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terminer le caractère d'une action, il n'est pas nécessaire de connaître le fait qui y a donné lieu, mais seulement le but qu'elle poursuit.

La cour de Bruxelles a donc décidé avec raison que l'action en dommages-intérêts intentée contre une société de chemin de fer est purement personnelle, alors même que l'une des causes du dommage résiderait dans la dépréciation apportée par la société à un immeuble. Cette circonstance ne pourrait lui donner le caractère d'une action réelle.- Bruxelles, 8 avril 1857 (Pas. 1857, 2, p. 322).

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La cour de Liége avait déjà déclaré par deux de ses arrêts qu'une action en indemnité est purement personnelle et ne peut donc être exercée qu'à la charge de celui qui y a donné lieu par son fait, ou à la charge de celui qui le représente à titre universel. Liége, 21 mars 1834 (Pas. 1834, 2, p. 77), et que l'action en dommages-intérêts intentée par suite d'éviction d'une dîme donnée en antichrèse, sous la coutume de Luxembourg, est personnelle et mobilière, et ainsi | prescriptible par trente et non par quarante ans. Liége, 10 mars 1835 (Pas. 1835, 2, p. 90).

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contre le propriétaire supérieur, pour fait de prise d'eau en un temps prohibé, lorsque le défendeur prétend avoir un droit et un titre particuliers. Cour de cassation de France, rej., 8 avril 1829 (Pas. 29, 1, 191).

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43: Que faut-il penser d'une action ayant pour but d'obtenir les arrérages d'une rente foncière?

Une distinction essentielle doit ici être établie. La demande porte-t-elle simplement sur les arrérages d'une rente dont le titre est reconnu entre parties, elle n'a alors pour objet qu'une somme d'argent, et dès lors l'action est purement personnelle. Les articles 2, 3 et 4 de la loi du 25 mars 1841 déterminent dans quels cas le juge de paix doit se déclarer compétent, eu égard aux arrérages des rentes.

Mais la demande, au contraire, embrasse-t-elle la reconnaissance d'un droit immobilier par le défendeur, l'action cesse évidemment d'être purement personnelle. Quand cette hypothèse se présente-t-elle? Lorsque non-seulement le défendeur refuse le payement des arrérages qui lui sont réclamés, mais lorsqu'il dénie le titre sur lequel le demandeur se fonde pour exiger le payement de ces arrérages. La position que La cour de cassation de France a déclaré de prend le défendeur fait de la demande une vémême, purement personnelle, l'action en dom-ritable action mixte. Le droit réel, qui se mamages-intérêts formée par les propriétaires habitants d'une commune, contre des individus auxquels ils contestent le droit de parcours et de pacage sur cette commune. C. rej., 8 mai 1838 (Pas. 38, 1, 860). — V. aussi Dalloz, Rép., vo Action, sub no 163.

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nifeste dans le titre de la rente, est en effet le premier objet en contestation. L'engagement du débiteur de la rente donne à l'action un caractère personnel à un autre point de vue. Il y a donc action mixte. La somme d'argent demandée comme montant des arrérages de la rente n'est plus alors qu'un simple accessoire de cette action.

C'est donc à tort que le juge de paix se déclarerait incompétent chaque fois que le deman- Nous remarquons donc que la loi du 25 mars deur se borne à réclamer une somme d'argent. 1841 en accordant aux juges de paix le droit de Peu importe d'ailleurs que la dette provienne prononcer, alors même que le titre des rentes de frais faits à un immeuble. Nous repoussons est contesté (art. 2, 3 et 4), n'a entendu parler que donc la doctrine d'un jugement de Bouillon qui du cas où ce titre n'a rien de réel. Le rapport de déclare le juge de paix incompétent pour con- M. Liedts ne laisse aucun doute à cet égard. Il naître de l'action en remboursement, intentée porte que les art. 2 et 3 ne sont qu'une application par le mari contre l'héritier de sa femme, à du principe général de l'art. 1er à un cas particuraison des frais de semences, de labour et d'en- lier, application qu'il aurait même été inutile grais qu'il prétend avoir avancés dans l'intérêt d'insérer dans la loi si elle n'avait été mal faite des propres de son épouse.-Justice de paix de jusque-là par beaucoup de juges de paix. Les diBouillon, 13 décembre 1859 (Cloes et Bon-vers cas que la loi a voulu embrasser dans ses jean, t. IX, p. 466). La note qui accompagne ce document judiciaire dans le recueil cité par nous pense au contraire que le juge de paix devait se déclarer compétent, parce qu'il ne s'agissait pour lui de se prononcer que sur une simple réclamation pécuniaire, objet purement personnel.

Mais si la demande, au lieu de se borner à une simple somme d'argent, embrassait au contraire un véritable droit réel, il n'y aurait plus de raison pour accorder compétence au juge de paix, en ayant égard seulement à des dommagesintérêts réclamés accessoirement au droit réel. C'est ainsi que la cour de cassation de France a pu décider qu'il faut considérer comme réelle ou mixte l'action en dommages-intérêts formée par le propriétaire inférieur d'un cours d'eau

art. 2, 3 et 4 ne peuvent donc jamais se rapporter qu'à des actions purement personnelles et mobilières.

La jurisprudence a, par divers arrêts, confirmé la théorie que nous venons d'exposer à propos du caractère personnel ou mixte d'une demande d'arrérages d'une rente foncière.

Est personnelle, dit la cour de cassation de France, la demande en payement d'arrérages d'une rente foncière dont le titre n'est pas contesté.-C. cass., 13 octobre 1813 (S.-V. 20, 1, 454). Il en est de même de l'action qui a pour objet le payement, de la part d'un tiers détenteur, des arrérages d'une rente hypothéquée sur un immeuble par lui détenu.-Paris, 18 janvier 1823 (Jurisprudence du XIXe siècle, 25, 2, 115).

Au contraire, il faut considérer comme mixte

l'action en payement d'une rente foncière, intentée contre les possesseurs des fonds grevés de la rente, et en proportion des parcelles de terrain qui se trouvent entre leurs mains. Cour de cassation de France, rej., 6 juin 1848 (Pas. 48, 1, 496).

le droit, mais le titre seul, réclamation purement personnelle.

Il faut donc considérer comme purement personnelle l'action en passation d'un titre nouvel d'une rente même hypothécaire. Paris, 18 janvier 1823 (Pas. à sa date). Foelix

Le même caractère doit être attribué à l'ac-et Henrion, Rentes foncières, p. 215 et 221, tion en payement d'une rente en argent, avec ainsi que Troplong, Prescription, t. 2, no 843,' énonciation que la rente est établie sur un im- se prononcent en ce sens. meuble, quand il y a contestation sur l'existence de la rente. Cour de cass. de France, rej., 8 décembre 1829 (Jurisp. du XIXe siècle, 30, 1,17). Voir aussi Cloes, Compétence, no 22, p. 51. S'il s'agissait d'une réclamation d'arrérages de rente contre le tiers détenteur de l'immeuble | grevé et que ce tiers niât l'existence de la rente, il nous paraît certain que la réclamation du de- | mandeur aurait non-seulement le caractère mixte, mais serait une véritable action réelle. Ce qui rendait l'action mixte vis-à-vis du débiteur primitif de la rente a en effet disparu dans le cas dont il s'agit. Le défendeur n'est plus actionné comme contractant, mais tout simplement comme détenteur.

La cour de cassation de France a consacré ce principe par un arrêt en date du 22 janvier 1840, où elle déclare que l'action formée contre un individu, en sa qualité de tiers détenteur d'immeubles affectés au service d'une rente, à fin de payement des arrérages de cette rente, est une action réelle, et non pas une action personnelle (Pas. à sa date).

Mais si, au contraire, l'objet de l'action se trouve être, non plus seulement l'obtention d'un nouveau titre, mais en même temps la reconnaissance d'un droit, la même règle ne peut plus être admise. Le caractère de la demande nous paraît alors devoir se régler d'après celui du droit qui sera en contestation et que le titre nouvel devrait consacrer. Le droit de prononcer sur une contestation de ce genre n'appartiendrait donc au juge de paix que dans l'hypothèse seulement où le titre ne devrait contenir qu'une obligation purement personnelle de sa compétence. Telle est aussi l'opinion de Dalloz (Rép. vo Action, no 81). Voir aussi Cloes, Compétence, p. 52 et 53.

46. Quel est le caractère d'une action en exhibition de titre?

Elle est incontestablement personnelle si la demande n'a pas d'autre objet que la restitution du titre. C'est là le sentiment de tous les auteurs qui ont écrit sur la matière. Mais en est-il de même, encore que l'action en exhibition soit formée comme base d'une demande en reven44. La règle qui nous a fait considérer dication d'immeubles dont le défendeur est en comme mixte la réclamation d'arrérages, lors- possession? Cette circonstance ne lui donne-t-elle qu'elle impliquait reconnaissance d'un contrat pas le caractère d'action réelle? Non, dit la ayant un objet réel, doit trouver son application cour de cassation de France. C. rej., 3 fédans le cas où le défendeur est assigné, non-vrier 1806 (S.-V. 6, 2, 705). Merlin, Quest., seulement comme débiteur direct d'une dette, vo Actio ad exhibendum; Carré, Compét. civ., mais encore comme détenteur de biens hypo- n° 198; Joccotton, Tr. des actions civiles, no413, théqués à cette dette. Cette hypothèse se pré-se prononcent dans le même seus, en déclarant sente notamment lorsque l'action est dirigée l'action en exhibition de titre action purement contre un héritier du débiteur primitif. personnelle.

Est mixte, et non personnelle, dit la cour de cassation de France, l'action contre un héritier tant en cette qualité que comme biens tenant, c'est-à-dire comme détenteur des biens hypothéqués à la créance du demandeur. Cour de cassation, 10 décembre 1806 (S.-V., 6, 1,516). La même cour a appliqué le même principe en attribuant le caractère mixte à l'action intentée contre un héritier détenteur de biens, en payement non de sa quote-part, mais de la totalité d'une somme due par la masse des héritiers. C. rej., 24 août 1826 (Jurisp. du XIXe siècle, 27, 1,157).

45. Que faut-il penser de l'action en réclamation de titre nouvel?

Si la demande a pour objet l'obtention d'un nouveau titre et que l'existence même du droit constaté par ce titre ne soit l'objet d'aucune contestation, il nous paraît évident que l'action n'a pas le caractère réel. Peu importe, en effet, au point de vue de la demande, ce que contiendra le titre réclamé. L'objet de l'action est, non

Nous pensons qu'il est utile ici de se bien rendre compte de la demande qui est faite. Lorsque l'action ne portera que sur l'exhibition du titre, nous croyons en effet que son caractère sera personnel, alors même que la demande ne serait que le prélude d'une revendication d'immeubles. Il n'appartient pas au juge de sonder à l'avance les intentions du demandeur, et de donner à son action un caractère réel, quand bien même le but du demandeur dans l'avenir ne peut évidemment être autre chose qu'une réclamation de droit réel.

Mais il en sera tout autrement, croyons-nous, si en même temps qu'il intente son action en exhibition de titre, le demandeur réclame un droit réel.

Le principe admis par la cour de cassation de France, dans son arrêt du 3 février 1806, ne nous paraît donc pas applicable en ce cas. Pour donner à l'action un caractère personnel, la cour se fonde uniquement sur ce que la question relative à la restitution des titres est nécessairement préju

rons plus loin; mais il statue sur l'action mobilière dont il avait été régulièrement saisi. C'est donc ici le cas d'appliquer le principe que le juge de l'action l'est aussi de l'exception.

dicielle à toute autre. Nous avons déjà eu occa- | évidemment connaître, ainsi que nous le version de manifester notre opinion à l'égard de cette influence déterminante qu'on prétend donner à une question préjudicielle sur le caractère de l'action. Ainsi dans le cas de demande formée par l'héritier naturel contre l'héritier institué, en nullité de testament et en délaissement des biens de la succession (n° 41), nous avons trouvé une action mixte. De même nous pensons qu'il y avait action mixte dans le cas que nous venons de signaler.

47. Le juge de paix conserve-t-il sa compétence lorsqu'il est appelé à se prononcer sur une action ayant pour objet un immeuble par destination?

D'après l'art. 524 du code civil, les objets que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds sont immeubles par destination... Sont aussi immeubles par destination, tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure. » Il résulte de cet article que c'est le propriétaire qui doit avoir placé certains objets pour le service et l'exploitation d'un fonds, ou avoir attaché ces objets au fonds à perpétuelle demeure, pour que ces meubles puissent devenir immeubles par destination (1). Mais supposons qu'un objet ait cu en effet la qualité d'immeuble par destination, et qu'il soit revendiqué séparément. Evidemment, il est revendiqué comme meuble, et par conséquent la compétence du juge de paix ne peut être mise en doute (2). M. Cloes, dans son Commentaire, s'exprime en ces termes sur cette question:

Qu'est-ce qui fixe la compétence du juge? Ce sont, en général, les conclusions reprises à l'exploit introductif de l'instance, ou modifiées lorsque les parties posent contradictoirement les qualités avant les plaidoiries (art. 8). Or, comme les conclusions du demandeur tendent à la revendication d'un objet purement mobilier, son action est mobilière et partant de la compétence du juge de paix.

Le défendeur prétend à la vérité que ce meuble est un immeuble par destination, comme ayant été placé sur son fonds par l'ancien propriétaire, pour le service et l'exploitation de ce fonds. Mais ce n'est là qu'une exception à l'action du demandeur; ce n'est pas une exception d'incompétence, c'est une exception tenant au fond du droit; car si elle était reconnue fondée, elle ferait écarter irrévocablement l'action du demandeur.

« Cette exception ne rend pas le juge de paix incompétent; en l'appréciant il ne statue pas sur une action immobilière dont il ne pourrait

(1) Liége, 14 février 1824 (Pas., 1824, 2, 48).

(2) Il a été décidé à diverses reprises que les objets mobiliers placés sur un fonds, pour le service et l'exploitation de ce fonds, n'ont le caractère d'immeubles par destination qu'aussi longtemps qu'ils restent attachés au fonds; ils perdent ce caractère et recouvrent la qua

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«Que fait en effet l'immobilisation du meuble par la fiction de la loi, vis-à-vis du tiers qui revendique ce meuble comme étant sa propriété? N'est-il pas de principe que cette immobilisation n'a lieu que quoad certos effectus, mais que, hors ces cas, le meuble conserve sa nature primitive?

C'est précisément ce qui a lieu dans le cas qui nous occupe; l'immobilisation faite par le possesseur du meuble ou par son auteur cesse de produire ses effets, lorsqu'on l'envisage abstraction faite du fonds auquel il est attaché, lorsqu'on la met en contact avec les droits du propriétaire du meuble, pour lequel cette immobilisation est une chose tierce.

Donc le tiers qui revendique un meuble même immobilisé, mais sans prétendre aucun droit sur l'immeuble, n'intente qu'une action mobilière dont la nature ne dégénère pas, parce que le possesseur du meuble prétend qu'il est immeuble par destination. C'est ce qu'il serait facile de démontrer par la doctrine et par la jurisprudence qui sont unanimes sur les effets ainsi restreints de l'immobilisation d'un meuble (3). »

Conformément à l'opinion de M. Cloes, la cour de Gand a décidé que, bien que des objets mobiliers de leur nature soient devenus immeubles par destination, ils ne peuvent néanmoins être réputés immeubles, lorsqu'on les poursuit séparément et comme détachés du fonds, par une action de saisie-revendication, qui, ne pouvant s'exercer que sur des effets mobiliers, ne peut être aussi que purement mobilière. Gand, 4 mai 1855 (Pas. 1855, 2, p. 187).

La cour de cassation de France avait assigné le même caractère à l'action intentée par l'acquéreur d'une coupe de bois, en revendication de baliveaux ou de taillis qu'il prétendait compris dans la vente, encore même qu'il s'agit de taillis ou de baliveaux non coupés. Il n'y pas là action réelle. Cour de cass., 5 octobre 1813 (S.-V., 13, 1, p. 465). Dans le même sens, Carré, Compétence civile, no 194.

Citons encore sur ce point un des derniers documents de la jurisprudence belge. Le 15 juillet 1858, le juge de paix de La Roche a décidé que l'action en revendication d'un meuble enlevé par le vendeur d'une maison par lui ven

lité de meubles dès l'instant qu'ils sont distraits du fonds. Bourges, 31 janv. 1843 (Pas., 44, 2, 67) ; cass. de France, 3 août 1831 (J. 31, 1, 388); ibid., rejet, 17 juillet 1838 (J. 38, 1, 869). Contra, Douai, 3 janvier 1815 (16, 2, 46); cass. rejet, 4 février 1817 (17, 1, 359).

(3) Cloes, Loi sur la compétence civile, p. 22 et 23.

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50. Citons encore quelques hypothèses où l'action nous paraît contenir incontestablement un principe réel, et où, par conséquent, le juge de paix est incompétent. La poursuite d'ordre pour la distribution du prix d'immeubles vendus soit volontairement, soit par expropriation forcée, est une action réelle, dit la cour de cassation de France, 13 juin 1809 (S.-V., 9, 1, 282).

due, est une action mobilière de la compétence | Le caractère réel des droits d'usage dans les du juge de paix, quoique ce meuble soit un im- forêts a été nettement déterminé par les arrêts meuble par destination. -(15 juillet 1858; de Bruxelles du 19 mars 1845 (Pas. 45, 2, p. 341) Cloes et Bonjean, t. VII, p. 456.) et de cassation belge du 22 mars 1844 (Pas. 44, 48. Dans le cas d'action hypothécaire, le 1, p. 130). juge de paix est-il compétent? Pas plus aujourd'hui que sous l'empire de la loi de 1790, il ne nous paraît possible d'attribuer une pareille compétence au juge de paix. Supposons, par exemple, qu'un créancier hypothécaire réclame à l'acquéreur d'un bien grevé le prix de la rente inscrite sur cet immeuble, et consentie par un propriétaire antérieur. Il est certain qu'une pareille réclamation est basée sur l'action hypothécaire seule, puisque le créancier n'a dans ce cas aucun titre contre le tiers qu'il attaque; il n'a de titre que contre le bien. Des lors, comment le créancier pourra-t-il prétendre avoir contre le détenteur de l'immeuble une action personnelle donnaut compétence au juge de paix? En vain ce créancier alléguerait-il qu'il ne réclame qu'une simple somme d'argent. Cette somme, lui serait-il répondu, est due en vertu d'un titre dont le juge de paix ne peut connaitre. C'est ce qui a été décidé par la cour de cassation de France dans un arrêt rendu Sous l'empire de l'article 1er de la loi du 25 mai 1838 (Chambre des requêtes 22 janvier 1840)(1).

Ne confondons pas le cas où nous nous trouvons avec celui tout différent où le créancier hypothécaire réclamerait le montant de sa créance après la vente de l'immeuble, sur le prix qui en serait provenu. Nous avons vu plus haut (no 26), qu'une telle action aurait un caractère purement personnel.

Ce point a été consacré par un grand nombre d'autres arrêts que l'on trouvera au mot Ordre de la table de la Pasicrisie française.

De même, le droit appartenant au propriétaire d'un mur dont la mitoyenneté a été acquise par le voisin, de reprendre la propriété exclusive du mur, s'il n'est pas payé de la valeur de la mitoyenneté, donne lieu à une action réelle, qui peut être exercée contre tout tiers détenteur de l'héritage voisin. Paris, 22 janvier 1834 (Pas. à sa date).

La cour de Paris a jugé dans le même sens, que le propriétaire qui a fait l'avance de tous les frais d'un mur mitoyen, construit d'accord avec le voisin, a, pour le remboursement de ces frais, une action réelle, ou tout au moins mixte, qu'il peut exercer contre l'acquéreur tiers détenteur de la propriété voisine. Paris, 3 avril 1841 (Pas. 41, 2, 540); voy. aussi cour de cass. rej., 21 mars 1843 (Pas. 43, 1, 350).

Ce qui assigne à cette action un caractère mixte, c'est qu'elle peut s'exercer indifféremment contre le voisin qui s'est engagé à payer La cour de Bruxelles a décidé, comme la cour une partie des frais du mur et contre le tiers de cassation de France, que l'action qui a pour détenteur de la propriété voisine. L'action déobjet de reconnaître si un immeuble est ou non coule ici véritablement de la situation des héhypothéqué au service d'une rente est de la com- ritages, et non de la volonté des parties seulepétence du tribunal de la situation des biens.ment (V. art. 653 à 674 du code civil). Bruxelles, 30 janvier 1815(Pas. 1815, 2, p. 297). Il y avait dans l'espèce une véritable dénégation du droit d'hypothèque de la part du défendeur. Un droit réel était donc en question.

49. Il est à peine besoin de dire que le juge de paix est sans compétence quand il s'agit de contestations ayant rapport à des servitudes.

Les contestations relatives à des servitudes, quelle que soit la partie qui forme la demande, constituent des actions réelles qui doivent être portées devant le juge de la situation du fonds sur lequel la servitude est due. - Pardessus, Servitudes, no 322; Solon, ibid, no 543.

La cour de Bordeaux déclare, d'autre part, qu'il faut considérer comme mixte l'action de l'acquéreur qui, ayant été évincé par surenchère, réclame contre l'adjudicataire le remboursement de ses frais et loyaux coûts, ou des améliorations qu'il aurait faites sur la chose, et cela, par privilége et préférence sur l'immeuble adjugé. Bordeaux, 5 juillet 1833 (Jurisp. du XIXe siècle, 33, 2, 467).

Le droit de privilége sur l'immeuble donne ici à l'action un caractère particulier de réalité, qui, joint à son caractère naturel de personnalité, lui assigne la qualité de mixte.

51. Il résulte de nombreux 'documents de jurisprudence qu'il faut considérer comme mixte l'action qui a pour objet la validité de la vente de certains immeubles et des prestations Liége, 16 janvier 1851 (Pas.

Il en est de même de l'action en reconnaissance de droits d'usage dans une forêt. - Cour de cassation de France, 29 avril 1853 (Jurisp. du XIXe siècle, 33, 1, 488). Proudhon, Usufruit, 1. 5, no 2747 et 2797, énonce la même opi-personnelles. nion. V. aussi Dalloz, vo Action, nos 127 et 128. 1851, p. 201).

(1) Dalloz, Rép., vo Compét. civ. des trib. de paix, sub no 29; Cloes, Loi sur la compétence civile, p. 25 et suiv.

Il en est de même de la demande par laquelle une personne revendique un terrain empris, et subsidiairement en réclame la valeur ainsi que des indemnités pour les domniages occasionnés

par la dépossession. Liége, 20 mars 1841
(Pas. 1842, 2, p. 48).
D'après le même principe, la cour de Bruxelles
a décidé que l'action en payement des cinq der-
nières années échues d'une dîme laïcale, à rai-
sou de six gerbes au cent des fruits perçus, est
une action mixte.

Le défendeur ne doit pas être assigné devant le tribunal de la situation des biens productifs des fruits, exclusivement à celui du domicile du défendeur; il peut l'être, soit devant l'un, soit devant l'autre de ces deux tribunaux. Bruxelles, 14 avril 1818 (Pas. 1818, 2, p. 77).

La cour de Bruxelles s'est encore prononcée dans le même sens par son arrêt du 2 mai 1846 (Pas. 1847, 2, p. 23). Il s'agissait d'une demande tendante à être remis en possession d'un immeuble à titre de propriétaire, et à obtenir des dommages-intérêts contre le défendeur qui n'avait pas rempli certaines obligations dans un temps prescrit.

La cour de Liége a adopté la même opinion dans des espèces analogues, par son arrêt du 30 avril 1846 (Pas. 1848, 2, p. 127), et la cour de Gand par son arrêt du 2 juillet 1859 (Pas. 1859, 2, p. 285).

La cour de Grenoble, 29 avril 1824 (Pas. à sa date), la cour d'Amiens, 13 novembre 1824 (Pas. à sa date), et la cour de cassation de France, 5 mai 1829 (Pas. à sa date), attribuent de même à une action en délaissement d'un immeuble, accompagnée d'une demande personnelle, un caractère réel ou tout au moins mixte.

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demande de subrogation, nous fait donner la préférence à la seconde partie de la solution adoptée par la cour de Bruxelles. L'action était mixte. Remarquons enfin qu'une action qui tend à la propriété d'un immeuble doit être considérée comme action réelle, nonobstant que l'immeuble réclamé ait fait l'objet d'un contrat que le juge doit apprécier. Liége, 18 décembre 1858. - (Pas. 1859, 2, p. 141).

L'appréciation d'un contrat avenu entre parties, objet personnel dans la contestation, ne pouvait influer sur le caractère de l'action, et celle-ci restait réelle parce que la réclamation était un immeuble et non autre chose. — Il est incontestable qu'il faudrait adopter une solution analogue dans tous les cas où le contrat invoqué devant le juge ne serait qu'un élément d'appréciation pour sa décision, tandis que la véritable demande porterait sur un droit immobilier quelconque.

52. On s'est demandé si le juge de paix peut connaître d'une demande en validité ou en nullité d'offres réelles, lorsque les causes de ses offres sont de sa compétence quant au chiffre. Deux hypothèses différentes peuvent se pré

senter.

Si les offres réelles sont faites par suite d'une condamnation, il nous paraît évident que le juge de paix ne peut prononcer sur ces offres. L'exécution de ses propres jugements échappe en effet au juge exceptionnel. Nous l'avons vu plus haut à notre no 15.

Mais si, au contraire, les offres réelles sont faites avant toute demande judiciaire? Aucune difficulté en ce cas à l'intervention du juge de paix. L'art. 815 du code de procédure civile porte que la demande qui pourra être intentée, soit en validité, soit en nullité des of

Pothier (Pandectes, liv. 10, tit. 2, no 19), et Henrion de Pansey (chapitre 2) déclarent de même que ce qui donne à certaines actions qu'ils spécifient le caractère mixte, c'est qu'elles ont pour objet un immeuble et des prestations personnelles. Dalloz (vo Action, no 130) et Za-fres ou de la consignation, sera formée d'après chariæ (tom. III, p. 263) ne veulent voir dans cette hypothèse qu'une simple action réelle. Les prestations personnelles ne sont d'après eux qu'un accessoire de la demande principale qui a pour but le droit réel.

les règles établies pour les demandes principales. La demande principale étant du ressort du juge de paix, nul doute que la demande en validité d'offres réelles doive être du même ressort (1).

Quoi qu'il en soit, la question est peu impor- Le tribunal de Liége a décidé la question tante pour la compétence du juge de paix. Réelle dans le même sens, en déclarant que le juge de ou mixte, l'action lui échappe incontestablement. paix est compétent pour connaître, à l'exclusion La cour de Bruxelles a décidé qu'il y avait ac- des tribunaux de première instance, d'une detion réelle ou mixte lorsqu'un créancier a reçu mande en validité d'offres réelles, suivies de en hypothèque des biens acquis par son débi- consignations, quand même il y aurait lieu à inteur du gouvernement, sous la condition qu'il y terprétation du titre qui sert de base à la deaurait déchéance en cas de défaut de payement mande. Ce n'est pas là une véritable contestadu prix en temps utile et demande pour parer à tion du titre. Tribunal de Liége, 5 mai 1852 cette déchéance, à être, moyennant payement de (Cloes et Bonjean, t. 1, p. 278). Il est bien ence qui reste dû, subrogé au lieu et place de tendu que dans l'hypothèse où le tribunal de l'adjudicataire. Le créancier ne doit pas, si le gou-Liége a eu à se prononcer, il s'agissait d'une vernement s'y refuse, l'assigner en validité de- somme inférieure à 200 francs (2). vant le tribunal de la situation des biens. Bruxelles, 16 novembre 1840 (Pas., 1841, 2, p. 329).

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L'action du demandeur tendait en ce cas à un droit réel, au maintien de l'hypothèque lui consentie par l'adjudicataire des biens du gouvernement. Ce caractère de la demande joint à la

(1) Une dissertation de M. A. Billequin, insérée dans le Journal de procédure (t. III, p. 204), de MM. Maertens et Toussaint, se prononce dans le même sens.

(2) Voy. aussi sur la question, une dissertation insérée au recueil de MM. Cloes et Bonjean, à la suite du jugement de Liége du 5 mai 1852.

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