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310. Les thermomètres à gaz présentent sur le thermomètre à mercure, et en genéral sur les thermomètres formés avec des substances solides et liquides, un avantage qui tient à la grandeur de la dilatation de la substance thermométrique. Dans un thermomètre quelconque formé par une substance liquide ou gazeuse, les indications de l'instrument dépendent de la dilatation de cette substance et de celle de l'enveloppe. Or la dilatation du mercure n'est guère que sept fois celle du verre qui le renferme; les variations que l'on remarque dans la loi de dilatation des différentes espèces de verre forment donc des fractions très-sensibles des dilatations apparentes du mercure, et influent par suite d'une manière notable sur les indications de l'instrument. Dans le thermomètre à gaz, au contraire, la dilatation du gaz étant 160 fois celle du verre, les variations dans la loi de dilatation des diverses espèces de verre n'influent plus sensiblement sur les indications de l'appareil, et n'empêchent pas les instruments d'être comparables.

Le gaz d'un thermomètre peut se trouver dans des conditions telles, que la pression soit constante et que son volume varie, ou que son volume soit constant et que sa pression varie.

Fig. 101.

A

Dans le premier cas, fig. 101:

Le thermomètre à gaz est composé d'un réservoir A, qu'on place dans l'enceinte dont on veut connaître la température; d'un tube calibré df, réuni au réservoir A par un tube capillaire ab qui l'éloigne de l'enceinte; d'un tube cd, ouvert à sa partie supérieure, et par lequel on introduit du mercure dans l'appareil; enfin d'un robinet r, établissant à volonté la communication : 1° entre le tube df et l'atmosphère; 2° entre le bas du tube cd et l'atmosphère; 3o entre les deux tubes df, cd; 4° simultanément entre les tubes df, cd et l'atmosphère. La plaque de fonte i, qui relie les tubes et le robinet, porte deux pattes qui servent à fixer l'appareil contre une cloison pendant l'expérience.

Le tube calibré df remplit les fonctions de la tige divisée du thermomètre à mercure, et sert à recueillir le gaz que

l'élévation de la température chasse du réservoir A; ce tube est d'ailleurs maintenu à une température constante peu différente de celle de l'air ambiant. A un moment quelconque de l'expérience, le gaz renfermé dans l'appareil se compose de deux parties: la première, qui occupe le réservoir A, se trouve à la température x; la seconde, recueillie dans le tube df, se trouve à la température ambiante t. Ces deux portions de gaz supportent la même pression, que l'on peut d'ailleurs rendre aussi rapprochée qu'on veut de la pression atmosphérique à l'aide du robinet r; on établit la communication simultanée entre les deux tubes df, cd, et avec l'atmosphère, de manière à faire écouler le mercure jusqu'à ce qu'il ait pris le même niveau dans les deux tubes. Appelons:

V le volume du réservoir A à la température 0°;

kle coefficient de dilatation cubique moyen du réservoir A depuis 0° jusqu'à la température évaluer x;

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α

le coefficient de dilatation du gaz, que l'on suppose constant;

vle volume que l'air occupe dans le tube gradué df à la température t, quand le réservoir A est placé dans la glace fondante;

'le volume que l'air occupe dans df à la même température t quand le réservoir A est à la température x;

H la force élastique du gaz en millimètres; H sera égale à la pression atmosphérique si le mercure a le même niveau dans les deux tubes df, cd;

H' la force élastique du gaz quand le réservoir A est à la température x; à l'aide du robinet r, on pourra faire en sorte que H' diffère le moins possible de H;

la densité du gaz à 0° et sous la pression de 760 millimètres.

Suivant que le réservoir A est à la température 0° ou à la température x, le poids du gaz contenu dans l'appareil est exprimé par

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Ces deux poids étant nécessairement égaux, on a donc

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1+ kx
=V
1+ at H' 1 + αx

Équation qui permet de calculer x.

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C'est cette disposition que Pouillet a employée comme pyromètre à air (311); mais M. Regnault a cru devoir la rejeter pour thermomètre à air. Elle présente un inconvénient très-grave quand l'appareil est destiné à mesurer des températures élevées; dans ce cas, la plus grande partie de l'air vient dans le tube calibré df, et il n'en reste plus qu'une portion très-petite dans le réservoir A; de sorte que la partie qui sort encore pour une nouvelle élévation de température est très-petite, et se mesure difficilement dans le tube calibré avec une précision suffisante. Si la température x s'élève de dx, le volume v' devient v' + dv' et l'on déduit de l'équation précédente

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Ainsi do', qui représente la sensibilité de l'appareil, varie à peu près en raison inverse du carré de 1+ ax.

M. Regnault, dans ses recherches, a fait usage du thermomètre à air, dans lequel le volume du gaz est maintenu constant. La température est évaluée à l'aide de l'augmentation de force élastique du gaz, due à la dilatation qu'il aurait subie par suite de son accroissement de température, et cela en admettant la loi de Mariotte sur la compression des gaz (319). Ce thermomètre est plus commode que celui à pression constante, et il donne plus de précision; de plus, il a l'avantage de présenter autant de sensibilité dans les hautes températures que dans les basses. Si l'on veut mesurer des températures très-élevées, par exemple si l'appareil doit servir comme pyromètre à air (311), la force élastique du gaz intérieur devenant très-considérable, il est à craindre que l'enveloppe ne subisse une déformation permanente sous l'influence de cette grande pression intérieure. On remédie à cet inconvénient en introduisant dans l'appareil de l'air sous une pression initiale plus faible que

celle de l'atmosphère, lorsque le réservoir est à 0°. On peut, de cette manière, maintenir les forces élastiques entre les limites aussi resserrées qu'on le veut. Il est clair, d'ailleurs, que l'appareil devient d'autant moins sensible que la force élastique du gaz à 0° est plus faible; mais comme la mesure des forces élastiques se fait avec un précision extrême, les indications de l'appareil présentent encore une exactitude suffisante dans le plus grand nombre de cas, lors même que la pression initiale du gaz à 0° n'est que de 1/4 d'atmosphère.

Quoique la valeur absolue du coefficient de dilatation d'un gaz change très-notablement avec sa densité, il résulte des expériences faites par M. Regnault, que des thermomètres à gaz chargés avec des gaz de nature différente marchent d'accord entre eux lorsqu'ils ont été réglés pour des points fixes de 0° et de 100°.

Fig. 102.

C

La fig. 102 représente la disposition employée par M. Regnault pour son thermomètre à gaz.

L'appareil se compose de deux tubes en verre df, cd, de 12 à 14 millimètres de diamètre intérieur, mastiqués dans une pièce de fonte i à robinet r, comme pour le thermomètre fig. 101. Le tube cd est ouvert à sa partie supérieure, et celui df communique avec le ballon A par un tube capillaire ab. B représente le couvercle de la chaudière dont on veut éva luer la température. CD cloison en bois à laquelle est fixé le manomètre-thermomètre, et qui le sépare de la chaudière.

B

α

La réunion des deux parties du tube capillaire ab se fait en amenant les bouts en contact, et en mastiquant par-dessus les deux bouts, qui ont le même diamètre, une petite tubulure g en laiton qui passe exactement à frottement. Cette tubulure reçoit un troisième tube capillaire h qui sert à mettre l'appareil en communication avec une pompe pneumatique, au moyen de laquelle on peut dessé cher l'appareil et y introduire le gaz.

On commence par dessécher complétement l'appareil. A cet effet, on fait passer un peu de mercure dans le tube bd, et l'on tourne le robinet r de manière qu'il n'y ait communica tion du tube bd, ni avec le tube cd, ni avec l'ouverture libre D du robinet; puis on met le tube h en communication avec

la

une pompe aspirante munie de plusieurs tubes remplis de pierre ponce imbibée d'acide sulfurique concentré, qui sont destinés à absorber l'humidité. On fait le vide un grand nombre de fois, et on laisse rentrer chaque fois l'air très-lentement. Pour être sûr que dessiccation est complète, on maintient le ballon chauffé à 50 ou 60 degrés. On sépare alors la pompe, mais en laissant le tube h en communication avec un tube desséchant.

Cela fait, on enveloppe le ballon A de glace fondante, on établit la communication entre les tubes bd, cd; on verse du mercure dans le manomètre, de façon à affleurer le sommet de la colonne à un trait de repère ƒ tracé sur le tube bd, très-près de son extrémité supérieure. Les deux colonnes de mercure se mettent de niveau, puisque l'appareil

communiqué avec l'atmosphère par le tube h. On ferme alors le tube h à la lampe.

Si l'on voulait que la pression dans l'appareil fût inférieure à l'atmosphère, on pomperait par le tube h, et d'après la différence de niveau dans les deux colonnes du manomètre on jugerait quand la raréfaction serait convenable; on fermerait alors l'appareil en fondant à la lampe le tube h, puis on verserait du mercure dans le manomètre de manière à affleurer le ménisque au repère ƒ.

Soient:

H la pression atmosphérique;

h

la différence de niveau du mercure dans les deux branches du manomètre quand le ballon A est dans la glace fondante;

H-h la force élastique du gaz dans l'appareil;

V la capacité à 0o du ballon A et de la portion de tube capillaire qui sera dans la chaudière;

v

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le petit volume d'air contenu dans la portion bf du tube;

id.

id.

dans le tube ab et l'appendice gh;

la température indiquée par un thermomètre placé près de bf;

id.

près de ab;

tet t' doivent être les températures moyennes de l'air dans ces tubes, et dans la formule suivante on les suppose les mêmes avant et après l'expérience;

ત્ર

la densité de l'air à 0° et sous la pression de 760 millimètres;

le coefficient de dilatation de l'air pour une force élastique initiale H-h.

Le poids de l'air contenu dans le thermomètre a pour expression

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Le ballon A étant placé dans la chaudière ou dans tout autre milieu dont on veut évaluer la température, appelant :

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H' la pression barométrique au moment où se termine l'expérience, H' ne peut différer de H que de très-peu;

h'

la différence de niveau du mercure dans les deux branches du manomètre ; H'h' la force élastique du gaz dans l'appareil. Le niveau du mercure devant être maintenu en f dans le tube bd, ce que l'on fait en introduisant du mercure dans le manomètre, h' s'ajoute à H' ou s'en retranche suivant que le niveau du mercure est au-dessus ou au-dessous du repère f dans le tube cd.

Le poids de l'air contenu dans l'appareil a alors pour expression

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Le poids de l'air de l'appareil n'ayant évidemment pas changé, on a

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Quand l'air est introduit à la pression atmosphérique H dans l'appareil, on fait h = 0, et l'on remplace ±h' par + h' dans les expressions et l'équation précédentes.

On conçoit qu'un second thermomètre à gaz placé à côté du premier, dans des conditions identiques, fournirait une formule semblable à la précédente, et donnerait pour x la même valeur que celle-ci, si les deux thermomètres sont comparables. C'est en opérant ainsi que M. Regnault

a reconnu :

1° Que l'air atmosphérique suit la même loi de dilatation depuis 0o jusqu'à 300°, lors même que sa force élastique initiale à 0° varie depuis 0m,400 jusqu'à 1,300; d'où il résulte que dans la construction d'un thermomètre à air on n'aura pas à se préoccuper de la densité de l'air introduit; les instruments seront comparables quelle que soit cette densité.

2o L'air atmosphérique, l'hydrogène et l'acide carbonique possèdent, entre 0° et 350°, sensiblement la même loi de dilatation, bien que leurs coefficients de dilatation soient notablement différents. Ainsi des thermomètres construits avec ces différents gaz marcheront d'accord, pourvu qu'on calcule les températures avec le coefficient propre à chacun d'eux. Il résulte de là que les coefficients de dilatation de ces gaz présentent sensiblement le même rapport à toutes les températures.

3o Le gaz acide sulfureux s'écarte notablement de la loi de dilatation que présentent les gaz précédents. Le coefficient de dilatation de l'acide sulfureux diminue avec la température prise sur le thermomètre à air; c'est ce que fait voir le tableau suivant, qui donne le coefficient moyen de dilatation par degré centigrade;

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Il est évident que la variation du coefficient de dilatation réel est encore plus grande que ne l'indique le tableau, qui donne les coefficients moyens toujours à partir de 0°.

Lorsqu'on n'a qu'une température à déterminer, on peut opérer ainsi qu'il suit avec le thermomètre à air.

On munit la tubulure g (fig. 102) d'un robinet semblable au robinet . Établissant la communication de bg avec gh, on remplit le manomètre de mercure jusqu'au point g; on intercepte cette communication, puis on établit la communication du ballon A avec gh, et l'on remplit ce ballon d'air sec. Cela fait, on place le ballon dans l'enceinte, de manière qu'une très-petite portion de son tube capillaire, qui peut être droit suivant les circonstances, sorte de l'enceinte; on laisse libre la communication du ballon avec le tube desséchant. Au moment où l'on veut déterminer la température, on supprime toute communication de gh avec A et le manomètre, et l'on observe le baromètre qui donne la pression atmosphérique à cet instant. On retire l'appareil et on le laisse revenir à la température ambiante.

On enveloppe le réservoir A et son tube capillaire de glace fondante, puis on fait couler le mercure du manomètre, de façon à avoir dans le tube df une dépression de 6 à 7 décimètres au-dessous du niveau ab; on établit alors la communication entre le ballon A et le manomètre, une portion de l'air du ballon A passe dans le tube df. On verse du mercure dans le tube cd pour amener exactement le niveau au repère f marqué sur le tube bd. On mesure la différence des colonnes de mercure

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