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délai légal (art. 449, code de procédure civile). | La cour de Bruxelles a prononcé la nullité de l'appel interjeté dans la huitaine, alors même que le jugement dont est appel avait ordonné de plaider au fond dans la huitaine. Dans ce cas on pouvait, dit la cour, comparaître et plaider sous réserve d'appel. 30, déc. 1839 (Pas, 39, 2, p. 234).

Cette nullité est-elle d'ordre public? La question est controversée. Chauveau sur Carré

(quest. 1612 ter); la cour de Bordeaux, 21 déc. 1832 (Dalloz, Rép., vo Appel civil, uo 855) et Jay (Diction. des justices de paix, vo Appel, no 31) soutiennent la négative.

La cour de Bruxelles s'est prononcée en sens contraire par arrêt du 21 février 1838 en se déclarant d'office incompétente pour prononcer sur un appel interjeté dans la huitaine de la prononciation du jugement (Pas., 38, 2, p. 49 et la note).

ARTICLE 12.

Dans les cantons où le besoin du service l'exigera, le gouvernement pourra, sur l'avis du tribunal de l'arrondissement, autoriser les juges de paix à augmenter le nombre de leurs huissiers.

SOMMAIRE.

318. Origine de l'art. 12. Proposition de M. Verhaegen. Amendement introduit par la commission de la chambre des représentants.

519. Proposition faite par la commission du sénat. Adoption de l'art. 12 de la loi.

520. Droit de nomination des huissiers des juges de paix

décret du 14 juin 1813 sont-ils toujours en vigueur ?

522. bis. La citation donnée par un huissier autre que celui de la justice de paix, ou celui spécialement désigné par le juge de paix, est-elle frappée de nullité?

par ces magistrats eux-mêmes. Loi du 28 floréal 523. Abrogation de ces articles en France par l'art. 16 de an 1, art. 5, 6 et 7.

521. Portée de l'art. 12.

522. L'art. 4 du code de procédure civile et l'art. 23 du

la loi du 25 mai 1838. Dispositions nouvelles de la loi française en ce qui concerne les huissiers.

COMMENTAIRE.

Les huissiers, avant de notifier la citation, devront s'adresser au juge de paix pour obtenir fixation de jour. »

Voici les raisons par lesquelles l'orateur justifiait l'innovation proposée :

518. La disposition qui forme l'art. 12 ché à la justice de paix ne pourrait pas faire le n'avait pris place ni dans le projet de loi pri- quart de sa besogne; aujourd'hui que la commitif, ni dans le projet de la commission spé-pétence des justices de paix est très-restreinte, ciale de la Chambre des représentants. Elle il est déjà presque impossible que les huissiers doit son origine à l'initiative parlementaire. attachés à ces justices fassent leur besogne. M. Verhaegen proposa un article additionnel Cependant, il peut quelquefois être très-imporainsi conçu: ‹ Par dérogation à l'art. 4 du tant que l'exploit soit fait de suite, surtout lorscode de procédure civile, les citations devant qu'il s'agit d'interrompre une prescription, les justices de paix et tous les autres exploits d'employer des mesures de conservation. Il pourront être notifiés par tous huissiers près serait donc convenable de permettre aux huisdes cours et tribunaux de l'arrondissement. siers des cours et tribunaux de l'arrondissement, de faire les citations devant les juges de paix; il me semble même que la chose est indispensable, d'autant plus que, dans toutes les villes où il y a un tribunal de première instance, les huissiers près des justices de paix sont en même temps attachés au tribunal de première instance. Ils ont donc, indépendamment de leur besogne comme huissiers près de la justice de paix, leur besogne comme huissiers près du tribunal de première instance; plusieurs d'entre eux sont en outre huissiers audienciers. Il est donc évident, messieurs, que, par suite de l'extension de la compétence des juges de paix, vous devez absolument permettre aux différents huissiers d'instrumenter près de ces juges. Cela est d'autant plus nécessaire que lorsqu'il faut assigner une personne qui n'est pas domiciliée dans le canton, il faut d'abord obtenir du juge de paix l'autorisation de faire faire la citation par un autre huissier. Ce sont là des entraves qui retardent souvent la décision d'affaires ur

Par ce que nous avons fait hier, disait-il, il ne faut pas se le dissimuler, nous avons nonsculement dans les petites, mais aussi dans les grandes villes, et même à Bruxelles, enlevé aux tribunaux de première instance le tiers des affaires qui leur étaient soumises, et même plus. Ceux donc qui ont voté les dispositions qui auront ce résultat, doivent aussi adopter les moyens de saisir les juges de paix des nombreuses contestations qui leur ont été déférées.

D'après l'art. 4 du code de procédure civile, les citations devant les justices de paix ne peuvent être notifiées que par l'huissier attaché à cette justice de paix. S'il fallait maintenir cet état de choses, il serait impossible d'atteindre le but que l'on se propose, car un huissier atta

DES JUSTICES DE PAIX.

gentes et que dès lors il faut faire disparaître. [ d'autoriser les huissiers des cours et tribunaux Cet inconvénient cessera si vous permettez à à instrumenter concurremment avec les huistous les huissiers de notifier les exploits. siers des justices de paix, surtout dans les grandes villes telles que Bruxelles, Liége et Anvers. (Loi sur la comp., p. 107).

Je ne vois pas d'ailleurs pourquoi il faut des huissiers privilégiés, pourquoi les huissiers attachés aux justices de paix doivent avoir un monopole. Il ne faut pas se le dissimuler, messieurs, d'après ce que nous avons établi relativement à la compétence des justices de paix, si les huissiers attachés à ces justices pouvaient seuls y instrumenter, je n'exagère pas en disant qu'un office d'huissier près d'une justice de paix vaudrait à Bruxelles, par exemple, de 20 à 25 mille francs par an. Je ne crois pas qu'il soit juste d'établir un semblable monopole, au détriment des huissiers qui instrumentent aujourd'hui près des tribunaux de première instance, auxquels la loi qui nous occupe enlève plus du tiers de leur besogne. Remarquez, messieurs, qu'ici, à Bruxelles, par exemple, il n'y a que deux justices de paix et que par conséquent nous donnerions à deux huissiers seulement plus du tiers de la besogne de tous les huissiers en général. Un semblable état de choses froisserait considérablement les intérêts du public et les intérêts d'une classe d'individus que nous ne pouvons pas léser non plus. »

M. Verhaegen établissait ensuite que sa proposition n'était pas inconciliable avec la disposition qui forme aujourd'hui l'art. 13 de la loi, (Loi sur la comp., p. 90 et 91) et qui consiste à donner au juge de paix la faculté de faire comparaître les parties devant lui sans citation.

Sur la demande de M. le ministre de la justice, l'article proposé par M. Verhaegen fut renvoyé à l'examen de la commission.

Dans la séance du 7 mai, M. de Behr déposa son rapport au nom de la commission. La proposition primitive était abandonnée et remplacée par celle-ci :

Dans les cantons où le besoin du service l'exigera, le gouvernement pourra, sur l'avis du tribunal de l'arrondissement, autoriser les huissiers des cours et tribunaux de première instance à instrumenter concurremment avec les huissiers des justices de paix. ›

Au lieu de donner à tous les huissiers la faculté de faire les citations devant les justices de paix, cette nouvelle disposition restreignait ce droit aux huissiers de certains cantons. Le gouvernement pouvait, sur l'avis du tribunal d'arrondissement, permettre cette dérogation à la loi commune dans les cantons où le besoin du service l'exigeait. Voici en quels termes la commission justifiait ce changement:

La commission a trouvé, dit le rapport, que la faculté qui serait laissée aux huissiers des cours et tribunaux serait beaucoup trop large, et que, dans plusieurs cantons, les huissiers des justices de paix ne pourraient plus vivre de leur état... La commission a cru que le gouvernement étant laissé juge du nombre des officiers ministériels, il lui appartenait de reconnaître les besoins des justices de paix et

Dans la séance du 8 mai, M. Verhaegen s'étant rallié à la proposition de la commission, celle-ci fut adoptée par la Chambre des représentants (Loi sur la comp., p. 110).

519. Mais la commission du séuat combattit l'article au point de vue du droit exorbitant accordé à tous les huissiers d'exercer dans certains cantons.

Voici les raisons sur lesquelles s'appuyait le rapport de M. de Haussy: «Dans l'état actuel de la législation, les juges de paix sont investis du droit de nommer eux-mêmes leurs huissiers; ils doivent en nommer un au moins et deux au plus, et ils ne peuvent choisir ces huissiers que parmi ceux attachés aux tribunaux de première instance et aux cours d'appel, pourvu qu'ils résident dans leur ressort, et ce n'est que dans le cas où il n'y aurait point d'huissier de cette qualité résidant dans le canton, qu'ils peuvent en choisir parmi les autres citoyens, mais dans ce cas, sauf l'approbation du tribunal de première instance, qui doit confirmer leur nomination.

Telles sont les dispositions de la loi du 28 floréal an x, qui a été jusqu'ici en vigueur et dont l'exécution ne doit avoir donné lieu à aucune plainte. Les besoins du service ont été généralement assurés dans tous les cantons, au moyen d'un seul huissier par justice de paix, et s'il en existe quelques-uns dans le royaume auxquels deux huissiers soient attachés, nous croyons que le nombre en est fort restreint, et il suffit de consulter les statistiques judiciaires, pour se convaincre qu'un huissier peut généralement suffire partout aux nécessités du service; de sorte que si la loi nouvelle, en augmentant le nombre des affaires de ces juridictions, révèle, ce qui est peu probable, la nécessité d'augmenter le nombre de leurs huissiers, le juge de paix pourra user de la faculté, qui lui est accordée par la loi, d'en nommer un second; enfin et pour prévenir l'objection que dans certaines localités ce nombre pourrait être insuffisant encore, on pourrait laisser aux tribunaux d'arrondissement la faculté d'autoriser les juges de paix à augmenter le nombre de leurs huissiers.

Votre commission a pensé qu'il y avait des motifs puissants pour ne pas modifier autrement la législation existante; il importe que les huissiers des justices de paix restent sous la main et sous l'influence des magistrats auxquels ils sont attachés; placés sous leurs ordres, obligés de faire le service de leurs audiences et l'appel des causes, il est juste qu'ils trouvent un dédommagement dans le privilége dont ils jouissent, de signifier seuls les exploits concernant cette juridiction; or, ce privilége deviendrait illusoire, s'il était partagé entre un trop

grand nombre d'huissiers, et le juge perdrait en partie l'autorité qu'il doit exercer sur cette classe de fonctionnaires, s'il ne trouvait la garantie du respect et de la déférence qui lui sont dus dans la crainte même de perdre la position qu'ils tiennent de lui.

Votre commission vous propose donc, messieurs, de modifier la rédaction de l'art. 11, en disant: Dans les cantons où le besoin du service l'exigera, le gouvernement pourra, sur l'avis du tribunal de l'arrondissement, autoriser les juges de paix à augmenter le nombre de leurs huissiers. Cette nouvelle rédaction lui a paru répondre complétement aux motifs qui ont dicté la disposition qu'elle est destinée à remplacer.

D'après cette disposition, le droit de demander l'augmentation du nombre de ses huissiers appartient donc exclusivement à chaque juge de paix. Sur l'avis du tribunal, le gouvernement permet ou ne permet pas cette augmentation.

Le sénat avait à choisir entre l'article adopté par la chambre des représentants et celui par lequel la commission du sénat proposait de le remplacer.

M. le ministre de la justice défendit la proposition adoptée à la chambre des représen

tants.

manqueront pas d'user de l'autorisation que la commission leur maintient; tandis qu'on pourrait dépasser de beaucoup le but qu'on a voulu atteindre, et même arriver à un résultat contraire, en autorisant indistinctement les huissiers des cours et tribunaux de première instance à instrumenter concurremment avec les huissiers de la justice de paix. Encore une fois, la seule chose qu'on a en vue, c'est d'assurer le service près des justices de paix; or, je demande si l'amendement de la commission ne répond pas mieux à ce désir que l'article du projet? La loi de l'an x permet aux juges de paix de désigner un et deux huissiers; eh bien, si la loi actuelle, en étendant leurs attributions, multipliait les affaires de leur juridiction au point de rendre ce nombre insuffisant dans certaines localités, dans ce cas ils verront mieux certes que le gouvernement si les besoins du service en exigent un troisième, ou un quatrième, et d'après la proposition de la commission, ils pourront être autorisés à les nommer. »

Ces raisons triomphèrent devant le sénat, qui adopta la proposition de la commission. ( Loi sur la comp., p. 195 à 199.)

Lors du second vote au sénat, l'article fut de nouveau adopté sans modification (L. sur la compétence, p. 241 et 242). Il en fut de même à la chambre des représentants.

520. Aux termes de l'art. 5 de la loi du 28 floréal an x (18 mai 1802), les juges de paix nomment eux-mêmes leurs huissiers, au nombre de deux au plus. Ceux-ci doivent être pris parmi les huissiers de première instance résidant dans le canton (art. 6); s'il ne s'en rencontre pas de cette catégorie résidant dans le canton, le

L'amendement de la commission, disait-il, n'obvie pas au mal qu'on a voulu éviter. Il autorise le gouvernement à permettre aux juges de paix d'augmenter le nombre de leurs huissiers; mais cela ne remédie pas au mal qui résulterait de ce qu'un trop grand nombre d'affaires seraient portées devant les justices de paix, au détriment des huissiers des cours et tribunaux de première instance. Si on donnait à ces derniers un droit absolu, si on statuait que les huissiers des cours et tribunaux exploiteront concurrem-juge de paix pourra nommer tous autres ciment avec les huissiers des justices de paix, je conçois qu'il pourrait en résulter un grand mal; mais telle n'est pas la disposition; elle laisse au gouvernement le soin d'apprécier dans quel cas il devra accorder cette autorisation; et, dans cette hypothèse, aucun mal n'est à redouter, car le gouvernement est le premier intéressé à ce que les huissiers des justices de paix ne soient pas lésés, de sorte que, par la disposition insérée à l'art. 11, on évitera l'inconvénient de voir les huissiers des cours et tribunaux privés d'une partie de leur clientèle. Ce but serait complétement manqué si on adoptait l'amendement proposé par la commission.

Mais la proposition de la commission du sénat fut vivement soutenue par MM. DumonDumortier, le comte Vilain XIIII, le comte Duval de Beaulieu et de Haussy.

Qui est-ce, demandait ce dernier orateur, qui peut mieux connaître les besoins du service que le juge de paix lui-même? Ce sont les besoins du service des tribunaux de paix qu'on doit consulter exclusivement; cela résulte clairement du texte de l'article, et je crois que si ces besoins se manifestent, les juges de paix ne

toyens, lesquels n'entreront néanmoins en exercice qu'après que le tribunal de première instance, s'étant fait rendre compte de leurs mœurs et de leur capacité, aura confirmé leur nomination (art. 7).

L'arrêté royal du 4 octobre 1832 relatif aux propositions pour la fixation du nombre et pour la nomination des huissiers près les cours et tribunaux déclare, dans son art. 8, que les nominations des huissiers des justices de paix, continueront d'avoir lieu conformément à la loi du 28 floréal an x, c'est-à-dire par le juge de paix.

Le droit de nomination des huissiers n'a pas cessé d'appartenir au juge de paix sous l'empire de la loi de 1841. Seulement, afin de pouvoir l'exercer pour plus de deux huissiers, le juge de paix doit être autorisé par le gouvernement. Tel est le sens que M. de Haussy, rapporteur au sénat, donnait au projet de loi de la commission.

En votant cette disposition, disait-il, vous voterez la continuation d'une législation existante; depuis l'an x, les juges de paix ont toujours été autorisés à nommer leurs huissiers. Mais ils ne peuvent les prendre que parmi les

huissiers immatriculés et attachés aux tribunaux de première instance, et le gouvernement ne donnera cette autorisation qu'après avoir pris l'avis du tribunal d'arrondissement. » (L. sur la compétence, p. 241.)

521. La seule modification que la loi du 28 floréal ait subie concerne donc le nombre des huissiers des justices de paix. Ce nombre est aujourd'hui illimité. Mais l'exercice du droit de nomination par le juge de paix est soumis à une autorisation gouvernementale quand le magistrat veut dépasser le chiffre de deux huissiers.

Cette autorisation, dit l'art. 12, sera rendue sur l'avis du tribunal de l'arrondissement. Il nous paraît résulter de ces termes que, si l'avis du tribunal n'était pas favorable à l'augmentation du nombre des huissiers d'une justice de paix, le gouvernement ne pourrait user de la faculté qui lui est conférée par la loi. Sur l'avis signifie conformément à l'avis, en considération de l'avis. Il ne suffirait donc pas au gouvernement d'avoir pris l'avis du tribunal de première instance, et de ne pas y donner suite. Cet avis est au contraire d'une telle importance dans le cas où nous nous trouvons, que M. de Haussy, présentant au sénat un article identiquement semblable à celui de la loi, croyait pouvoir l'expliquer par ces termes de son rapport: « Pour prévenir l'objection que, dans certaines localités, le nombre de deux huissiers pourrait être insuffisant encore, on pourrait laisser aux tribunaux d'arrondissement la faculté d'autoriser les juges de paix à augmenter le nombre de leurs huissiers (supra, no 519). Bien que ces expressions ne soient pas rigoureusement exactes, elles ne laissent aucun doute sur la pensée de la commission du sénat : c'est le tribunal d'arrondissement qui, par son avis, détermine l'autorisation du gouvernement quant à l'augmentation du nombre des huissiers d'une justice de paix. Mais sur l'avis de ce tribunal, le gouvernement n'est cependant pas obligé d'agir. Le gouvernement pourra autoriser, dit notre disposition, ce qui implique une simple faculté de la part du gouvernement.

522. Il est à peine nécessaire d'ajouter que l'art. 12 de la loi de 1841 n'a porté aucune atteinte à l'art. 4 du code de procédure. La citation doit donc toujours être notifiée par l'huissier de la justice de paix ou par l'un de ces huissiers quand il en existe plusieurs ayant cette qualité. L'article 12 maintient la position spéciale de certains huissiers choisis par le juge de paix. Il se borne à permettre dans certains cas l'augmentation du nombre des huissiers jouissant de cette position exceptionnelle. Nous avons vu que la proposition de M. Verhaegen et l'article adopté d'abord à la chambre des représentants avaient une portée toute différente (supra, n° 518).

Le décret du 14 juin 1813 sur l'organisation et le service des huissiers n'a pas davantage cessé d'être en vigueur. L'art. 28 de ce décret

porte Tous exploits et actes du ministère d'huissier près les justices de paix et les tribunaux de police seront faits par les huissiers ordinaires employés au service des audiences.

A défaut ou en cas d'insuffisance des huissiers ordinaires du ressort, lesdits exploits et actes seront faits par les huissiers ordinaires de l'un des cantons les plus voisins. »

Cette disposition doit se combiner avec l'article 4 du code de procédure.

522 bis. Mais une question plus délicate est celle de savoir si l'exploit est nul quand il est fait en dérogation de l'art. 4 du code de procédure civile, par un huissier autre que « celui de la justice de paix du domicile du défendeur ou en cas d'empêchement, celui commis par le juge.. En d'autre termes, l'huissier ou les huissiers de la justice de paix ont-ils seuls qualité pour faire les exploits qui sont relatifs à cette juridiction?

En faveur de la validité de l'exploit fait par un huissier étranger à la justice de paix, on invoque l'art. 1030 du code de procédure civile. D'après cette disposition aucun exploit ou acte de procédure ne pourra être déclaré nul, si la nullité n'en est pas formellement prononcée par la loi.

« Dans les cas où la loi n'aurait pas prononcé la nullité, l'officier ministériel pourra, soit pour omission, soit pour contravention, être condamné à une amende qui ne sera pas moindre de cinq francs, et n'excédera pas cent francs. »

Cette disposition, dit-on, défend de prononcer aucune nullité d'exploit ou d'acte de procédure, à moins que la loi ne l'exige formellement.

Or l'art. 4 du code de procédure ne prononce pas la nullité de l'exploit fait par un huissier autre que celui désigné. L'amende contre l'huissier qui ne pouvait instrumenter est donc la seule sanction de cet art. 4.

Telle est la solution que le Praticien français donne à la question (t. 1, p. 121). Il en est de même de Chauveau sur Carré (quest. 9); de Thomine-Desmazures (Commentaire, no 26) et de Pigeau (t. 1, p. 9).

Dalloz enseigne aussi en ce sens que les huissiers ordinaires ayant en principe le droit de faire tous les actes de leur ministère, on ne peut prononcer la nullité d'un de ces actes que si la loi la prononce formellement (Anc. Répert., vo Huissier, art. 2, t. 14, p. 370).

Dans son nouveau Répertoire, Dalloz se borne à rapporter les éléments de la controverse (vo Huissier, nos 160 et suiv.). Sous l'empire de la loi de 1838, la question a perdu tout intérêt en France, puisque tous les huissiers du canton ont le droit de faire toutes les citations et tous les actes devant les justices de paix (art. 16). V. supra, no 523.

Mais nous ne pensons pas que, sous l'empire de l'art. 4 du code procédure, l'opinion de Dalloz et des autres auteurs cités soit conforme à la volonté du législateur.

Il est certain que, dès l'origine des justices

de paix, la loi a voulu confier à des huissiers spéciaux le droit de faire exclusivement tous les actes se rapportant à la nouvelle juridiction. Ainsi le décret du 19 vendémiaire an iv (11 octobre 1795) sur l'Organisation administrative et judiciaire porte dans son art. 27: «Il y aura auprès de chaque tribunal non divisé en sections, et de chaque section de tribunal, deux huissiers nommés et révocables par le tribunal; ils feront concurremment tous exploits de justice dans tout le département, hormis pour les justices de paix et bureaux de conciliation... »

Il est donc inexact de dire que tous les huissiers aient en général le même droit. Le décret d'organisation de l'an iv enlève formellement aux huissiers ordinaires le droit d'agir pour les justices de paix et les bureaux de conciliation. En vertu de quelle loi prétendraient-ils avoir qualité?

Le décret du 14 juin 1813, sur l'organisation et le service des huissiers, confirme la prohibition établie dès l'origine par le législateur, en déclarant dans son art. 28 que tous exploits et actes du ministère d'huissier près les justices de paix et les tribunaux de police seront faits par les huissiers ordinaires employés au service des au

diences. »

Ces huissiers ordinaires sont les huissiers audienciers des justices de paix dont parle l'art. 94 | du même décret. Ces huissiers ordinaires ne peuvent être ceux du tribunal d'arrondissement puisque le § 2 de l'art. 28 décide qu'à défaut et en cas d'insuffisauce des huissiers ordinaires du ressort, lesdits exploits et actes seront faits par les huissiers ordinaires de l'un des cantons les plus voisins. Si ce paragraphe exige qu'en cas de nécessité on ait recours aux huissiers d'un canton voisin, c'est, à n'en pas douter, parce que les huissiers de tout le ressort du tribunal de première instance sont en général sans pouvoir. Sinon tous les huissiers des cantons voisins seraient de droit compétents et le paragraphe 2 de l'art. 28 n'aurait aucune raison d'être.

Si les huissiers n'appartenant pas aux justices de paix sont sans qualité pour agir devant ces juridictions, l'art. 4 du code de procédure n'a pas besoin de prononcer expressément la nullité de l'exploit qu'ils auraient fait. Cette nullité est de droit et radicale. Il en est ainsi chaque fois qu'un acte est fait par un officier public sans qualité. Le code de procédure, dans son art. 4, se borne donc à rappeler le droit spécial appartenant aux huissiers des justices de paix. Quant à l'article 1050 du même code, il ne prévoit pas le cas où l'exploit a été fait par un officier ministériel sans pouvoir, mais seulement celui où l'huissier aurait omis dans un acte une formalité qui aurait dû s'y trouver. L'acte, d'ailleurs valablement fait, ne peut être déclaré nul que si la nullité en est prononcée par la loi. Mais l'acte émanant d'un officier ministériel n'ayant pas qualité pour agir est nécessairement nul de plein droit, et la loi n'a pas à prononcer sa nullité.

Cette doctrine est celle de Carré (quest. 9, t. 1, p. 10); de Levasseur (Manuel des just. de paix, p. 21,no 36); de Merlin (Répert., vo Huissier, § 8, et Quest. de droit, vo Huissier des justices de paix, § 2); et de Boncenne (Théorie de la procédure civile, p. 8).

La jurisprudence française était divisée sur la question avant la loi de 1838 (Dalloz, Nouveau Répert., vo Huissier, no 160 et suiv.). Aujourd'hui la question ne peut plus naître en France, comme nous l'avons dit plus haut.

Quant à la jurisprudence belge, elle s'est prononcée dans le sens de la nullité de l'exploit. Un arrêt fort bien motivé, du 9 juillet 1831 (Bruxelles, chambre de cass.), décide que les huissiers des justices de paix ont seuls qualité pour faire les exploits relatifs aux justices de paix et aux bureaux de conciliation et que les exploits de cette nature faits par les huissiers des tribunaux d'arrondissement sont nuls de plein droit (Pas., 31, p. 194).

Nous pouvons aussi citer en ce sens les motifs d'un arrêt de la cour de cassation de Belgique. L'arrêt avait à se prononcer sur la validité d'une citation en matière de police. Il déclare nulle la citation faite par un huissier du tribunal de première instance de l'arrondissement, non spécialement attaché au tribunal de simple police du canton. 4 novembre 1840 (Pas., 40, 1, p. 77).

L'arrêt après avoir mentionné les lois qui établissent des huissiers spéciaux près des justices de paix, se base, entre autres motifs, sur ce que dans l'art. 145 du code d'instruction criminelle, le législateur n'a pas eu l'intention d'abroger pour la simple police une institution qui avait été maintenue pour toutes les autres branches de juridiction des juges de paix... » L'arrêt se termine par cette dernière considération, «que c'est un principe irréfragable que les actes faits par les fonetionnaires publics hors du cercle de leurs attributions sont nuls, sans que la nullité ait besoin d'être expressément prononcée par la loi. »

Ces motifs indiquent clairement que, pour la cour de cassation de Belgique, la nullité de la citation ne pouvait faire doute en matière civile pas plus qu'en matière de police (1).

523. La nouvelle législation française contient quant aux huissiers une disposition trèsdifférente de celle de la loi belge.

L'art. 16 de la loi du 25 mai 1838 porte en effet: Tous les huissiers d'un même canton auront le droit de donner toutes les citations et de faire tous les actes devant la justice de paix. Dans les villes où il y a plusieurs justices de paix, les huissiers exploitent concurremment dans le ressort de la juridiction assignée à leur rési

(1) La nullité de l'exploit de citation en matière de police n'existe pas dans le cas dont nous parlons d'après la jurisprudence de la cour de cassation de France. Voy. la note sous l'arrêt du 4 nov. 1840 (Pas., 1841, 1, p. 77 et 78).

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