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naturel de la nécessité, tous les attributs propres à réparer les malheurs passés, à prévenir ceux de l'avenir: la paix, la concorde, le retour des idées morales, le respect pour la religion, qui est le premier anneau où s'attache le bonheur des peuples; enfin tous les principes conservateurs de l'ordre politique et social. Il ne s'agit plus d'aucune opinion particulière sur le caractère, sur la capacité de celui qui, revêtu par l'ordre des destinées, du droit de légitimité, serait appelé à venir l'exercer. Eût-il tous les défauts réunis, au lieu des qualités que possède celui en qui réside aujourd'hui ce droit, il lui serait impossible, absolument impossible de ne pas faire asseoir avec lui tous les principes tendant à établir, maintenir et prolonger au dehors comme au dedans la tranquillité et l'harmonie, dont toutes les plaies à guérir dans son royaume lui feraient une indispensable nécessité.

>> On pourrait donc réduire toutes ces questions à deux principes :

» L'usurpation prolongée doit perpétuer pendant plus d'un demi-siècle la guerre et tous les fléaux qu'elle entraîne.

» La légitimité replacée sur le trône de France peut seule rendre le repos à l'ordre politique et social, et donner à l'Europe une paix générale.

» C'est donc entre ces deux systèmes que les arbitres du sort de l'Europe, les souverains et leurs ministres ont à choisir. Toute autre idée partielle, tout autre intérêt individuel ne saurait être mis dans la balance, avec la vérité fondamentale qu'on a cherché à développer. Elle est la clef de la grande voûte, de laquelle dépend la conservation ou la ruine de tous les autres édifices politiques, dont une si grande partie a déjà été renversée depuis vingt années par le fléau dévorant de l'usurpation. » Lorsque la Providence aura jugé dans sa sagesse que le temps est arrivé de dissiper la nuit épaisse qui empêche encore de voir et de saisir le véritable fil de direction dans ce dé

dale politique, lorsqu'elle voudra enfin faire cesser cette plaic désastreuse dont elle punit et afflige l'humanité, alors les regards se reporteront sur Louis XVIII, et l'épigraphe qui précède celte note trouvera sa juste et entière application. >>

Nous trouvons, répétons-le, dans cette note, reflet complet des opinions, des préjugés aveugles et des espérances des anciens royalistes en 1812, la pensée tout entière de 1814.

le

Qui eût montré cependant à Napoléon, maître du Kremlin, nuage royaliste qui se formait à Paris; qui lui eût découvert cette note, où l'outrage burlesque à nos armées victorieuses coudoie une appréciation très-juste de la prochaine réaction bourbonnienne; qui eût mis sous ses yeux les petites intrigues de quelques émigrés rentrés en France grâce à sa protection, l'aurait fait sourire de pitié. Napoléon ne prenait point au sérieux les Bourbons, et la retraite d'Hartwell ne le préoccupa jamais. Il s'inquiétait davantage du parti républicain, des idéologues. La conspiration Malet, dont l'audace dépasse tout ce que l'on connaît en ce genre, lui révéla des dangers d'une nature autre que les prétentions du frère de Louis XVI, et qui lui prouvèrent combien son établissement dynastique avait peu jeté de racine dans l'esprit national.

L'armée française quittait les ruines de Moscow, lorsque cette conspiration éclata. Tous les incidents en sont remarquables.

Ici, ce n'est plus le culte platonique de quelques vieux royalistes qui se nourrissent de conjectures sur les éventualités d'une restauration; c'est un homme hardi, déjà éprouvé dans les sociétés secrètes, dans les complots. Après avoir froidement calculé toutes les chances, étudié le diagnostic de l'opinion pu blique, et reconnu que l'empire n'est qu'un fait, il essaie de supprimer ce fait par un coup de main, sauf à faire ensuite un appel au droit et à galvaniser la fibre révolutionnaire. Les conspirations de place publique, dont le plan se trame à huis los, pour renverser les pouvoirs établis, n'ont pas ordinaire

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