimer était synonyme de prévenir, et, en conséquence, ils soutenaient la censure préalable. Cette dispute de grammaire, où la mauvaise foi était évidente de la part du gouvernement, amusa beaucoup le public, et le mécontenta. La loi néanmoins fut votée, comme si en effet prévenir et réprimer eussent été synonymes. Tous les écrits au-dessous de vingt feuilles d'impression, c'est-à-dire trois cent vingt pages in-8°, étaient soumis à la censure, et par conséquent tous les journaux. On plaçait dans la catégorie des écrits au-dessus de vingt feuilles ceux rédigés en langues mortes ou étrangères, les mandemens des évêques, les catéchismes, les mémoires sur procès, les mémoires des sociétés savantes et les opinions des deux chambres. Le ministre avait proposé trente feuilles ; on les réduisit à vingt. Voilà tout ce qu'obtint légalement l'opposition. La plupart de ces exceptions furent vivement disputées. Mais cette discussion eut un résultat très-utile: ce fut de rappeler l'attention publique sur l'importance des questions constitutionnelles, et en particulier sur celle de la liberté de la presse. Enfin, malgré les difficultés imposées par la loi, la liberté trouva le moyen de se faire jour. MM. Comte et Dunoyer publièrent un écrit périodique, le Censeur européen, qu'ils purent soustraire à la censure en composant chaque numéro de plus de vingt feuilles.

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La Chambre, qui présentait une majorité imposante en faveur du ministère, était sans force pour soutenir des vues d'intérêt public. M. Riboud proposa d'accorder des indemnités aux dépar temens qui avaient été le théâtre de la guerre : la Chambre ajourna. M. Hébert demanda que l'armée française ne fût plus composée que de nationaux : la Chambre déclara qu'il n'y avait pas lieu à délibérer.

La session de 1814 fut prorogée le 30 décembre, et ajournée au 1er mai 1815. Mais une circonstance imprévue, le retour de Napoléon, ne permit pas d'attendre cette époque.

Les Bourbons et leurs amis était loin de s'attendre à un pareil événement, qu'ils travaillaient, sans s'en douter, à préparer en aigrissant l'opinion publique par une série d'actes sans portée et sans but gouvernemental. Nous allons énumérer la succession des actes officiels qui rendirent possible l'événement dont il s'agit. Nous citerons d'abord l'ordonnance sur les jours fériés, que les chambres convertirent en loi. En cette circonstance, ce fut moins le fait qui blessa le public que le rappel aux réglemens de l'ancien régime. On se demandait s'il ne pourrait pas arriver un jour où l'on en appellerait ainsi sur toutes choses au passé que la révolution avait détruit.

Du 7 juin. Ordonnance du directeur général de la police, M. Beugnot. « Considérant que l'observation des jours consacrés aux solennités religieuses est une loi commune à tous les peuples policés, qui remonte au berceau du monde, et qui intéresse au mème degré la religion et la politique; que l'obervation du dimanche s'est maintenue avec une pieuse sévérité dans toute la chrétienté, et qu'il y a été pourvu pour la France en particulier par différentes ordonnances de nos rois, des arrêts des cours souveraines, et en dernier lieu par le réglement du 8 novembre 1782, etc.; ordonnons ce qui suit : Les travaux seront interrompus les dimanches et les jours de fête. Tous les ateliers seront fermés. Il est défendu à tout marchand d'ouvrir sa boutique ; à tout ouvrier, portefaix, voiturier, etc., de travailler de leur état lesdits jours, et à tout étalagiste de rien exposer en vente. Il est expressément ordonné aux marchands de vin, maîtres de café, de billard, etc., de tenir leurs établissemens fermés les dimanches et jours de fête pendant l'office divin, depuis huit heures du matin jusqu'à midi. Des amendes de 100, 200 et 500 francs seront prononcées contre les contrevenans, sans préjudice des poursuites judiciaires, etc. »

Le 15 août, procession pour le vœu de Louis XIII, qui eut lieu à Notre-Dame, « Les vêpres dites, la procession est sortie de l'église. Madame et les princes suivaient à pied.

Du 19 juillet. Ordonnance qui reconstitue la Légion d'Honneur sous la protection du nom de Henri IV.

« L'établissement de la maison d'éducation d'Écouen, pour les filles des membres de la Légion-d'Honneur, est réuni à la maison de Saint-Denis. A l'avenir, le nombre des élèves ne pourra excéder celui de quatre cents. Les élèves ne pourront être reçues avant l'âge de huit ans révolus, ni rester après celui de dixhuit ans accomplis. Les établissemens formés à Paris, aux Barbeaux et aux Loges, pour l'éducation des orphelines de la Légion-d'Honneur sont supprimés. »

Du 30 juillet. — « Louis, etc. Ayant reconnu qu'une seule école militaire pourrait suffire aux besoins du service; désirant en outre récompenser les services des officiers-généraux et supérieurs de nos armées, et faire jouir la noblesse de notre royaume des avantages qui lui ont été accordés par l'édit de notre aïeul du mois de janvier 1751, relatif à la fondation de l'École royale militaire; or→ donnons, etc. Les trois écoles militaires actuellement existantes sous la dénomination d'École militaire de Saint-Cyr, d'École militaire de Saint-Germain et de Prytanée militaire de La Flèche, sont supprimées. L'École royale militaire, créée par édit du mois de janvier 1751, sera rétablie, etc., etc. »

Du 5 octobre. « Lours, etc. Ayant égard à la nécessité où sont les archevêques et évêques de notre royaume, dans les circonstances difficiles où se trouve l'Église de France, de faire instruire, dès l'enfance, des jeunes gens qui puissent ensuite entrer avec fruit dans les grands séminaires, et désirant de leur procu rer les moyens de remplir avec facilité cette pieuse intention, etc.; avons ordonné, etc. Les archevêques et évêques de notre royaume pourront avoir, dans chaque département, une école ecclésiastique, dont ils nommeront les chefs et les instituteurs, etc. »

Paris, 25 juin 1814. « Le service annoncé pour les généraux Pichegru, Georges, Moreau, et les onze personnes qui ont péri avec le général Georges, a eu lieu aujourd'hui dans l'église Saint-Paul. L'assemblée était nombreuse; elle a assisté à la cérémonie avec un pieux recueillement. Il n'y a pas eu de prédicateur. Une quête a été faite par madame de Polignac, accompagnée par M. le marquis de Rivière, que l'on sait avoir échappé au sort des autres victimes.

» Le service devait être célébré aux frais des parens du général Georges; S. M., l'ayant appris, a désiré témoigner l'intérêt que lui inspirait l'objet de la cérémonie, et elle a fait connaître qu'elle entendait se charger de ces frais. » (Extrait du Moniteur.)

Ordonnance du roi. · - » Louis, etc. Sur le compte qui nous a été rendu par notre amé et féal chevalier, chancelier de France, le sieur Dambray. - Voulant récompenser la fidélité et le dévouement à notre personne de feu Georges Cadoudal, et donner à sa famille un témoignage durable de nos sentimens ; Nous avons anobli et anoblissons, décoré et décorons le sieur Joseph Cadoudal, son père, du titre et qualité de noble, pour jouir à perpétuité, par lui et ses descendans en ligne directe, des droits, honneurs et prérogatives attachés à ce titre. - Il se retirera par devant notre chancelier pour qu'il lui soit délivré des lettres patentes sur ce nécessaires. - Donné au château des Tuileries, le 12 oc¬ tobre de l'an de grâce 1814, et de notre règne le vingt-cinquième. »

Monument de Quiberon.

La commission du monument de Quiberon, réunie le 30 novembre 1814, sous la présidence de M. le maréchal duc de Dalmatie (Soult), gouverneur de la 3

T. XL.

treizième division militaire (Rennes), a arrêté que le nombre de ses membres serait porté jusqu'à treize, et s'est définitivement constituée.

Membres de la commission. M. le maréchal duc de Dalmatie, président; MM. le duc de Rohan, le duc de Levis, le comte de Damas, le baron de Damas, le vicomte de Sesmaisons, le comte de Botderu, le comte de Floirac, le baron de Suzannet, le vicomte Dubouchage, le marquis de la Rochejaquelin, le comte Charles d'Autichamp, le baron de Beausset, le chevalier Henri de Viella.

La commission, atosi constituée et réunie, ayant entendu la lecture du programme ci-après, l'a approuvé, et a ordonné qu'il serait publié.

Programme. Les peuples civilisés regardèrent toujours comme un devoir sacré les honneurs rendus à la mémoire des guerriers objets de leurs regrets. Chez les anciens quelques cérémonies vaines suffisaient pour consoler des mânes affligés ; mais la religion chrétienne, toute divine, suit ses enfans bien audelà du tombeau.

Elle met au premier rang de ses affections les victimes qu'une mort, glorieuse lui enlève dans les combats livrés pour la défense de l'autel et du trône; aux éloges de la patrie, aux larmes des proches et des amis, elle unit des supplications, et ne cesse de demander une récompense éternelle pour prix d'un sacrifice passager.

Les champs de Carnac, les plages de Quiberon virent tomber des légions entières de ces guerriers chrétiens; en expirant, leurs dernières paroles furent des paroles d'amour pour leur roi et des vœux pour la patrie.

Aujourd'hui le roi après un long exit, la patrie après un long silence, répondent à ces touchans adieux.

La mémoire de ces preux chevaliers retrouve enfin ses honneurs!.....

....... Pénétrée de ces motifs et de ceux énoncés dans l'arrêté du 17 novembre dernier, de M. le maréchal duc de Dalmatie, la commission a pris les résolutions suivantes :

Il sera élevé un monument pyramidal sur le lieu même où les victimes de Quiberon ont été immolées.

Ce monument doit imposer par un caractère simple et noble. La matière même du pays, le granit, semble par sa dureté exclure toute espèce d'ornemens; des inscriptions doivent seules fixer l'attention.....

..... Un autre monument sera érigé dans la Chartreuse, près d'Auray, où les cendres de ces guerriers ont été transportées.

Cet édifice funéraire sera orné de deux bas-reliefs: l'un représentera la restauration de la monarchie et le rétablissement de S. M. Louis le Désiré sur le trône de nos anciens rois; l'autre représentera S. A. R. M, le duc d'Angoulême faisant rendre les honneurs de la sépulture et les premiers devoirs religieux aux précieux restes de ces guerriers.

Ce mausolée doit également porter un caractère simple...........

L'institution d'utilité publique indiquée par l'article 3 de l'arrêté précité sera un collége militaire.

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Le mode d'enseignement, le nombre des élèves et le régime intérieur seront fixés par la commission.....

.....

La commission, voulant associer tous les Français à l'exécution d'un aussi noble et utile projet, et leur présenter tous les moyens d'y concourir à raison de leurs facultés, recevra tous les dons qui lui seront offerts; la somme la plus modique sera acceptée. » (Extrait du Moniteur du 1er janvier 1815,)

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