Page images
PDF
EPUB

le besoin de remplir une lacune dans l'instruction, a dirigé depuis long temps nos méditations sur la composition d'un véritable traité élémentair Nous l'avions déjà essayé dans notre patrie avec les faibles ressources d nos moyens et des établissemens littéraires de Venise. Habitant depu plusieurs années la capitale de la France, qu'on pourrait, sans exagera tion, appeler le rendez-vous obligé de tout ce qu'il y a de plus distingué e de plus remarquable sur le globe, nous avons pensé à tirer parti de cett circonstance favorable, qui nous rendait accessibles les immenses richesse littéraires renfermées dans les collections publiques et particulières, e qui nous mettait en rapport avec une foule de savans et de personnage distingués, pour améliorer et pour étendre le plan de notre Compendio a Geografia universale, en le modifiant de manière à le mettre en harmoni avec les progrès que la science avait faits depuis sa première apparition et à le rendre digne de l'époque éclairée où nous vivons. Tels sont l'origine et le but de l'ouvrage que nous présentons au public. Pour le mettre à mėme de juger si nous avons envisagé la science sous son véritable poin de vue, et si notre méthode d'instruction peut être féconde en heureux résultats, nous allons exposer le plan que nous avons suivi dans sa rédaction

PLAN de l'ABRÉGÉ. Tout le traité est divisé en deux parties distinctes qu'à l'exemple d'un célèbre géographe nous nommons PARTIE DES PRINCIPES GÉNÉRAUX et PARTIE DESCRIPTIVE. Dans la première, qui est de beaucoup la moins étendue, nous exposons en douze chapitres toutes les notions les plus indispensables que la géographie emprunte à l'astronomie aux mathématiques, à la géologie, à la physique, à l'histoire naturelle, à l'anthropologie, à la statistique et à l'économie politique. Un de ces chapitres, et le plus long, est entièrement consacré aux définitions, qui, en géographie comme dans toutes les autres sciences, doivent toujours précéder l'exposition des théorèmes. La partie descriptive est partagée en cinq grandes sections correspondant aux cinq parties du monde. Chaque section se subdivise en géographie générale et en géographie particulière. La géographie générale offre dans deux chapitres distincts pour chaque partie du monde: 1° la géographie physique; 2° la geographic politique. Voici les articles qui composent la géographie physique : position astronomique, dimensions, confins, mers et golfes, detroits, presqu'iles, fleuves, lacs, iles, montagnes, plateaux, volcans, vallées et plaines, déserts, steps et landes, climats, minéraux, végétaux, animaux. Les articles qui forment la géographie politique sont intitulés: superficie, population, ethnographie, religion, gouvernement, industrie, commerce, état social, divisions politiques et géographiques.

La géographie particulière comprend autant de chapitres qu'il y a de grands états ou de grandes régions géographiques à decrire. La description particulière des principaux états de l'Europe se compose des articles suivans position astronomique, dimensions, confins, pays, montagnes, îles,

avec l'état actuel de la science. On peut s'étonner encore que la Société de géographie, qui décerne chaque année plusieurs prix pour des ouvrages relatifs aux objets principaux de ses études, n'ait jamais mis au concours la composition d'un semblable traité. Il est pénible d'avouer que, jusqu'aux temps actuels, l'enseignement de la géographie dans nos écoles ne s'est fait qu'au moyen de traductions d'ouvrages anglais et allemands, dont notre indigence a fait exagérer le mérite, et qui, grâce à elle, ont obtenu depuis trente ans de nombreuses reim pressions,»

lars, fraves, canaux et quelquefois chemins en fer, ethnographie, religun, gouvernement, places fortes et ports militaires, industrie, commerce, dann administrative, topographie, possessions. Nous verrons plus bas queues sont les modifications que nous avons éte obligé de faire subir a e plan dans la description des états des autres parties du monde. Un tableau statistique complète la description de chaque partie du monde, en offrant dans ses colonnes le titre de chaque état, sa superficie, sa population absolue et relative, son revenu, sa dette et ses forces.

BORNES de la GÉOGRAPHIE. Mais avant de justifier le plan que nous venons d'exposer, qu'il nous soit permis de faire quelques observations preliminaires que nous croyons indispensables dans l'intérêt de la science, et pour donner à nos lecteurs le moyen de la considérer sous sou veritable point de vue. Nous commencerons d'abord par examiner quelles doivent être les bornes de la géographie.

La confusion extrême, dit un statisticien très distingué, qu'on voit regner dans les systèmes des géographes, tant dans les definitions fondainentales que dans les attributions et la circonscription des diverses branches de la geographie, dans le corps entier de la méthode, c'est-à-dire dans l'art de classer et d'offrir les faits intéressans que la science embrasse, me paraît provenir, chez quelques-uns, de l'isolement plus ou ins complet dans lequel ils ont envisagé la geographie, ou du faux point de vue sous lequel ils ont examiné quelques connaissances qui l'avoisent; chez d'autres, des études speciales les ont fait par trop abonder dans certaines parties de cette science, en même temps qu'ils en négligraient d'autres fort importantes; beaucoup encore ayant mal saisi l'ensemble de la géographie et de ses divisions principales ont garde le silence sur plusieurs de ses divisions, les ont faussement designées, confondues on placées entre elles dans des rapports inexacts; enfin quelques ecmains ont compris dans la géographie une foule de choses qui en sont tous-a-fait distinctes. C'est ainsi que pour ne s'être point attachés à classer d'abord cette science dans l'ordre qu'elle doit occuper dans le tableau des connaissances humaines, pour ne point s'être occupés à définir et à tracer les limites de celles qui en approchent de plus près, la plupart des autears allemands enveloppent la geographie dans la statistique, tandis que presque tous les Français comprennent celle-ci dans les nombreux ramacx de la première; que l'économie, l'arithmétique politiques, ont éte confondues avec la statistique; la cosmographie dans la geographie et meme dans la topographie; la géologie dans la géographie physique; qu'on a place tantôt dans la geographie, tantôt dans la statistique, l'hydrographe et la géognosie, la chorographie et la topographie; et que resserrant souvent cette dernière dans la sphère étymologique de sa denomination, un en a fait d'autres fois la description universelle d'un pays étendu. » Ainsi s'exprimait, en 1819, M. le baron de Férussac, dans son memoire sur la necessité de fixer et d'adopter un corps de doctrine pour la géographie et la statistique, en appelant l'attention des savans et des personnes studieuses sur ces assemblages informes de plusieurs sciences lancés dans le public sous les titres les plus imposans dont la géographie ait encore été parée. Nous pourrions offrir le résultat de nos méditations sur ce sujet et notre experience à l'appui des justes plaintes de ce savant. Mais nous nous contenterons seulement d'ajouter quelques réflexions relatives à la statistique,

a.

parce que c'est à cette dernière science que des mains inhabiles autant que peu exercées, ont de nos jours fait le plus d'emprunts en écrivant sur la géographie. Elles nous donneront aussi l'occasion de signaler quelques graves erreurs adoptées généralement comme des vérités presque évidentes, et cela sur la célébrité dont jouissent à juste titre, mais pour des spécialités toutes differentes, soit les ouvrages où ces mêmes erreurs se trouvent consignées, soit les auteurs qui les ont émises. D'ailleurs, il est nécessaire que le lecteur sache une fois pour toutes à quoi s'en tenir sur une science, à laquelle la géographie doit forcément avoir recours dans bien des circonstances, et qui est devenue dernièrement le but d'attaques aussi injustes que violentes de la part de quelques savans, auxquels on doit rendre cette justice qu'ils sont complétement étrangers à l'objet de leurs déclamations. SÉPARATION entre la GÉOGRAPHIE et la STATISTIQUE. La geographic étant la description de la Terre en général et de ses divisions politiques (états) en particulier, on voit que cette science pour être bien traitée a besoin de recourir à plusieurs autres. Mais ce serait en faire une véritable encyclopédie, et la rendre pour ainsi dire inaccessible au plus grand nombre des lecteurs, que de vouloir y comprendre la cosmogonie Turanographie, l'astronomie, la géologie, l'histoire naturelle dans ses différentes branches, la physique, la météorologie, l'anthropologie, la statistique, l'économic politique, le dessin et la cartographie, l'histoire ancienne, celle du moyen-age et l'histoire moderne, l'archéologie, lethnographie, et une foule d'autres sciences et arts qu'il serait fastidieux de nommer, et avec lesquels la géographie a des points de contact plus ou moins nombreux. Les principaux objets de quelques-unes de ces sciences seulement doivent y être indiqués, et un moins grand nombre de quelques autres, mais aucun ne doit y être décrit et traité en détail, la connais- * sance en étant presque toujours présupposée. La surface, la population absolue et la population relative, les revenus et la dette, les forces de terre et de mer étant les principaux élémens de la force et des ressources d'un état, entrent également dans la sphère de la géographie et de la statistique, mais avec cette difference que le géographe se contente des résultats généraux, et que le statisticien descend dans les détails de chacun de ces élé- » mens. Ainsi, par exemple, le premier se contente de savoir que la surface de la France est de 154,000 milles carrés; que sa population absolue est de 32,000,000 d'habitans; que sa population relative est de 208 habitans par mille carré; que son revenu est de 987,600,000 francs; que sa dette est de 3,900,000,000 francs; que son armée est de 279,957 hommes, etc. Le second au contraire veut savoir combien des 154,000 milles carrés sont destinés à la culture des céréales ou aux pâturages, combien sont occupés par des vignobles, des potagers, des jardins et des vergers, par des cultures particulières, ou bien par des bois, par des terres incultes, par des routes, rivières, montagnes et rochers; combien de ces milles carrés sont couverts par des propriétés bátics, par des étangs, par des marais, par des mines et carrières, etc., etc. Le statisticien ne se borne pas à savoir que la France a 32,000,000 d'habitans, mais il veut connaître comment cette population est partagée sous les rapports ethnographique eɩ religieux, pour juger par-là de la force ou de la faiblesse de l'état, selon le plus ou le moins d'homogénéité entre les élémens dont la population se compose; car, en général, il est sûr qu'un état qui ne serait composé que d'habitans parlant tous la

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

mene langue et professant tous la même religion offrirait plus d'elemens davon, et par conséquent de force et de durée, que celui qui serait compose de l'agglomeration de plusieurs nations parlant des idiomes et professant des religions diverses. Le statisticien veut en outre savoir conbien sur ces 32 millions d'habitans il y en a du sexe masculin, du sexe feminin; combien de célibataires, de gens maries et de veufs, et comment les uns et les autres se divisent pour les dges; combien sont proprietaires, donnes au commerce, aux manufactures ou à la navigation; con.bien appartiennent à l'état ecclésiastique ou à l'état militaire; combien sont empines dans les differentes administrations du royaume ; combien se livrent aar arts libéraux; quel est le nombre des écoliers, des pauvres, des prisonniers, des criminels; combien il y a d'enfans illegitimes; dans quel rapport sont les naissances aux décès, les naissances aux mariages, et une foule dactres choses qui sont du domaine exclusif de la statistique. Si le geographe se contente de connaître la somme generale de la recette et de la dette, le statisticien entre dans tous les details du budget et vent savoir combien sur les 987,600,000 francs ont ete le produit de la contribution facere, de la contribution personnelle et mobilière, etc.; combien en ont Journi ['enregistrement et les domaines ; combien les droits à l'importation et ceux sur les sels; combien les droits sur les boissons, sur les tabacs, et quelle a été la recette des postes et celle de la loterie, etc.; de plus, que est la quote part de chaque departement. En decomposant la dette dans ses différentes parties, il veut savoir à combien monte la dette Sader, et à combien la dette flottante; il distingue dans la première les rentes à 3 pour cent de celles à 4 et 1/2 pour cent et a 5 pour cent ; il sépare dans la seconde les interets aux receveurs généraux de ceux des bas royaur, des escomptes à la banque, des interéts aux communes, etc.; i veut connaître la somme destinée chaque année à l'amortissement de la dete fondée, le montant de la dette viagère, et celui des cautionnemens, Line lui suffit pas de savoir que l'armee est de 279,957 hommes, mais il veut connaître la force des différentes armes qui la composent, le pod de pat, le pied de guerre et le nombre effectif sous les drapeaux, et en outre les départemens qui fournissent particulièrement les crues de cerlaines armes, à cause de la différence que presente la taille commune de Thomme dans les différentes regions du royaume.

REPROCHES faits à la GÉOGRAPHIE et à la STATISTIQUE. Si les géographes de profession, si même ceux qui ne le sont pas s'étaient tenus dans ces bornes, et n'eussent admis dans leurs traites de géographie que des données statistiques puisées à de bonnes sources, en les signalant au lecteur et en indiquant l'année à laquelle elles se referent, ils n'auraient pas tout embrouille, et ils n'auraient pas attire à la geographie et surtout a la statistique d'injustes reproches, Le peu d'accord entre les diverses evalations de ces prétendus geographes et statisticiens ne doit pas eire attribue à l'imperfection de ces deux sciences, mais au peu de soin de quelques-uns, a l'ignorance, à la présomption ou à la mauvaise foi d'un grand wabre d'autres, qui sans avoir fait d'études préparatoires pretendent le presser l'une et l'autre. Si dans la rédaction d'une geographie ou d'un statique générale chaque auteur voulait indiquer loyalement et la sourc à laquelle il a puisé ses chiffres, et les modific. tions qu'il leur a fait subir, sil précisait en même temps l'époque à laquelle ils doivent se rapporter,

on verrait disparaître presque toutes ces pretendues contradictions, mu ne sont que la conséquence necessaire et mevitabit des élemens variabes sur lesquels on opere.

Dira-t-on que la statistique donne des resultats inexacts ou contradirtoires, parce que trois auteurs écrivant en 1827, evalueraient le popuition de la France, le premier a 30.750,000 ámes d'apres it recensemen fait à la fin de 1821, en y comprenant larmee et la botte, ie second a 30,465,291 pour la même année en faisant abstraction de l'armer et de iz flotte, le troisieme a 31,845,426, d'apres le recensement qu. emt tien at commencement de 1827. Osera-t-on soutenir que la statistique n'abonti en definitive qu'à des groupes de chiffres illusoires, et indignes de la confiance des gens sérieux, parce que, en dépit de tous les cairuis et de trus les raisonnemens auxquels nous nous sommes livres, appuyés sur le recensement de l'année 1819, pour prouver que la population de Portugal continental s'élevait en 1822 a 3,173,000 ámes, deux savans estimabies. mais étrangers à cette science, reproduisant les anciennes evaluations ap proximatives basées sur le nombre de feux en 1798, ia portaient contre toute probabilité en 1897, l'un a 2,650,000, l'autre a 3.683.400 ames? Est-ce à l'imperfection de la statistique qu'il faut s'en prendre si des hitterateurs, si des savans estimables, peu familiarises avec les difficultes sans nombre qu'elle offre méme à ses adeptes, commettent, lorsqu'ils se lancent dans une carrière si eloignée de jeurs etudes speciales, les méprises les plus ridicules? L'un par exemple attribue a la seule ville de Boston la totalité des importations et des exportations de toute la confédération Anglo-Américaine; l'autre, confondant le mouvement du port de Liverpool avec sa marine marchande, fait monter cette dernière a 1.180.914 tonneaux! nombre presque neuf fois plus grand que le tonnage de ce port, et qui dépasse la moitié de celui de toute la marine marchande du RoyaumeUni. Celui-ci prétend prouver la superiorite morale des Badois sur les Wurtembergeois en prenant pour point de depart dans ses calculs des documens évidemment erronés, puisqu'ils lui donnent pour résultat definitif un seul accusé sur 1,600 habitans dans le grand-duche de Bade, tandis que, selon ces memes documens, le royaume de Wurtemberg n'en compterait pas moins d'un sur 169! Celui-là, puisant a différentes sources la surface des principaux états du globe, range dans une même colonne, en prétendues milles carrés allemands de 15 au degré, des évaluations, dont les unes sont réellement exprimées dans cette mesure, mais dont plusieurs autres le sont en milles geographiques de 60 au degre et même en milles anglais de 69 12 au degré, ce qui fait que la Chine est representee dans prétendu tableau statistique comme avant une surface superieure à plus de la moitié de toute la partie terrestre du globe!

MOYENS DE LES ÉVITER. On doit avouer que si la statistique offre déjà un assez grand nombre d'ouvrages spéciaux d'un mérite réel, il n'en est pas de de la statistique générale, malgre les profondes connaissances et les travaux remarquables de MM. André, Hassel, Al. de Humboldt, Malchuset autres savans célebres de l'Allemagne, de Gioja, Graberg de Hemsö et de quelques autres en Italie et ailleurs. Les travaux que nous avons eu a faire en ce genre nous ont prouvé que la statistique générale est encore dans l'enfance, pour ne pas dire au berceau, et que l'auteur consciencieux qui en sait le plus est justement celui qui remplit le moins de colonnes,

« PreviousContinue »