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pratique, car comment séparer les lettres des sciences et des arts auxquels elles sont si intimement unies? Mais l'omission dans le texte de l'article, du mot que l'amendement tend à y rétablir, donnerait à sa disposition une apparence d'hostilité contre les lettres qui la flétrirait à jaais dans l'opinion publique.

M. le comte de Villèle, ministre des finances, demande à être entendu. Non seulement l'addition demandée est inutile dans l'intérêt des lettres, mais elle pourrait devenir une occasion de fraude; tel est le double motif qui porte le gouvernement à la repousser. Que l'addition soit inutile, c'est en quelque sorte ce que tout le monde reconnaît, car on se demande de toutes parts comment la littérature pourrait ne pas se trouver comprise au nombre des sciences et des arts? Mais, dit-on, si les lettres se trouvent de droit dans la nomenclature de l'article, pourquoi ne pas les y comprendre d'une manière explicite? A cet égard le ministre observera d'abord qu'on ne peut soupçonner dans l'omission reprochée au projet, aucune intention hostile contre les lettres, auxquelles il accorde au contraire toute protection, puisqu'il fait jouir tous les ouvrages non périodiques, et jusqu'à la plus mince brochure, de la faveur de la taxe la moins élevée. Devait-on étendre explicitement cette disposition aux ouvrages périodiques consacrés à la littérature? C'est ce que le gouvernement n'eût pas manqué de faire s'il n'eût eu devant les yeux l'exemple des nombreux abus qu'entraîne chaque jour la publication de ces petits journaux qui, sous un titre purement littéraire, entretiennent leurs lecteurs de toute autre chose que de littérature, et trouvent ainsi moyen d'échapper aux dispositions de la loi. Que les questions soient traitées dans les journaux, rien de mieux assurément; mais que ceux qui se livrent à cette discussion se soumettent du moins aux conditions que la loi leur impose, et qu'ils ne refusent pas à la société les garanties qu'elle a droit d'exiger d'eux. C'est pour empêcher une fraude dont le danger frappe tous les yeux, que le ministre insiste pour le maintien du paragraphe dont, comme il l'a déjà prouvé, la rédacon actuelle n'a pour objet ni pour résultat d'exclure de la faveur accordée aux sciences et aux arts aucun ouvrage véritablement littéraire.

M. le comte de Ségur observe que l'abus dont on parle peut également se glisser et dans les ouvrages scientifiques, et dans les recueils littéraires. On peut parler politique à propos de religion ou de sciences, comme à propos de littérature. Pourquoi donc les lettres se trouveraientelles frappées sous ce prétexte d'une exclusion particulière? Peut-être, comme on l'a dit, leur omission dans la nomenclature, eût-elle eu en pratique peu d'inconvénients; mais une fois qu'il a été proposé de les y rétablir, n'est-il pas à craindre qu'on ne voie dans le refus de souscrire à ce vœu une intention hostile contre une des principales branches de la gloire nationale?

M. le vicomte de Châteaubriand, auteur de l'amendement, insiste pour son adoption. L'abus dont on a parlé existe en effet, et c'est un mal sans doute que l'existence de ces petits journaux, qui ne vivent le plus souvent que de scandale et de calomnie; mais pour des jeux de mots déjà usés, pour des allusions souvent inintelligibles, et dont le mépris public suffit à faire justice, faut-il donc compromettre les avantages réels

qu'offre à la société la publication des ouvrages vraiment littéraires?

M. le baron Pasquier demande si les recueils périodiques qui traitent en même temps des sciences, des arts et de la littérature, la Revue encyclopédique, par exemple, resteront, en cas d'adoption du paragraphe, dans la position oùles place la loi actuellement en vigueur?

M. le comte de Villèle, ministre des finances. déclare qu'il ne sera rien changé à ce qui s'observe maintenant à l'égard de ces recueils; le but unique du projet étant de prévenir la fraude, et non de soumettre à une taxe plus forte le transport d'ouvrages qui, jusqu'à présent, ont été considérés comme purement scientifiques.

(L'amendement est mis aux voix et rejeté.) La Chambre adopte ensuite provisoirement le paragraphe dernier de l'article.

La délibération s'établit sur l'article 9 ainsi conçu :

Article 9. Les imprimés ne pourront être expédiés que sous bandes, et ces bandes ne devront pas couvrir plus du tiers de la surface du paquet.

<< Ils ne devront contenir ni chiffres, ni aucune espèce d'écriture à la main, si ce n'est la date et la signature.

«

Toutefois, les avis imprimés de naissances, mariages ou décès, pourront être présentés à l'affranchissement sous forme de lettres, mais de manière qu'ils soient facilement vérifiés, et pourvu qu'ils ne contiennent point d'écriture à la

main.

« Il sera perçu sur chacun de ces avis un décime, quelle que soit la distance à parcourir dans l'étendue du royaume, et cinq centimes seulement lorsqu'ils seront destinés pour l'arrondissement du bureau où ils auront été présentés à l'affranchissement.

«La dimension de la feuille d'impression de ces avis ne pourra excéder onze décimètres carrés le port sera double pour les feuilles qui dépasseront cette dimension. »

M. le vicomte de Châteaubriand observe que souvent des auteurs demeurant en province font imprimer leurs ouvrages à Paris, et confient leurs épreuves à la poste. Jusqu'à ce jour, une tolérance, qu'il importe de voir se perpétuer, a permis le transport sous bande de ces épreuves avec les corrections typographiques faites par l'auteur; mais quelquefois des difficultés se sont élevées au sujet des corrections de style. Les prohibitions absolues du second paragraphe pourraient faire craindre que ces difficultés ne se renouvelassent, et ne s'étendîssent même aux corrections typographiques. Le noble pair désire qu'une explication, donnée par le ministre, lève, à cet égard, toute incertitude sur un point qui n'est pas sans importance pour ceux qu'il inté

resse.

M. le comte de Villèle, ministre des finances, estime que l'état actuel des choses, sous ce rapport, répond suffisamment aux craintes qui viennent d'ètre manifestées, car les prohibitions du projet de loi ne sont pas autres que celles qui existent aujourd'hui. La juste tolérance qui s'est établie sera donc maintenue par l'administration, qui se montrera toujours empressée de faire, dans l'intérêt des lettres et de ceux qui les cultivent, tout ce qui peut se concilier avec le bien du ser

vice. La véritable difficulté qui pouvait s'élever au sujet du transport des épreuves, était celle de savoir si l'administration pouvait ainsi se prêter à transporter des ouvrages qui n'avaient encore été soumis à aucune des conditions exigées par les lois sur la presse; mais cette difficulté n'ayant pas arrêté la direction générale des postes, on ne peut croire qu'elle puisse l'être par la nature des corrections qui se trouveraient sur les épreuves.

M. le vicomte de Châteaubriand déclare qu'il est satisfait des explications qui viennent d'être données.

Aucun autre pair ne demandant la parole sur l'article, il est mis aux voix et provisoirement adopté.

Il en est de même de l'article 10 qui ne donne lieu à aucune observation et qui se trouve ainsi rédigé :

« Art. 10. Les dispositions des lois et règlements qui sont contraires à la présente loi, sont abrogées à dater du 1er janvier 1828. »

La délibération sur les articles se trouvant ainsi terminée, M. le président annonce qu'il va être voté au scrutin sur l'ensemble du projet de loi.

Avant d'ouvrir le scutin il désigne, suivant l'usage, par la voie du sort, deux scrutateurs pour assister au dépouillement des votes.

Les scrutateurs désignés sont MM. le marquis d'Aramon et le marquis de Latour-Maubourg.

Il est procédé au scrutin dans la forme usitée pour le vote de lois.

Le résultat du dépouillement donne, sur un nombre total des 145 votants dont l'appel nominal constate la présence, 115 suffrages en faveur du projet de loi.

Son adoption est proclamée, au nom de la Chambre, par M. le président.

Aucun autre objet n'étant à l'ordre du jour, la Chambre se sépare sans ajournement fixe. La séance est levée.

CHAMBRE DES DÉPUTES.

PRÉSIDENCE DE M. RAVEZ.

Séance du samedi 10 mars 1827.

La séance est ouverte à une heure et demie. M. le garde des sceaux, M. le ministre de l'intérieur et M. Jacquinot-Pampelune, commissaire du roi, y assistent.

Un de MM. les secrétaires fait lecture du procèsverbal. La Chambre en adopte la rédaction.

M. le Président appelle à la tribune M. de Galard-Terraube, rapporteur de la commission des pétitions.

M. de Galard-Terraube. Messieurs, M. Tenaille Dulac, membre du conseil d'arrondissement de Clamecy (Nièvre), adresse à la Chambre un mémoire imprimé, en réfutation des moyens d'exécution du canal de Nivernais.

M. Tenaille-Dulac, Messieurs, qui déjà a fait entendre sa voix contre le projet de canalisation de l'Yonne, se propose particulièrement aujourd'hui, dit-il, d'éclairer le gouvernement sur le danger qui menace l'approvisionnement de Paris, en bois de chauffage, par l'exécution du canal

dit de Nivernais, dont la loi du 14 août 1822 a ordonné la confection.

Le cours de l'Yonne est, d'après l'auteur du mémoire, nécessaire toute l'année aux opérations d'un commerce uniquement et exclusivement occupé de cette partie de l'approvisionnement de cette capitale, et c'est cette rivière qui conduit, tous les ans, dans ses chantiers, aux prix les plus modiques, 3,400 trains, ou 125,000 cordes de bois.

Ce résultat si intéressant, et pour Paris et pour l'inépuisable magasin de bois des départemeats de l'Yonne et de la Nièvre, n'est atteint qu'au moyen d'une marche régulière, invariable, et de combinaisons fondées sur les saisons et les localités, de telle manière qu'en les compliquant de la navigation d'un canal, des ouvrages d'art qui en seraient la conséquence nécessaire, et de la dérivation d'une partie des eaux de l'Yonne, à peine suffisantes dans l'état actuel, on s'exposerait aux inconvénients les plus graves, à celui notamment de compromettre l'approvisionnement dont nous venons de parler.

Il paraît que de nombreuses réclamations s'étant fait entendre dans le pays, tant de la part des propriétaires que des Compagnies de commerce des bois, des assurances furent données au conseil d'arrondissement de Clamecy, au nom de l'administration des ponts et chaussés, que la rivière d'Yonne ne serait pas canalisée, qu'il serait seulement ouvert un canal latéral sur sa rive gauche, et de manière à ce que ce nouveau débouché ne nuisît en rien aux opérations ordinaires du com

merce.

D'autre part, le conseil général de la Nièvre et le conseil d'arrondissement de Clamecy ont inséré, dans leur note, la restriction expresse que le canal latéral n'aurait aucune communication avec la rivière, et ne lui emprunterait aucune partie de ses eaux.

Au lieu de cela, dit l'auteur du mémoire, il résulte du tracé du canal et des bornes posées, que le prétendu canal latéral rencontre le lit de l'Yonne, le traverse en plusieurs endroits, le barre par douze pertuis nouveaux, et se confond même avec cette rivière sur divers points, notamment sur une étendue d'environ 500 toises au-dessus du pertuis de Clamecy.

Les principales conclusions du mémoire tendent à ce qu'il soit ordonné une information de commodo et incommodo, et que le cours de l'Yonne reste entièrement libre.

Votre commission, Messieurs, à la vue de considérations si importantes, a été unanimement d'avis du renvoi à M. le ministre de l'intérieur; j'ai l'honneur de vous en faire la proposition.

M. Hyde de Neuville. J'ai l'honneur d'être député de l'arrondissement au nom duquel on réclame; je puis attester l'exactitude des faits énoncés dans la pétition. Tout le monde, dans cet arrondissement, désire un canal; mais tout le monde y est effrayé de voir qu'on veuille canaliser l'Yonne et interrompre le flottage du bois nécessaire à l'approvisionnement de Paris. J'appuie en conséquence le renvoi proposé par la commission, et j'invite M. le ministre de l'intérieur à donner la plus grande attention à cette affaire. J'ai dans les mains une délibération par laquelle le conseil d'arrondissement de Clamecy demande qu'on s'occupe de cette affaire, qui est d'une très grande importance pour tout le département de la Nièvre et pour l'approvisionnement de la capitale.

M. Becquey, directeur général des ponts et chaussées. Messieurs, le canal de Nivernais, ordonné depuis plusieurs années, a dû être tracé de telle sorte qu'il fût possible de le rendre latéral sur une grande partie de son tracé mais il y a quelques portions qui ne peuvent êtres rendues latérales, et pour cela l'on canalise quelques parties de la rivière.

L'objection est celle-ci : c'est que dans les parties traversées par les bateaux, le flottage en trains ne pourra plus se faire. Messieurs, les travaux exécutés par les ingénieurs, et je puis dire par les ingénieurs les plus expérimentés, nous font voir que, sans aucune difficulté, les bateaux circuleront du côté d'une rive et les trains de l'autre côté, comme cela se pratique en France sur presque toutes les rivières. Supposer que là où il y a train, il ne peut y avoir un bateau circulant, c'est supposer le contraire de ce qui se passe tous les jours sous vos yeux. Il faudrait donc qu'il n'y eût que l'espace nécessaire pour un seul train ou un seul bateau; mais les dimensions sont telles, que l'un et l'autre pourront circuler à la fois. Il est certain que si le flottage en trains pouvait être empêché par le canal, il serait plutôt un malheur qu'un bienfait pour le pays, et c'est pourtant un bienfait qu'on a voulu lui procurer. Les travaux sont dirigés de manière à faciliter le double service; les trains circuleront en même temps que les bateaux.

J'ai donné communication aux ingénieurs des mémoires qui ont été publiés sur cet objet, je puis dire que, sous ce rapport, leurs réponses offrent toute espèce de sécurité; mais comme il n'y a aucun inconvénient dans le renvoi proposé, je ne m'y oppose pas.

M. de Sainte-Marie. M. le directeur général a raison de dire que la navigation des bateaux peut avoir lieu concurremment avec les trains. Mais ce n'est pas des trains qu'il est question dans la pétition; il y est question du flottage à bûches perdues. Ce flottage est en usage au-dessus de Clamecy. Vous pouvez canaliser l'Yonne au-dessus de Clamecy; on ne s'y opposera pas; mais le canal entre dans l'Yonne au-dessus de Clamecy. Pour que le flottage puisse s'opérer, il faut une pente et un certain volume d'eau. Cette pente et ce volume d'eau n'existeraient plus si l'Yonne était canalisée. Ce qui inquiète les habitants, c'est que dans les endroits où le canal rentre dans le cours de la rivière, on ne voit pas que ce soit la nature du terrain qui en soit la cause; mais on soupçonne que les ingénieurs ont agi ainsi dans la crainte que le canal vint à manquer d'eau. Dans cette position, si vous nous laissez la rivière pour le flottage à bùches perdues, mais que vous la mettiez à sec, c'est comme si vous ne nous laissiez rien. La difficulté est là tout entière. Les ingénieurs disent qu'ils ne nous prendront que le superfiu, et nous craignons qu'ils ne nous prennent le nécessaire.

M. Becquey, directeur général des ponts et chaussées. Je n'avais parlé que du flottage des bois en trains, par ceque notre honorable collègue, qui a parlé le premier, ne s'était occupé que de cette sorte de flottage, et qu'au surplus c'est là-dessus que porte principalement le mémoire du pétitionnaire. Quant aux inquiétudes qui viennent d'être manifestées pour le flottage à bùches perdues, je dois déclarer que le canal est latéral partout où le flottage s'exécute à bûches perdues. Le canal ne se confondra avec la rivière que dans deux ou trois

endroits et cela est indispensable lorsque le canal s'établit sur une autre rive de l'Yonne, parce qu'il change deux ou trois fois de rive. Mais les précautions sont prises pour que cela ne fasse aucun obstacle au mouvement du flottage à bûches perdues. Quant à l'emprunt des eaux de la rivière, il ne peut avoir aucun inconvénient toutes les fois qu'on ne porte aucun dommage à la circulation des bûches perdues. Ce flottage ne se fait qu'à deux époques de l'année, pendant lesquelles l'eau est bien loin de manquer. Au surplus, le but du canal dont il s'agit est d'ouvrir une voie navigable à ce département, qui manquait de cette espèce de communication. Le canal portera les vins, les bois et tout ce que le pays voudra transporter, tout ce qu'il ne peut transporter en ce moment qu'avec des frais très considérables; et il faut bien qu'il puisse être approvisionné d'eau toutes les fois qu'il peut l'être sans nuire au flottage. Ce qui importe, c'est que le canal ne gêne en rien le flottage sur la rivière. D'ailleurs, la police du canal et celle de la rivière appartiendront à la même administration, et cette administration est bien éloignée de vouloir empêcher le flottage à bûches perdues, qui est, on effèt, le plus économique de tous les moyens de transport.

(Le renvoi proposé par la commission est ordonné.)

M.de Galard-Terraube, rapporteur, continue: Le sieur Bertrand, à Paris, demande la suppression de la rétribution universitaire, ou bien que les élèves des petits séminaires y soient également soumis.

Messieurs, le pétitionnaire, qui se dit artisan, exerçant une profession purement manuelle, s'est mépris en vous adressant sa réclamation, et en cherchant à établir une analogie là où il ne saurait en exister.

La rétribution universitaire, en effet, qui a pour objet de subvenir aux besoins de l'Université, a été établie, il y a environ vingt ans, en vertu d'un décret qui a aujourd'hui force de loi. L'Université la perçoit, parce qu'elle en a le doit légal; et, par respect pour l'initiative royale, votre commission ne pourrait vous faire à cet égard aucune proposition.

Quant aux petits séminaires, placés sous la direction immédiate des évêques diocésains, l'Université ne saurait avoir le doit de rien réclamer de leur part, et, en outre, Louis XVIII, par des motifs puisés dans sa sagesse, a rendu une ordonnance, en date du 5 octobre 1814, qui les exempte de toutes prestations de tous genres.

D'après ces diverses considérations, votre commission m'a charge, Messieurs, d'avoir l'honneur de vous proposer l'ordre du jour,

M. Méchin. La réclamation du pétitionnaire est parfaitement fondée. Cette réclamation se renouvelle souvent avec une justice égale. En effet, je conçois très bien que les séminaires diocésains, qui sont sous la juridiction exclusive des évêques, qui ont une destination spéciale, soient affranchis de la rétribution universitaire; mais les petits séminaires, qui se multiplient à l'infini, sont autant d'écoles qui ont pour but spécial d'enlever des élèves à l'Université. Ce ne sont pas des écoles ecclésiastiques proprement dites: c'est un moyen détourné de s'emparer d'une portion du domaine de l'instruction publique. Si l'on veut anéantir l'Université, il vaut mieux le faire par des moyens francs et ouverts, que de la miner sourdement comme on le fait. Il est évident que l'affranchis

sement de la rétribution universitaire favorise singulièrement les petits séminaires, au préjudice de l'Université. Je n'examine pas la question de savoir lesquelles de ces écoles sont les plus utiles; mais je dis que nous ne devons pas rester dans une situation équivoque. Cette faveur donnée aux petits séminaires pourrait faire croire que le corps universitaire à perdu de sa considération et de son influence auprès du gouvernement.

Je demande le renvoi à M. le ministre des affaires ecclésiastiques.

(L'ordre du jour ayant la priorité est mis aux voix et adopté.)

M. de Galard-Terraube, rapporteur, reprend:

Le sieur Spy, desservant de Massire (Marne), se plaint de la non exécution des lois et règlements qui ordonnent que les cabarets et cafés de village soient fermés les dimanches et fêtes, pendant l'office divin: il demande que les gardes-champêtres soient chargés de cette police.

La pétition du respectable desservant du département de la Marne à paru à votre commission le vœu de l'homme de bien, qui voyant de plus près que personne le désordre, mieux que personne, sent combien il est important de chercher à y apporter quelque remède.

Le principal objet de sa demande a été de tous temps ordonné par nos lois, et se trouve particulièrement consigné dans celle du 18 noverabre 1814. C'était un motif peut-être pour vous proposer l'ordre du jour; mais, sans s'arrêter en aucune manière aux moyens proposés, jugeant qu'il s'agissait ici d'un intérêt général, qui se rattache directement à la moralité, et par conséquent au bonheur de nos campagnes, votre commission s'est déterminée à vous soumettre le renvoi à M. le ministre de l'intérieur. J'ai l'honneur de vous le proposer.

M. Petou. Messieurs, l'exécution des lois, règlements et ordonnances de police sont dans les attributions spéciales de l'administration municipale. C'est à elle seule d'y veiller et de les faire observer.

M. le desservant de Massire pouvait s'adresser au maire de sa commune. Nul doute qu'il aurait obtenu satisfaction; mais il faut s'entendre. Si M. le desservant demande que les cafés et cabarets soient entièrement fermés les dimanches et fêtes, pendant l'office divin, et que nul individu ne puisse y être reçu, la Chambre sentira qu'une pareille réclamation ne peut être admise, car je ne pense pas qu'elle puisse désirer voir remettre en vigueur une certaine ordonnance de police qui a fait beaucoup de bruit en 1815, et donné lieu à des interprétations désagréables.

Dans mon opinion, j'estime que le maire peut charger le commissaire de police ou le garde-champétre de surveiller exactement les cafés et cabarets, notamment pendant l'office divin, dont la célébration ne doit pas être troublée; mais la surveillance de ces agents ne peut être rigoureuse à ce point, que la fermeture des lieux publics soit exigée, si les individus qui s'y trouvent ne se permettent aucuns actes répréhensibles ou capables de troubler la tranquillité publique; d'ailleurs le cafetier et le cabaretier ont le droit d'avoir leur porte ouverte à tout venant comme les autres particuliers.

Exiger plus, ce serait les placer dans un cas d'exception que la Charte n'admet pas.

Je ne m'oppose pas, au surplus, à ce que les gardes-champêtres, placés sous la dépendance

des maires, soient chargés de cette surveillance dans les villages où il n'y a pas de commissaire de police; mais il ne devront agir que d'après les ordres qui leur seront donnés par les maires. Du reste, je ne mets aucun empêchement au renvoi demandé.

(La Chambre prononce le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.)

M.dé Galard-Terraube, rapporteur, poursuit: Le sieur Thinon, notaire à Aigre, arrondissement de Ruffec, département de la Charente, demande que les fonctions de notaire soient incompatibles avec celles de suppléant de juge de paix.

Il n'existe ici, Messieurs, aucune incompatibilité légale, et peut-être pourrait-on dire que les notaires étant le plus souvent eux-mêmes des espèces de juges de paix que tout porte à la conciliation, leurs habitudes et même leurs intérêts, ils seraient sous ce rapport très propres à suppléer MM. les juges de paix: mais toutefois, comme on croit toujours voir quelque inconvénient à confier des fonctions judiciaires à des hommes dont on pourrait suspecter l'impartialité par cela seul qu'ils ont une clientèle, on ne nomme, depuis plusieurs années, aucun notaire aux places de suppléant de juge de paix, que dans les seuls cas fort rares où les localités en imposent l'absolue nécessité, parce qu'on ne saurait à qui confier ces fonctions temporaires, si le notaire en était exclu.

Les vœux du pétitionnaire se trouvent exaucés toutes les fois qu'ils peuvent l'être; j'ai l'honneur, Messieurs, au nom de votre commission, de vous proposer l'ordre du jour. (L'ordre du jour est adopté.)

Le sieur Callet, de Rouvroy, à Paris, qui a perdu des rentes sur l'Etat, fait connaître l'excès de misère auquel il est réduit, lui et sa famille,

Cette pétition, Messieurs, est conçue dans les termes les plus respectueux, et porte l'empreinte de l'honnêteté et du malheur. Ce sont deux époux sexagénaires accablés d'infirmités, et ayant de la peine à pourvoir à leurs besoins et à ceux d'un enfant de douze ans.

La pétition du sieur Callet ne conclut formellement à rien, et n'est, à proprement parler, qu'un exposé de sa situation douloureuse et un hommage de sa recpectueuse confiance.

C'est avec un sincère regret, Messieurs, que votre commission s'est vu condamnée à vous proposer l'ordre du jour.

Plusieurs voix: Il faut envoyer au ministre de l'intérieur qui peut distribuer des secours.

M. de Galard-Terraube, rapporteur. Je ne vois aucune objection à faire contre cette demande. Je pense que, si la commission était consultée, elle ne s'y opposerait pas.

(La Chambre ordonne le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.)

M.de Galard-Terraube, rapporteur, reprend: Le sieur Ragoulleau, ancien avocat, rentier, à Paris, sollicite des mesures législatives pour que les vendeurs et acquéreurs de rentes au comptant ne soient plus exposés à être victimes des faillites des agents de change.

Messieurs, cette pétition a fixé d'une manière particulière l'attention de votre commission, et elle lui a paru fondée en raison et en justice; voici, en substance, de quoi il s'agit:

M. Ragoulleau était propriétaire d'une rente de 4,500 fr. 5 pour 100. Il chargea le sieur Roger,

agent de change, de la vendre fin juin 1826, et il en résulta un capital de 99,062 francs.

Le sieur Roger fit banqueroute presque immédiatement, et avant d'avoir remis à M. Ragoulleau ces 99,062 francs qui lui appartenaient. Ce dernier s'en est trouvé frustré, et ce n'a été qu'au 23 janvier dernier, c'est-à-dire après sept mois de soins et de démarches actives auprès de MM. les syndics provisoires de la faillite, qu'il est parvenu à faire admettre sa créance comme dette privilégiée, sans pouvoir obtenir aucune assurance sur l'époque de son paiement.

MM. les syndics et adjoints de la compagnie des agents de change, dont le pétitionnaire se loue d'ailleurs, lui ont observé, dit-il, ainsi qu'aux autres créanciers privilégiés, qu'ils avaient tort de se plaindre, parce qu'étant créanciers pour faits de charge, ils ne pouvaient manquer d'être payés de leurs créances, un peu plus tôt ou un peu plus tard, soit sur le cautionnement ou le prix de l'office de leur débiteur, dont la vente, au profit de ces créanciers privilégiés, était autorisée par une ordonnance royale du 4 août 1826.

La vérité ici, Messieurs, c'est que ces créanciers ne sont pas payés, et qu'ils devraient l'être. Or, il est aisé de concevoir l'excès d'embarras et de malheur qui, dans certaines positions, peut résulter d'un tel retard, et le pétitionnaire cite des créanciers privilégiés dans les faillites de trois agents de change qu'il nomme, qui ne sont pas encore entièrement soldés de ce qui leur est dû, quoique leurs créances comptent dejà plus de trois ans de date.

Un vice radical, il faut en convenir, Messieurs, ou tout au moins une étrange et funeste lacune, semble exister ici dans la loi qui régit MM. les agents de change, et votre commission en a été frappée.

Dans l'état actuel des choses, en effet, les vendeurs sont obligés de faire à la trésorerie le transfert de leurs rentes, c'est-à-dire de se dépouiller de leur propriété avant d'en avoir reçu le prix ; et, les acquéreurs, de livrer leurs fonds avant de recevoir l'inscription qu'ils entendent acquérir. Il reste donc, tant pour les uns que pour les autres, un intervalle, et cet intervalle est de plusieurs jours, pendant lequel ils sont dépouillés, et à la merci, chacun, de leur agent de change; de telle manière que si, dans cet intervalle, cet agent de change vient à faillir, comme dans l'espèce, les vendeurs et acquéreurs de rentes se trouvent entraînés dans sa faillite.

Vainement viendrait-on vous dire, Messieurs, qu'ils ont un recours assuré. Ce n'est point un recours, des démarches et une attente pénible des liquidations qu'il leur faut, mais bien, aux uns, la remise immédiate de leur inscription, et aux autres, celle de leur argent.

Les acquéreurs ou les vendeurs de rentes au comptant n'étant pas des joueurs, ils ne doivent pouvoir courir aucune espèce de chance, et par cela seul que MM. les agents de change sont des instruments obligés, il a semblé à votre commission qu'ils devaient être des instruments infaillibles.

Le sieur Ragoulleau propose une mesure qui consisterait à établir, dans la chambre syndicale, une caisse dans laquelle seraient déposées, par les acquéreurs, les sommes nécessaires pour solder leur acquisition: ces sommes ne pourraient être remises qu'aux vendeurs, et les inscriptions qu'aux acquéreurs. Il observe, de plus, que la Caisse d'amortissement ne payant les rentes, par elle achetées que lors de la remise de l'inscription, il est naturel et simple que les mesures de

T. L.

sûreté analogues soient adoptées pour les intérêts privés.

Pénétrée de la haute importance de ces considérations, votre commission me charge, Messieurs, d'avoir l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des finances. (La Chambre prononce ce renvoi.)

M. Navoire, propriétaire à Paris, se plaint du sort réservé aux hommes qui se dévouent à l'instruction publique dans l'Université actuelle, et demande qu'on rétablisse, pour les professeurs, les lois et règlements de l'ancien Emeritat.

Rien n'est si commun, Messieurs, que de voir demander le rétablissement de telle institution d'autrefois, que l'on juge préférable à ce qui la remplace aujourd'hui, et, au nombre de ses vœux, plus sentis que raisonnés, se trouve celui que forme aujourd'hui le pétitionnaire, qui semble avoir oublié que l'hydre révolutionnaire est venue s'interposer entre les temps d'alors et les nôtres.

Ainsi, dans l'ancienne Université, un professeur devenait émérite, et avait par conséquent droit à la pension de retraite après vingt ans de service, et sa pension lui était payée sur les biens et revenus appartenant, soit à l'Université, soit aux écoles qui en faisaient partie.

Dans l'Université nouvelle, au contraire, le régime spoliateur de la Révolution ayant envahi tous les biens, il n'est plus resté d'autre ressource, pour former un fonds commun et spécial de retraite, que de faire une retenue sur tous les traitements. En outre, par suite du système d'uniformité, assimilant, sous ce rapport, les membres de corps enseignants à la plupart des autres fonctionnaires, la durée des services pour l'éméritat a été fixée à trente ans.

Toutefois, malgré cette condition générale de trente ans de service, et même de soixante ans d'âge, exigés par l'ordonnance du 19 avril 1820, on a cherché à avoir égard à la position de ceux de ces fonctionnaires qui pourraient avoir de justes motifs de solliciter leur retraite sans remplir cette double condition, et, lorsque leurs demandes sont reconnues légitimes, ils commencent à avoir droit à cette retraite au bout de dix années seulement de service.

Ces pensions sont faibles sans doute, mais votre commission ayant acquis la certitude que le fonds de retraite actuel ne permet pas de faire mieux, qu'on a des motifs d'espérer une amélioration, et qu'il est impossible d'avoir des dispositions plus favorables à cet égard, elle m'a chargé, Messieurs, d'avoir l'honneur de vous proposer l'ordre du jour. (La Chambre passe à l'ordre du jour.)

Le sieur Gaillet, à Pont-l'Evêque, se plaint de ce que les avocats semblent entièrement exclus des places de la magistrature. Il voudrait que les deux tiers au moins de ces places leur fussent réservées. Il se plaint, en outre, du cumul des places sur certains individus.

Messieurs, on pourrait sans doute se borner à répondre ici au sieur Gaillet d'une manière pé remptoire, par l'article 14 de la Charte; mais il y a ici une foule de raisons faciles à sentir, sans s'élever à celle, sans réplique, du droit que le pétitionnaire devrait connaître.

Pour ne choisir que les plus frappantes, ne peuton pas, en général, par exemple, se promettre plus de dignité, surtout d'indépendance, de la part d'hommes qui n'auront jamais eu avec les justiciables d'autres rapports que ceux du magistral, tandis que pour MM. les avocats, et par la nature même de leurs fonctions, la société se divise souvent en deux classes, les amis et les adversaires,

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