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CHAPITRE IX.

Des serruriers, et des règlements qui concernent leur profession.

Cette profession exige, de la part des autorités locales, une vigilance sévère et une grande sollicitude. En effet, tout ce que la serrurerie peut faire pour la sûreté des habitations, les serruriers peuvent le rendre inutile, puisque, toujours maîtres d'abuser des secrets de leur art, il est vrai de dire que rien n'est fermé pour eux. Aussi trouvons-nous dans nos anciens Codes plusieurs règlements qui les concernent, et dans les nouveaux, des lois qui maintiennent ces règlements et en ordonnent l'exécution. Celle du 22 juillet 1791 porte, art. 29 Sont provisoirement maintenus les règlements actuellement existants sur les objets de serru̟rerie; et l'article 46 ajoute : Les corps municipaux pourront faire publier de nouveau les lois et règlements de police, et rappeler les citoyens à leur observation.

Pour épargner aux officiers municipaux la peine de rechercher ces règlements, je vais en rappeler

les dispositions qu'il leur importe le plus de con

naître.

On voit, par des statuts donnés à la communauté des serruriers, vers le milieu du treizième siècle, statuts qui vraisemblablement ne sont pas les premiers, que dans tous les temps on a senti combien il importait d'assujétir cette profession à des règles sévères. Ces statuts sont rapportés par le commissaire Lamarre, dans son Traité de la police, tome 4, p. 96. On y lit « qu'il était défendu aux serruriers » de vendre aucune serrure neuve qui ne fût garnie de toutes ses gardes, autrement elle était » réputée fausse; qu'il ne devait sortir que de >> bons ouvrages des mains des maîtres. Pour leur >> ôter l'occasion d'en faire de mauvais, il n'était >> permis à aucun d'eux de travailler la nuit. >> Pour prévenir les vols, il y avait des défenses >> expresses à tous les maîtres de faire aucune clef >> sans avoir les serrures entre les mains. >>

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Ce règlement est le type de tous ceux qui ont été faits depuis. On en compte trois le premier du 21 mars 1392, donné par le prévôt de Paris, de concert avec le conseil du roi et autres sages; le second, en 1543; le troisième, de l'année 1650, est le plus complet et le plus parfait de tous. Enregistré au parlement, le 27 janvier 1652, il a toute l'autorité d'une loi, et constitue le dernier

état. En voici les articles qui se recommandent plus particulièrement à l'attention des officiers municipaux.

Art. 10. Pour remédier aux trop grands abus que la liberté pourrait causer dans la vente des ouvrages dudit art, nous voulons (ainsi que l'a ordonné le feu roi François Ier, notre prédécesseur, par le 15 article desdits anciens statuts) que lesdits maîtres, les marchands forains, de quelque pays qu'ils puissent venir, et tous autres, ne pourront dorénavant exposer en vente ni débiter aucun ouvrage neuf dépendant dudit art, qu'ils n'ayent été préalablement visités par lesdits jurez.

Art. 17. D'autant que la maîtrise dudit art est de si grande importance qu'elle n'a véritablement pour objet que la conservation de la vie des hommes et la sûreté de leurs possessions, nous voulons que nul ne sera dorénavant maître, ne pourra exercer ladite maîtrise, et ne lui sera permis de tenir boutique ouverte, qu'après avoir fait apparoir..... de son brevet d'apprentissage, et n'aye fait un chef-d'œuvre.

L'article 23 exige, de celui qui veut exercer en qualité de maître, qu'il ait travaillé cinq ans comme apprenti et cinq ans en qualité de compagnon, fidèlement et sans reproche.

Art. 37. Les compagnons qui, chez lesdits maitres, travailleront à leurs pièces, au mois et par année, ou qui auront abandonné le service desdits maîtres, ni à plus justes raisons les apprentis, ne pourront faire achat ni vente de marchandises ni ouvrages dépendants dudit art.

Art. 41. Nous faisons défenses très-expresses à tous compagnons et apprentis dudit art, de travailler, forger, ni faire forger les ouvrages en dépendants, hors de chez lesdits maîtres.

Art. 51. Défendons aux maîtres dudit art, compagnons, apprentis, de faire ouverture d'aucune serrure de cabinets et coffres-forts fermants à clefs ou loquets, que par l'ordre et en présence du maître, comme aussi d'aucune serrure de portes cochères, chambres et autres, qu'en la présence dudit maître ou de la maîtresse de la maison au moins, en laquelle ils auront été requis se transporter.

Art. 52. Lesdits maîtres, compagnons et apprentis, ne pourront forger ni faire aucune clef, que l'on n'ait mis en leur possession la serrure ou une clef, qu'ils iront en ce cas essayer sur ladite serrure, et la délivreront au maître ou à la maitresse de la maison, ni même n'en pourront faire sur modèles de cire, terre, ou autres patrons.

Art. 54. Afin que le cours d'une infinité de mal

heurs soit heureusement arrêté, nous défendons pareillement à tous marchands orfévres, et maîtres chaudronniers, fondeurs, et autres, de faire serrures, clefs, contre-clefs, fiches ou latons, bloques, rosettes, entrées de clefs, boutons, et autres ouvrages dudit art.

Art. 62. Les bourgeois et habitants de notredite ville, communautés, colléges, couvents et monastères, ni les académies et autres gens, ne pourront dorénavant avoir des forges pour le fait dudit art de serrurerie en leurs maisons, crainte que les malheurs ci-devant arrivés à la faveur de cette liberté ne continuent leur cours.

Ces statuts ont été faits sous le régime des corporations, et pour la ville de Paris; mais leur sagesse les rend applicables à toutes les communes, sauf quelques modifications que peuvent exiger certaines circonstances ou certaines localités. Je ne signale pas ces modifications, dans la confiance où je suis qu'elles n'échapperont pas à la sagacité des officiers municipaux.

[Add.] L'une des principales modifications que l'on doit apporter aux anciens règlements sur les arts et métiers résulte de l'article 7 de la loi du 2 mars 1791, qui veut : «< Qu'il soit libre à toute personne de faire tel négoce ou d'exercer telle profession, art ou métier

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