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mobilière, ce n'aurait pas été l'évaluation du défendeur qui aurait réglé la compétence, mais bien celle du demandeur seulement, conformément à l'art. 14 de la loi de 1841. L'évaluation du défendeur n'a une influence décisive sur le ressort que dans le cas où il s'agit d'une action immobilière, parce que c'est alors seulement qu'il y a lieu à l'application de l'article 18 de la même loi.

685. L'opinion qui consiste à considérer la demande en expropriation comme immobilière dans toutes ses parties a été vivement critiquée. Voici comment s'exprime à cet égard une dissertation insérée dans la Pasicrisie (1849, 2, p. 9):

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demandeur; cette demande incidente du défendeur, mobilière de sa nature, peut seule servir de base à la fixation du premier ou dernier ressort.

Le défendeur en expropriation pour cause d'utilité publique, devenant ainsi demandeur, et sa demande étant mobilière de sa nature, les règles établies pour ces sortes de demandes sont seules applicables: c'est donc à lui qu'il appartient de fixer le chiffre de ses prétentions, et le demandeur en expropriation pourra s'en libérer en acquittant le prix de cette évaluation, etc. (art. 14, 15 et 17 de la même loi). C'est ce chiffre qui servira à déterminer le taux du premier ou du dernier ressort, quant au chef de la demande qui a pour objet le règlement de l'indemnité...

En résumé donc, la demande en règlement d'indemnité est indépendante de l'action en expropriation; celle-ci est toujours préalable à celle-là, qui peut fort bien être soumise aux deux degrés de juridiction, tandis que l'autre n'y serait pas sujette; car, ou bien le défendeur consent à l'expropriation, et le tribunal décide que les formalités prescrites par la loi pour y parvenir ont été remplies, de manière que le règlement de l'indemnité reste le seul et unique objet du litige, et les indemnités réclamées par le défendeur détermineut le taux du premier ou du dernier ressort; ou bien le défendeur con

Quant à ce dernier objet, qui tend à la mise en possession de l'immeuble, il n'y a pas de doute que l'action ne soit réelle et immobilière, ce sera donc le revenu de l'immeuble, déterminé soit en rente, soit par prix de bail, ou, à défaut de ces bases, par la matrice du rôle de la contribution foncière au moment de la demande, qui fixera, quant à cet objet, la valeur de l'action et le taux du premier ou dernier ressort, et si toutes ces bases manquent, la valeur de l'im-teste la demande d'expropriation, il soutient meuble à exproprier doit être déterminée par le demandeur et le défendeur dans leurs conclusions, et c'est l'évaluation la plus élevée qui doit être prise en considération (art. 14 et 18 de la loi du 25 mars 1841).

Quant à l'autre objet de l'action, la demande en règlement d'indemnité, cette demande est évidemment mobilière de sa nature. Il est même à remarquer que ce sont les conclusions du défendeur qui, quant à ce, doivent seules fixer la compétence du juge en premier ou dernier ressort. En effet, l'expropriation pour cause d'utilité publique est une véritable vente forcée, ainsi qu'on l'appelait autrefois (Delalleau, no 9); le défendeur est donc un vendeur réclamant le prix de l'immeuble et le dommage que la vente forcée lui cause; cette réclamation change donc réellement son rôle et, de défendeur qu'il est sous un rapport, en fait un demandeur sous un autre, et le demandeur qui conteste la hauteur du prix et du dommage réclamés se constitue véritablement défendeur dans cette contestation. En un mot, il en est ici comme en matière de vente ordinaire si la valeur de l'action de l'acquéreur, immobilière de sa nature, en délivrance de l'immeuble acquis se détermine conformément aux règles tracées pour les actions immobilières, et si, quant à cet objet, l'acquéreur doit être considéré comme demandeur, il n'en est plus de même lorsqu'il se défend contre une demande incidente du défendeur, son vendeur, qui réclame un prix supérieur à celui offert par le

que cette demande n'a pas été régulièrement introduite, que les formes prescrites par la loi n'ont pas été observées, que le plan des travaux n'est pas applicable à la propriété dont l'expropriation est poursuivie. Le tribunal prononce. Son jugement sera-t-il sujet à appel? Oui, si le revenu de l'immeuble à exproprier atteint les 75 fr., ou si à défaut de cette base le demandeur ou le défendeur ont évalué la valeur de l'immeuble à un taux qui atteint ce chiffre, car l'action est réelle immobilière; mais si le revenu de l'immeuble est inférieur à 75 fr., le jugement sera en dernier ressort; on aura beau objecter que le tribunal a prononcé sur des demandes indéterminées, à l'égard desquelles la loi nouvelle est sans application; ces demandes forment autant d'incidents à la demande principale en expropriation, et on sait qu'il est de principe que les demandes incidentes suivent le sort de la demande principale. »

Tout ce raisonnement repose sur une distinction entre la partie de l'action qu'on appelle ka demande en expropriation et celle qu'on qualifie de demande sur le règlement de l'indemnité. La demande en expropriation se termine, dit-on, au moment où le tribunal prononce sur la question de savoir si les formalités prescrites par la loi pour parvenir à l'expropriation ont été remplies. Après que ce point a été réglé et que le défendeur a d'ailleurs proposé, conformément à l'article 4 de la loi de 1835 et à peine de déchéance, toutes les exceptions qu'il croyait pouvoir opposer, il ne reste plus qu'un seul objet en ques

tion Comment se réglera l'indemnité ? Cette seconde action a un caractère mobilier et doit s'évaluer d'après la base prescrite pour les actions mobilières.

C'est là, pensons-nous, attribuer à l'action en expropriation un caractère double qui ne lui appartient pas. La loi ordonne, il est vrai, que, par un premier jugement, le tribunal se prononce sur la question de savoir si les formalités exigées pour parvenir à l'expropriation ont été remplies; la loi exige aussi que toutes les exceptions que le défendeur croirait pouvoir opposer soient présentées avant le premier juge

ment.

Mais quel a été le but du législateur en édictant ces dispositions?

Il a voulu éviter les désagréments, les frais et les lenteurs d'une expertise dans le cas où les formalités nécessaires n'auraient pas été remplies. Si le tribunal, dit l'article 5, décide que l'action n'a pas été régulièrement intentée, que les formes prescrites par la loi n'ont pas été observées, ou bien que le plan des travaux n'est pas applicable à la propriété dont l'expropriation est poursuivie, il déclarera qu'il n'y a pas lieu de procéder ultérieurement. » Cette déclaration du tribunal vient donc se poser au début de l'instruction de l'affaire, et met obstacle à toute poursuite ultérieure. Mais parce que le législateur a pris cette sage précaution, s'ensuit-il qu'il ait envisagé la demande en expropriation comme comprenant deux actions distinctes, l'une immobilière, la seconde mobilière?

Une pareille conséquence ne pourrait résulter que d'un texte exprès, lequel n'existe pas. Bien plus, l'interprétatiou qu'on veut tirer de la loi de 1835 est contredite par son texte et par son esprit.

L'action en expropriation, nous l'avons dit, n'a jamais qu'un seul but: l'obtention par l'expropriant de l'immeuble appartenant à l'exproprié. La demande ne reçoit donc son effet que quand l'immeuble devient la propriété de l'expropriant.

Mais pour que cette conséquence de l'action soit accomplie, il faut une condition essentielle, condition exigée par la constitution belge. « Nul, dit l'art. 11 de notre charte fondamentale, ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établie par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité. »

Si l'exproprié n'est privé de sa propriété qu'après le payement préalable de l'indemnité, il est clair que c'est seulement alors aussi que l'expropriant devient propriétaire. Comment dès lors pourrait-on prétendre que l'action en expropriation est terminée et a atteint son but lorsque l'indemnité n'est pas encore réglée, c'est-à-dire après un premier jugement du tribunal déclarant que les formalités préalables à l'expropriation ont été accomplies?

Le règlement et le payement de l'indemnité

sont essentielles pour que l'expropriation soit accomplie. Cela est si vrai que l'art. 12 de la loi de 1855 n'autorise la mise en possession de l'expropriant que par ordonnance du président rendue sur requête. Cette ordonnance ne peut intervenir que quand un jugement a réglé l'indemnité, et que l'indemnité elle-même a été déposée à la caisse des consignations.

Malgré les deux jugements qui doivent intervenir dans le cas d'expropriation, la demande ne cesse donc pas d'être une, et de conserver jusqu'à la fin le caractère immobilier. Le premier jugement exigé par la loi ne met pas fin à l'action, et sert simplement de préparation au second jugement, qui règle l'indemnité et permet ainsi la mise en possession par le président du tribunal.

Mais, objecte-t-on, après le premier jugement, l'exproprié se borne à demander le payement de la vente forcée qu'il a consentie. Il en est dans ce cas comme dans celui de vente ordinaire. L'expropriant se trouve dans la position d'un acheteur qui se défend contre une demande incidente de son vendeur, demande tendante à obtenir un prix supérieur à celui qui lui est offert. Cette demande incidente est mobilière et se règle, quant au ressort, par la hauteur de la somme offerte.

Ce raisonnement se base, nous parait-il, sur une confusion.

Il y a d'abord erreur à prétendre qu'après le premier jugement le défendeur se borne à réclamer une somme d'argent. Pour que cela fût vrai, il faudrait que l'expropriation fût accomplie avant la fixation de l'indemnité, et nous avons démontré qu'on ne peut le soutenir sans se mettre en contradiction avec la constitution et avec la loi de 1835. Il n'y a donc aucune analogie entre la position de celui contre qui l'expropriation est demandée et celle du vendeur qui réclame le prix d'une vente effectuée, mais dont le prix n'a pas été payé.

Ensuite on ne peut prêter la position de demandeur à celui contre qui on réclame l'expropriation, qu'en intervertissant complétement les rôles. Après le premier jugement, l'expropriant ne cesse pas d'être demandeur. De toutes les expresssions de la loi il ressort clairement que c'est lui qui continue a poursuite. Ainsi, quand l'expertise a été ordonnée, c'est au poursuivant que le greffier doit délivrer un extrait du jugement, et c'est le poursuivant qui signifie cet extrait aux experts (art. 8). De même la cause est appelée à l'audience sur avenir, s'il y a avoué constitué, sans qu'il soit besoin de faire signifier au préalable le procès-verbal, non plus que l'avis des experts (art. 11). Ces mots indiquent clairement que l'avenir est donné à celui contre qui l'expropriation est demandée. C'est lui seul, en effet, qui pourrait ne pas être représenté au débat. L'expropriant est forcé de constituer avoué pour pouvoir poursuivre. D'après l'art. 12, c'est encore l'expropriant qui, en vertu du jugement qui règle l'indemnité, et sans

qu'il soit besoin de le faire signifier au préalable, | (Commentaire, no 201), Si la loi était ainsi dépose l'indemnité à la caisse des consignations, et, sur le vu de la signification faite à avoué ou à partie du certificat de dépôt, est envoyé en possession. Toujours c'est l'expropriant seul qui agit, et à aucun moment de la procédure nous ne voyons apparaître, autrement que comme défendeur, celui contre qui l'expropriation est demandée. Il est donc impossible de prétendre que les rôles ont été intervertis et que dans la seconde partie de l'action c'est l'exproprié qui devient demandeur en réclamant le prix de son immeuble cédé.

Il faut conclure de là que la demande en expropriation a le caractère immobilier dans toutes ses parties et que sa valeur se détermine, soit en revenu (art. 14), soit par l'évaluation des intéressés (art. 18).

686. Nous venons de voir comment le caractère de la demande en expropriation a été contesté, à partir du moment où un premier jugement déclare que les formalités exigées par la loi ont été remplies.

A un autre point de vue, on a prétendu que la contestation surgissant lors de ce premier jugement ne devait pas se régler d'après la valeur immobilière de la demande, mais devait au contraire toujours donner lieu à appel.

La question s'est présentée devant la cour de Bruxelles.

Dans une espèce où le revenu de chaque parcelle à exproprier était inférieur à 75 fr., on soutenait que l'appel était recevable. Il y avait, disait-on, débat sur une valeur indéterminée puisqu'il s'agissait d'une question d'accomplissement de formes. En tous cas, le procès portait sur la réparation du dommage dû au propriétaire pour l'enlèvement de son bien, et cette réparation ne dépendait aucunement du revenu produit par l'immeuble. De plus, le litige entre le propriétaire et l'expropriant pouvait donner lieu à des conséquences très-graves puisqu'il entravait des travaux importants. A ces différents point de vue, concluait-on, le jugement prononçant sur l'accomplissement de formalités indispensables à l'expropriation devait être soumis à l'appel.

La cour admit cette manière de voir par un arrêt du 26 mai 1841 rendu sur l'avis conforme de M. l'avocat général d'Anethan (Pas., 41, 2,194).

Sur la fin de non-recevoir defectu summæ : Attendu, dit la cour, qu'il s'agit dans l'espèce de décider si les formalités voulues par la loi pour parvenir à l'expropriation ont été remplies, et par suite si les terrains auxquels on a fait l'application du plan pourront être empris;

Attendu, dès lors, que la base d'évaluation adoptée par la loi nouvelle sur la compétence est ici sans application, puisqu'elle concerne exclusivement la valeur d'un immeuble dont la propriété contestée fait le seul objet du litige soumis au juge.

Comme le remarque à bon droit M. Cloes

conçue ou devait être ainsi entendue, la cour de Bruxelles aurait certainement raison. Mais notre art. 14 ne parle pas exclusivement des actions en revendication d'un immeuble; elle porte sur les actions réelles immobilières en général. Elle est donc applicable dans tous les cas où un immeuble est en litige, soit qu'on en revendique la propriété, soit qu'on en réclame la mise en possession, soit qu'on ne réclame sur lui qu'un droit de servitude ou d'usufruit. Pourquoi dès lors la base d'évaluation fixée par la loi ne serait-elle pas applicable à l'action réelle immobilière dont nous nous occupons? Il est de principe que les lois générales sont applicables en toute matière, même aux lois spéciales, à moins que celles-ci n'y aient expressément dérogé. La loi actuelle n'est-elle pas la loi générale, la règle du droit commun fixant la compétence en matière civile? La loi spéciale sur l'expropriation pour cause d'utilité publique contient-elle à cet égard une dérogation expresse?

« Si nous passons aux motifs de la loi, il est certain que l'on a voulu diminuer le nombre des appels et empêcher que, pour un objet de minime importance, une affaire subit deux degrés de juridiction. Ces motifs ne sont-ils pas applicables aux actions en expropriation pour cause d'utilité publique, comme aux matières ordinaires? Ne rentrent-ils même pas dans l'esprit de la loi spéciale du 17 avril 1835, dont le but est aussi d'accélérer la procédure et d'économiser les frais? >

La demande en expropriation étant immobilière, toute contestation qui surgit incidemment à propos de cette demande participe de son caractère et doit être considérée comme immobilière. Quant à la valeur de la contestation incidente, elle n'existe pas par elle-même, et pour la connaître il faut s'en référer à la demande principale. C'est là un principe que nous avons établi et développé plus haut en parlant de la valeur de l'action mobilière. Si la demande en expropriation porte sur un immeuble inférieur à 75 fr. de revenu, tout débat incident et par suite tout débat sur la question de savoir si les formalités ont été remplies, participera de sa nature et ne pourra donner lieu à appel.

Admettre l'indétermination de la contestation sur le point de savoir si les formalités ont été remplies, c'est de plus contrevenir formellement à la loi de 1841. Alors même que la contestation sur la question d'observation des formes exigées par la loi devrait être considérée comme formant un litige particulier, il y aurait toujours lieu d'évaluer ce litige. L'évaluation de la contestation est une règle générale édictée par la loi de 1841. A ce point de vue encore, l'arrêt de la cour de Bruxelles serait contraire à la volonté du législateur.

La dissertation que nous avons citée à notre numéro précédent (Pas., 49, 2, 9) à propos de l'arrêt de la cour de Gand du 24 novembre

1848, tout en admettant que la seconde partie | caractère de la saisie immobilière. Nous avons de la demande en expropriation est mobilière, a vu que toute demande se rapportant à cette soin cependant de considérer comme immobilier matière devait être évaluée d'après les règles le débat qui s'élève sur la question d'observa- qui concernent les litiges immobiliers. Nous tion des formalités préalables à l'expropriation. renvoyons sur ce point aux no 655 et suiv. Ce débat incident ne donne lieu à appel que si le revenu de l'immeuble est supérieur à 75 fr. Sur ce point, nous sommes donc d'accord avec la dissertation que nous avons combattue au point de vue du caractère mobilier qu'elle prête à la seconde partie de la demande en expropriation.

689. La fixation de la valeur des actions immobilières en revenu est une obligation générale imposée au plaideur par la loi de 1841. Toute action immobilière est donc soumise à cette nécessité légale.

Appliquons cette règle aux diverses catégories d'immeubles.

L'arrêt de la cour de Bruxelles du 26 mai D'après le code civil, les biens sont immeu1841 déclare, nous venons de le voir, que la loi bles ou par leur nature, ou par leur destination, sur la compétence est inapplicable dans certains ou par l'objet auquel ils s'appliquent (art. 517). cas à la matière de l'expropriation forcée. Cette Les immeubles par leur nature sont tous soumanière de voir est combattue par l'un des mo- mis à la fixation en revenu. Aucune difficulté à tifs de l'arrêt de la cour de cassation du 8 jan- | cet égard. vier 1852. Dans l'espèce, le pourvoi était fondé sur ce que l'arrêt attaqué avait admis l'enquête comme mode d'information en matière d'expropriation, tandis que la loi du 17 avril 1855 ne parle pas spécialement de l'enquête, mais simplement de l'expertise et d'une information par le juge-commissaire. La cour repousse le pourvoi, et l'un des motifs sur lesquels elle se fonde est ainsi conçu :

Attendu, dit la cour, que les lois des 8 mars 1810 et 17 avril 1855 ne contiennent aucune disposition dérogeant aux lois relatives à la compétence des cours et tribunaux; qu'il s'ensuit que, suivant les règles établies par la loi du 25 mars 1841, les tribunaux de première instance jugent même en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, en premier et dernier ressort, les questions relatives au montant de l'indemnité, lorsque la valeur réclamée ne dépasse pas les limites du dernier ressort. (Pas., 52, 1, 244.)

Cet arrêt déclare donc en termes généraux que ce sont les règles édictées par la loi de 1841 qui doivent être appliquées à l'expropriation forcée comme à toutes les autres contestations. 687. Diverses lois postérieures à celle de 1855 renvoient aux règles de l'expropriation quant aux formalités à accomplir.

Il en est ainsi de la loi du 2 mai 1837 sur les mines (Pasinomie, 37, no 90). Elle applique aux communications à établir dans l'intérêt des mines les dispositions de la loi du 17 avril 1835 et autres lois sur la matière (art. 12).

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Il en est de même de la loi du 10 avril 1841 sur les chemins vicinaux (Pas., 41, no 162) pour le cas où il y a lieu à expropriation (art. 11). La loi du 1er juillet 1858 sur l'assainissement des quartiers insalubres se réfère de même par son art. 1o à la loi de 1835 sur l'expropriation. Toutes les questions qui se présentent à propos de l'expropriation dans ces divers cas doivent donc recevoir une solution analogue à celle que nous avons signalée. Nous renvoyons, sur ce point, aux numéros qui précèdent.

688. En nous occupant des diverses espèces de saisies, nous avons déterminé plus haut le

Il en est de même pour les immeubles par destination tant qu'ils sont attachés au fonds. Mais ces immeubles, revendiqués séparément, ont au contraire un caractère mobilier, comme nous l'avons démontré à propos de la compétence du juge de paix (supra, no 47). Dans ce dernier cas, il ne pourrait donc être question que d'évaluation mobilière.

Envisageons enfin la troisième catégorie d'immeubles, ceux par l'objet auquel ils s'appliquent. Ces immeubles sont, d'après l'art. 526 du code

civil:

1° L'usufruit des choses immobilières; 2o Les servitudes ou services fonciers; 3o Les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.

Envisageons séparément les diverses demandes qui se rapportent à ces immeubles.

690. L'usufruit des choses immobilières est immeuble. La demande ayant pour but de revendiquer un semblable usufruit se déterminera donc par l'un des modes prescrits par l'art. 14, ou bien conformément à l'art. 18 de la loi de 1841.

L'usufruit peut être l'objet d'un bail, aux termes de l'art. 595 du code civil.

Il en est autrement des droits d'usage et d'habitation, qui sont pareillement des droits immobiliers. Ceux-ci ne pourront donc jamais être évalués par prix de bail (art. 651 et 634 du code civil). Mais à défaut de tout autre mode d'évaluation, les parties seront tenues d'en fixer ellesmêmes la valeur, aux termes de l'art. 18 de la loi de 1841.

Les auteurs sont d'accord pour déclarer que les droits d'usufruit, d'usage et d'habitation peuvent être évalués. Tel est l'avis de Carré (Lois de la Compétence, art. 461, t. 4, p. 252), de Dalloz (Répert., vo Degrés de juridict., no 463), de Raikem (Discours, Revue des revues de droit, t. 5, p. 71 et suiv.) et de Cloes (Commentaire, no 203). Aucun doute ne peut en effet surgir quant à la nécessité de l'évaluation d'actions tendantes à revendiquer un immeuble.

691. Mais les servitudes sont-elles pareillement susceptibles d'évaluation?

Sous l'ancienne jurisprudence, les servitudes

de cette action peut se déterminer en rente ou par prix de bail, il faut prendre cette fixation pour base du ressort.

L'évaluation de la servitude en rente pourra avoir lieu spécialement quand une servitude aura été cédée moyennant une rente. La cession d'un immeuble peut avoir lieu de cette façon, aux termes de l'article 530 du code civil. Cet article s'applique à la servitude comme à toute autre sorte d'immeuble.

étaient jugées évaluables. Leur valeur était fixée par la demande. En ce sens, dit Jousse, que le demandeur déclarait qu'il n'entendait pas faire plus grande estime du droit de servitude que de la somme qu'il demandait, auquel cas il demeurait à l'option et liberté du défendeur, s'il succombait, de se dire et maintenir être quitte du droit, en payant la somme. Alors les présidiaux déclaraient par un premier appointement, qu'ils en retenaient connaissance pour en connaître comme sans appel. (Commentaire de l'Edit., I, ch. 1, no 10.) L'évaluation de la servitude se faisait donc en une somme d'ar-un contrat qui s'applique à toute espèce de gent, et moyennant cette somme le rachat en était permis.

Rien ne s'oppose non plus à ce qu'une servitude soit l'objet d'une location. Le louage est

choses, à moins d'exception formelle (art. 1709. Or, il n'y a aucune raison pour que la jouissance d'une servitude, droit immobilier, ne puisse pas être louée comme la jouissance de l'immeuble lui-même. Seulement, la servitude devrait nécessairement être établie en faveur d'un fonds. Si elle était créée en faveur d'une personne, elle serait défendue par l'art. 686 du code civil. Ainsi dans le cas où la valeur de la servitude elle-même serait établie, soit par rente, soit par prix de bail, l'art. 14 lui deviendrait évidemment applicable.

Dans le cas où l'évaluation de la servitude ne pourrait être faite ni par rente, ni par prix de bail, la servitude ne devrait plus aujourd'hui être considérée comme devant rester indéterminée et par suite comme rendant l'appel toujours recevable.

La loi de 1790, en décidant que les demandes immobilières seraient toujours déterminées en revenu, avait évidemment rompu avec les traditions de l'ancienne jurisprudence. Sous l'empire de cette loi, la valeur de la servitude restait indéterminée. Cette valeur ne pouvait s'établir, ni par le revenu de l'immeuble au profit duquel existait la servitude, ni par celui de l'immeuble qui la subissait. Et en effet, la servitude a une valeur indépendante de celle des immeubles en eux-mêmes. Elle présente parfois au profit de l'immeuble dominant un avantage très-léger, quoiqu'elle soit pour le fonds servant une charge extrêmement lourde. Les circonstances influent puissamment sur la valeur de la servitude, et cette dernière n'a pas un rapport direct avec La loi de 1841 a admis un principe nouveau celle de l'un ou de l'autre des héritages. diamétralement opposé à celui de la loi de 1790. Sous la loi de 1790 il n'était donc pas possi-Toute action immobilière doit être évaluée par ble de déterminer par le revenu d'un immeuble la valeur d'une servitude établie à son profit ou dont il se trouvait chargé. C'est ce que Carré établit clairement (Lois de la Compétence, article 354, no 460, t. 4, p. 249 et suiv.) et ce que Dalloz enseigne aussi sous l'empire de la loi française de 1838 (Kép, vo Degrés de juridict., nos 462 et 463); Benech (Tribunaux de première instance, p. 196 et suiv.) se prononce dans le même sens.

Ces principes n'ont pas cessé d'être applicables sous l'empire de la loi de 1841. Le revenu de l'immeuble, déterminé soit en rente, soit par la matrice cadastrale, n'exerce aucune influence sur la valeur de la servitude.

Tel est l'avis de M. Raikem (Discours, Revue des revues de droit, t. 5, p. 71 et suiv., note 1). Un arrêt de la cour de Liége du 30 avril 1846 décide aussi qu'une servitude intéresse également le fonds servant et le dominant, et qu'elle est sous ce double rapport d'une valeur indéterminée. (Pas., 58, 2, 127.)

Mais s'il est admis que la valeur de l'immeuble n'influe en rien sur celle de la servitude qui y est attachée, nous n'apercevons aucune raison pour refuser à la valeur de la servitude en elle-même la légitime influence qu'elle doit avoir sur le ressort, aux termes mêmes de l'article 14 de la loi de 1841.

L'action qui a pour objet une servitude est une action réelle immobilière. Quand la valeur

les parties, aux termes de l'art. 18 de la loi de 1841. En ce sens, nous ne pensons donc admettre la doctrine de la cour de Liége qui décide en termes généraux que la servitude a une valeur indéterminée. (Arrêt du 30 avril 1846, Pas., 48, 2, 127.) Cette valeur de la servitude ne peut pas demeurer indéterminée. Dans l'espèce jugée par la cour de Liége, la servitude aurait donc dû être évaluée par les parties devant le tribunal, sous les peines comminées par l'art. 18 de la loi de 1841.

La nécessité pour les parties d'évaluer les servitudes a été admise d'une manière expresse lors de la discussion de la loi de 1841.

Dans son rapport sur l'article 11 du projet, M. Liedts (Loi sur la Compétence, p. 38) mentionnait spécialement les servitudes comme des droits pouvant être évalués par le demandeur, malgré le vague qui paraît au premier abord régner sur la valeur de pareils droits. Lors de la discussion publique, M. Liedts, alors ministre de l'intérieur, disait de même : S'il s'agit d'un immeuble, il est vrai qu'il peut y avoir des cas où il soit assez difficile d'apprécier la valeur d'un immeuble, surtout si c'est un immeuble incorporel tel qu'une servitude. » Mais cette difficulté n'arrêtait pas la nécessité d'évaluation des servitudes (Lois sur la Compétence, p. 95)

Seulement, d'après le projet primitif de la commission spéciale, c'était le demandeur qui fixait seul la valeur de la servitude comme de tous les autres droits immobiliers. A la suite d'observa

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