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Le juge de paix prononce sur les difficultés relatives aux articles du compte, lorsque les obligations résultant du contrat ne sont pas contestées, sans appel lorsque l'objet de la contestation ne dépasse pas le taux de sa compétence générale en dernier ressort, et à charge d'appel à quelque somme qu'il puisse s'élever (1).

Le juge statue sur le vu des registres des parties; il peut même admettre la preuve testimoniale, s'il le juge convenable (2).

Art. 12.

Toute action résultant du bail à colonat partiaire se prescrit par cinq ans, à partir de la sortie du colon.

Art. 13. Les dispositions de la section première du titre du louage contenues dans l'article 1718, et dans les articles 1736 à 1741 inclusivement, et celles de la section 3 du même titre, contenues dans les articles 1766, 1777 et 1778, sont applicables aux baux à colonat partiaire. Ces baux sont en outre régis, pour le surplus, par l'usage des lieux (3).

(1) Le paragraphe 2 de l'article 11 (introduit par la commission du Sénat) portait primitivement: « Le juge de paix prononce sans appel, lorsque l'objet de la contestation ne dépasse pas 100 francs, et à charge d'appel, à quelque somme qu'il puisse s'élever, sur les difficultés relatives aux articles du compte, lorsque les obligations résultant du contrat ne sont pas contestées. » La commission de la Chambre des députés a modifié cette rédaction en lui substituant le texte actuel que, dans son rapport, M. Million a justifié en ces termes : « La compétence en dernier ressort limitée à 100 francs a paru à votre commission fixée à un taux trop bas, par suite de l'augmentation des frais de justice résultant de l'aggravation des droits d'enregistrement survenue en 1872 ; il a semblé à votre commission qu'il fallait limiter le droit d'appel aux seuls litiges qui ont au moins un intérêt égal ou supérieur à celui des frais que les parties seraient obligées d'avancer pour se faire rendre justice. Cette considération a fait rejeter comme trop faible la limite de 100 francs pour la compétence en dernier ressort des juges de paix; mais, pour ne pas se mettre en désaccord avec la commission spéciale qui étudie cette question, elle a pensé qu'il fallait adopter une formule générale qui renvoie au taux de la compétence en dernier ressort du juge de paix, tout en laissant dans la compétence de ce juge en premier ressort les règlements de compte entre propriétaire et métayer, à quelque taux que puisse s'élever le chiffre du solde de compte. » Lors du retour du projet de loi au Sénat, M. de Casabianca a demandé si, en changeant les termes de l'article 11, § 2, la Chambre des députés avait voulu modifier les dispositions du code de procédure sur la compétence des juges de paix. Le ministre de l'agriculture a répondu négativement (Sénat, séance du 5 juill. 1889).

(2) Le paragraphe 3 de l'article 11 s'applique au litige et non pas seulement à l'instance en justice de paix. Donc le tribunal civil, quand il aura à statuer en appel, pourra recourir aux mêmes modes de preuve que le juge de paix luimême (rapports de MM. Clément et Million).

(3) Au Sénat, lors de la deuxième délibération, M. de Gavardie a proposé sur l'article 13 l'amendement suivant: « Les baux à colonage partiaire sont régis par l'usage des lieux, et, pour les cas non prévus, par les dispositions du code civil relatives aux contrats de louage et de société. » M. Halgan a soutenu cet amendement et formulé contre le texte de la commission des critiques auxquelles M. Clément, rapporteur, a répondu par des explications qui ont fait maintenir la rédaction actuelle (Sénat, séance du 17 juin 1880).

ΧΧΙ

LOI DU 19 JUILLET 1889,

SUR LES DÉPENSES ORDINAIRES DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE PUBLIQUE ET LES TRAITEMENTS DU PERSONNEL DE CE SERVICE (1).

Notice et notes par M. J. BOULLAIRE, docteur en droit, ancien magistrat.

La loi du 16 juin 1881 a établi la gratuité de l'enseignement primaire; la loi du 28 mars 1882 l'a rendu obligatoire; celle du 30 octobre 1886 l'a organisé en réglant les conditions d'établissement et de fonctionnement des écoles publiques et des écoles privées.

La loi du 19 juillet 1889 complète les unes et les autres en établissant la constitution financière de ce grand service. Elle se trouvait primitivement comprise dans le projet de loi organique voté en 1886; la Chambre l'en avait détachée dans sa séance du 16 février 1884.

Le projet de loi fut soumis par le gouvernement à l'examen préalable du Conseil d'État et c'est le texte adopté par lui qui a été proposé à la Chambre par M. Goblet, ministre de l'instruction publique, le 13 mars 1886.

La réglementation des dépenses scolaires et des traitements des instituteurs était depuis quelque temps tombée dans un véritable chaos. L'instabilité des budgets, les complications de la comptabilité et de la réglementation amenaient des inégalités et des difficultés inextricables.

Non seulement plus de 30.000 instituteurs n'étaient pas en possession de traitements suffisants, mais le corps tout entier souffrait de l'absence de classement régulier et par conséquent d'avancement normal. Les inégalités les plus choquantes, les variations les plus pénibles étaient

(1) J. Off., 20 juillet 1889. - Rapport au Président de la République. (J. Off. 31 juillet 1889).

Projet de loi présenté par M. Goblet, ministre de l'instruction publique, à la Chambre des députés le 13 mars 1886. Exposé des motifs (J. Off., Annexes, Chambre 1886, p. 1238). Rapport par M. Compayré, déposé le 7 juillet 1887 (J. Off. Annexes, Chambre 1887, p. 999). Avis de la Commission du budget, par M. Burdeau, déposé le 27 octobre 1887 (J. Off., Annexes, Chambre 1887, p. 182). Délibération unique, urgence déclarée, les 29 octobre, 7, 8, 10, 12 et 14 novembre 1887.

Projet porté au Sénat par M. Faye, ministre de l'instruction publique, le 15 décembre 1887. Exposé des motifs (J. Off., Annexes, Sénat 1887, p. 51). Rapport par M. Combes, déposé le 22 novembre 1888 (J. Off., Annexes, Sénat 1888, session extraordinaire, p. 170). Discussion unique, urgence déclarée les 4, 5, 8, 11 avril, 3, 7, 14, 17, 18, 20 et 21 juin 1889. Avis de la commission des finances lu par M. Léon Say, le 8 avril 1889.

Nouveau rapport la Chambre sur les modifications votées par le Sénat, par M. Compayré (J. Off., Annexes, Chambre 1889, p. 1.319). Dernière discussion à la Chambre le 6 juillet 1889.

signalées, et ne pouvaient être corrigées. Car, d'une part, la loi du 19 juillet 1875 avait fixé un taux minimum de traitement insuffisant, et, d'autre part, la loi du 16 juin 1881 avait garanti pour l'avenir aux instituteurs alors en fonctions les traitements dont ils jouissaient lors de sa promulgation, et ces traitements, enflés par l'indemnité scolaire que payaient encore les familles, étaient excessifs dans beaucoup de localités. La moyenne des traitements des instituteurs baissait d'année en année (1) et les communes devaient y suppléer par des suppléments facultatifs. Mais les communes à leur tour se plaignaient de voir varier d'une année à l'autre la charge qui leur incombait, et d'être sans cesse menacées de voir supprimer ou réduire la subvention de l'État.

La loi a eu pour but de remédier à ces graves embarras.

L'instruction primaire a revêtu dans nos lois trois formes différentes : Elle a été d'abord un service rendu aux familles et rétribué par elles; puis, depuis la loi de 1838, elle est devenue l'affaire et la dette des communes. Aujourd'hui elle est un service d'État dont le gouvernement a la charge et la responsabilité (2). La loi nouvelle complète cette dernière organisation. L'instituteur devient absolument un fonctionnaire public. Déjà nommé par le pouvoir central, il sera aussi désormais uniquement, en principe du moins, payé par lui.

Sous la législation précédente le traitement d'un instituteur se composait des éléments suivants :

1° Un traitement fixe de 200 francs payé par la commune;

2o Un traitement éventuel calculé par tête d'élève et d'après un taux de rétribution scolaire devenu fictif, vestige du temps où les instituteurs étaient payés par les familles à raison du nombre des enfants et des mois de présence;

3o Une allocation complémentaire payée par la commune pour parfaire, s'il y avait lieu, le minimum légal;

4o Une allocation de 100 francs, s'il y avait lieu, pour le brevet supérieur; 5o Une autre allocation de 50 ou de 100 francs pour l'inscription dans le premier ou le second huitième de la liste de mérite;

(1) En 1879, 65.182 instituteurs se partagèrent 72.124.800 fr. soit un traitement moyen de 1.106 fr. En 1885, pour 100.482 instituteurs qui se partagent 101.561.000 fr. la moyenne n'était plus que de 1.010 fr.

(2) Les orateurs de droite ont protesté contre cette théorie qui fait de l'instruction primaire essentiellement une fonction d'État. Ils ont fait observer que ce sont les parents qui ont avant tout le devoir d'élever et d'instruire leurs enfants et que des trois pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, qui constituent l'État, aucun ne comprend la fonction éducatrice. L'État doit seulement exercer sur l'enseignement une haute tutelle sociale, écarter de l'enseignement les indignes et les incapables, et surveiller l'enseignement même libre pour qu'il ne s'écarte pas du respect dû à la morale et aux lois. Il peut aussi mettre à la disposition des familles un enseignement dont il assume la direction, mais il ne doit l'imposer à personne et il doit le mettre en harmonie avec les sentiments et les croyances des familles. (Discours de M. Chesnelong au Sénat, 6 avril 1889.)

6. Si les fonds communaux étaient insuffisants, ce qui était le cas dans 30.000 communes, une allocation supplémentaire du département sur les quatre centimes, qui d'ailleurs était elle-même toujours insuffi sante;

7° Une seconde allocation supplémentaire de l'État pour parfaire, en cas d'insuffisance des précédentes ressources, le minimum légal;

8o Dans les communes de quelque importance, un ou plusieurs suppléments facultatifs votés par le conseil municipal, éminemment variables d'une commune à l'autre et d'une année à l'autre.

La nouvelle loi supprime cette complication. Les traitements du personnel du corps enseignant de l'instruction primaire seront payés désormais par l'État seul, qui n'apparaissait jusque-là que pour venir en aide aux communes.

Les dépenses de l'instruction primaire seront réparties de la manière suivante :

Aux familles incombent les dépenses qui regardent l'enfant individuellement achat de livres et cahiers, fournitures scolaires. La caisse des écoles est destinée à fournir des secours pour cette dépense aux familles qui peuvent en avoir besoin.

Les communes ont la charge de la partie matérielle du service scolaire : entretien de l'immeuble, qui sera bientôt partout propriété communale, entretien et renouvellement de tout le mobilier de classe et de tout le matériel d'enseignement à usage collectif. En outre un certain nombre de communes dont le chiffre de la population est élevé doivent payer à l'instituteur une indemnité supplémentaire dite de résidence, représentant l'excédent de dépenses qui lui incombe dans ces localités.

Toute la dépense du personnel reste à la charge de l'État.

Pour payer la part qui lui incombait dans la dépense du personnel, la commune versait le produit de ses quatre centimes dits communaux. Puis, si elle avait des revenus ordinaires, elle subissait un prélèvement qui pouvait aller jusqu'au cinquième du produit de certains de ses revenus. Après quoi, s'il en était besoin, une subvention sur les quatre centimes dits départementaux aidait la commune à combler le déficit. Enfin comme ce subside ne suffisait nulle part, l'État était chargé de parfaire la différence.

Pour soulager les communes, la loi de finances de juillet 1881, sur le vote d'un amendement de M. Sarrien, avait en fait remplacé le prélèvement du cinquième, dans toutes les communes de France, sauf pour cinq villes (Paris, Lyon, Bordeaux, Marseille, Lille), par une subvention extraordinaire de l'État qui en 1882 avait été de 15 millions. Mais les nécessités du budget avaient fait diminuer cette subvention d'année en année et les communes étaient menacées, à leur grand déplaisir, de faire emploi de nouveau de l'excédent disponible de leur cinquième pour l'instruction primaire.

Les quatre centimes départementaux et les quatre centimes communaux étaient devenus obligatoires depuis 1881. Ils étaient encore votés

par les conseils généraux et par les conseils municipaux. Mais c'était une formalité vaine. Leur vote était obligatoire et il y aurait été au besoin suppléé d'office.

Ces huit centimes deviennent des centimes d'État, attachés au principal des quatre contributions, et ils disparaissent du nombre des centimes additionnels. Ils représentent une ressource de 29 millions.

Le prélèvement du cinquième communal disparait également. Il était absolument impopulaire et les communes protestaient contre l'application de la loi du 16 juin 1881 qui avait imaginé cette malheureuse conception.

L'État désormais pourvoira seul aux traitements au moyen des ressources générales du budget de l'instruction publique, accru des huit centimes nouveaux. Les communes acquitteront de même les dépenses du matériel et l'indemnité de résidence au moyen de leurs ressources générales.

La loi nouvelle améliore les émoluments de l'ensemble des instituteurs, en augmentant le tarif du traitement légal et en y ajoutant une indemnité de résidence dans toutes les communes dont la population agglomérée est de mille âmes au moins et dans les chef-lieux de canton, ayant même moins de mille habitants. Toutefois ces améliorations ne seront que progressives, au fur et à mesure des vacances qui se produiront et selon l'importance des crédits annuels votés par le Parlement. Elles devront être complètement réalisées en huit ans.

Le traitement minimum des instituteurs titulaires est fixé à 1.000 francs. Il est de 800 francs pour les stagiaires. Il était antérieurement de 900 francs pour les instituteurs titulaires, 700 francs pour les adjoints et 600 francs pour les adjointes.

La loi de 1881, qui établit la gratuité et supprima par conséquent la rétribution scolaire payée par les parents, assura aux instituteurs en exercice un traitement égal à la moyenne de ce qu'ils avaient reçu dans les trois dernières années. Il en résulta que des instituteurs touchaient des traitements excessifs de 3, 4 et 5.000 francs et que l'avancement et le traitement des nouveaux venus en étaient considérablement amoindris depuis cette époque; le corps enseignant avait été comme immobilisé par cette mesure. Pour remédier à cet état de choses, la loi nouvelle établit cinq classes d'instituteurs et elle permettra dans l'avenir, les extinctions aidant, de récompenser les instituteurs méritants par des augmentations de classe et de traitement.

Les dépenses des écoles normales primaires qui étaient à la charge des départements seront supportées désormais par l'État, comme conséquence naturelle de la suppression des 4 centimes départementaux.

La personnalité civile est accordée à ces établissements (art. 47).

On a beaucoup discuté sur les charges que la loi nouvelle imposera au budget. Le Sénat a essayé de les amoindrir; c'est ainsi qu'il a supprimé l'indemnité de premier établissement de 100 francs qui était attribuée aux

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