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renvoyé à se pourvoir par action principale: [ Les fruits naturels, ou industriels, c'est-àce jugement n'est donc pas susceptible d'appel. dire ceux qui sont le produit spontané de la Cet arrêt constate donc que, d'après l'usage, terre ou le résultat du travail de l'homme les mots intérêts légaux doivent s'entendre scule- (art. 582 et 583 du code civil), sont les accesment des intérêts échus depuis la demande intro-soires de la chose réclamée en justice, de même ductive de l'instance actuelle. que les intérêts sont les accessoires des sommes d'argent.

Le même principe a encore été consacré par un arrêt de Liége du 13 janvier 1829 (Pas., 29, 2, 14), dans une espèce où le demandeur, après avoir, devant le bureau de paix, réclamé, outre le capital, les intérêts échus et exigibles, n'avait pas pris soin de répéter cette demande dans son exploit introductif d'instance, et s'était contenté de réclamer les intérêts légaux. Il ne pouvait prétendre faire entrer ces intérêts légaux en ligne de compte, pour l'évaluation du taux du ressort.

Les cours de Bruxelles et de Gand ont admis de même que les intérêts échus depuis la demande ne peuvent coopérer à la fixation du ressort. Bruxelles, 19 juillet 1848 (Pas., 48, 2, 310); Gand, 6 avril 1849 (Pas., 49, 2, 136).

Il en est évidemment de même pour les arrérages des rentes ou les loyers des propriétés données en location.

En ce qui concerne les arrérages échus postérieurement à la demande, un arrêt de Liége a cependant décidé que lorsqu'on a assigné en payement d'une somme inférieure à 1,060 fr. pour remboursement d'une rente et des arrérages échus, et que, pendant l'instance, on demande le payement d'une autre somme pour les arrérages échus depuis l'ajournement, le jugement qui intervient est en premier ressort, si les demandes réunies excèdent 1,000 francs. Liége, 4 février 1835 (Pas., 35, 2, 46).

Cet arrêt se base sur des motifs erronés, en ce que, pour la fixation du ressort il joint les arrérages échus depuis l'ajournement à ceux échus antérieurement. Mais quant à son dispositif sur la question de recevabilité de l'appel, l'arrêt nous paraît irréprochable. Le demandeur avait en effet demandé à passer titre nouvel de la rente ou bien à recevoir le remboursement du capital et des accessoires, et les deux membres de cette demande alternative donnaient tous deux droit à appel.

Un arrêt de Bruxelles du 14 août 1834 (Pas., 1834, 2, 229), déclare de même erronément dans ses motifs que les arrérages d'une rente échus pendant le procès doivent servir à fixer le ressort; mais il ajoute un second motif qui justifie la recevabilité de l'appel, à savoir la contestation sur la rente elle-même, laquelle donnait lieu au double ressort.

La jurisprudence française nous offre aussi de nombreuses décisions sur le même principe (V. Dalloz, Répert., vo Degrés de jurid., nos 175, 267 et suiv.).

599. Les fruits recueillis depuis l'intentement de l'action doivent être assimilés aux intérêts. Ces derniers ne sont en effet que les fruits civils des sommes d'argent (art. 584 du code civil).

Le produit et le croît des animaux sont aussi des fruits naturels. La même règle doit donc être appliquée à ce genre de produits (art. 582 du code civil).

L'édit des présidiaux du mois d'août 1777 assimile de même les restitutions de fruits aux intérêts, et déclare qu'ils ne peuvent pas compter pour la fixation du ressort, lorsqu'ils sont échus depuis la demande. En déclarant que c'est la demande en principal qui fixe le ressort, la loi de 1790, et après elle la loi de 1841, ont voulu se reporter aux termes de l'édit de 1777.

Il est facile d'ailleurs de comprendre pourquoi les fruits, pas plus que les intérêts, ne peuvent entrer en ligue de compte pour la détermination du ressort, lorsque, bien entendu, ces fruits et intérêts ne sont nés que depuis l'intentement du procès. Le demandeur, en fixant sa réclamation, ne peut avoir égard qu'à ce qui lui est dù. Or, les intérêts et fruits qui peuvent dériver de la demande ne sont pas dus au moment où le procès commence. Ils peuvent, il est vrai, venir à naître plus tard, mais c'est là l'effet de la nature de la chose réclamée, et non le résultat de la volonté du demandeur. Celui-ci n'a donc pas à se préoccuper des intérêts que peuvent produire les sommes réclamées. Les intérêts et fruits ne font pas véritablement partie de la demande. Ils n'en sont que le résultat indirect, et ne peuvent donc être évalués au moment où l'action est présentée à la justice.

600. Mais lorsque les intérêts et fruits réclamés étaient déjà dus au moment de l'intentement de l'action, il n'existe pas de raison pour refuser de les compter dans le chiffre de la demande. Ils forment dans ce cas un chef spécial de la réclamation et ce chef doit être joint aux autres portions de la demande pour établir le ressort. Si cet ensemble dépasse 2,000 francs, le juge ne peut se prononcer qu'en premier ressort. Dans le cas contraire, il n'y a pas lieu à appel.

Il est incoutestable en effet que les intérêts et fruits nés avant la demande, et réclamés par l'exploit introductif d'instance font partie du principal de la réclamation. Ce principal c'est l'objet réclamé, la chose qui, d'après le demandeur, est due au moment de l'action. Or, les intérêts et fruits échus avant la demande ne sont pas des objets vagues dout le chiffre ne peut etre déterminé. Ce sont au contraire des choses certaines et déterminées qui sont dues au demandeur. Telles sont les différences essentielles entre la demande de fruits non échus au moment de l'intentement de l'action, et celle

de fruits déjà perçus par le défendeur à cette époque, et réclamés séparément par le demandeur.

La doctrine que nous venons d'énoncer quant aux fruits échus avant la demande est cependant contredite par un jugement du tribunal de cassation de France le 29 frimaire an xi (Dalloz, Répert., vo Degré de jurid., no 180) dont voici l'espèce :

Telle est la solution indiquée par l'édit de 1777 qui ne donne connaissance en dernier ressort aux juges présidiaux que pour les demandes qui n'excèdent pas 2,000 francs tant pour le principal que pour les intérêts ou arrérages échus avant la demande.

Carré (Lois de la compétence, art. 284, no 320), Merlin (Répert., vo Dernier ressort; § 11, Revendication. § 10; Quest. de droit ; vo Dernier ressort, § 10); et Poncet (t. 1, no 293) admettent la même opinion.

La cour d'appel de Liége, par arrêt du 19 janvier 1842, déclare en ce sens que quand le demandeur n'a évalué ni le terrain qu'il revendique, ni les fruits dont il réclame_la_restitution, l'appel est recevable parce que la demande est indéterminée (Pas., 43, 2, 132); cet arrêt mentionne ainsi les fruits échus comme devant concourir à fixer la valeur de la demande.

Le sieur Cazames réclamait: 1° 575 fr., prix d'une pièce de terre qui aurait dû, suivant lui, être comprise dans la vente de droits successifs que lui avait faite Courtade, mais qui avait précédemment été vendue par son auteur; 2o 300 fr. de dommages-intérêts; 3° les fruits perçus depuis quatre ans. Le tribunal avait rejeté sa demande par un jugement en dernier ressort, et devant le tribunal de cassation il invoquait l'art. 24 de la loi du 24 août 1790, en ce que les juges n'avaient pu juger en dernier ressort, puisque la demande des fruits était in-core dans un arrêt du 5 novembre 1855 (Pas., déterminée. Voici comment le tribunal repousse sa prétention: Considérant que même en admettant le cumul des dommages-intérêts réclamés par le demandeur avec les 575 fr., prix de la pièce de terre dont il s'agit, la valeur de ces deux objets n'excédait pas 1,000 fr., et qu'à l'égard des fruits par lui réclamés, ce n'était | qu'un accessoire de la demande principale dont la quotité détermine seule la compétence du juge; qu'ainsi c'est avec raison que le jugement attaqué a statué en premier et en dernier ressort sur la contestation; Rejette. D

Le tribunal de cassation déclare donc que les fruits réclamés par le demandeur et perçus avant la demande n'étaient que l'accessoire de celle-ci. Nous ne pouvons partager cette opinion. Gardons-nous de confondre le caractère des fruits au point de vue du droit civil, et celui des fruits au point de vue de la valeur de l'action intentée.

Il est bien vrai que les fruits naturels, industriels et civils appartiennent au propriétaire de la chose par droit d'accession (art. 547 du code civil). En ce sens il est possible de dire qu'ils dérivent de la chose, et en sont les accessoires. Mais quand il s'agit d'une demande en justice, il ne suffit plus de savoir quel est le droit du propriétaire de la chose sur certains de ses produits. Ce droit existât-il à l'évidence ne pourrait devenir la base d'un jugement, à moins d'être réclamé par des conclusions formelles. En accordant ce qui ne serait pas spécialement demandé, le juge prononcerait ultra petita. C'est donc la demande seule qui fixe la valeur de l'action. Au point de vue de la réclamation en justice, il importe donc fort peu que les intérêts et fruits soient ou ne soient pas des accessoires d'une autre partie de la demande. I faut que ces intérêts et fruits soient réclamés par conclusions formelles. Ils deviennent ainsi une véritable portion de la demande, et doivent par conséquent compter pour la détermination du ressort.

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La cour de Bruxelles est plus explicite en57, 2, 16). Elle déclare qu'il y a lieu à appel de l'action en revendication d'un immeuble dont le revenu est déterminé par le cadastre à un taux inférieur à celui du dernier ressort, et cela parce qu'à cette demande en revendication était jointe une réclamation indéterminée des fruits perçus. La réclamation des fruits perçus avant la demande suffisait donc dans ce cas à rendre l'appel recevable, quoique la réclamation immobilière ne donnât pas lieu au double ressort.

Nous aurons à examiner plus loin si l'action formée d'une demande mobilière jointe à une demande immobilière donne nécessairement lieu à appel. Toujours est-il que si la demande d'intérêts jointe au capital réclamé forme un ensemble supérieur à 2,000 francs, cette circonstance suffit pour justifier l'appel. Le ressort se règle sur l'ensemble de la demande.

Nous aurons occasion de rencontrer, dans nos numéros suivants, d'autres applications des mêmes principes.

601. Les considérations que nous avons fait valoir nous serviront à distinguer le cas où les frais et dépens sont antérieurs à la demande, de celui où ces frais et dépens sont le résultat de la réclamation en justice. Dans cette dernière hypothèse, les frais faits par une partie pour arriver à la reconnaissance judiciaire de son droit ne viennent augmenter la condamnation qu'éventuellement. Ils ne font pas partie de l'action et ne peuvent être fixés au moment où le deman leur détermine le chiffre de sa réclamation. Ils n'existent pas encore à cette époque. Le ressort se déterminant d'après la demande en principal, il ne faut pas ajouter à celle-ci des frais ou dépens qui ne prendront naissance que postérieurement et qui sont ainsi de véritables accessoires.

Nous ne faisons encore qu'appliquer ici la distinction établie par l'édit des présidiaux de 1777 que nous avons cité plus haut, distinction consacrée par Merlin, Carré et Poncet sous

DES TRIBUNAUX DE PREMIÈRE INSTANCE.

l'empire de la loi de 1790, comme nous l'avons | sans appel, sur l'article des dépens ▸ (t. 12, vu dans nos numéros précédents.

C'est en ce sens que s'est prononcée la jurisprudence. Un arrêt de Bruxelles du 26 janvier 1853 refuse de faire compter dans la demande en principal les intérêts, frais et dépens. Le demandeur n'avait produit aucune pièce constatant qu'il s'agit de frais antérieurs à la demande (Pas., 1853, 2, 154).

La cour de Liége a décidé le même principe par arrêt du 13 mars 1856 (Pas., 1856, 2, 232). Dans l'espèce résolue par cet arrêt, la demande principale n'était que de 120 francs, mais le litige avait cependant été évalué à 3,000 francs. La cour déclare que cette évaluation arbitraire ne pouvait être faite et que les intérêts moratoires et les frais qui ne sont qu'éventuels ne pouvaient être joints au principal pour éluder le dernier ressort.

602. Nous venons de voir que les dépens nés depuis la demande sont de véritables accessoires de celle-ci et restent sans influence sur le

ressort.

Déduisons une conséquence de ce principe:

Quand il n'y a appel que des dépens d'une instance, et que les parties sont tombées d'accord sur le fond du litige, ces dépens règlent-ils le ressort, ou bien faut-il, pour déterminer le ressort, s'en tenir au chiffre du litige primitivement en contestation?

C'est à cette opinion que nous n'hésitons pas à nous ranger.

En vain objecterait-on que c'est l'objet qui reste en litige qui doit régler la compétence et que cet objet n'est autre chose que les dépens, puisque les parties se sont mises d'accord sur le surplus.

Ce raisonnement viendrait échouer devant cette considération capitale que l'accessoire suit nécessairement le sort du principal. Il n'est pas possible de considérer les dépens comme le principal du litige, alors même que l'appel ne porte que sur eux. L'appel n'est donc recevable pour les dépens qu'alors qu'il est ouvert pour la demande elle-même. Comme le disait d'Aguesseau dans ses observations sur un jugement qui avait cru pouvoir décider en dernier ressort sur des dépens inférieurs au taux de ce ressort: C'est une maxime certaine, dans l'ordre judiciaire comme dans d'autres matières, que l'accessoire suit la nature du principal, ou que le principal entraîne nécessairement l'accessoire: d'où il suit que les dépens n'étant que l'accessoire du fond de la contestation, celui qui n'est pas juge du fond en dernier ressort, ne peut être juge en dernier ressort des dépens. C'est ce qui a toujours été décidé à l'égard des présidiaux, qui ont le même pouvoir que vous.

Ainsi le fond des demandes qui ont été portées devant votre tribunal contre la dame de..., n'étant point de votre compétence, au moins comme juge en dernier ressort, il est sans difficulté que vous n'avez pu rendre un jugement

p. 5).

Toutefois deux arrêts de Bruxelles décident le principe contraire. Bruxelles, 4 février 1811 (Dalloz vo Dernier ressort, no 185); Id., 16 novembre 1821 (Pas., 21, 2, 488); mais sans invoquer de motifs de droit à l'appui de leur manière de voir.

A l'appui de l'opinion qui refuse de s'arrêter au chiffre des dépens pour décider du ressort, nous pouvons invoquer l'opinion de Carré (Lois de la comp., art. 281, nos 292 et 293), celle de Benech, p. 493 et suiv., et celle de Dalloz (Répert., vo Dernier ressort, no 182 et s., et vo Appel civil, nos 342 et 453).

La cour de Bordeaux, 14 août 1829 et celle de Limoges, 17 août 1843, se prononcent dans le même sens (Dalloz, Répert., vo Dernier ressort, n° 182).

La cour d'appel de Liége a de même déclaré recevable l'appel interjeté des dépens d'une instance, bien que ces dépens fussent inférieurs à 2,000 fr. parce que le fond était susceptible d'appel. Considérant, dit la cour, sur la première question, qu'en matière immobilière la compétence du dernier ressort ne peut se déterminer que par la quotité de la rente ou le prix de bail de l'immeuble en litige; que, dans l'espèce, le revenu de la maison dont la vente était contestée étant indéterminé, le premier juge n'a pu prononcer qu'à la charge de l'appel; que dès lors il a été loisible de n'appeler que de la disposition du jugement relative aux dépens; qu'en vain l'on invoque l'article 6 du décret du 15 février 1807, qui interdit d'appeler du jugement rendu sur une opposition à la taxe, s'il n'y a appel de quelque disposition sur le fond; car cet article n'est évidemment applicable qu'à la liquidation des dépens et non à la condamnation elle-même, laquelle, à l'encontre de cette liquidation, constitue réellement une disposition sur le fond; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir proposée par les intimés est dénuée de fondement; déclare l'appel recevable. 7 janvier 1832 (Pas., 32, 2, 8).

603. Cet arrêt résout dans ses motifs une seconde question qui doit recevoir une solution toute différente de celle qui vient de nous occuper.

C'est celle de savoir si l'appel sur la liquidation des dépens est recevable en l'absence d'appel sur le fond. Comme le dit la cour de Liége, dans ce cas la solution serait négative.

L'art. 6 du décret du 16 février 1807 porte: L'exécutoire ou le jugement du chef de la liquidation seront susceptibles d'opposition. L'opposition sera formée dans les trois jours de la signification à avoué avec citation; il y sera statué sommairement, et il ne pourra être interjeté appel de ce jugement, que lorsqu'il y aura appel de quelques dispositions sur le fond. »

On sait, dit Carré (art. 281, no 293, t. 3, p. 29), la différence qui existe entre la condam

nation aux dépens et leur liquidation. L'appel est ouvert immédiatement contre la condamnation, parce qu'elle est l'accessoire des condamnations prononcées sur le fond. Il n'y aurait pas plus de raisons pour interdire l'appel du jugement sur ce chef sculement, quoique inférieur au taux du dernier ressort, qu'il n'y en aurait pour déclarer non recevable ce même pourvoi contre un seul chef du jugement.

import de la traite prémentionnée, avec les intérêts jusqu'au 31 décembre 1854; 2° celle de 158 fr. 78 cent., montant des frais de poursuite contre Van Keerberghen; 3o les intérêts de la première somme, à dater du 1er janvier jusqu'au parfait payement, et en outre les dépens. Le 6 février 1855, il intervint un jugement qui admet le demandeur à prouver que la traite a une cause réelle, c'est-à-dire qu'à l'époque La liquidation, au contraire, n'est que l'éva- de sa création le sieur d'Hermine-Delhoteur luation de la condamnation aux dépens, indé était réellement le débiteur de la société de pendante des condamuations sur le principal; charbonnage dont la baronne de Gyseghem faiet surpassât-elle le taux du dernier ressort, sait partie et que les 2,000 francs avancés par l'appel n'est pas admis, mais seulement l'oppo- lui l'ont été pour la société et ont réellement sition, dont le jugement n'est pas même suscep- profité à celle ci. Sur l'appel interjeté de ce jutible d'appel, lorsque le montant de la liquida-gement, la cour se prononça en ces termes sur tion excède le taux du dernier ressort, à moins la fin de non-recevoir : qu'il n'y ait appel de quelques dispositions sur le fond. La raison en est que la décision à ren-lant, devant le tribunal de commerce de Saintdre sur ce pourvoi peut modifier ou anéantir la Nicolas, avait pour objet : 1o le payement d'une condamnation aux dépens, et, par conséquent, traite de 2,000 fr. souscrite par Van Keerberchanger ou annuler la liquidation. ghen-Dewaha, pour la part des 3/8 de la bouillère des Six Bonniers Réunis pour la vente de leurs produits; 2o de 30 fr. pour intérêts jusqu'au 31 décembre 1854; et 3o de 158 fr. 78 c. pour frais de poursuite; intérêts échus et frais auxquels ledit Van Keerberghen avait été condamné au profit de l'appelant, par jugement du tribunal de commerce de Liége du mois d'octobre 1854;

Toutefois un arrêt de la cour de cassation de Belgique du 13 mai 1839 (Pas., 39, 1, 92) a, décidé que quand l'appel ne peut être interjeté de la décision sur la liquidation des dépens, il y a cependant lieu à se pourvoir en cassation. L'article 15 de la loi du 4 août 1832 admet en effet le pourvoi en général contre tous arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les cours et tribunaux. Il n'y a pas de raison pour déroger à ce texte formel, en matière de liquidation des dépens.

604. Lorsque les frais et dépens ont été faits anterieurement au litige, de telle sorte qu'ils ne sont plus la suite ou l'accessoire du litige, il y a pas lieu tenir compte au point de vue du ressort.

Cette règle a reçu son application en matière de frais d'actes notariés payés avant l'instance et réclamés en même temps que l'annulation d'un acte. Les frais doivent être ajoutés au principal de la demaude (cass. de France, 13 frimaire an xiv, Dalloz, vo Dernier ressort, no 181). La cour de Gand, par arrêt du 31 mars 1856, a fait application du principe dans une espèce où il s'agissait de frais judiciaires faits antérieurement à la demande, et compris dans cette demande.

Van Keerberghen avait créé un traite sur d'Hermine-Delhoteur. Le billet fut endossé par Van Keerberghen à Trappeniers, mais d'Hermine Delhoteur en refusa le payement à l'échéance, et Trappeniers ayant fait assigner son cédant devant le tribunal de commerce de Liége, obtint un jugement (19 octobre 1854) qui condamna Van Keerberghen à payer la somme de 2,000 fr., avec les intérêts légaux et les dépens.

Par exploit du 3 janvier 1855, Trappeniers fit assigner la baronne de Gyseghem devant le tribunal de commerce de Saint-Nicolas, aux fins de se voir et entendre condamner, même par corps, à lui payer: 1o la somme de 2,030 fr.,

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Attendu que l'action intentée par l'appe

«Attendu que pour déterminer le taux du dernier ressort, les intérêts et frais résultant d'un jugement, lorsqu'ils sont demandés contre un tiers qui n'a pas été partie à ce jugement, doivent être joints au principal de la demande, parce que dans ce cas ils forment eux-mêmes un véritable capital et qu'ainsi ces sommes réunies dépassent évidemment ce taux;

« Qu'entre les parties, il en est autrement, parce que ces intérêts et ces frais sont à considérer à leur égard comme un accessoire de la demande purement éventuel lors de l'intentement de l'action ;

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|
Que l'intimée n'ayant pas été partie dans la
susdite instance, il s'ensuit que l'appel doit être
déclaré recevable... Gand, 31 mars 1856 (Pas.,
57, 2, 236).

La cour de Bruxelles a décidé dans le même sens qu'on doit comprendre dans la demande, pour déterminer la valeur du litige, les frais antérieurs qui sont des accessoires de la créance et non les conséquences de la réclamation. Bruxelles, 27 décembre 1858 (Praticien belge, 1862, p. 59).

Le même principe a été encore admis par la cour de Bruxelles le 4 avril 1857 (Pas., 58, 2,135), dans une espèce où le litige avait pour objet le payement d'une somme de 2,000 fr., plus celui des frais de protêt et compte de retour montant à 30 fr. 95 cent.

L'une des parties ayant payé ces différentes sommes au porteur de la lettre de change les réclamait en justice contre le tireur de la lettre. La cour de Bruxelles déclare que, dans ces

circonstances, une somme de 2,030 fr. 95 c. étant réclamée, il y avait lieu d'admettre l'appel. Et en effet, dans cette espèce, les frais de protêt et de compte de retour n'étaient pas réclamés par celui qui les avait ordonnés. Le porteur avait été payé par l'endosseur. Les frais étaient demandés par cet endosseur qui, ayant soldé l'import de la lettre et les frais, était en droit de recourir soit contre un précédent eudosseur, soit contre le tireur de la lettre de change (article 164, c. comm.). Dans ce cas c'était évidemment la demande en son entier qui devait fixer le ressort. Il fallait y comprendre les frais payés avant la demande.

La cour de cassation de France a décidé dans le même sens, que lorsqu'un endosseur a été condamné, et a payé au porteur le montant du billet protesté, les intérêts qui ont couru depuis le protêt et les dépens qui ont été adjugés au porteur, forment, dans la demande en garantie intentée contre un autre endosseur ou contre le souscripteur, des capitaux qui doivent être comptés à part pour déterminer la compétence du dernier ressort. Cass., 18 novembre 1807 (Dalloz, Répert., vo Degré de jurid., no 197).

605. Mais les frais de protêt peuvent-ils être comptés dans le principal du litige quand ils sont réclamés en justice par celui qui a ordonné le protêt contre celui qui a refusé de payer le billet?

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arrêt du 11 mai 1831 (Pas., 31, 2, 131), qui admet les frais de protét comme concourant à fixer la valeur du litige.

Nous ne pensons pas que l'art. 185 du code de commerce ait la portée que lui attribue la cour de Bruxelles. Cette disposition se trouve insérée au paragraphe XIII, sect. 1re, titre VIII du code de commerce. Ce paragraphe traite du rechange, c'est-à-dire du nouveau contrat de change qui intervient entre le porteur et le tireur ou l'un des endosseurs, contrat qui permet au porteur de se rembourser du principal de la lettre protestée, des frais et du nouveau change (art. 178 du code de comm.). La retraite au moyen de laquelle le rechange s'effectue est accompagnée d'un compte de retour qui comprend le principal de la lettre de change protestée, les frais de protêt et autres frais légitimes, tels que commissions de banque, courtage, timbre et ports de lettre (art. 181, code de comm.).

Le protêt fait courir les intérêts de la lettre de change (art. 184, code de comm.); mais quant aux intérêts des autres sommes dont le compte de retour se compose, ils ne sont dus que depuis la demande en justice (art. 185, code de comm.).

Cette dernière disposition prouve-t-elle que les frais de protèt font partie du principal de la demande dirigée contre le débiteur de la lettre de change?

En aucune façon.

C'est là une question qui appartient vérita- L'art. 185 a surtout pour but de faire courir blement au ressort commercial et qui devrait les intérêts des sommes dont le compte de retrouver sa place lors de l'explication de l'arti- tour se compose (Pardessus, Cours de droit comcle 24 de la loi de 1841. Toutefois, afin de pré-mercial, no 439). L'art. 185 règle donc un objet, senter un tableau complet des difficultés qui touchent au ressort, nous avons cru préférable de la traiter ici.

La question que nous venons de nous poser doit recevoir une solution toute différente de celle que nous avons admise dans le numéro précédent.

On pourrait dire cependant en faveur de l'opinion contraire que les frais du protêt sont antérieurs à la demande et que par conséquent ils viennent augmenter le chillre de celle-ci en se réunissant à son principal.

Mais il serait facile de répondre que les frais de protêt, bien qu'antérieurs à la demande font véritablement partie des dépens de cette demande puisque le protêt est l'acte préliminaire indispensable pour conserver ses droits en ce qui concerne la lettre de change.

On a fait une autre objection pour prouver que les frais de protêt font partie du principal de la demande.

L'art. 185 du code de commerce, a-t-on dit, porte que l'intérêt des frais de protêt, rechange et autres frais légitimes est dû à compter du jour de la demande en justice. Cette disposition prouve que ces frais sont autre chose qu'un simple accessoire de la demande, car l'intérêt n'est pas dû sur de simples frais. Ce raisonnement est présenté par la cour de Bruxelles dans un

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qui ne change rien au caractère accessoire du protet. La disposition a tout simplement pour but d'éviter une perte d'intérêts au porteur de la lettre de change. La sécurité et la facilité résultant de l'usage de la lettre de change ne seraient pas complètes s'il pouvait résulter du non-payement une perte quelconque pour le porteur du titre.

Les frais de protet font d'ailleurs si peu par-tie du principal de la lettre de change, que l'intérêt de ce principal est dû depuis le jour du protêt, tandis que l'intérêt des frais de protêt et autres ne prend cours que depuis la demande en justice (art. 184 et 185 c. de comm.).

La doctrine de l'arrêt de la cour de Bruxelles du 11 mai 1831 est cependant adoptée par un certain nombre de cours françaises ainsi la cour de Riom, 8 août 1810; celle de Toulouse, 13 mars 1835 (Dalloz, Répert., vo Degrés de juridiction, no 195); celle de Bordeaux, 3 janvier 1840 (Journal du palais, 40, 2, 408); et celle de Colmar, 25 février 1839 (Journal du palais, 39, 1, 551).

Mais la doctrine s'est prononcée en sens contraire. Merlin (Répert., vo Dernier ressort, § 11, Quest. de droit, § 10); Berriat Saint-Prix (t. 1, no 65, chap. 3, art. 3) Carré (Lois de la comp., t. 5, p. 433); et Benech (t. 2, p. 74) refusent de comprendre les frais de protêt dans le principal du litige.

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