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cet article est une action relative à la disposition. | de paix, n° 279), soutiennent que le juge de Curasson (t. 2, p. 500) et Masson (n° 260) pro- paix peut connaître de toutes les actions en fessent cette opinion sous l'empire de la loi fran- dommages-intérêts, même de celles fondées sur çaise. L'action basée sur l'art. 674 ne perd pas un dommage survenu nonobstant l'observation de son caractère parce qu'elle se réduit à des dom-l'art. 674. Mais cette opinion ne nous parait mages-intérêts. basée, nous l'avons dit, ni sur la lettre, ni sur l'esprit de l'art. 9.

470. Le juge de paix n'est compétent pour statuer dans les limites de l'art. 674 que dans le cas où la proprieté ou la mitoyenneté du mur ne sont pas contestées.

Ainsi, quand les propriétaires voisins ne sont pas d'accord sur la propriété ou la mitoyenneté du mur, le débat se complique d'une question de droit et le juge de paix devient incompétent.

C'est ce qu'a décidé spécialement le tribunal de Nivelles le 12 décembre 1853, et le juge de paix de Diest le 13 octobre 1854 (Recueil de Cloes et Boujean, t. 3, p. 431 et la note).

et 461).

469. Mais si au contraire la demande en dommages-intérêts est fondée sur ce que, nonobstant l'observation des règles prescrites par l'art. 674, il y a eu dommage, cette action n'est de la compétence du juge de paix que dans les limites fixées par l'art. 1er de la loi de 1841. Cette hypothèse est en effet toute différente de celle prévue à notre numéro précédent. Les dommages-intérêts ne sont plus fondés sur l'article 674, c'est-à-dire sur le dommage éprouvé par suite de l'inobservation des distances nécessaires ou sur la négligence à exécuter les travaux qui devaient empêcher le dommage La réclamation d'une somme d'argent ne peut se justifier que par la règle générale que tout dommage On peut appliquer par analogie à cette hypocausé à autrui doit être réparé (art. 1382), et thèse tout ce que nous avons dit déjà à propos de cela indépendamment de l'observation des rè-la contestation de propriété (supra, no 443 à 445 glements et usages relatifs aux constructions. Etendre la compétence du juge de paix à tous 471. Si le propriétaire assigné en exécution les cas où des dommages-intérêts seraient ré- de l'art. 674 prétendait avoir acquis par prescrip clamés par un propriétaire voisin contre un tion trentenaire le droit d'avoir des construcautre, ce serait donner au magistrat une com- tions dans des conditions autres que celles pétence illimitée en matière de contestations de voulues par la loi, le juge de paix serait-il comvoisinage et non plus restreindre cette compé-pétent pour statuer sur la contestation? tence dans le cercle des actions relatives à l'article 674 du code civil, comme le veut la loi de 1841. Foucher émet cette opinion (no 309 et 310) et la cour d'appel de Bruxelles se prononce dans le même sens par arrêt du 5 juillet 1854 rendu sur les conclusions de M. l'avocat général Corbisier (Pas., 55, 2, 83). Dans l'espèce, un propriétaire se plaignait de ce que des matières étrangères se répandaient dans son puits, par suite de l'existence d'une savonnerie voisine. Devant la cour, on objecta l'incompétence du tribunal civil pour se prononcer sur la question. Le juge de paix, disait-on, était seul compétent aux termes de l'art. 9 de la loi de 1841. La cour repousse le moyen, en se fondant sur ce que l'action telle qu'elle a été intentée ne rentre dans aucun des cas prévus par l'art. 674 du code civil.

Et en effet il s'agissait, non pas de faire observer des distances et des précautions règlementaires, ou d'obtenir des dommages-intérêts pour dommage survenu par suite d'inobservation des règles de l'art. 674. L'action avait simplement pour but d'obtenir la réparation d'un préjudice causé, indépendamment de toutes précautions qui auraient été prises.

Toutefois Masson (Commentaire de la loi de 1838), et Dalloz (Répert., vo Cʊmp. civ des trib.

Dalloz (Répert., v° Comp. civ. des trib. de paix, no 283) soutient l'affirmative, en se fondant sur ce que dans ce cas la question de propriété n'est pas en jeu, et sur ce que le juge de l'action est juge de l'exception.

Nous ne pouvons admettre ce raisonnement, et nous invoquons pour le combattre les raisons que nous avous exposées sur une question tout à fait analogue (supra, no 462).

472. Rappelons enfin le principe que le juge ordinaire est radicalement incompétent pour statuer dans les cas prévus par l'art., §§ 2 et 3. Le tribunal de Huy a décidé spécialement ce point en matière de plantations d'arbres. 7 juin 1849 (Belg. jud., t. 7, p. 1290 et 1396, le réquisitoire et les observations qui accompagnent le jugement). Quant aux raisons sur lesquelles se base ce principe, V. supra, no 59, 211, 228 et 257.

473. Terminons en rappelant un autre principe commun à toutes les parties de l'art. 9.

L'évaluation prescrite par l'art. 8 n'est pas applicable à l'art. 9. C'est là un point qui est rendu évident par la place occupée par l'art. 9 et par les discussions qui ont précédé l'adoption de la loi. Nous avons discuté la question en nous occupant de l'art. 8 (supra, no 385). Nous n'avons donc plus à y revenir.

ARTICLE 10.

Ne sera pas recevable l'appel des jugements mal à propos qualifiés en premier ressort, ou qui, étant en dernier ressort, n'auraient pas été qualifiés. Seront sujets à l'appel les jugements qualifiés en dernier ressort, s'ils ont statué, soit sur des questions de compétence, soit sur des matières dont le juge de paix ne pouvait connaître qu'en premier ressort.

Néanmoins, si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après la décision définitive ou qu'après un jugement interlocutoire et conjointement avec l'appel de ce jugement.

SOMMAIRE.

474. Portée de l'art. 10 én ce qui concerne la qualifica- | 487. Distinction établie par le code de procédure entre tion donnée au jugement par le premier juge.

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le jugement interlocutoire et le jugement préparatoire. Dans le cas de préparatoire l'appel sur la compétence ne peut être interjeté avant le jugement definitif.

L'appel du jugement sur la compétence peut-il être interjeté conjointement avec celui du jugement qui accorde une provisiou?

L'appel du jugement sur la compétence peut-il être interjeté si le défendeur est sans grief contre le jugement interlocutoire?

L'appel du jugement sur la compétence peut-il, dans ce cas, s'exercer conjointement avec celui sur le fond?

478. Utilité du principe de la loi dans cette dernière hy- 491. L'appel du jugement sur la compétence est recevapothèse. Inconvénients de ce principe.

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ble quand celui du jugement interlocutoire ou dénitif est interjeté par le demandeur. Hypothèse où l'appel du jugement sur la compétence peut s'exercer seul.

480. Modification apportée par un amendement de M. de 493. Quand l'appel du jugement sur la compétence peut

Behr au projet de l'art. 10 de la loi belge.

481. Portée de l'amendement de M. de Garcia rejeté par

la chambre. 482. L'appel du jugement sur la compétence doit-il être interjeté conjointement avec l'appel sur le fond? 483. Dans le cas de jugement par défaut sur le fond, l'appel sur la compétence peut-il avoir lieu sans délai ?

484. Dans quelle hypothèse l'appel sur la compétence ne peut avoir lieu.

485. Quand il y a appelsur le fond, l'appel sur la compétence est toujours recevable. Sens du mot conjointement dans le § 3 de l'art. 10.

486. Appel du jugement sur la compétence interjeté conjointement avec celui sur un jugement interlocutoire.

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COMMENTAIRE.

474. Le premier principe inséré dans l'arti- | cle 10 n'offre rien de nouveau. Il n'est que l'application pure et simple aux justices de paix de l'art. 453 du code de procédure civile. Cette disposition dit en effet : « Seront sujets à l'appel, les jugements qualifiés en dernier ressort, lorsqu'ils auront été rendus par des juges qui ne pouvaient prononcer qu'en première instance.

Ne seront recevables les appels des jugements rendus sur des matières dont la connaissauce en dernier ressort appartient aux pre

miers juges, mais qu'il auraient omis de qualifier, ou qu'ils auraient qualifiés en premier ressort. » Antérieurement à la loi de 1841, la jurisprudence n'avait cessé d'appliquer aux justices de paix la disposition de l'article 453. (Cass. de France, 5 février 1810, S.-V., 10, 1, 224, et 1er juillet 1812, S.-V., 12, 1, 351.)

L'art. 10 dont nous nous occupons, s'est donc borné à constater législativement ce qui n'était admis jusque-là que par la jurisprudence. Dans son rapport M. Liedts confirme cette in

DES JUSTICES DE PAIX.

terprétation naturelle de l'art. 10, en disant L'article 453 du code de procédure, qui détermine quels sont les jugements sujets à appel, s'applique aux jugements rendus par les juges de paix comme à ceux rendus par les tribunaux ordinaires. › (Sur l'art. 9 de la commission. Loi sur la compétence, p. 36.)

D'ailleurs le principe posé par l'art. 10 dérive d'une règle générale qui ne laisse aucune place à l'équivoque: L'ordre des juridictions ne peut dépendre de la qualification erronée que le juge en premier ressort donne au jugement rendu. Que ce magistrat qualifie de jugement en premier ressort celui qui en réalité est non susceptible d'appel, qu'il déclare au contraire en dernier ressort le jugement pour lequel l'appel reste ouvert, qu'il s'abstieune enfin de donner une qualification quelconque au jugement, peu importe. L'appel sera un droit quand la loi le permettra. Il cessera au contraire d'en être un, lorsque le législateur ne l'aura pas autorisé Tout autre principe mettrait la volonté du juge à la place de celle de la loi, et bouleverserait les règles des juridictions.

475. Après avoir proclamé l'inefficacité de la qualification donnée par le juge à son œuvre, l'art. 10 dont nous nous occupons porte que les jugements qui ont statué sur des questions de compétence seront sujets à appel alors même qu'ils seraient qualitiés en dernier ressort. Cette règle n'est encore que l'application aux justices de paix d'un principe inséré dans le code de procédure civile: Lorsqu'il s'agira d'incompétence, dit l'art. 454 de ce code, l'appel sera recevable, encore que le jugement ait été qualité en dernier ressort. » L'art. 10 érige en règle législative pour les justices de paix le principe de l'art. 454 qui avait d'ailleurs été étendu par la jurisprudence à la juridiction inférieure. Cass. de France, 16 juin 1810 (S.-V., 11, 1, 164). Id., 22 avril 1811 (S.-V., 11, 1, 162). Comme le dit Henrion de Pansey (Comp. des juges de paix, ch. 59) qui déclare l'art. 454 applicable aux justices de paix, le déclinatoire n'est pas un incident du procès, c'est bien réellement une demande principale, et le droit d'avoir tel juge plutôt que tel autre ne tombe pas en évaluation.

Toutefois, sous l'empire du code de procédure civile, une question restait douteuse, celle de savoir si, dans le cas d'incompétence du juge de paix, c'était au juge d'appel qu'il fallait recourir ou bien à la cour de cassation. Ce doute provenait de ce que la loi du 27 ventôse an vi dans son art. 77 permettait le recours en cassation pour incompétence, contre les sentences rendues en dernier ressort par les juges de paix. Etait-ce cet art. 77 ou bien l'art. 454 du code de procédure civile qui devait être appliqué aux justices de paix?

La loi belge du 4 août 1832 sur le recours en cassation avait déjà effacé de son texte le recours en cassation pour incompétence. Elle tranchait donc la question et donnait sans aucun

doute la préférence au recours en appel. C'est ce que la cour de cassation de Belgique avait décidé sous l'empire de la loi de 1832, arrêt du 14 mai 1841 (Pas., 1841, 1, p. 207; V. supra, notre no 76).

L'art. 10 de la loi du 25 mars 1841 ne laisse place à aucune difficulté sur ce point et prend soin de donner au juge d'appel le droit de se prononcer sur les questions de compé

tence.

476. L'appel est donc toujours ouvert quand la compétence du juge de paix a été contestée, peu importe que le juge ait qualifié son jugement de décision en dernier ressort. Mais il est à remarquer que si l'affaire n'est pas du genre de celles pour lesquelles l'appel est recevable au fond, le juge supérieur n'a à statuer que sur le déclinatoire.

Le fond du litige lui reste étranger. La loi n'accorde l'appel que du jugement statuant sur la question de compétence. Le surplus de la décision du juge reste soumis aux règles générales de la juridiction. Tel est aussi l'avis de Curasson (t. 2, p. 439) et celui de Cloes (Compétence, no 151, p. 167). S'il en était autrement, il n'y aurait plus une seule décision qui ne fût soumise à l'appel, même sur le fond, puisqu'il suffirait d'un déclinatoire pour remettre le litige entier en contestation. Remarquons cependant que la réformation du jugement sur la compétence a pour effet de faire tomber la décision au fond. Un juge incompétent ne peut rendre un jugement valable Il y a lieu quand le premier juge a été déclaré incompétent de porter le litige en entier devant une autre juridiction.

477. La décision du juge de páix sur la compétence peut toujours être frappée d'appel. Mais ce recours ne peut pas dans tous les cas s'exercer immédiatement.

Deux hypothèses dillérentes se présentent, ou bien le juge de paix se déclare incompétent, ou bien au contraire, il s'attribue compétence.

Dans le premier cas, rien ne s'oppose à ce que l'appel soit immédiatement interjeté. Ni l'article 454 du code de procédure, ni l'art. 10 de la loi de 1841 ne font obstacle à l'appel immédiat.

Dans le second cas, il en est autrement. Le second paragraphe de l'art. 10 porte à cet égard une règle nouvelle: Néanmoins, dit cette disposition, si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après la décision définitive ou qu'après un jugement interlocutoire et conjointement avec l'appel de ce jugement. »

478. Voici en quels termes M. Liedts, rapporteur de la commission spéciale justifiait l'innovation qui a pris place dans le paragraphe final de l'art. 10: L'article 453 du code de procédure, qui détermine quels sont les jugements sujets à l'appel, s'applique aux jugements rendus par les juges de paix comme à ceux

rendus par les tribunaux ordinaires. Toutefois l'expérience a fait voir que l'intérêt des justiciables réclame une modification au droit accordé aux parties d'interjeter appel des jugements rendus par le juge de paix sur un déclinatoire de compétence.

Jusqu'ici, tout appel d'un pareil jugement suspendait l'examen de la contestation au fond; il fallait que le juge d'appel statuât d'abord sur la compétence, et les parties revenaient ensuite reprendre la cause devant le juge de paix, si la compétence était recounue. De là il résultait qu'un plaideur de mauvaise foi, décidé à fatiguer son adversaire, opposait souvent à une action ayant pour objet une valeur de quelques francs l'exception d'incompétence, interjetait appel du jugement qui le déboutait de son exception, et forçait ainsi son adversaire à le suivre devant le juge d'appel, persuadé qu'il obtiendrait par lassitude ce qu'il ne pouvait espérer du magistrat appelé à connaître du différend.

Il a paru à votre commission que, si l'on se pénètre bien du but de l'institution des juges de paix, et du peu d'importance que présentent généralement les actions portées devant eux, on peut admettre provisoirement la présomption du bien jugé en faveur du jugement par le quel ce magistrat se déclare compétent, et en défendre l'appel jusqu'au moment où il interviendra un jugement soit interlocutoire, soit définitif sur le fond.» (L. sur la compétence, p. 36.)

Le système préconisé par la commission spéciale, et qui a pris place dans la loi, après une légère modification (V. infra, no 480) offre à coup sûr l'avantage de la célérité, mais on ne peut se dissimuler qu'il présente aussi un inconvénient assez grave. L'interdiction d'appeler de la décision sur la compétence avant la décision définitive, ou du moins avant un jugement interlocutoire expose à des frais frustratoires. Si en appel la décision sur la compétence est réformée, le jugement tombe en entier comme rendu par un magistrat sans pouvoir. Dès lors tous les frais faits devant le premier juge incombent au perdant et il y a lieu de recommencer toute la procédure. (V. infra, no 481.) M. Liedts signalait cet inconvénient, mais le jugeait sans grande importance en présence du peu de valeur des contestations soumises aux juges de paix. M. de Haussy, dans son rapport au sénat (L. sur la compétence, p. 149), siguale aussi l'inconvénient, mais le déclare inévitable si l'on veut simplifier la procédure et accélérer l'expédition des affaires devant les justices de paix.

479. L'art. 14 de la loi française des 25 mai6 juin 1838 a la plus grande analogie avec notre art. 10. Signalons toutefois entre eux une différence essentielle. Le § 2 de l'art. 14 est ainsi conçu Néanmoins si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après le jugement définitif. » La loi belge porte au contraire: «L'appel ne pourra

être interjeté qu'après la décision définitive, ou qu'après un jugement interlocutoire et conjointemeni avec l'appel de ce jugement. »

Sous l'empire de la loi française, il peut donc sembler douteux que l'appel de la décision sur la compétence soit recevable après un jugement interlocutoire. Le texte de la loi ne dit rien de cette hypothèse, et se borne à permettre l'appel sur la compétence après le jugement définitif.

Mais contre cette interprétation rigoureuse des termes de la loi, on peut faire valoir cette considération que l'appel étant ouvert en général contre un jugement interlocutoire (art. 31, § 2, c. de pr. civ.) avant le jugement définitif, il n'existe aucune raison, quand il est intervenu un interlocutoire, de retarder l'appel pour incompétence jusqu'au jugement définitif. La Joi, peut-on dire en ce sens, n'a voulu retarder l'appel sur incompétence que pour éviter que cet appel fût interjeté seul, et devint un refuge pour la mauvaise foi. Mais dès l'instant où l'appel est de droit pour un autre motif que l'incompétence, on ne voit plus de raison au retard édicté par la loi.

Avec cette dernière interprétation de la loi française, il faudrait donc entendre les mots jugement définitif, comme s'ils comprenaient aussi le jugement interlocutoire. Défendant cette dernière manière de voir, Foucher (no 443) décide «qu'en cas d'appel ouvert sur un jugement interlocutoire, le tribunal supérieur doit en même temps statuer sur le grief d'incompétence, s'il a déjà fait l'objet d'une décision du premier juge, parce qu'il y a là tout à la fois économie de frais et de temps, meilleure administration de la justice et raisonnement logique.

Il y a plus, dit-il, je serais disposé à admet tre que, faute par l'appelant de n'avoir pas présenté son grief d'incompétence en même temps que celui que lui cause le jugement interlocutoire, il doit être déclaré déchu de son droit d'appel en ce qui concerne l'incompétence: autrement on retomberait dans les inconvénients que la loi a eu pour but d'éviter, puisque ayant déjà saisi le tribunal supérieur à l'occasion de l'interlocutoire, on se réserverait d'y traîner de nouveau son adversaire, si le jugement sur le fond n'était pas favorable, et cela quand même ce jugement serait rendu en dernier ressort, faisant ainsi tourner au profit de la mauvaise foi et de la chicane une arme dont la loi s'était servie pour les détruire. »

Cette interprétation de la loi française nous paraît inadmissible, parce qu'elle est en opposition complète avec le texte de la loi. Comment contraindre, sous peine de déchéance, un plaideur à présenter son grief d'incompétence en même temps que l'appel sur l'interlocutoire, quand la loi dit expressément que l'appel sur compétence ne pourra être interjeté qu'après le jugement définitif? Remarquons que, lors de la discussion de la loi belge de 1841, M. Raikem trouvait des inconvénients à per

mettre l'appel sur compétence après le juge-ticle soumis à votre discussion, d'abord parce ment interlocutoire, et déclarait préférer le que toute la première partie de .cet article se système de la loi française, c'est-à-dire l'appel trouve dans l'art. 453, c. de proc. civ., et qu'il après le jugement définitif seulement (L. sur la est inutile de répéter ce qui existe en principe compétence, p. 85). Dans l'opinion de M. Rai- | général. » kem, le sens de la loi française n'était donc pas douteux.

On peut regretter avec Foucher que la loi française n'ait pas été plus précise, mais il nous parait impossible d'ajouter à son texte, d'autant plus que rien dans la discussion et dans les rapports ne vient y autoriser.

480. La loi belge de 1841, au contraire, ne laisse aucun doute sur la question, comme nous l'avons vu plus haut (no 477 et 478).

Le projet de la commission spéciale a subi une légère modification lors de la discussion à la chambre des représentants.

Ce projet portait en effet Art. 9 Néanmoins, si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après un jugement interlocutoire ou définitif sur le fond. »

M. de Behr proposa paramendement que l'appel contre la décision du juge de paix qui s'était déclaré compétent ne fût permis que conjointement avec l'appel sur l'interlocutoire. « La loi, disait-il, laisse la faculté d'appeler, soit après le jugement interlocutoire, soit après le jugement définitif; mais il ne faut pas laisser appeler du jugement de compétence sans appeler du jugement interlocutoire ou définitif. Voilà le but de mon amendement qui est conçu pour lever tous les doutes à cet égard, tandis qu'il en resterait par la rédaction de la commission. » (L. sur la competence, p. 84)

M. le ministre de la justice (Leclercq) appuya l'amendement de M. de Behr. Cet amendement fut mis aux voix et adopté. Il fait aujourd'hui partie de la loi.

481. D'autres modifications furent proposées à la chambre des représentants, mais sans succès. Il est nécessaire cependant de les analyser, parce qu'elles servent à déterminer le sens précis à donner à notre art. 10.

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M. de Garcia proposa, par amendement, de supprimer l'art. 10 de la commission et de le remplacer par la disposition suivante :

Art. 10. Le juge de paix, en rejetant le déclinatoire, statuera au fond par le même jugement, lorsque la matière sera disposée à recevoir une décision définitive, mais par deux dispositions distinctes, l'une sur la compétence, l'autre sur le fond.

Si l'une des parties refuse de prendre d'au tres conclusions que sur la compétence, le juge de paix le constatera par le procès-verbal de l'audience, et il prononcera par défaut sur le fond.

Les dispositions sur la compétence pourront toujours être attaquées par la voie d'appel.

Voici comment cet orateur justifiait son amendement: «J'ai proposé de remplacer l'ar

L'art. 455, c. de proc., civ. est ainsi conçu : Seront sujets à l'appel les jugements qualifiés en dernier ressort, lorsqu'ils auront été rendus par des juges qui ne pouvaient prononcer qu'en première instance.

Ne seront pas recevables les appels des jugements rendus sur des matières dont la connaissance en dernier ressort appartient aux premiers juges, mais qu'ils auraient omis de qualifier ou qu'ils auraient qualifiés en premier ressort. » On voit, d'après cela, que la première partie de cet article est complétement inutile.

Dans cet article on s'est proposé un autre but (je désire qu'on l'atteigne), c'est de simplifier la procédure dans les questions de la compétence. Le projet de la commission atteint-il ce but? Je ne le trouve pas.

Il porte ... Si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après un jugement interlocutoire ou définitif sur le fond. Ces mots, après un jugement interlocutoire, » peuvent laisser bien des doutes et donner naissance à des contestations fort longues. On sait combien il est difficile, dans la pratique, de distinguer un jugement interlocutoire d'un jugement préparatoire. Il résulte de là un grand nombre de circuits de procédure que mon amendement tend à éviter.»

L'amendement de M. de Garcia fut soutenu par M. Raikem. Après avoir combattu le projet de la commission, l'orateur justifiait l'amendement par les considérations suivantes : « Lorsque l'affaire est simple, disait-il, il est trèsfacile de statuer sur le fond en même temps que sur la compétence; mais lorsque l'affaire est compliquée, ne vaut-il pas mieux que le juge en appel statue définitivement sur la compétence avant qu'on ne fasse des enquêtes, des descentes sur les lieux, avant qu'on ne fasse, en un mot, tous les frais qui peuvent être nécessaires pour qu'un jugement sur le fond puisse intervenir? Il me semble que cela engendrerait moins d'inconvénients. C'est d'ailleurs ce qui existe aujourd'hui, que l'on peut appeler d'un jugement sur la compétence sans attendrê le jugement sur le fond. Je n'ai pas vu qu'il soit résulté des inconvénients de l'état actuel des choses, et l'on m'a toujours enseigné qu'il ne faut changer une loi que lorsque l'utilité d'un changement est reconnue. »

M. le ministre de la justice combattit l'amendement par les considérations suivantes : « Il me semble, messieurs, que la disposition que nous examinons a pour objet d'empêcher que, dans une affaire où la célérité est une condition de bonne justice, on n'élude toutes les mesures que vous avez prises pour obtenir cette célérité, en élevant des exceptions d'incompétence mal fondées et en appelant ensuite des jugements

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