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ment parce que l'engagement du commis lui accordait une part dans les bénéfices, et que dès lors il cessait d'être simple commis pour devenir associé.

Toutefois la cour de cassation de France a décidé en sens contraire que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des engagements respectifs entre les commerçants et leurs commis, ces engagements se rattachant uniquement au fait du trafic... alors même que le commis étranger à la vente ne participerait qu'indirectement au commerce (arrêt du 10 février 1851, S.-V., 51, 1, 737). Dalloz désapprouve la jurisprudence de Bruxelles, mais sans donner les motifs de son opinion (Répert., Comp. commerciale, no 149).

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Nous ne pouvons admettre cette solution, qui nous paraît en désaccord avec l'art. 634 du code de commerce. L'arrêt de la cour de Bruxelles du 4 février 1845 l'établit à toute évidence.

322. Les arrêts de Bruxelles des 6 février 1841, 4 février 1843 et 12 août 1859, que nous avons cités au numéro qui précède, déclarent incidemment que l'art. 634 du code de commerce n'autorise la compétence des tribunaux consulaires qu'en faveur des tiers qui ont traité avec les commis ou facteurs.

Cette interprétation nous paraît empreinte d'exagération.

L'art. 634 dont s'agit ne spécifie pas quelles personnes auront le droit d'assigner le commis devant le tribunal consulaire. Il dit simplement que les tribunaux de commerce connaitront des actions contre les facteurs, commis des marchands ou leurs serviteurs, pour le fait seulement du trafic du marchand auquel ils sont attachés.

Il en résulte que lorsque l'action est fondée sur certains faits particuliers, ceux ayant rapport au commerce, la compétence du juge consulaire est ordonnée par la loi. Peu importe, dans ce cas, que l'action soit intenté par les tiers qui ont contracte avec le commis ou facteur, ou qu'elle soit produite par le commerçant lui-même contre son commis ou facteur.

C'est ce que la cour de Liége a décidé par arrêt du 30 novembre 1843. Voici comment cet arrêt interprète l'art. 634 du code de commerce Attendu, dit-il, que l'art. 634 du code de commerce attribue à la juridiction commerciale la connaissance des actions contre les facteurs et commis des marchands pour le fait seulement du trafic du marchand auquel ils sont attachés; que les termes généraux dans lesquels cette disposition est conçue la rendent applicable aux actions des marchands contre leurs facteurs et commis, comme à celles intentées par des tiers; qu'il y a donc d'autant moins lieu d'en restreindre l'application à celles-ci qu'il n'y a aucun motif pour introduire une distinction que les termes de la loi ne comportent pas, et qui serait contraire à l'intérêt bien entendu du commerce; que d'ailleurs l'art. 3 de l'édit de 1563 et l'art. 1er, tit. XII de l'ordonnance de

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1673, en vigueur en France, lors de la confection du code de commerce, rendaient les facteurs et commis justiciables des tribunaux consulaires pour toutes contestations mues par leurs commettants du chef de leur gestion et administration, et que si le législateur avait voulu introduire un droit nouveau et rendre ces actions à la juridiction ordinaire, il s'en serait formellement expliqué; qu'il suit de là que les termes de la loi, son esprit et l'intention du législateur concordent pour conserver aux tribunaux de commerce la connaissance des actions de cette nature, qu'elles soient intentées par des marchands ou par des tiers... >

La cour de Bruxelles a de même, sur les conclusions conformes de M. le premier avocat général Delebecque, déclaré le juge consulaire compétent pour statuer sur une action intentée par un négociant contre son commis, pour faits relatifs au commerce de ce négociant. Dans l'espèce, il s'agissait d'une demande en reddition de compte relative à des opérations commerciales faites par le commis au nom de son patron (15 février 1845, Pas., 1843, 2, p. 82).

La cour de Bruxelles a admis de nouveau le même principe par son arrêt du 31 décembre 1845 (Pas., 1846, 2, 23). Un arrêt de la mênie cour du 12 juillet 1854 (Pas., 1855, 2, p. 210) a encore été rendu en ce sens.

Presque toute la doctrine et la jurisprudence françaises confirment cette interprétation de l'art. 654 du code de commerce.

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Ainsi il a été jugé que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions formées contre les commis marchands par leurs patrons pour le fait de leur trafic, tout aussi bien que des actions formées contre ces commis par des tiers. Paris, 24 août 1829 (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 2, 15); Cass. rej., 15 déc. 1835 (Jurisp. du xixe siècle, 36, 1, 335).- Id. Limoges, 30 juillet 1856 (Jurisp. du XIXe siècle, 36, 2, 389); —Id,, Paris, 11 juillet 1844 (Pas., 45, 2,165). Nouguier, t. 2, p.76 et suiv.; Despréaux, nos 424 et 425; Pardessus, no 1546; et Orillard, no 478, se prononcent dans le même sens. La cour de cassation de France a décidé le même prineipe à l'égard d'un facteur, en déclarant que, par suite, le facteur est contraignable par corps. Cass., rej. 3 janvier 1828 (Jurisp. du XIXe siècle, 28, 1, 189).

Il a été jugé aussi que l'action intentée par un marchand contre son commis, en restitution de valeurs qu'il prétend détournées par le commis dans l'exercice de ses fonctions, doit être considérée comme se rattachant au trafic du marchand, et, par suite, qu'elle est de la compétence du tribunal de commerce. Paris, 12 décembre 1829 (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 2, 140).

Un arrêt de Metz décide qu'il en est de même de l'action formée par les syndics d'une faillite et ayant pour objet de forcer un commis au rapport de sommes par lui puisées dans la caisse au moment de la faillite, sous prétexte d'arrérages

d'appointements. Metz, 30 août 1831 (Pas., à sa date).

Toutefois Carré, Compétence civile, t. 2, article 587, se prononce en sens contraire. On peut citer, en faveur de cette dernière interprétation, les arrêts de Bruxelles que nous avons mentionnés au commencement de ce numéro, et principalement celui du 12 août 1859 (Pas., 1860, 2, 248). Mais ces arrêts ne résolvent la question qu'incidemment et par conséquent n'ont pas ici une très-grande impor

tance.

n° 479; Dalloz, Répert., v° Comp. commerciale, nos 22, 23, 24 et 25; Nouguier, Tribunaux de commerce, t 2, p. 79 et suiv., se prononcent dans le même sens. La cour de Bordeaux décide aussi que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître de l'action intentée par un facteur ou commis contre le marchand qui l'a employé, alors surtout que cette action a pour objet le remboursement du cautionnement et des avances que le facteur ou commis aurait faites à son patron. Bordeaux, 17 juillet 1846 (Pas., 48, 2, 431).

Enfin deux arrêts français, celui de la cour D'autres arrêts cependant décident en sens d'Amiens du 24 décembre 1824 (Jurisp. du x1x* contraire que les tribunaux civils sont seuls siècle, 1825, 2, 200) et celui de la cour de compétents pour connaître des actions formées Nimes du 16 août 1859 (Pas., à sa date) résolvent contre les marchands par leurs commis, en payeaussi la question dans le sens de l'incompétence ment d'appointements que ceux-ci prétendent absolue du juge consulaire pour décider d'une leur être dus. C'est ce que décide la cour de réclamation faite par le patron contre son com- Florence, 20 septembre 1809 (Pas., à sa date). mis. Dans l'un et l'autre de ces arrêts, il s'agis- V. id., Rouen, 19 janv. 1813 (S.-V., 14, 2, sait cependant de réclamation ayant rapport au 35). - Id., Metz, 21 avril 1818 et 16 fév. 1819 trafic du marchand. Devant la cour d'Amiens, le (Pas., à leurs dates). — Id., Aix, 23 janv. 1830 patron réclamait de son commis un compte pour | (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 2, 85).—Id., Poitiers, les opérations commerciales qu'il avait faites. 27 janvier 1830 (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 2, Devant la cour de Nîmes, le commis était cité 230). Id., Nimes, 28 juin 1839 (Jurisp. du en restitution de carnets de commission et au- XIXe siècle, 39, 2,522). — Id., Bordeaux, 10 janv. tres papiers se rattachant aux intérêts de la 1843 (Pas., 43, 2, 192). Favard, v Tribumaison. naux de commerce, sect. 2, § 1, n° 9; Vincens, Législation commerciale, t. 1, p. 41; Carré, Compétence civile, t. 2, p. 612, art. 387; Despréaux, Compétence des tribunaux de commerce, nos 415 et suiv., se prononcent en ce sens. La cour d'Amiens conclut très-justement que, dans ce cas, l'incompétence des tribunaux de commerce peut

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Ces dernières solutions nous paraissent faire une fausse application de l'art. 634 du code de commerce. La volonté de cette disposition est de soumettre au juge consulaire l'appréciation de toutes les réclamations faites contre les commis, mais seulement lorsqu'elles ont rapport au fait du trafic, peu importe qui fait les réclama-être proposée pour la première fois en appel.tions.

Les demandes en restitution de livres ou de pièces de commerce ont directement rapport au commerce, puisqu'elles tendent à établir la situation du commerçant. Il en est de même des demandes de compte.

323. Mais devant quel juge le commis doit-il assigner son patrou, soit en payement d'appointements, soit en exécution d'engagements contractés?

La question est encore vivement controversée en France et en Belgique.

Il a été jugé en Frauce, avant comme depuis la loi du 25 mai 1838, que les tribunaux de commerce, compétents pour connaître des actions des marchands contre leurs commis, le sont par réciprocité pour connaître des actions formées par ceux-ci contre leurs patrons en payement de leurs appointements. V. Paris, 29 novembre 1825 (Jurisp. du xixe siècle, 27, 2, 204). Id., Paris, 24 août 1829 (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 2, 15). Cour de cass., rej., 15 déc. 1835 (Jurisp. du XIXe siècle, 36, 1, 333).- Cour de Limoges, 30 juillet 1836 (Jurisp. du XIXe siècle, 36, 2, 389). Cour de Bordeaux, 4 août 1840 (Pas., 41, 2, 14). Pardessus, no 38 et 1346; Delvincourt, Inst. commerciales, t. 2, p. 506; Horson, Questions sur le code de comm., no 204; Orillard, Compétence des tribunaux de commerce,

Amiens, 8 mai 1821 (Pas., à sa date). Il y aurait incompétence absolue.

En Belgique, la cour de Bruxelles a décidé la question dans le sens de la compétence de la justice consulaire, par deux arrêts du 17 avril 1822 (Pas., 1822, p. 109) et du 15 juin 1859 (Pas., 1839, 2, p. 108). Mais elle s'est prononcée en sens contraire par un arrêt du 29 novembre 1845 (Pas., 1848, 2, p. 125), où elle déclare que l'action d'un commis voyageur contre son commettant n'est pas de la compétence des tribunaux de commerce.

‹ Attendu, dit-elle dans ce dernier arrêt, que, par la convention produite au procès, l'intimé s'est obligé à faire jouir les appelants de son temps et de ses soins pendant trois années consécutives, et moyennant un prix déterminé, ce qui constitue un contrat de louage;

«Attendu que si cette convention a été faite pour aider les appelants dans leur commerce, soit par des voyages, soit par d'autres services, cette circonstance ne change pas la nature essentiellement civile du contrat, puisque, d'une part, le code civil ne distingue pas entre les différents services ou travaux qui peuvent faire l'objet d'un louage, et, de l'autre, le code de commerce ne met pas au rang des actes commerciaux le travail ou le service qu'un commis ou serviteur fait pour son maître commerçant;

«Attendu qu'il importè peu aussi que le salaire de l'intimé consiste en une somme fixe ou en un tantième sur le montant des ventes qu'il opérait pour les appelants, puisque ce tantième ne lui donne aucune part dans les bénéfices; par ces motifs,... dit pour droit que le tribunal de commerce était incompétent. »

La doctrine de ce dernier arrêt ne nous paraît pas pouvoir être suivie. L'argument sur lequel il se base consiste à dire que le code de commerce ne range pas parmi les actes commerciaux le travail que le commis ou serviteur fait pour son patron commerçant.

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avaient droit de connaître des gages, salaires et pensions des commissionnaires, facteurs ou servileurs des marchands, pour le fait du trafic seulement; une disposition aussi précise n'a jamais permis de douter que les engagements des négociants envers leurs commis, relativement à leurs appointements, ne fussent actes commerciaux de la compétence des tribunaux de commerce, et que, par suite, la contrainte par corps ne dût avoir lieu, pour assurer leur exécution. Le code de commerce, art. 634, porte : « Les tribunaux de commerce connaîtront, 1° des actions contre les facteurs, commis des marchands ou leurs serviteurs, pour le fait seulement du trafic du marchand auquel ils sont attachés, etc. » Si la loi répute commerciaux les engagements des commis envers les négociants, à plus forte raison doit-on penser que les engagements des négociants envers leurs commis sont de même nature; il n'y aurait aucune équité, disons mieux,

Celle allégation est exacte, mais n'oublions pas qu'il ne s'agit pas ici d'une demande produite par un patron contre son commis, mais au contraire d'une réclamation du commis contre le patron.Peu importe donc que le travail du commis pour son patron ne soit pas un acte commercial. La véritable question est celle de savoir si, de la part du patron, l'engage-il y aurait une suprême injustice et une inégament d'un commis n'est pas un acte de commerce qui rende le premier justiciable du juge consulaire.

Nous croyons que la compétence du tribunal de commerce existe incontestablement ici pour le patron.

L'art. 631 du code de commerce déclare que les juges de commerce connaîtront, entre toutes personnes, des contestations relatives aux actes de commerce. D'autre part, l'art. 632 du même code répute actes de commerce toutes obligations entre négociants, marchands et banquiers. Mais il nous paraît certain que le caractère de l'obligation chez le créancier ne peut influer sur la | nature de l'acte. Il faut donc dire que tous engagements de la part de négociants, marchands et banquiers appartiennent à la juridiction commerciale. C'est ce qui résulte à toute évidence de la discussion qui a eu lieu à cet égard au conseil d'Etat (Locré, t. 20, p. 94). V., dans le même sens, Dalloz, Répert., vo Acte de commerce, no 19, et vo Compétence commerciale, nos 21 | et 134.

Il est bien entendu aussi que les mots négociants, marchands et banquiers doivent être compris en ce sens agissani dans l'acte en qualité de négo- | ciants, marchands ou banquiers. Car le négociant ne fait acte de commerce que pour autant qu'il contracte pour une cause relative à son commerce. Telle est l'interprétation fort juste, d'après nous, que Pardessus donne aux art. 631 et 632 du code de commerce (Droit commercial, nos 8, 51 et 1346).

M. Pailliet conclut aussi à la compétence du juge de commerce pour statuer sur des réclamations d'appointements de commis contre leur patron, et se livre à une critique fort approfondie de l'arrêt de Metz du 21 avril 1818 qui admet seulement la compétence du juge civil. Sous l'empire de l'ordonnance de 1673, dit-il, la question proposée ne pouvait point exister: l'art. 5, tit. XII de cette ordonnance décidait textuellement que les juges-consuls

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lité choquante, à l'égard du commis, si un principe contraire était accueilli : le négociant traînerait son commis devant les tribunaux de commerce; il obtiendrait contre lui la contrainte par corps, il le priverait de sa liberté. D'un autre côté le commis serait obligé d'appeler le négociant devant un juge de paix, en conciliation, ensuite devant un tribunal civil; et s'il obtenait sentence, elle serait illusoire, faute de moyens coercitifs. Un pareil contraste n'a pu entrer dans les vues du législateur. Tous les actes d'un négociant qui se rapportent à son commerce sont actes commerciaux : ils soumettent à la juridiction commerciale et à la contrainte par corps; cela ne peut point être contesté. Or lorsqu'un négociant traite avec un commis, ne fait-il pas un acte directement relatif à son commerce? l'œuvre du commis ne se porte-t-elle pas sur ce même commerce? Ne faut-il pas nécessairement conclure de là que l'engagement du négociant est commercial? Il y a plus, toutes les fois qu'un négociant loue un objet mobilier quelconque pour l'exploitation de son commerce, par exemple des chevaux, des voitures, des bateaux, des navires, pour transporter ses marchandises, il fait un acte essentiellement commercial; peut-on dire avec fondement qu'il ne fait point un acte de même nature, lorsqu'il loue, en quelque sorte, le service de ses commis, service exclusivement consacré à son commerce? (Pailliet, Code de commerce, sur l'art. 634, note u, 2.)

Dans ces derniers temps, une troisième opinion s'est fait jour. Un arrêt de la cour de cassation de France du 22 février 1859 (Pas., 1860, 2, p. 213) notamment laisse à celle des parties qui n'a pas fait acte de commerce le choix d'assigner la partie qui est commerçante, soit devant le tribunal civil, soit devant le tribunal de commerce. Il en est ainsi spécialement du commis à l'égard de son patron.

Cet arrêt est basé sur ce que la partie qui n'a pas la qualité de commerçant et à l'égard de laquelle l'engagement ou le fait litigieux n'a

pas le caractère d'un acte de commerce, ne peut être contrainte d'appeler le défendeur devant le tribunal de commerce. Le non-commerçant ne doit pas plus se soumettre à cette juridiction comme demandeur, qu'il n'est tenu de l'accepter comme défendeur.

Ce dernier arrêt de la cour de cassation avait été précédé de quelques autres arrêts moins explicites. Ainsi ceux de la cour de cassation du 12 décembre 1836 (1837, 1, 621; Dalloz, Répert, vo Comp. commerciale, no 134) de celle de Bourges, 17 juillet 1837 (1838, 2, 120) et 12 mars 1841 (1842, 2, 78); de cassation du 6 novembre 1843 (1844, 1, 168) et enfin de Paris du 31 décembre 1853 (1854, 1, 120).

gens de travail ni parmi les domestiques, il n'en est pas de même des serviteurs dont nous parlons ici.

Selon que la nature de leurs fonctions et leur position dans la maison le comporteront, on pourra les qualifier de gens de travail, ou de domestiques, mais il ne sera pas possible de leur assigner une position différente.

Le juge de paix sera donc compétent à l'infini pour décider des contestations de ces serviteurs, soit au sujet de leurs gages, soit au sujet de leurs engagements. Telle est aussi l'opinion de Dalloz (v° Comp. commerciale, no 154, in fine).

325. Remarquons cependant que cette compétence du juge de paix cesserait devant la juridiction commerciale, dans le cas où, soù un tiers, soit le patron lui-même, intenterait une action au serviteur, pour le fait du trafic. Il faudrait appliquer ici ce que nous avons dit plus haut des

Merlin, Quest. de droit, v° Acte de commerce, § 9; Pardessus, Droit commercial, no 1347; Horson, Quest. sur le code de commerce, t. 2, p. 455; Nouguier, Tribunaux de commerce, t. 1, p. 350; Alauzet, Commentaire, t. 4, no 2015; Dageville, Code de commerce expliqué, t. 1, p. 17; et Devil-commis et facteurs (supra, no 322). Il n'y a auleneuve, Dictionnaire du contentieux commercial, vo Commis, no 23 et 24, admettent de même que le non-commerçant a le choix d'assigner le commerçant, soit devant le tribunal de commerce, soit devant le tribunal civil.

Nous ne pouvons nous arrêter à cette der nière opinion. Celle qui attribue au juge consulaire exclusivement la connaissance des réclamations du commis contre le patron nous paraît de beaucoup préférable.

La compétence du juge de commerce résulte de la qualité de commerçant dans le chef du patron. Mais lorsque cette qualité est constante, nous n'apercevons aucune raison pour ne pas en faire dériver une compétence invariable. Il est vrai que le commis n'a pas fait acte de commerce en s'engageant (supra, no 321); mais il a cependant posé un acte vis-à-vis d'un négociant en vue du commerce de ce négociant. Le commis doit assigner ce dernier en exécution de ses obligations devant le juge dont il relève aux termes de la loi, c'est-à-dire devant le juge commercial.

Il n'appartient pas à la partie demanderesse de changer l'ordre des juridictions, et d'entraîner la partie défenderesse devant un tribunal dont celle-ci ne relève pas, eu égard à certains actes qu'elle a posés.

324. Si les commis et facteurs ne sont pas compris dans les termes de l'art. 7, n° 4, de la loi de 1841, faut-il de même dénier la compétence des juges de paix aux serviteurs dont parle l'art. 634 du code de commerce?

Quels sont ces serviteurs?

Le code de commerce a désigné par ce mot les personnes qui sont chargées de quelques emplois subalternes dans une exploitation commerciale, celles par exemple qui transportent, rangent ou chargent les ballots de marchandises.

Nous pensons que si les commis occupent des fonctions et sont dans une position sociale qui ne permettent de les ranger ni parmi les

cune raison d'interpréter différemment l'excep❘tion de l'article 634 du code de commerce, selon qu'il s'agit de commis ou de simples serviteurs. Cet article les met sur la même ligne.

326. Mais nous ne pensous pas que l'action du serviteur du négociant contre son patron, action tendant au payement de salaires ou à l'exécution d'engagement, pourrait être intentée devant le tribunal de commerce. La règle que nous avons donnée à l'égard du commis (supra, no 323) n'est pas en vigueur dans ce cas. La loi de 1790 et celle de 1841 ont posé un principe général pour le règlement des contestations entre les maîtres d'une part, et les gens de travail et domestiques d'autre part. Cette règle n'existe pas pour les commis et facteurs, dout la position sociale est supérieure à celle des gens de travail; mais elle existe dans toute sa force pour les serviteurs des négociants. C'est donc elle qu'il faut appliquer, quelle que soit la qualité de celui qui profite des services.

C'est en vain qu'on pourrait objecter ici les termes de l'ordonnance de 1673 (art. 5, titre XII), qui donnait aux juges consuls le droit de connaître des gages, salaires et pensions des serviteurs des marchands. Ces termes n'ont pas été reproduits dans le code de commerce, et à défaut d'une dérogation formelle à la loi des 16-24 août 1790, c'est celle-ci qui doit continuer à régler la compétence entre les maitres et les gens de travail ou serviteurs.

Toutefois plusieurs arrets français se sont prononcés contrairement à notre opinion, en attribuant compétence aux juges de commerce pour statuer sur des réclamations d'engagements entre les marchands et leurs serviteurs (V. Dalloz, v° Comp. commerciale, no 154). Ces arrêts se basent tous sur l'assimilation des serviteurs avec les commis et facteurs. Nous croyons avoir démontré que les mêmes principes ne pouvaient leur être applicables.

Nous trouvons dans le sens de la compétence du tribunal de commerce, pour statuer sur des

réclamations faites par des serviteurs contre des négociants, l'arrêt de Paris du 16 janvier 1843 (Pas., 43, 2, 332) et celui de Poitiers du 20 février 1851 (S.-D., 51, 2, 637).

Mais si le cocher, au lieu de recevoir un appointement fixe, est obligé au contraire de payer au louageur de voitures une somme déterminée, et si, moyennant cet arrangement, il dispose comme il l'entend de la voiture, sa po

Mais d'autres arrêts récents se prononcent à bon droit en sens contraire, en décidant en gé-sition change immédiatement. néral que les juges de paix sont exclusivement compétents pour prononcer sur des actions formées par des gens de travail contre ceux qui les emploient, alors même que ces derniers seraient commerçants. Tel est le principe qui a été adopté par la cour de Limoges le 8 juillet 1842 (Pas., 43, 2, 16), par celle de Bourges, le 5 janvier 1842 (Pas., 43, 2, 17), par celle de Besançon, le 5 décembre 1843 (Dalloz, Périod., 1845, 4, | 95), par celle de Riom, le 3 janvier 1846 (Id., 1849, 2, 139), et par celle de Caen, le 14 novembre 1849 (Id., 1850, 5, 80).

Il devient sous-entrepreneur au lieu d'être domestique, puisqu'il peut recevoir plus ou moins selon les éventualités qui se présenteront et selon ses aptitudes particulières. L'arrangement conclu avec le propriétaire des voitures sera alors pour le cocher une source de perte ou de gain variable. Nous y trouvons donc tous les caractères de la sous-entreprise. C'est en ce sens que la cour de cassation de France s'est prononcée dans son arrêt du 30 décembre 1828 (Sirey-Devill., 1830, 1, p. 111), et que Troplong a pu dire: Les cochers des voitures de place ne sont pas non plus,à l'égard des loueurs ou entrepreneurs qui les emploient, dans la relation de domestiques ou d'ouvriers à gages. L'entrepreneur leur confie sa voiture et ses chevaux moyennant une rétribution fixée par jour, par semaine ou par mois, et ceux-ci reçoivent pour leur propre compte, et au risque d'un bénéfice plus ou moins considérable, les 327. Nous devons examiner encore quelques-rétributions des personnes qui les louent; dans uns des cas où le sens du mot domestique a semblé douteux.

Curasson défend le même principe (t. 2. p. 531, deuxième édition). Enfin Carou (Comp. des juges de paix, no 544) traite spécialement la question de la compétence des juges de paix pour prononcer sur des réclamations élevées par des serviteurs de commerçants contre leurs patrous, et la résout comme nous dans le sens de l'affirmative.

On s'est demandé si un cocher de voiture de place était un domestique.

M.Cloes décide négativement laquestion en déclarant que cette opinion est d'accord avec un jugement du tribunal de Liége, du 23 janvier 1841 (Cloes, Loi sur la compétence, p. 107, 108 et 109). Ce jugement déclare à bon droit que les cochers d'omnibus ne doivent pas obtenir de congé d'acquit de leurs engagements, parce qu'ils ne font pas partie des ouvriers employés par les manufacturiers, fabricants ou autres auxquels la loi du 22 germinal an xi impose cette obligation. Mais le tribunal de Liége ne décide pas la question de savoir si les cochers de place sont des domestiques du propriétaire des voitures. Toutefois il semble donner raison plutôt à l'affirmative qu'à la négative, puisqu'il qualifie ces cochers d'hommes de service à gage, terme qui n'exclut aucunement l'idée de domesticité. Nous pensons donc qu'il n'est pas possible de décider d'une manière absolue que le cocher d'une voiture de place n'est pas le domestique de celui qui l'emploie.

Toutefois, il y a lieu de faire ici une distinction essentielle. Le cocher est-il payé à appointements fixes par l'entrepreneur de voitures publiques, nous ne voyons aucune raison pour ne pas le comprendre parmi les domestiques. Ces fonctions n'ont rien de relevé et ne nécessitent pas plus un travail intellectuel que celles de toute autre personne employée à un service quelconque de domesticité. Dès lors il importe peu, comme nous l'avons dit (supra, no 326), que le service soit rendu à un particulier ou à un commerçant.

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cette position ils sont plutôt des facteurs préposés, ou serviteurs pour le commerce. (Troplong, Louage, no 887, p. 354. Ed. Bruxelles, 1845.)

On peut appliquer au cocher, dans les conditions que nous mentionnons, ce que nous avons dit plus haut des ouvriers payés en proportion du travail effectué par eux (V. supra, no 291 et suiv.).

325. La contestation entre le propriétaire d'un domaine et son garde particulier appartient-elle au juge de paix?

La question n'est pas douteuse. Le garde particulier n'est pas un domestique. Les gardes forestiers des particuliers doivent, dit un arrêt de la cour de Liége, être rangés dans la classe des officiers de police judiciaire (9 juillet 1833, Pas., 33, 2, 198). Or il est impossible de supposer qu'un officier de police judiciaire puisse être le domestique d'un particulier. Aussi a-t-il été décidé que les contestations entre un propriétaire et son garde particulier ne sont pas de la compétence du juge de paix, parce que le garde particulier n'est pas domestique. Bourges, 29 juillet 1853 (Dalloz, Périod., 1854, 2, 41).

On a décidé, en appliquant le même principe en matière pénale, que les gardes forestiers, même particuliers, qui se rendent coupables de vol de bois dans les forêts confiées à leur garde, ne sont passibles que des peines portées par le code forestier contre les délinquants ordinaires (sauf l'application du maximum, aux termes de l'art. 198 du code pénal). — On ne peut considérer ces gardes comme des serviteurs à gages, passibles, à raison des vols par eux commis, des peines prononcées par le code pénal. — En conséquence, ils sont, en leur qualité d'officiers de police judiciaire, justiciables exclusivement

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