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réparations locatives que de dégradations, n'a pu être portée par le bailleur devant le tribunal civil conjointement avec la demande de résiliation du bail, au mépris de la disposition de la loi du 25 mars 1841, art. 7, qui attribue les réclamations de cette nature au juge de paix. 2 juillet 1849 (Pasic., 1850, 2, p. 15; Belg. judic., t. 9, p. 310).

Il est à remarquer que, dans l'espèce, il s'agissait de la résiliation du bail d'un hôtel, c'est-àdire de la résiliation d'un bail échappant évidemment au juge de paix (art. 5 de la loi de 1841). A ce point de vue, la compétence du juge de première instance n'était pas contestée. Mais au point de vue des dégradations et réparations locatives, il en était tout autrement. Le propriétaire de l'hôtel réclamait la nomination d'un ou plusieurs experts, lesquels auraient été appelés à constater l'état des lieux pour que cette constatation servit de base à une condamnation du locataire à rétablir les lieux dans leur état primitif. Sur ce point, la compétence était vivement contestée. Le 24 avril 1848, le tribunal de Bruxelles écarta en ces termes la prétention du propriétaire : «‹ Attendu qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 20 mars 1840, les juges de paix connaissent, à charge d'appel, à quelque valeur que la demande puisse monter, tant des réparations locatives que des dégradations alléguées par le propriétaire; Attendu que cette matière étant ainsi expressément attribuée à la juridiction des juges de paix, on ne saurait en saisir avec effet le tribunal. même en la mélant avec une demande d'exécution d'autres stipulations d'un bail; qu'en admettant même que les experts puissent être nommés par le tribunal pour constater ce qui est relatif à l'article 5 du bail, toujours est-il que ce ne serait point dans l'ordre de la demande, puisque la partie Speeckaert, en réclamant cette expertise, conclut au payement de toutes les sommes à allouer par les | experts pour dégradations qui auraient été apportées aux lieux loués;

D

La cour de Bruxelles, par arrêt du 2 juillet 1849,se rallie à l'opinion du tribunal de Bruxelles en adoptant les motifs du premier juge (Pasic., 1850, 2, p. 15).

La cour de Bastia s'est prononcée dans le même sens que la cour de Bruxelles, au point de vue des dégradations faites aux lieux loués. Elle décide que le juge de paix a seul compétence pour prononcer sur les dégradations, quand leur chiffre ne dépasse pas 1,500 francs (loi du 25 mai 1838, art. 4 et 5), alors même que l'action en payement du prix du bail appartient au juge de première instance. Bastia, 28 janvier 1856 (Sir.-Devill., 1856, 2, p. 213).

Remarquons qu'en Belgique les dégradations sont de la compétence du juge de paix, même lorsqu'elles dépassent 1,500 francs. La loi française de 1838 déroge sur le point à celle de 1790, et à la loi belge de 1841 (infra, sur l'art. 7 3o, n° 236).

231. Supposons maintenant qu'un propriétaire réclame de son locataire diverses réparations, parmi lesquelles les unes seraient locatives, tandis que les autres ne seraient imposées au locataire que par le bail ou par une convention spéciale, le juge de première instance serat-il compétent pour prononcer sur toutes les réparations réclamées ?

Nous n'y voyons pas d'obstacle. Evidemment ce magistrat est compétent quant aux réparations réclamées qui ne sont pas purement locatives. Quant aux autres réparations, elles pourraient être demandées devant le juge de paix. Mais alors le demandeur serait forcé de comparaitre devant deux juridictions pour des objets qui, en définitive, ont le même titre pour base, à savoir le contrat de bail. Il vaut mieux, dès lors, considérer la réclamation de réparations dans son ensemble. A ce point de vue, la demande porte sur des réparations qui ne sont pas uniquemeut locatives. Le juge de première instance est donc compétent pour statuer sur une pareille action, de même que nous avons vu qu'il est compétent pour statuer sur des réparations d'entretien_(supra, no 222), bien que parmi cellesci il s'en rencontre qui sont purement locatives.

L'opinion que nous venons d'émettre est soutenue par Carou (no 525), et par Curasson | (t. 1, p. 412).

Un arrêt de la cour d'appel de Bruxelles vient encore la confirmer. Nous remarquons que, dans l'espèce, la réclamation pour réparations se présentait sous forme de reconvention; mais les arguments de la cour se rapportent tout aussi bien au cas où la demande de réparations aurait été directe.

Voici dans quelles circonstances la question s'est présentée devant la cour:

Le sieur Vloeberg, locataire du sieur Parent, fit faire à celui-ci, par exploit du 23 septembre 1855, sommation de faire exécuter dans la quinzaine, à la maison qu'il occupait, les réparations voulues pour la rendre habitable et le mettre à même d'en jouir suivant sa destination, et l'assigna à cet effet devant le tribunal de Charleroi.

Le défendeur opposa une demande reconventionnelle, fondée sur ce que la maison était mal entretenue, et sur ce que Vloeberg n'avait pas effectué les réparations locatives qui lui incombaient, et n'avait pas satisfait à l'obligation de mettre en couleur, suivant l'engagement qu'il en avait pris, les portes et fenêtres.

Le tribunal de Charleroi ne se dessaisit pas de cette demande reconventionnelle et prononça sur le tout. La cour prononça en ces termes sur le point qui nous occupe :

d...

Attendu que le premier juge saisi de la réclamation principale, notamment de celle en dommages-intérêts et de la demande reconventionnelle, n'a pas dû se dessaisir de celle-ci pour prétendue incompétence;

Qu'en effet, la demande reconventionnelle

233. Au point de vue du lieu, quel sera le juge compétent pour statuer sur les réparations locatives?

n'était pas une demande pure et simple de répara- | les auteurs et par les arrêts. Henrion de Pansey tions locatives, mais elle présentait un ensemble (chap. VII, p. 43 et suiv.); Carré (Lois de dans lequel figure une réclamation pour des l'organisation et de la compétence, t. 4, p. 487). peintures à faire aux boiseries de la maison; Arrêts de la cour de Bruxelles des 19 janvier que cet objet de peintures n'est ni par la loi ni 1853 et 15 février 1834 (Jurisp. de Belg., 1833, par l'usage au nombre des charges locatives; t 2, p. 79, et 1835, t. 2, p. 311); de la cour de que cela est si vrai, que, dans l'espèce, le bail- Liége du 6 juillet 1835 (Jurisp. de Belg., 1837, leur a cru nécessaire de recourir à une énoncia- | t. 2, p. 38), et Merlin (Questions de droit, vo Contion expresse et spéciale pour mettre ces pein-trefaçon, § 5). tures dans les obligations du locataire; qu'il suit de là que la reconvention, par l'ensemble de son objet, sortait de la compétence restreinte du juge de paix et se trouvait au contraire dans une condition qui l'auribuait au juge de première instance, de la décision duquel il est appel; et ce d'autant plus, dans l'espèce, que cette reconvention revêtait le caractère d'une défense à la réclamation principale, et avait pour principe, pour source obligatoire et connexe, la même convention de bail; qu'ainsi tout rationnelle ment, le même juge devait en connaître, et qu'il devait y faire droit, selon l'état de la D - 21 mai 1856. Cour de Brux.

cause;

(Pas., 1857, 2, p. 22.)

232. Les derniers arguments dont se sert la cour de Bruxelles établissent que l'action reconventionnelle doit être jugée en même temps que l'action principale lorsqu'elle est connexe à cette action. Nous pourrions citer dans le même sens de nombreuses décisions analogues. Ainsi, par exemple, les arrêts de Bruxelles du 21 octobre 1821 (Pasic., 1821, p. 481); du 2 août 1837 (Pasic., 1837, 2, p. 200); de La Haye du 24 mai 1824 (Pasic., 1824, p. 131); de Bruxelles du 21 mars 1855 (Pasic., 1856, 2, p. 102).

D'après l'art. 3, no 3, du code de procédure civile, ce sera le juge de la situation de l'objet litigieux. En matière de réparations locatives, ce sera évidemment le juge de l'immeuble sur lequel le propriétaire prétendra que des réparations sont dues par le locataire.

Ici, comme eu matière de dommages aux champs, fruits et récoltes, le législateur a dérogé à la règle de l'article 2 du code de procédure, d'après laquelle, en matière purement personnelle ou mobilière, la citation doit être donnée devant le juge du domicile du défendeur, et à défaut de domicile, devant le juge de sa résidence (supra, n° 208). Les raisons que nous avons données de cette dérogation pour les dommages aux champs se retrouvent dans le cas dont nous nous occupons actuellement.

234. Mais dans le cas où il s'agit des réparations locatives réclamées à une ferme, supposons que les réparations soient exigibles pour diverses parties de la ferme situées dans différents ressorts de justices de paix, quel sera le juge de paix compétent?

Comme la ferme forme un ensemble, un tout eu quelque sorte indivisible, on ne peut renvoyer chaque réclamation partielle devant un juge de paix différent. Dans une hypothèse ana

Dans ces cas il y a une prorogation légale de juridiction (supra, no 11) qui prend le nom de reconvention; mais, comme le dit Henrion de Pansey, que la prorogation soit volontaire ou qu'elle soit legale, les règles sont les mêmes.logue, c'est-à-dire à l'occasion du tribunal qui Conventio el reconventio pari passu ambulant, disent les jurisconsultes (Compét. des juges de paix, chap. VIII, p. 43). Il en résulte que les diverses regles que nous avons établies dans nos no 10 à 16 quant à la prorogation volontaire de juridiction, s'appliquent également au cas de reconvention.

Ainsi il ne nous paraît pas douteux que, dans l'espèce mentionnée, le tribunal de Charleroi n'aurait pu prononcer sur la demande reconventionnelle si cette demande avait appartenu au juge de paix, à raison de ce qu'elle n'aurait porté que sur des réparations locatives. Le juge de première instance aurait été alors incompéteut ratione materiæ, et la reconvention n'aurait pu lui donner compétence contre la volonté de la loi.

C'est ce qui résulte des principes exposés par

doit connaître de la vente des biens en matière d'expropriation forcée, le code civil pose une règle qui peut être appliquée dans notre cas. D'après l'art. 2210, § 2, du code civil, la vente forcée est suivie dans le tribunal dans le ressort duquel se trouve le chef-lieu de l'exploitation, ou à défaut de ce chef-lieu, la partie de biens qui présente le plus grand revenu d'après la matrice du rôle. Cette disposition, fort rationnelle du reste, peut être facilement appliquée dans le cas où nous sommes. Le juge compétent sera donc celui du chef-lieu de l'exploitation, du bâtiment de la ferme, par exemple; et à défaut de bâtiment de ferme, le juge compétent sera celui de la partie de terres donnée en location, qui se trouvera être la plus importante. (V. Dalloz, Répert., v° Compét. civ. des trib. de paix, no 253.)

ARTICLE 7.

Les juges de paix connaissent, sans appel, jusqu'à la valeur de 100 francs, et à charge d'appel, à quelque valeur que la demande puisse monter :

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3o Des indemnités prétendues par le fermier ou locataire, pour non-jouissance, lorsque le droit d'indemnité ne sera pas contesté, et des dégradations alléguées par le propriétaire ; .

235. Portée du no 3 de l'art. 7.

SOMMAIRE.

236. Différence essentielle de cette disposition avec l'article 4 de la loi française du 25 mai 1838. Inconvénients de ce dernier article.

237. Cas divers prévus par l'art. 7, no 3. Ilypothèse où le fermier peut réclamer une indemnité pour nonjouissance.

252. A qui, dans le cas de renvoi, incomberont les frais faits par le demandeur devant le juge de paix ? Renvoi aux nos 80 et 204.

253.

253. Lorsque le droit d'indemnité est contesté, l'incom-
pétence du juge de paix est-elle absolue?
254. Le tribunal de première instance devant lequel on
soulèverait pour la première fois l'exception tirée
de ce que le droit d'indemnité serait contesté,
pourrait-il rester saisi de la cause?
Lorsque le droit d'indemnité est contesté, le juge
de paix est-il cependant compétent si l'indemnité
réclamée est inférieure à 200 francs?
Degradations alléguées par le propriétaire. Sens
de ces mots. Modifications apportées à la loi des
16-24 août 1790 par la loi française du 25 mai
1838 (art. 4).

256.

257.

Lorsque le droit à l'indemnité est contesté, le juge de paix reste-t-il compétent?

258. Controverse à ce sujet.

238. La non-jouissance doit-elle provenir du fait du propriétaire? Loi française du 25 mai 1858, art. 4. Divers cas qui peuvent se présenter. 239. Actions en indemnité ne provenant pas du fait du propriétaire. Lorsque la chose louée n'est détruite qu'en partie par cas fortuit, la diminution de prix demandée au propriétaire peut-elle se produire devant le juge de paix (art. 1722 du code civil)? 240. La demande en diminution du prix du bail, lorsque les réparations faites par le propriétaire durent plus de quarante jours, peut-elle se produire de vant le juge de paix (art. 1724 du code civil)? 241. Quid lorsque le fermier demande une remise du prix de sa location par suite de perte de la totalité ou de la moitié de la récolte (art. 1769, 1770 el 1771 du code civil)? Controverse à ce sujet. 242. Quid lorsque le fermier demande la diminution du prix du bail par suite de contenance moindre que celle indiquée (art. 1765 du code civil)? Controverse en France dans cette hypothèse. 243. Le juge de paix est-il compétent dans le cas où le preneur réclame la résiliation de son bail pour 262. La mauvaise culture constitue-t-elle une dégradanon-jouissance?

244. Le juge de paix peut-il ordonner des réparations

qui mettront le locataire ou fermier à même de jouir complétement du bail?

259. Le juge de paix reste-t-il compétent lorsque le locataire soutient que les dégradations dont se plaint le propriétaire sont en réalité des améliorations?

260.

261.

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Si le défendeur, en déniant les dégradations alléguées, produisait une demande pour améliorations, le juge de paix serait-il toujours compétent? Que faut-il entendre par dégradations, dans la loi de 1841?

tion ?

Y a-t-il dégradation lorsque le fermier enlève des objets attachés à la ferme pour l'exploitation de celle-ci ?

245. Les termes fermier et locataire sont-ils restrictifs? 264. Dans quels cas la vente ou l'enlèvement de pailles Comprennent-ils le locataire de meubles ? et d'engrais constitue-t-elle une dégradation?

246. Le fermier ou locataire de l'usufruitier peut-il l'as- 265. Dans quels cas la vente ou le détournement de signer devant le juge de paix? Solution en France et en Belgique.

247. L'action du sous-locataire ou sous-fermier contre le locataire ou fermier principal appartient-elle à la compétence du juge de paix ?

248. Le juge de paix reste-t-il compétent pour prononcer sur l'action en garantie du locataire ou fermier contre le propriétaire?

249. Quid dans le cas où une tierce personne est appelée en garantie?

250. Que faut-il entendre par contestation du droit d'indemnité? Applications du principe.

251. Lorsque le droit d'indemnité est contesté, le juge de paix peut-il, en renvoyant cette contestation au tribunal de première instance, se réserver de statuer sur la hauteur de l'indemnité?

fourrages peut-elle être réputée dégradation? 266. Le juge de paix est-il compétent quand il s'agit de coupes indument faites par le locataire d'un bois ? 267. Le fait du locataire qui cause du dommage au propriétaire n'est pas nécessairement une dégradation. 268. Le juge de paix est-il compétent quand il s'agit de dégradation à un objet mobilier?

269. Quels sont les divers articles du louage qui peuvent donner lieu à l'action pour dégradation?

270. Dans l'hypothèse prévue par l'art. 1768 du code civil y a-t-il action en dégradation?

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276. Le juge de paix est-il compétent lorsque ce n'est 280. Dans quels cas le juge de paix a-t-il compétence

pas un véritable locataire ou fermier contre lequel

les dégradations sont réclamées?

277. L'action en dégradation peut-elle s'exercer contre

pour prononcer sur une demande relative à des dégradations commises par le locataire postérieurement à l'expiration du bail?

COMMENTAIRE.

235. Le n° 3 de l'art. 7 est l'exacte reproduction du no 4 de l'art. 10, tit. III, de la loi des 16-24 août 1790. Les opinions et les décisions émises sur la portée de la disposition avant la loi de 1841, ont donc la même valeur que celles qui sont venues après cette loi. Remarquons toutefois que, sous l'empire de la loi de 1790, la compétence du juge de paix ne s'étendait qu'à la valeur de 50 livres en dernier ressort. La loi de 1841 a élevé cette compétence à 100 fr. pour tous les cas prévus par son art. 7. 236. L'art. 4 de la loi française du 25 mai 1858 au contraire a apporté, au point de vue de la hauteur de la compétence, un important changement à la loi de 1790. Voici comment il s'exprime :

Les juges de paix connaissent, sans appel, jusqu'à la valeur de 100 francs, et, à charge d'appel, jusqu'au taux de la compétence en dernier ressort des tribunaux de première instance: - 1o Des indemnités réclamées par le locataire ou fermier, pour non - jouissance provenant du fait du propriétaire lorsque le droit à une indemnité n'est pas contesté; 2o Des dégradations et pertes, dans les cas prévus par les art. 1732 et 1735 du c. civ. Néanmoins, le juge de paix ne connait des pertes causées par incendie ou inondation, que dans les limites posées par l'art. 1er de la présente loi. >

-

souvent il serait difficile d'en distinguer la cause et d'en séparer la vérification. Comment faire cette distinction à la fin du bail, lorsqu'il s'agit de remettre en bon état la chose louée ? Alors les dégradations se trouvent presque toujours confondues avec le défaut de réparatious locatives; et si, de son côté, le locataire oppose que sa jouissance n'a pas été intégrale, force est de s'en rapporter à une expertise, pour vérifier les sujets de plaintes réciproques. Sous l'empire de la loi de 1790, qui attribuait aux juges de paix la connaissance de ces différents objets, quel qu'en pût être le montant, leur réunion était sans inconvénient. Aujourd'hui ce n'est plus cela que l'une de ces demandes soit indéterminée, alors le juge de paix devient incompétent, même pour les réparations locatives, à l'égard desquelles sa compétence est illimitée; c'est au tribunal civil qu'appartient la connaissance du tout; car si, de divers chefs, l'un est de la compétence de ce tribunal, et l'autre de la compétence du juge de paix, mais que tous dérivent du même titre, le tribunal doit prononcer sur tous ces chefs; il ne peut les scinder et renvoyer au juge de paix ceux qui sont de la compétence de ce juge. »

De cet état de choses il résulte nécessairement que, dans un grand nombre de cas, le défendeur se trouvera privé de la bienfaisante juCette disposition qui, pour le dernier ressort, ridiction des juges de paix. Comme l'observe donne au juge de paix la même compétence que Dalloz, il est douteux que l'innovation de la loi la loi belge, se sépare de celle-ci et de la loi de française soit heureuse. Elle a été combattue 1790 quant à la règle qui détermine la compé- à la chambre des députés, comme ayant, entre tence sous réserve d'appel. Dans la loi française, autres inconvénients, celui d'offrir à la maucette compétence n'est pas illimitée, mais s'ar- vaise foi un moyen facile de soustraire à la rête au taux de la compétence en dernier ressort compétence du juge de paix, pour les soumettre des tribunaux de première instance. En mettant à la juridiction ordinaire des contestations sans cette disposition en rapport avec l'article qui dé-importance, puisqu'il suffira pour cela de contermine ce taux (loi du 11 avril 1838, art. 1or), nous voyons que la compétence du juge de paix devra, en premier ressort, s'arrêter toujours à la somme de 1,500 francs.

Cette innovation de la loi française a été trèsvivement critiquée, en présence de la disposition de l'art. 5 de cette loi, qui laisse au juge de paix une compétence illimitée en premier ressort pour les réparations locatives des maisons et fermes. En effet, comme le dit Curasson (t. 1, p. 331), les dégradations et le défaut de réparations locatives proviennent du même fait;

clure à une indemnité de plus de 1,500 francs, ou simplement à une indemnité à régler par experts. (Dalloz, Répert., v° Compét. civ. des juges de paix, no 219.)

237. Le n° 3 de l'art. 7 contient deux parties complétement distinctes. La première concerne les indemnités prétendues par le fermier ou locataire pour non-jouissance; la seconde, les dégradations alléguées par le propriétaire.

Examinons d'abord les difficultés qui peuvent s'élever à l'occasion du premier de ces deux objets.

Dans quels cas le fermier ou locataire a-t-il à réclamer devant le juge de paix une indemnité pour non-jouissance?

La condition que la loi met à l'intentement de l'action devant ce magistrat est que le droit de l'indemnité ne soit pas contesté. Mais avant de rechercher les cas où il y aura véritablement contestation du droit à indemnité, il importe de nous rendre compte de ce qu'il faut entendre par droit à indemnité pour non-jouissance. 238. La loi française de 1838 ajoute au texte de la loi de 1798 que la non-jouissance doit provenir du fait du propriétaire (supra, no 236). La loi belge ne contient pas cette condition.

Comment dès lors faut-il l'interpréter? Pour résoudre cette question, examinons successivement en quels cas il peut y avoir lieu à indemnité pour non-jouissance?

l'art. 1722, lorsque la chose louée n'est détruite qu'en partie par cas fortuit, il y a lieu de demander une diminution de prix contre le propriétaire, ou la résiliation même du bail. Ši la résiliation du bail est demandée, nous ne croyons pas que le juge de paix puisse en connaître. (V. infra, no 243.) Mais il nous paraît en étre autrement pour le cas où l'on réclame une diminution de prix.

Quel est en effet le point de départ de l'article 1722? C'est sans aucun doute l'obligation qui incombe au bailleur de faire jouir le preneur de la totalité de la chose louée (art. 1719 3o). Le fondement de l'art. 1722 est exactement le même que celui de l'art. 1721, lequel force le bailleur à indemniser le preneur lorsque les vices ou défauts de la chose, même inconnus du bailleur lors du bail, font éprouver quelque perte au preneur. Cette responsabilité du bailleur, alors même qu'il prouve sa bonue foi, établit clairement que ce n'est pas à raison d'une faute qu'il doit indemnité, mais à raison de son obligation de faire jouir. L'action du preneur dans le cas de l'art. 1722 est fondée également sur la non-jouissance.

Aux termes de l'art. 1719, le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée. S'il le fait tardivement, le preneur aura contre lui une action en indemnité pour non-jouissance. Il en sera de même, si le bailleur se refuse à entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée (art. 1719 2o), c'est-à-dire s'il se refuse à faire toutes les répa- La diminution de prix, dont parle cette disporations, autres que les locatives, qui peuvent de-sition, n'est autre chose qu'une indemnité. [] venir nécessaires (art. 1720, § 2). Il y aura encore lieu à indemnité pour non-jouissance, si quelque perte résulte pour le preneur des vices ou défauts de la chose louée (art. 1721, § 2), ou si le preneur souffre de ce que le bailleur change pendant la durée du bail la forme de la chose louée (art. 1723.)

Dans ces différentes hypothèses, la loi française donne compétence au juge de paix comme la loi belge. Eten effet, c'est le fait du propriétaire qui donne lieu à l'indemnité. L'action en indemnité est tout simplement une véritable action en dommages-intérêts contre le propriétaire.

Cette même action peut encore s'exercer contre le bailleur, lorsque le preneur se trouve troublé dans sa jouissance, ou évincé par un tiers. Il y a faute du bailleur à avoir loué un bien dont le locataire pouvait être expulsé. C'est par conséquent son fait qui donne lieu à l'indemnité. Dalloz (Kép, v° Compétence civ. des tribunaux de paix, no 222).

239. Mais à côté de ces actions en indemnité, il en est d'autres qui peuvent être intentées pour non-jouissance. Ce sont celles qui proviennent, non pas du fait du propriétaire, mais d'un cas fortuit ou de toute autre circonstance. Nous pensons que, ni la loi de 1790, ni la loi belge n'ont voulu exclure ces actions de la compétence du juge de paix, pourvu, bien entendu, que le droit à l'indemnité ne soit pas contesté.

Quelles sont les actions où le preneur peut réclamer une indemnité du bailleur, bien que celui-ci ne soit coupable à son égard d'aucune contravention aux règles du bail?

Ce sont celles qui résultent des art. 1722, 1724, 1765, 1769, 1770 et 1771. Aux termes de

n'y a donc aucune raison sérieuse pour écarter cette demande de la compétence du juge de paix. Remarquons d'ailleurs que le mot indemnité, employé par la loi de 1790 et conservé par celle de 1841, a un sens fort général et qui n'exclut en aucune façon une demande de diminution de prix. Enfin la raison de texte qui est décisive en France (Curasson, t. 1, p. 336; Dalloz, Rép., vo Compétence civ. des juges de paix, n° 221) n'existe pas pour la Belgique, puisque la loi belge n'exige pas que la non-jouissance provienne du fait du propriétaire.

240. Les raisons que nous venons d'invoquer pour justifier la compétence du juge de paix dans le cas de l'art. 1722 se présentent avec la même force dans l'hypothèse prévue par l'art. 1724.

Cet article dispose dans son second paragraphe que, si des réparations urgentes sont faites à la chose louée pendant le bail, et si ces réparations durent plus de quarante jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose dont le locataire aura été privé.

Qu'est-ce en réalité que cette règle, sinon une nouvelle application du principe de l'obligation du bailleur de faire jouir le preneur, principe qui domine toute la matière du louage? (Marcadé, art. 1724, t. 6, p. 454). Lorsque les réparations durent moins de quarante jours, le preneur doit les subir sans indemnité. Il doit accepter comme une conséquence de sa position de locataire les réparations que le propriétaire est obligé d'effectuer (art. 1724, § 1er.) Lorsque, au contraire, les réparations dépassent quarante jours, elles deviennent gravement préjudiciables au locataire. Celui-ci peut alors

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