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argent, et n'ayez point deux habits. En quelque maison que vous soyez entrés, demeurez-y et n'en sortez point. Lorsqu'il se trouvera des personnes qui ne voudront pas vous recevoir, sortant de leur ville, secouez même la poussière de vos pieds, afin que ce soit un témoignage contre eux. Étant donc partis, ils allaient de village en village, annonçant l'Évangile, et guérissant partout les malades.

C'EST une chose bien admirable que la manière dont le christianisme s'est établi, quand on songe à la petitesse de ses commencemens, à la faiblesse des moyens employés, au caractère des premiers ouvriers, et qu'on voit néanmoins cette religion s'être répandue dans tout l'univers et chez les peuples les plus éclairés. Il faut être frappé d'un étrange aveuglement pour ne pas rendre hommage à la main puissante par laquelle a été élevée cette œuvre plus qu'humaine. Un homme paraît dans la Judée, et, bien qu'il soit issu de la race des rois, une longue suite d'années a réduit sa famille à un état obscur. A l'âge de trente ans il sort de sa retraite; il se produit en public. Des choses merveilleuses y signalent son entrée; il rend la vue aux aveugles, la voix aux muets; il fait marcher les boiteux; il annonce qu'il est envoyé par son père pour sauver les pécheurs. Partout il fait du bien, non par son crédit, non par ses richesses, mais par le seul pouvoir de la parole, et rien n'est plus pur que la doctrine qu'il prêche. Tel est Jésus qui vient pour changer le monde.

Mais quels auxiliaires s'adjoint-il pour amener à une heureuse fin une si grande entreprise ? Des

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hommes sans nom sans lettres sans autorité parmi le peuple, sans pouvoir; quelques pêcheurs de profession, ou d'autres gens d'une condition aussi peu élevée.

Il les envoie et les fait participer à la puissance qu'il a manifestée lui-même. En annonçant la doctrine de leur maître, ils commandent aux mauvais esprits; ils guérissent les malades; ils s'entourent de merveilles. Ne voit-on pas en cela l'accomplissement de ce que dit l'Apôtre ? « Que Dieu a choisi ceux qui étaient sans science dans le monde pour confondre les sages, et qu'il s'est servi des faibles pour confondre les puissans» (1).

Et comment encore Jésus envoie-t-il ses disciples, si dénués d'ailleurs des choses propres à séduire les hommes ?... Il les envoie sans aucune ressource humaine. «Ne portez rien dans le chemin, dit-il, ni bâton, ni sac, ni argent. » Ils n'ont rien à promettre, rien à donner; ils n'ont absolument aucun des moyens par lesquels le peuple se laisse gagner. La vérité seule et une religion sainte et pure, voilà tout ce qu'ils ont à offrir. Cependant on les écoute ; ils persuadent. Dieu bénit l'œuvre; elle succède. A quoi attribuer cette réussite, sinon à la puissance de Dieu qui voulait l'établissement de la religion, et qui opérait par les mains de ces hommes, qui d'ailleurs paraissaient si peu recommandables, des guérisons miraculeuses et d'autres choses merveilleuses? Plus l'instrument était faible, semble-t-il, plus alors le pouvoir divin éclatait.

(1) I. ép. aux Corinth., I. 27, 28.

Quelle différence entre la manière dont le christianisme s'est établi, et celle par laquelle quelques autres religions se sont répandues. Leurs apôtres employèrent la force des armes pour y contraindre les peuples, et plus encore la séduction des passions, en offrant aux nouveaux prosélytes tout ce qui pouvait flatter leurs sens.

Je remarquerai dans le même évangile un trait qui caractérise bien la religion chrétienne comme religion de douceur, de paix et de tolérance. « Lorsqu'il se trouvera des personnes qui ne voudront point vous recevoir, y est-il dit, sortant de la ville', secouez même la poussière de vos pieds, afin que ce soit un témoignage contre eux, c'est-à-dire, laissez à Dieu à les juger et à les punir. Le christianisme n'est donc point une religion de contrainte. La persuasion et l'exemple sont les moyens que Dieu a mis dans la main de ceux qu'il a chargés de l'annoncer. Sa grâce divine fait le reste. Cette doctrine est conforme à celle de saint Paul. » J'ai planté, dit-il, Apollo (1) a arrosé; mais c'est Dieu qui donne l'accroissement (2), c'est-à-dire, nous autres ministres, nous annonçons la parole évangélique; mais c'est Dieu qui rend les cœurs dociles. Qu'avons-nous donc à faire, soit que nous soyons ministres, soit que nous ne soyons que fidèles ? Ce que nous avons à faire peut se réduire à ce peu de mots: Soyons religieux; remplissons nos devoirs chacun dans notre état. Si les autres ne sont point

(1) Apollo était un Juif converti d'Alexandrie, qui prêchait Jésus

Christ avec beaucoup de zèle.
(2) I. ép. aux Corinth., III. 6.

religieux, plaignons-les; prions qu'ils le deviennent, et laissons Dieu faire le reste; car c'est lui dont il est dit qu'il atteint le but avec force, et qu'il dispose tout avec douceur (1).

POUR LE VEndredi de LA PENTECOTE.

ÉPITRE.

Joel, chap. II, v. 23.

Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Fille de Sion,

tressaillez

d'allégresse, réjouissez-vous dans le Seigneur votre Dieu, parce qu'il vous a donné un maître de la justice, et qu'il fera descendre sur vous les premières et les dernières pluies, comme il a fait au commencement. Vos greniers seront remplis de blé, et vos pressoirs regorgeront de vin et d'huile. Je vous rendrai les années qui ont été mangées par la sauterelle, par le hanneton, par la nielle et par la chenille, qui ont été les instrumens de ma grande puissance que j'ai exercée contre vous. Vous vous nourrirez de tous ces biens, et vous en serez rassasiés, et vous louerez le nom du Seigneur votre Dieu qui a fait des œuvres merveilleuses parmi vous, et mon peuple ne tombera jamais plus dans la confusion. Vous comprendrez alors que c'est moi qui suis au milieu d'Israël, que c'est moi qui suis votre Seigneur et votre Dieu, et qu'il n'y en a point d'autre que moi, et mon peuple ne tombera jamais plus dans la confusion.

DANS le chapitre de Joël, duquel cette épître est tirée, le prophète annonce au peuple juif de grands maux à cause des péchés dont il s'est rendu coupable; il lui montre la guerre et la famine rava

(1) Sagesse, VIII. 1.

geant le pays qu'il habitait; sés campagnes devenues un désert affreux, l'ennemi s'approchant avec un bruit semblable à celui de chariots armés, ou d'un feu qui brûle de la paille sèche, la terre épouvantée, les cieux ébranlés, le soleil et la lune obscurcis, l'éclat des étoiles éclipsé, le Seigneur enfin criant à son peuple, au milieu de tous ces désastres, de se convertir, d'avoir recours à lui, parce qu'il est bon et compatissant, parce qu'il est patient et riche en miséricorde, parce qu'il oublie les fautes des hommes, quand ils se repentent du fond du cœur.

Les fléaux dont Dieu afflige les hommes; la guerre, les maladies contagieuses, l'inclémence des saisons, l'infertilité de la terre et la famine qui les suit, sont donc, dans les principes des saintes Écritures, une vengeance que Dieu tire des peuples qui l'oublient, et des punitions par lesquelles il cherche à les ramener à lui, à les rappeler à une conduite plus sage, à des sentimens plus religieux. Dieu est alors un juge qui menace, qui tonne, qui prononce ses arrêts et punit le crime; mais qui en même temps se montre plus encore père que juge, qui ne châtie ses enfans que parce que les châtimens sont nécessaires pour les faire rentrer en eux-mêmes, qui leur envoie des calamités, parce que, sans elles, ils persisteraient dans l'oubli de leur créateur, qui se laisse fléchir dès qu'on retourne à lui, qui rend à sa créature au centuple les biens dont il l'avait privée, y ajoutant encore des grâces nouvelles.

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