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Elle (la paternité) ne pourra jamais être | admettre l'auteur mème de la reconnaissance « établie contre le père que par sa propre à le critiquer.-Les principes que nous vea reconnaissance, et encore faudra-t-il, pour nons de développer répondent en partie à l'oba que les familles soient à cet égard à l'abri jection. Où et comment trouverait-on la véa de toute surprise, que cette reconnaissance rité en dehors de ce que la loi, par l'art. 339, a ait été faite ou par l'acte même de naissan- déclaré être la vérité?-N'exagérez pas l'ordre ce, ou par acte authentique. »--Duveyrier, public. Qu'un mariage soit nul pour défaut d'â– orateur du Tribunat, disait au Corps législa- ge, ou pour cause de bigamie, ou parce qu'il tif : « La reconnaissance d'un enfant naturel aurait été contracté entre parents au degré peat nuire à tout autre qui aurait plus de ten- | prohibé, l'ordre public demande qu'il soit andresse et plus de raison pour se dire le père nulé. Elle ouvre une action à tous les intéresde l'enfant. Elle peut nuire à l'enfant qui a sés, et elle ouvre en même temps une action déjà trouvé ou qui réclame un autre père. La principale et directe au ministère public aux reconnaissance faite par le père ou la récla- mêmes fins (art. 184).—En matière de contesmation élevée par l'enfant peuven', l'une aussi tation de reconnaissance au contraire, l'acbien que l'autre, nuire à des héritiers légiti- | tion n'est ouverte qu'aux intéressés : le minismes. Ces divers intérêts et tous autres qu'il est tère publica seulement le droit d'être entendu, impossible de prévoir et de désigner ont indi- d'empêcher des compromis proscrits par lá qué la justice et la nécessité d'une disposition loi (art. 83, § 2, et 1004, C. proc.).—N'est-ce générale qui donne à tous ceux qui y ont inté- pas la preuve la plus manifeste que la loi s'est rét, le droit de contester soit la reconnais- reposée sur les intéressés à contester du soin sance faite par le père ou la mère, soit la ré- de déjouer les reconnaissances mensongères? clamation élevée par l'enfant. » ——— Les vrais - existe, il est vrai, contre la doctrine que motifs de la loi ressortent jusqu'à la dernière nous soutenons trois arrêts: deux de la Cour évidence de la comparaison attentive des de Paris des 14 déc. 1833 et 23 juill. 1853, principes de la paternité et de la filiation légi- et un de la Cour d'Aix du 22 déc. 1852. (V. times avec ceux de la paternité et de la filia- | suprà, ad notam.) Tous les trois ont décidé tion naturelles. La première dérive du ma- que la reconnaissance n'est que l'aveu de la riage. Une présomption juris tantùm répute le paternité préexistante et la présuppose étamari père des enfants qui en sont nés. Cette blie; que celui qui a reconnu doit être admis à présomption, il peut la combattre et la dé- faire preuve de sa non-paternité pour faire truire par le désaveu (art. 312). Ses héritiers, tomber la reconnaissance.-Nous nous inclis'il a garde le silence, la combattront par l'ac- nons avec respect devant ces graves autorités, tion en contestation de légitimité (art. 317). mais elles n'ont pas ébranlé notre conviction. - La seconde ne découle que de la recon- Ces arrêts ont eu pour but de rechercher la naissance, c'est-à-dire du fait tout personnel vérité dans une matière où la vérité même est du père ou de la mère. Aussi l'action en désa- tellement incertaine, qu'elle ne peut sûrement veu ne leur est-elle pas ouverte. Comment | dériver que de la force légale attachée à la reles autoriser à détruire une paternité créée, connaissance. C'est pour cela précisément que non plus par une fiction de la loi, mais par la loi exige qu'elle soit faite en la plus solenleur propre déclaration? Aussi la loi n'ouvre- nelle des formes, la forme authentique.-De t-elle ici que la seconde action, celle au profit plus, ils ont tous été rendus dans des espèces des tiers, en contestation de reconnaissance où la question n'était réellement pas enga(art. 339). C'est ainsi que se trouvent con- gee. Dans le premier, un mineur, subjugué ediés tous les intérêts en ces délicates ma par une femme au sortir du collége, contestait tères. La paternité est l'œuvre mystérieuse a reconnaissance qu'elle lui avait arrachée de la nature. Comment rechercher et connaî- par des articulations de fraude parfaitement tre la vérité par des règles sûres? Elle résul-caractérisées et accueillies par la Cour. L'acte tra de la présomption de la loi dans un cas, était vicié dans son essence, sans avoir à rede la déclaration authentique de l'homme dans chercher si la paternité était vraie ou simulée. l'autre.-Et qu'on ne se préoccupe pas de cett L'arrêt de la Cour d'Aix a été rendu dans une objection qu'un individu pourrait, à l'ombre espèce où il y avait également vice radical de de ces principes, reconnaître valablement la reconnaissance, suffisant à en faire de plano pour son enfant une personne d'un âge trop prononcer la nullité; il y avait eu erreur sur rapproché du sien pour que la paternité fût la personne reconnue. Le dernier arrêt de la possible. Il n'est pas un officier public qui re- Cour de Paris enfin a été rendu dans une escevrait un pareil acte. C'est prévoir gratuite- pèce où le père de l'auteur de la reconnaisment une impossibilité. Que la paternité soit sance usait du droit réservé aux intéressés de possible, qu'elle ait été librement et volontai- la contester. C'est donc surabondamment, et rement reconnue par acte authentique, aux en dehors de la question du procès, que cet yeux de la loi, elle est. Nulle preuve, n'est ad- arrêt a déclaré que l'auteur de la reconnaismise à l'encontre, à raison meme de l'incerti-sance pouvait lui-même la contester... tude forcée de ces preuves. On invoque l'ordre public. Il est intéressé, dit-on, à déjouer de fausses paternités: dès lors, il faut

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Me Auvillain invoque ici l'autorité de M. Demolombe (tom. 5, no 437) sur l'interprétation à donner à l'article 339, et il termine en

qui a eu lieu le 6 août 1839; - 2o Qu'à une époque correspondante à celle mentionnée dans l'articulation qui précède, Halet a habité constamment, soit en Angleterre, soit en France, et qu'il n'a habité ni même traversé la partie de la Belgique où résidait la fille Schwilden;-3 Que ledit Halet n'a rencontré et connu, pour la première fois, la demoiselle Schwilden qu'à Paris, en 1853; - Sauf à la demoiselle Schwilden à faire la preuve contraire par les mêmes voies. »

Appel par la demoiselle Schwilden. - -«La question à juger, a dit Me Auvillain, son avecat, se présente à la Cour dans les termes les plus précis, et réduite en quelque sorte à sa plus simple expression. L'allégation de reconnaissance conditionnelle se trouve, en effet, écartée par le jugement. Le contrat de mariage, même non suivi de mariage, ne constitue pas moins un acte authentique, et la reconnaissance y contenue satisfait pleinement au vou de l'art. 334, Cod. Nap.-Il n'y a pas d'appel incident sur ce point.-D'un autre côté, le moyen de nullité tiré de prétendues manœuvres dolosives qui n'ont jamais été précisées, qui sont démenties par les articulations même de la demande, qui n'ont jamais existé, est aussi complétement mis de côté. Les premiers juges déclarent que la reconnaissance a été librement consentie. Il n'y a pas, non plus, et il ne pouvait pas y avoir d'appel incident sur ce chef.

«La seule question du procès est donc celleci: La reconnaissance librement consentie peut-elle être rétractée par celui de qui elle émane, sous prétexte qu'il ne serait pas réellement le père de l'enfant reconnu?-La négative paraît résulter de trois ordres d'idées: 1o des principes applicables aux actes de l'état civil; 2o des principes généraux des obligations; 3° et des principes spéciaux de la reconnaissance des enfants naturels.

« Des principes en matière d'état civil..... -La reconnaissance d'un enfant naturel constitue, en effet, l'un des actes les plus importants de la vie civile, puisqu'il assure à un citoyen sa place dans la société, qu'il détermine son nom, fixe ses droits de famille et de suc cession. C'est, en un mot, un acte de l'état civil, et ce mot dit tout. Les actes de l'état civil sont essentiellement irrévocables. L'état des citoyens ne peut être le caprice et le jouet de personne. La question a été tranchée en ce sens par la jurisprudence (V. Pau, 5 prair. an 13, S-V. 6.2.8; Collect. nouv. 2.2.54; Cass. 27 août 1811, S-V. 12.1.13; C. n. 3.1. 399); à ce point que bien que le testament soit de sa nature un acte essentiellement révocable, essentiellement secret et destiné à ne produire ses effets qu'au décès du testateur, en sorte que jusqu'à cette époque, ce dernier est complétement le maître de le changer, de le rétracter, de l'annuler, cependant si le testament authentique contient une reconnaissance d'enfant naturel, cette reconnaissance

sera irrévocable: elle est acquise à l'enfant reconnu; elle subsistera malgré la révocation du testament. (V. Bastia, 5 juill. 1826, S-V. 27. 2. 106; C. n. 8. 2. 254, et 17 août 1829, S-V. 29. 2. 279; C. n. 9.2.323.)

« Les principes des obligations repoussent également la prétention du sieur Halet. L'acte authentique fait pleine foi entre les parties jusqu'à inscription de faux (Cod. Nap., art. 1319); l'acte sous seing privé fait foi également (art. 1322); et aucune preuve par témoins n'est admise contre ou outre le contenu aux actes, à moins de commencement de preuve par écrit (art. 1341 et 1347).—Qu'estce à dire? Nul ne peut prouver, sans s'inscrire en faux, contre les faits constatés par le notaire de visu et auditu, c'est-à-dire sur la présentation des parties devant lui et sur les déclarations qu'elles lui ont faites et qu'il a constatées. Quant à la sincérité de ces déclarations, il n'en est pas le juge; il n'en peut contrôler le plus ou moins d'exactitude. Il n'est pas besoin de s'inscrire en faux pour prouver contre ces déclarations; mais il faudrait un commencement de preuve par écrit, c'est-àdire, dans l'espèce, des lettres, des écrits quelconques émanés de la demoiselle Schwilden, qui rendissent vraisemblable la non-paternité. Or, il n'en est pas produit; il n'y en a pas.-Sans doute, l'art. 1353 admet les magistrats à juger sur de simples présomptions, en dehors même des cas où la preuve testimoniale est admise : c'est lorsqu'un acte est attaqué pour cause de fraude où de dol. Ici, rien de tel. Halet ne peut être reçu à invoquer son propre dol pour exciper de cet article. La maxime: Nemo auditur propriam turpitudinem allegans, repousse cette interprétation de la loi. Il ne pourrait se faire un titre de sa propre faute. C'est, au surplus, la doctrine consacrée par la Cour de cassation. (Cass., 29 mai 1827, S-V. 27.1.313; Collect. nouv. 8.1. 608.)

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Le sieur Halet se réfugie dans un dernier moyen: celui admis par les premiers juges. Je demande, dit-il, à prouver ma non-paternité. Si je fais cette preuve, l'acte tombera, faute de cause. Ce langage doit-il être admis? Nous ne le pensons pas. Et le sérieux examen des principes délicats engagés dans la cause nous a conduit à une conviction contraire.Les principes particuliers en matière de reconnaissance proscrivent ce raisonnement. L'art. 339 est le siége de la matière : « Toute << reconnaissance et toute réclamation d'état, « dit la loi, pourra être contestée par tous « ceux qui y ont intérêt. »— Le mot contestée indique clairement qu'il s'agit de toutes personnes autres que celles de qui émane la reconnaissance. On ne conteste pas un acte émané de notre pure volonté, on le révoque; or la loi n'a pas réservé le droit de révocation. Les discours de présentation de la loi au Corps Législatif confirment pleinement cette interprétation. Bigot-Préameneu disait :

Elle (la paternité) ne pourra jamais être | admettre l'auteur même de la reconnaissance « établie contre le père que par sa propre à le critiquer.--Les principes que nous vea reconnaissance, et encore faudra-t-il, pour nons de développer répondent en partie à l'obque les familles soient à cet égard à l'abri jection. Où et comment trouverait-on la vé« de toute surprise, que cette reconnaissance | rité en dehors de ce que la loi, par l'art. 339, a ait été faite ou par l'acte même de naissan- déclaré être la vérité?-N'exagérez pas l'ordre ce, ou par acte authentique. »-Duveyrier, public. Qu'un mariage soit nul pour défaut d'â– orateur du Tribunat, disait au Corps législa-ge, ou pour cause de bigamie, ou parce qu'il tif : « La reconnaissance d'un enfant naturel aurait été contracté entre parents au degré peut nuire à tout autre qui aurait plus de ten- | prohibé, l'ordre public demande qu'il soit andresse et plus de raison pour se dire le père nulé. Elle ouvre une action à tous les intéresde l'enfant. Elle peut nuire à l'enfant qui a sés, et elle ouvre en même temps une action déjà trouvé ou qui réclame un autre père. La principale et directe au ministère public aux reconnaissance faite par le père ou la récla- mêmes fins (art. 184).—En matière de contesmation élevée par l'enfant peuven', l'une aussi tation de reconnaissance au contraire, l'acbien que l'autre, nuire à des héritiers légiti- | tion n'est ouverte qu'aux intéressés : le minismes. Ces divers intérêts et tous autres qu'il est tère public a seulement le droit d'être entendu, impossible de prévoir et de désigner ont indi- d'empêcher des compromis proscrits par lá qué la justice et la nécessité d'une disposition | loi (art. 83, § 2, et 1004, C. proc.).—N'est-ce générale qui donne à tous ceux qui y ont inte- pas la preuve la plus manifeste que la loi s'est rét, le droit de contester soit la reconnais- reposée sur les intéressés à contester du soin sance faite par le père ou la mère, soit la ré- de déjouer les reconnaissances mensongères? clamation élevée par l'enfant. » — Les vrais -11 existe, il est vrai, contre la doctrine que motifs de la loi ressortent jusqu'à la dernière nous soutenons trois arrêts: deux de la Cour évidence de la comparaison attentive des de Paris des 14 déc. 1833 et 23 juill. 1853, principes de la paternité et de la filiation légi- et un de la Cour d'Aix du 22 déc. 1852. (V. times avec ceux de la paternité et de la filia- suprà, ad notam.) Tous les trois ont décidé tion naturelles. La première dérive du ma- que la reconnaissance n'est que l'aveu de la riage. Une présomption juris tantùm répute le paternité préexistante et la présuppose étamari père des enfants qui en sont nés. Cette | blie; que celui qui a reconnu doit être admis à présomption, il peut la combattre et la dé- faire preuve de sa non-paternité pour faire truire par le désaveu (art. 312). Ses héritiers, tomber la reconnaissance.-Nous nous inclis'il a gardé le silence, la combattront par l'ac-nons avec respect devant ces graves autorités, tion en contestation de légitimité (art. 317). mais elles n'ont pas ébranlé notre conviction. -La seconde ne découle que de la recon- Ces arrêts ont eu pour but de rechercher la paissance, c'est-à-dire du fait tout personnel vérité dans une matière où la vérité même est du père ou de la mère. Aussi l'action en désa- tellement incertaine, qu'elle ne peut sûrement veu ne leur est-elle pas ouverte. Comment dériver que de la force légale attachée à la reles autoriser à détruire une paternité créée, connaissance. C'est pour cela précisément que non plus par une fiction de la loi, mais par la loi exige qu'elle soit faite en la plus solenleur propre déclaration? Aussi la loi n'ouvre- nelle des formes, la forme authentique.-De t-elle ici que la seconde action, celle au profit plus, ils ont tous été rendus dans des espèces des tiers, en contestation de reconnaissance où la question n'était réellement pas enga(art. 339). C'est ainsi que se trouvent con- gee. Dans le premier, un mineur, subjugué cdiés tous les intérêts en ces délicates ma- par une femme au sortir du collége, contestait uères. La paternité est l'œuvre mystérieuse la reconnaissance qu'elle lui avait arrachée de la nature. Comment rechercher et connaî- par des articulations de fraude parfaitement tre la vérité par des règles sûres? Elle résul- caractérisées et accueillies par la Cour. L'acte tra de la présomption de la loi dans un cas, était vicié dans son essence, sans avoir à rede la déclaration authentique de l'homme dans chercher si la paternité était vraie ou simulée. l'autre.-Et qu'on ne se préoccupe pas de cette L'arrêt de la Cour d'Aix a été rendu dans une objection qu'un individu pourrait, à l'ombre espèce où il y avait également vice radical de de ces principes, reconnaître valablement la reconnaissance, suffisant à en faire de plano pour son enfant une personne d'un âge trop prononcer la nullité; il y avait eu erreur sur rapproché du sien pour que la paternité fut la personne reconnue. Le dernier arrêt de la possible. Il n'est pas un officier public qui re- Cour de Paris enfin a été rendu dans une escevrait un pareil acte. C'est prévoir gratuite-pèce où le père de l'auteur de la reconnaisment une impossibilité. Que la paternité soit possible, qu'elle ait été librement et volontairement reconnue par acte authentique, aux yeux de la loi, elle est. Nulle preuve, n'est admise à l'encontre, à raison meme de l'incerti-sance pouvait lui-même la contester... tude forcée de ces preuves. On invoque l'ordre public. Il est intéressé, dit-on, à déjouer de fausses paternités: dès lors, il faut

sance usait du droit réservé aux intéressés de la contester. C'est donc surabondaniment, et en dehors de la question du procès, que cet arrêt a déclaré que l'auteur de la reconnais

Me Auvillain invoque ici l'autorité de M. Demolombe (tom. 5, n° 437) sur l'interprétation à donner à l'article 339, et il termine en

ces termes : « Un dernier mot. Un enfant | grave, controversée par les auteurs, et qui mérite n'a pas été reconnu; il n'a pas demandé à au plus haut point votre intérêt.—La validité d'une naître; il a les maios pleines de preuves conreconnaissance d'enfant naturel ne doit pas être aptre les auteurs de ses jours; sa cause est bien préciée sous l'influence des principes concernant les digne d'intérêt; il ne peut être puni d'une conventions ordinaires; elle doit être appréciée sous faute qui n'est pas la sienne; cependant la loi l'influence des principes qui régissent les actes de l'état civil. En effet, qu'est-ce qu'une reconnaislui refuse toute action en recherche de la pasance d'enfant? c'est évidemment un acte de l'état ternité. Un père, au contraire, a reconuu li- civil: il doit donc être régi par les règles qui régisbrement, spontanément, dans la plus solen- sent l'état des personnes. Or, l'une de ces règles, nelle des formes, l'enfant auquel il a donué c'est l'irrévocabilité.-Lorsqu'un père reconnaît un le jour. Il demande à prouver contre cet enfant, enfant, il est juge de sa reconnaissance. S'il l'a fait, qui n'a pas sollicité la reconnaissance, qu'elle c'est qu'il le veut bien, c'est qu'il la croit fondée; est mensongère, et, pour se recommander à pourra-t-il venir plus tard, sous prétexte que cette la confiance de la justice, il débute en décia- reconnaissance n'est pas l'expression de la vérité, en rant qu'il a fait un mensonge. Et il sera admis demander la révocation, c'est ce que nous ne croyons à faire cette preuve à l'aide du témoignage des pas. On invoque, il est vrai, l'art. 339, Cod. Nap., mais cet article n'est véritablement pas applicable à hommes, c'est-à-dire de la plus fragile, de la plus suspecte de toutes les preuves! Ce n'est l'espèce.-Lorsque la loi a dit que toute reconnaissance d'enfant naturel pouvait être contestée par pas nous qui la qualitions ainsi, c'est la loi, tous les intéressés, elle n'a certainement eu en vue puisqu'elle la répudie dans les causes excé- que les tiers et non l'auteur même de la reconnaisdant 150 fr. Et ici il s'agit, pour l'enfant, d'un sence. L'auteur de la reconnaissance était libre de intérêt inappréciable, de son état dans le ne pas la faire; il l'a faite, il ne doit plus pouvoir monde, de son avenir, et l'on accorderait ce l'attaquer. Il faudrait une disposition spéciale de la genre de preuve! Non, cela n'est pas possible. loi pour autoriser le père à contester ou à révoquer Jamais l'enfant n'aura par-devers lui la preuve sa reconnaissance: cette disposition n'existe pas; d'une paternité toujours secrète et mystérien, dès lors, ne l'autorise à déchirer lui-même ce rieuse. Et il serait ainsi, lui mineur, lui déshé rité, à qui la justice doit toute sa protection, abandonné comme un jouet aux caprices du père qui l'a reconnu. Non, les deux conditions ne sont plus égales; non, cela n'est pas possible, et voilà pourquoi la loi rejette ce nouveau genre de désaveu. >>

qu'il a reconnu et déclaré. – Sans doute, s'il y avait violence ou dol, l'auteur de la reconnaissance dans la cause, il n'y a rien de pareil. Il n'y a donc pourrait toujours demander à en être relevé; mais,

pas lieu à se faire relever d'un consentement librement donné. — Ici se présente le grand moyen donné par la jurisprudence, l'ordre public. Ce qui domine, dit votre dernier arrêt, dans une cause de Pour l'intimé, Me Blot-Lequesne, après cette nature, c'est l'intérêt de la vérité. Cet intérêt une exposition de divers faits se rattachant à est d'ordre public. Si une reconnaissance d'enfant la cause, soutient qu'en droit, la question est n'est pas conforme à la vérité, elle rompt des raptout entière dans les art. 6, 339 et 1108, Cod. ports de famille pour en créer de faux, elle crée des Nap.; que l'art. 339 ouvre à toute personne incapacités qui sont contraires à la vérité du fait, Ces objections sont graves, mais avec le système de et, par conséquent, au père le droit de contester la reconnaissance; que l'art. 1108 exige recherche de la paternité? Il existe à ce principe l'arrêt, que devient le grand principe qui interdit la que toute convention ait une cause, une matrois exceptions: mais les juges peuvent-ils en élartière qui lui serve de base; que l'art. 6 dé- gir le cercle? Nous ne le pensons pas. Or, c'est clare nulle toute obligation, toute convention une exception nouvelle que l'on tend à introduire et contraire à l'ordre public; que reconnaitre qui n'existe pas. Que les familles fassent tomber une une fausse paternité, c'est troubler l'ordre des reconnaissance d'enfant naturel, cela se conçoit; successions, créer des incapacités de mariage, mais que l'auteur de la reconnaissance cherche à inventer une puissance paternelle sans réa-la faire tomber, cela n'est pas possible. - Encore lité; que, dès lors, toute reconnaissance qui conduit de pareils résultats est essentielle ment révocable.

M. Moreau, avocat général, a donné ses conclusions dans les termes suivants :

« Il ne s'agit plus, dans la cause, de savoir si la reconnaissance d'un enfant naturel faite dans un acte authentique doit être réputée nulle lorsque l'acte lui-même est nul ou devenu sans objet: le jugement attaqué constate que cette reconnaissance constitue un acte distinct qui se soutient par lui-mème, et cette disposition du jugement n'est attaquée par aucun appel. Il ne s'agit pas non plus de savoir si la reconnaissance de l'enfant naturel est, dans l'espèce, le résultat de la violence ou du dol: il n'a été allégué ni violence, ni dol. Il s'agit de savoir si la reconnaissance peut être attaquée par celui-là même qui l'a faite, par cela seni qu'elle ne reposerait pas sur un fait vrai. C'est là, messieurs, une question

une fois, il existe là le grand principe de la recher-
che de la paternité, et à ce principe on ne doit pas
créer des exceptions que la loi n'a pas créées...-
(Ici, M. l'avocat général examine et discute les motifs
qui ont fait décréter ce principe par le législateur.
Examinant ensuite la position particulière de l'in-
timé dans la cause, il démontre que les faits dont
le tribunal a autorisé la preuve ne sont pas même
admissibles et pertinents.) Ils ne seraient pas ad-
mis en matière de désaveu, dit ce magistrat, à plus
forte raison doit-il en être ainsi lorsqu'il s'agit
d'une reconnaissance librement faite. Ce n'est pas
l'intérêt de la vérité qui doit dominer la matière,
c'est la crainte de voir le juge dépasser les prévi-
sions de la loi et être poussé à faire ce qu'il ne
doit pas faire. Une analogie des plus concluan-
tes se tire de l'art. 344, Cod. Nap. Cet article per-
met le désaveu à l'époux dans certains cas pré-
vus, et notamment lorsque l'enfant a été conçu avant
le mariage; mais cependant il déclare que si le père

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Considérant qu'il est constant, en fait, que la reconnaissance de la fille Schwilden par

Halet, dans l'acte du 8 fév. 1854, a été volontaire; que le consentement d'Halet n'a été vifraude; qu'il n'articule encore aucun fait pour cié ni par la violence, ni par le dol, ni par la articulés par Halet, lors même qu'ils seraient l'établir; Considérant, enfin, que les faits prouvés, n'établiraient pas l'impossibilité phySchwilden, et qu'ainsi ils ne démontreraient sique pour lui d'avoir été le père de la fille pas que sa reconnaissance est mensongère; faits, déboute Halet de sa demande, etc. -Infirme, et sans s'arrêter à l'articulation des

a assisté à la rédaction de l'acte de naissance, il ne aux attaques et aux articulations de son ausera plus recevable à intenter un désaveu. Or, l'auteur dans son intérêt personnel, et surtout teur d'une reconnaissance d'enfant naturel n'est-il pas lorsqu'elles ne peuvent être soutenues que dans un cas moins favorable encore, lui qui a volon- par les résultats toujours si dangereux de la tairement et librement reconnu un enfant que rien preuve testimoniale; qu'admettre cette action ne l'obligeait à reconnaître ? Evidemment, il n'y a de la part du père naturel en révocation de sa donc pas lieu de lui accorder une faculté qui est rereconnaissance, action qui ne serait pas même fusée à l'époux....... » —— Par ces considérations, M. l'asoumise, comme celle en désaveu de la part vocat général conclut à l'infirmation du jugement. du mari, à des conditions et à des délais porARRET (après délib. en ch. du cons.). LA COURtant déchéance, ce serait porter une grave atConsidérant que le voile qui couvre la conception de l'enfant et qui rend teinte au principe de la stabilité de l'état cisi incertain le fait de la paternité a déterminé vil des citoyens et faire renaître les débats le législateur à établir des présomptions ayant ont voulu éteindre; scandaleux que les auteurs du Code Napoléon la force de la vérité;-Que c'est ainsi qu'il a prescrit que l'enfant conçu pendant le maTage aurait pour père ie mari, et que la paternité de l'enfant né hors mariage appartiendra à celui qui l'aurait reconnu volontairement par acte authentique;-Considérant que sans doute le législateur, pour les cas qu'il a précisés, a admis le mari à attaquer la paternité que lui attribue la loi, en le soumettant encore à des conditions et à des délais déterminés;-Mais que le mème droit n'est pas ou vert au père naturel contre sa reconnaissance; - Considérant qu'il devait en être ainsi, puis que le père naturel, maître de faire ou de ne pas faire sa reconnaissance, qui doit donner un état à l'enfant, est le libre et le souverain appréciateur des circonstances propres à le convaincre de sa paternité;-Considérant que s'il est vrai que, principalement en cette matière, la justice doit rechercher la vérité el admettre tous les moyens de la faire paraître, elle doit cependant maintenir les principes qui donnent aux actes publics la force et l'autorité que la loi leur attribue ;-Que l'acte solennel de reconnaissance de l'enfant né hors mariage est surtout placé sous cette protection; Qu'il suffit, pour la manifestation de la vérité, que cet acte reste soumis aux principes qui gouvernent les contrats en général, et qui permettraient de l'annuler, s'il était prouvé que la reconnaissance a été arrachée par la violence ou surprise par le dol et la fraude; Le 19 janv. 1852, la fille Bourriquet, do-Que l'art. 339, Cod. Nap., au titre de la Re-mestique chez un sieur Lemesle père, est acconnaissance des enfans nés hors mariage, a couchée d'un enfant du sexe masculin. Ce encore ouvert, spécialement dans cette mamême jour, Lemesle fils présenta cet enfant à tière, une voie nouvelle pour découvrir le l'officier de l'état civil de sa commune, et remensonge, en donnant aux tiers intéresses connut en être le père. Il paraît que le maire le droit de contester toute reconnaissance; ne dressa l'acte que quelques jours après la - Mais qu'il importe de ne pas livrer cet acte présentation de l'enfant au moment même

(1) Il en serait autrement, sans doute, d'une reconnaissance faite devant notaire, parce que le défaut de signature des actes notariés emporte nullité, aux termes des art. 14 et 68 de la loi du 14 vent. an 14; tandis qu'aucune disposition n'attache cette peice au défaut de signature des actes de l'état civil. Cependant M. Rieff, dans son Comm. des actes de l'état civil, n. 40, s'exprime en ces termes : « C'est a signature de l'oflicier public, celle des parties comparantes et des témoins qui donnent la vie et Li force a l'acte; c'est elle seule, en effet, qui établit

|

Du 22 janv. 1855. - Cour imp. de Paris.-
Concl.,
Aud. solenn.- Prés., M. Delahaye.
M. Moreau, av. gén.-Pl., MM. Auvillain et
Blot-Lequesne.

ENFANT NATUREL.

RECONNAISSANCE.

SIGNATURE.

La reconnaissance d'un enfant naturel, dans son acte de naissance, est valable, bien que le père, qui savait signer, n'ait pas apposé sa signature, et cela encore même que l'acte porte qu'il a signé, si d'ailleurs le défaut de signature provient simplement d'une omission involontaire, et non d'un refus du père. (Cod. Nap., 39, 57 et 334.) (1)

(Lemesle-C. Bourriquet.)

:

que les parties dénommées dans l'acte ont réellement assisté à sa rédaction, et trouvé juste et exact ce que l'acte énonce. »-Mais, toute vraie que soit cette observation, nous ne pensons pas qu'il ait été dans la pensée de l'auteur de voir une cause de nulIté dans l'inobservation de la formalité de la signature, quand du reste, comme ici, ce défaut de signature n'est que l'effet d'un simple oubli et non d'un refus ou d'une volonté réfléchie. V. en ce sens MM. Coin-Delisle sur l'art. 39, Cod. Nap., n. 2, et Demolombe, t. 4, n. 285.

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